Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1893-09-30
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 30 septembre 1893 30 septembre 1893
Description : 1893/09/30 (N112). 1893/09/30 (N112).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263311g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
ORGANE RÉPUBLICAIN
paix DES ABONNEMENTS :
Le Havre....
Départements.
UN an six MOIS
5 fr. 3 fr.
6 fr. 3 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉ VEIL DU HA VRE paraît tous les Samedis
PRIX DES INSERTIONS ;
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
Le peuple français tout entier s’apprête à
fêter dans quelques jours, au milieu de mani
festations qu’on prévoit enthousiastes, la
venue de l’escadre russe à Toulon. L’adhésion
à cette démonstration militaire est presque
unanime dans le pays. Les abstentions sont
rares, plus rares encore les protestations.
On peut le dire, sans crainte d’être démenti
par personne, ce courant d’opinion a sa source
dans la haine que T Allemagne nous inspire.
A la base de l’entente tranco-russe, il y a,
pour nous Français, l’espérance d’abaisser tôt
ou tard la politique d’Outre-Rhin. Nous
nous sentons réconfortés en pensant que l’en
nemi, qui nous a arraché deux provinces, peut
se trouver pris, à un moment donné, sous les
feux croisés de deux puissances de premier
ordre. Le mot de paix peut être sur nos
lèvres, l’idée de la guerre est au fond de nos
cœurs. >
Si tel est exactement le sentiment qui
émeut actuellement la France entière, si nous
obéissons à cet instinct de combativité, à cette
ambition de revanche si naturelle chez les
vaincus redevenus forts, la raison ne doit pas,
dans la circonstance, perdre ses droits et le
devoir des patriotes esr d’examiner avec sang-
froid, une situation toute nouvelle dans la
destinée de notre patrie. Rarement, on peut
faire à la politique une application plus profi
table des enseignements de l’histoire.
Et tout d’abord, on s’est demandé si l’in
térêt de la cause républicaine ne s’opposerait
pas à F alliance d’une démocratie, fille de la
Révolution, et d’un empire où l’autocratie est
absolue. Le croire, ce serait méconnaître les
traditions de la diplomatie, cette force avec
laquelle il faut encore compter.
Les alliances internationales sont soumises
à des lois q^jiR^nt hélas ! rien. de sentimen
tal. Les nécessités de là défense sont la seule
règle de ces rapports. La conformité de goûts
politiques ou religieux n’y joue qu’un rôle
infime, le plus souvent négligeable.
N’a-t-on pas vu, sous l’ancien régime, le
cardinal Richelieu combattre les protestants
en France etVallier à eux à l’étranger, en
même temps qu’il s’efforçait d’abaisser la
catholique Autriche et qu’il envoyait des
troupes dans la Valteline contre le Pape ?
N’a-t-on pas vu Mazarin s’allier à Cromwell ?
N’a-t-on pas vu Cromwell lui-même s’armer
contre la Hollande républicaine et protes
tante? Les exemples foisonnent dans l’Histoire
de ces alliances au premier abord illogiques.
Comme on le voit, la raison d’Etat est exclusive
du sentimentalisme.
C’est une vérité dont il est essentiel que se
pénètrent bien tous nos concitoyens, dans la
circonstance présente. Il faut qu’ils se rendent
bien compte, en dépit des efforts que pourront
faire l’ignorance du chauvinisme inintelligent
ou la mauvaise foi de nos ennemis, que ces
fêtes de Toulon et de Paris ne consacrent pas
l’union de deux régimes. Userait même inexact
de parler d’un engagement réciproque de
deux peuples. C’est l’entente de deux gouver
nements, agissant comme représentant la
Quel est celui de la France ? En dehors des
revendications de territoires, auxqucîU., oui en
France ne songe à don ner un caractère pressant,
notre intérêt est purement défensif. Au point
de vue du développement de nos institutions,
de notre évolution politique et sociale, la paix
est un facteur indispensable. La guerre, au
contraire, serait pour nous le signal d’une
réaction ; nous y perdrions presque certaine
ment la liberté. Victorieuse, la France retour
nerait à la dictature, c’est-à-dire à l’Empire.
Vaincue, elle retomberait en monarchie, car
le peuple ne pardonnerait pas à la République
d’avoir fait espérer pendant plus de vingt ans
une revanche et d’aboutir à une défaite.
L’intérêt de la Russie est tout autre.
Sans doute, elle a besoin de défendre sa
frontière de l’Ouest et de s’opposer aux tenta
tives de germanisation, toujours fort actives,
de ses provinces bal tiques. Mais elle n’est pas
directement visée par les démonstrations du
militarisme prussien. Ce n’est pas de son
démembrement qu’il s’agit dans ces manœuvres
d’Alsace-Lorraine, où l’on a vu fraterniser un
prince de la maison de Savoie avec un Ho-
henzollern.
Si donc la Russie juge bon de donner, dans
la circonstance, à notre pays, des marques de
sympathie, ce n’est pas pour assurer son salut
immédiat. C’est sans doute pour ne pas laisser
sans contre-poids en Europe la Triple-Alliance.
Mais c’est peut-être aussi pour donner car
rière aux ambitions qu’elle caresse depuis des
siècles dans les affaires d’Orient. Son véritable
objectif est la région du bas-Danube et des
Balkans qui sont pour elle la route de Con
stantinople.
A ce point de vue, les visées de la Russie,
différentes en cela de celles de la France, ont
une tendance offensive qu’on ne peut mécon
naître.
Est-ce à ces considérations panslavistes
que nous devons subordonner notre politique ?
Nous ne le croyons pas. Ç’a été une faute
grave de notre part de nous engager, ; à Finci- |
tation et au profit de l’Angleterre, dans la
malencontreuse guerre de Crimée. Il serait
aussi dangereux de hous faire les auxiliaires
et en quelque sorte les vassaux de la Russie
dans une guerre de conquêtes en Orient.
Dans ces conditions, et sans songer à re
froidir en rien la chaleur des sympathies
franco-russes, il est permis aux patriotes
clairvoyants de demander à la Russie autre
chose que de platoniques démonstrations na
vales, coïncidant trop souvent avec des émis
sions de valeurs russes sur notre marché.
C’est un traité formel qu’il nous faut, ayant
pour but unique le maintien de la paix en
Europe et une résistance énergique aux vel
léités belliqueuses de la triple alliance.
Nos populations feront leur devoir en fêtant
les marins russes. Notre gouvernement fera le
sien un consignant, dans un traité d’alliance
bien défini et ne prêtant à aucune équivoque,
une entente qui ne peut rester éternellement
à l’état de projet.
VERUS.
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
puissance militaire de leurs nations respec
tives.
Cette entente suppose un interet commun#
La seule préoccupation du jour est la très gran
diose réception que la France doit faire aux ma
rins russes, nos alliés. On sait que la municipalité
toulonnaise a revendiqué l’honneur de recevoir et
de fêter les marins de l’escadre russe ; elle s’est
mise de grand enthousiasme à la tâche ; ellea éta-,
bli un programme magnifique, et, finalement, elle
s’est si bien emballée que les dépenses projetées
dépasseront de beaucoup ses ressources.
Pour parfaire ia somme nécessaire on avait
compté sur le gouvernement. M. le président du
Conseil a dû dissiper les illusions des édiles tou-
lonnais et leur faire comprendre qu’en la circon
stance l’Etat ne pouvait prendre à sa charge que
les dépenses qu’il engageait lui-même. Rien de
plus juste.
En soi, tout cela n’est pas autrement grave. Et
en admettant que le programme primitif ne puisse
être entièrement exécuté, l’on peut être certain
que la réception qui sera faite aux marins russes,
à Toulon comme à Paris aura l’éclat et la magni
ficence qui conviennent et, — osons le dire — qui
dépassera peut-être les mesures de la politesse et
de la courtoisie françaises.
En effet, ne voyons-nous pas les journaux mo
narchistes mener grand tapage autour de la pré
sence du comte de Paris au château de Frédens-
borg ? C’est donc le tzar en personne qui l’a invité.
Mieux encore, l’empereur de toutes les Russies
n’a d’autre intention — disent ces journaux —
que celle de relever le trône de Louis-Philippe, et
de lui apporter, comme don de joyeux avènement,
l’alliance franco-russe désormais définitivement
scellée. Et c’est ainsi que, de suppositions en dé
ductions, la Monarchie va nous être rendue dès
demain et la République poussée d’un coup de
botte aux gémonies.
En parlant ainsi, nous reconnaissons volontiers,
que les journaux réactionnaires vont vite; en be
sogne. Le tzar, quelque préférence qu’il puisse
avoir pour le régime monarchique, puisqu’il en est
lui-même le représentant le plus complet, est trop
avisé pour songer à se mêler de nos affaires inté
rieures, et il n’est pas sans savoir que les récentes
élections ont surtout manifesté l’aversion profonde
du pays pour les représentants des vieux partis
aujourd’hui complètement décimés.
“Mais ne devons-nous pas cependant admettre
qu’il y a quelque chose d’incorrect — sinon d’ir
révérencieux — dans cette attitude du tzar de re
cevoir le comte de Paris — au moment, précisé
ment où la France se prépare, par des souscrip
tions publiques, à fêter ses sujets et à les couvrir
de cadeaux ? Soyons donc un peu plus réfléchis
dans nos manifestations. Un peu moins d’enthou
siasme et un peu plus de modestie dans la circons
tance, seraient, ce nous semble, suffisamment
compris de nos alliés et surtout des étrangers qui
nous observent.
★
* * * f:‘
La plus belle Fosse minière de France.
— C’est à Commentry, au dire de tous ceux qui
connaissent l’industrie minière, que les mineurs
sont traités avec le moins de cruauté.
Les premiers coups de pioche furent donnés à
Commentry il y a une soixantaine d’années envi
ron ; et, dans ce laps, de temps, l’exploitation de fa
mine passa aux mains de plusieurs directeurs dont
un des derniers, M. Mony, devenu actionnaire de
la compagnie, s’est retiré il y a quelques années,
avec un petit pécule évalué à 72 millions. Ces éco
nomies raisonnables prouvent péremptoirement
que l’on peut encore vivre sur la mine — à la con
dition de n’y jamais descendre.
Les salaires : Les salaires atteignent une moyen
ne de 3 fr. par journée de travail, ce qui, repos
déduit, donne une moyenne réelle de. 2 fr. 60
à 2 fr.75. Le mineur doit, avec cette somme, nour
rir sg femme et ses enfants, payer son loyer, etc.
Combien de ménagères parisiennes, en voyant
ces chiffres, se demanderont comment les femmes
de mineurs arrivent à résoudre le problème si
ardu de l’existence ?
Même en admettant d’ailleurs que le mineur
dans la force de l’âge gagne un salaire quelque
peu supérieur à la moyenne, lui est-il possible de
vivre autrement qu’une brute ? Il n’est pas d’exem
ple qu’un mineur ait touché comme solde men
suelle plus de cent francs.
Et, cela va de soi, au fur et à mesure que la ma
chine humaine s’use, que les muscles s’amolissent,
que le travailleur s’épuise, sa production se fait
moindre, et c’est par une diminution de salaire
que la compagnie répond aux besoins grandissants
du vieillard.
La grève d’aujourd’hui. — Après les détails
que l’on vient de lire sur cette fosse minière de
Commentry, la plus belle de France, ne l’oublions
pas, peut-on donner tort aux mineurs du Nord dix
fois plus misérables parce qu’ils réclament une
rémunération supérieure ou un labeur moins abru
tissant ?
La grève qui commence dans le Nord prend des
proportions inquiétantes. Coïncidant avec celles
d’Angleterre et demain, sans doute, de Belgique,
elle affecte des allures de grève générale corpora
tive. Qu’en sortira-t-il ? Il serait peut-être préma
turé de le prévoir.
Souhaitons, toutefois, dans l’intérêt général,
que les administrateurs des compagnies et les ac
tionnaires, dans le genre de M. Mony, cité plus
haut, ne laissent pas affamer toute une popula
tion aussi nombreuse et aussi intéressante que les
travailleurs des mines. Autrement, la France en-
tière, avant que la disette de charbon ne se fasse
sentir et devant l’approche de l’hiver et ses ri
gueurs, verrait avec plaisir le gouvernement in
tervenir et prendre toutes les mesures nécessaires
pour le fonctionnement des mines pour cause d’u
tilité publique. — Njni.
LES MINISTERES DE CONCENTRATION
La composition de la nouvelle Chambre rend
presque impossible tout pronostic sur la durée du
ministère Dupuy.
Les uns, et c’est le plus grand nombre, pensent
qu’ayant à sa disposition la vieille balançoire du
spectre rouge et la menace de la dissolution, le
ministère actuel pourra faire voter comme un seul
homme ses 319 oppprtunistes.
D’autres basent sur l’alliance des radicaux et des
socialistes, sur l’opposition systématique de la
droite, enfin sur un certain nombre de défections
récentes parmi les gouvernementaux, la possibilité
du renversement immédiat de Dupuy et de ses
acolytes.
Sans se prononcer entre ces deux opinions, nous
pouvons cependant envisager l’attitude probable
des partis avancés dans l’une et l’autre hypothèse.
Si Dupuy se maintient au ministère, nous le
verrons, a l’occasion de tous les incidents politi
ques, se montrer nettement rétrograde, conduite
que pourront facilement exploiter les radicaux-
socialistes, pour le plus grand bien de leur doctrine
et de leur propagande. Il ne faudrait pas, en effet,
beaucoup de collisions comme celles du quartier
Latin, pour jeter au socialisme tout ce qui, en
France, hésite encore. Pour nous, nous sommes
intimement persuadés que la maladresse bien con
nue'de nos gouvernants rend imminentes d’aussi
regrettables bagarres.
Dans la seconde hypothèse, c’est-à-dire dans le
cas où il faudrait procéder à de nouvelles combi
naisons gouvernementales, les radicaux se trouvent
èn face de la fameuse question des ministères
mixtes que l’on peut poser ainsi : Les radicaux
peuvent-ils entrer individuellement dans un minis
tère qui ne serait pas tout entier composé des
membres du parti ?
A celte question, M. Gobïet répond nettement
par la négative. Un gouvernement, pense-t-il, doit
résumer un système politique et en assumer la
responsabilité. Toute compromission entre les
partis ne peut servir qu’à tromper le pays sur les
résultats des diverses politiques. Un ministère
doit être, soit recruté dans les partis avancés et
alors prendre hardiment l’initiative des réformes
sociales les plus pressées, soit composé unique
ment d’opportunistes et alors maintenir le statu
quo par tous les moyens, et défendre même par la
force, contre les revendications ouvrières, les pri
vilèges du capitaliste. Entre ces deux politiques,
le pays prononcera.
Aux yeux de certains politiciens, l’abandon
définitif des ministères mixtes aurait, outre les
avantages précédents, celui d’assurer à chaque
combinaison gouvernementale, par l’absence de
compétitions individuelles, une durée beaucoup
plus longue, durée assurée encore par ce fait, que
les partis qui seraient convaincus une bonne fois
paix DES ABONNEMENTS :
Le Havre....
Départements.
UN an six MOIS
5 fr. 3 fr.
6 fr. 3 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉ VEIL DU HA VRE paraît tous les Samedis
PRIX DES INSERTIONS ;
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
Le peuple français tout entier s’apprête à
fêter dans quelques jours, au milieu de mani
festations qu’on prévoit enthousiastes, la
venue de l’escadre russe à Toulon. L’adhésion
à cette démonstration militaire est presque
unanime dans le pays. Les abstentions sont
rares, plus rares encore les protestations.
On peut le dire, sans crainte d’être démenti
par personne, ce courant d’opinion a sa source
dans la haine que T Allemagne nous inspire.
A la base de l’entente tranco-russe, il y a,
pour nous Français, l’espérance d’abaisser tôt
ou tard la politique d’Outre-Rhin. Nous
nous sentons réconfortés en pensant que l’en
nemi, qui nous a arraché deux provinces, peut
se trouver pris, à un moment donné, sous les
feux croisés de deux puissances de premier
ordre. Le mot de paix peut être sur nos
lèvres, l’idée de la guerre est au fond de nos
cœurs. >
Si tel est exactement le sentiment qui
émeut actuellement la France entière, si nous
obéissons à cet instinct de combativité, à cette
ambition de revanche si naturelle chez les
vaincus redevenus forts, la raison ne doit pas,
dans la circonstance, perdre ses droits et le
devoir des patriotes esr d’examiner avec sang-
froid, une situation toute nouvelle dans la
destinée de notre patrie. Rarement, on peut
faire à la politique une application plus profi
table des enseignements de l’histoire.
Et tout d’abord, on s’est demandé si l’in
térêt de la cause républicaine ne s’opposerait
pas à F alliance d’une démocratie, fille de la
Révolution, et d’un empire où l’autocratie est
absolue. Le croire, ce serait méconnaître les
traditions de la diplomatie, cette force avec
laquelle il faut encore compter.
Les alliances internationales sont soumises
à des lois q^jiR^nt hélas ! rien. de sentimen
tal. Les nécessités de là défense sont la seule
règle de ces rapports. La conformité de goûts
politiques ou religieux n’y joue qu’un rôle
infime, le plus souvent négligeable.
N’a-t-on pas vu, sous l’ancien régime, le
cardinal Richelieu combattre les protestants
en France etVallier à eux à l’étranger, en
même temps qu’il s’efforçait d’abaisser la
catholique Autriche et qu’il envoyait des
troupes dans la Valteline contre le Pape ?
N’a-t-on pas vu Mazarin s’allier à Cromwell ?
N’a-t-on pas vu Cromwell lui-même s’armer
contre la Hollande républicaine et protes
tante? Les exemples foisonnent dans l’Histoire
de ces alliances au premier abord illogiques.
Comme on le voit, la raison d’Etat est exclusive
du sentimentalisme.
C’est une vérité dont il est essentiel que se
pénètrent bien tous nos concitoyens, dans la
circonstance présente. Il faut qu’ils se rendent
bien compte, en dépit des efforts que pourront
faire l’ignorance du chauvinisme inintelligent
ou la mauvaise foi de nos ennemis, que ces
fêtes de Toulon et de Paris ne consacrent pas
l’union de deux régimes. Userait même inexact
de parler d’un engagement réciproque de
deux peuples. C’est l’entente de deux gouver
nements, agissant comme représentant la
Quel est celui de la France ? En dehors des
revendications de territoires, auxqucîU., oui en
France ne songe à don ner un caractère pressant,
notre intérêt est purement défensif. Au point
de vue du développement de nos institutions,
de notre évolution politique et sociale, la paix
est un facteur indispensable. La guerre, au
contraire, serait pour nous le signal d’une
réaction ; nous y perdrions presque certaine
ment la liberté. Victorieuse, la France retour
nerait à la dictature, c’est-à-dire à l’Empire.
Vaincue, elle retomberait en monarchie, car
le peuple ne pardonnerait pas à la République
d’avoir fait espérer pendant plus de vingt ans
une revanche et d’aboutir à une défaite.
L’intérêt de la Russie est tout autre.
Sans doute, elle a besoin de défendre sa
frontière de l’Ouest et de s’opposer aux tenta
tives de germanisation, toujours fort actives,
de ses provinces bal tiques. Mais elle n’est pas
directement visée par les démonstrations du
militarisme prussien. Ce n’est pas de son
démembrement qu’il s’agit dans ces manœuvres
d’Alsace-Lorraine, où l’on a vu fraterniser un
prince de la maison de Savoie avec un Ho-
henzollern.
Si donc la Russie juge bon de donner, dans
la circonstance, à notre pays, des marques de
sympathie, ce n’est pas pour assurer son salut
immédiat. C’est sans doute pour ne pas laisser
sans contre-poids en Europe la Triple-Alliance.
Mais c’est peut-être aussi pour donner car
rière aux ambitions qu’elle caresse depuis des
siècles dans les affaires d’Orient. Son véritable
objectif est la région du bas-Danube et des
Balkans qui sont pour elle la route de Con
stantinople.
A ce point de vue, les visées de la Russie,
différentes en cela de celles de la France, ont
une tendance offensive qu’on ne peut mécon
naître.
Est-ce à ces considérations panslavistes
que nous devons subordonner notre politique ?
Nous ne le croyons pas. Ç’a été une faute
grave de notre part de nous engager, ; à Finci- |
tation et au profit de l’Angleterre, dans la
malencontreuse guerre de Crimée. Il serait
aussi dangereux de hous faire les auxiliaires
et en quelque sorte les vassaux de la Russie
dans une guerre de conquêtes en Orient.
Dans ces conditions, et sans songer à re
froidir en rien la chaleur des sympathies
franco-russes, il est permis aux patriotes
clairvoyants de demander à la Russie autre
chose que de platoniques démonstrations na
vales, coïncidant trop souvent avec des émis
sions de valeurs russes sur notre marché.
C’est un traité formel qu’il nous faut, ayant
pour but unique le maintien de la paix en
Europe et une résistance énergique aux vel
léités belliqueuses de la triple alliance.
Nos populations feront leur devoir en fêtant
les marins russes. Notre gouvernement fera le
sien un consignant, dans un traité d’alliance
bien défini et ne prêtant à aucune équivoque,
une entente qui ne peut rester éternellement
à l’état de projet.
VERUS.
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
puissance militaire de leurs nations respec
tives.
Cette entente suppose un interet commun#
La seule préoccupation du jour est la très gran
diose réception que la France doit faire aux ma
rins russes, nos alliés. On sait que la municipalité
toulonnaise a revendiqué l’honneur de recevoir et
de fêter les marins de l’escadre russe ; elle s’est
mise de grand enthousiasme à la tâche ; ellea éta-,
bli un programme magnifique, et, finalement, elle
s’est si bien emballée que les dépenses projetées
dépasseront de beaucoup ses ressources.
Pour parfaire ia somme nécessaire on avait
compté sur le gouvernement. M. le président du
Conseil a dû dissiper les illusions des édiles tou-
lonnais et leur faire comprendre qu’en la circon
stance l’Etat ne pouvait prendre à sa charge que
les dépenses qu’il engageait lui-même. Rien de
plus juste.
En soi, tout cela n’est pas autrement grave. Et
en admettant que le programme primitif ne puisse
être entièrement exécuté, l’on peut être certain
que la réception qui sera faite aux marins russes,
à Toulon comme à Paris aura l’éclat et la magni
ficence qui conviennent et, — osons le dire — qui
dépassera peut-être les mesures de la politesse et
de la courtoisie françaises.
En effet, ne voyons-nous pas les journaux mo
narchistes mener grand tapage autour de la pré
sence du comte de Paris au château de Frédens-
borg ? C’est donc le tzar en personne qui l’a invité.
Mieux encore, l’empereur de toutes les Russies
n’a d’autre intention — disent ces journaux —
que celle de relever le trône de Louis-Philippe, et
de lui apporter, comme don de joyeux avènement,
l’alliance franco-russe désormais définitivement
scellée. Et c’est ainsi que, de suppositions en dé
ductions, la Monarchie va nous être rendue dès
demain et la République poussée d’un coup de
botte aux gémonies.
En parlant ainsi, nous reconnaissons volontiers,
que les journaux réactionnaires vont vite; en be
sogne. Le tzar, quelque préférence qu’il puisse
avoir pour le régime monarchique, puisqu’il en est
lui-même le représentant le plus complet, est trop
avisé pour songer à se mêler de nos affaires inté
rieures, et il n’est pas sans savoir que les récentes
élections ont surtout manifesté l’aversion profonde
du pays pour les représentants des vieux partis
aujourd’hui complètement décimés.
“Mais ne devons-nous pas cependant admettre
qu’il y a quelque chose d’incorrect — sinon d’ir
révérencieux — dans cette attitude du tzar de re
cevoir le comte de Paris — au moment, précisé
ment où la France se prépare, par des souscrip
tions publiques, à fêter ses sujets et à les couvrir
de cadeaux ? Soyons donc un peu plus réfléchis
dans nos manifestations. Un peu moins d’enthou
siasme et un peu plus de modestie dans la circons
tance, seraient, ce nous semble, suffisamment
compris de nos alliés et surtout des étrangers qui
nous observent.
★
* * * f:‘
La plus belle Fosse minière de France.
— C’est à Commentry, au dire de tous ceux qui
connaissent l’industrie minière, que les mineurs
sont traités avec le moins de cruauté.
Les premiers coups de pioche furent donnés à
Commentry il y a une soixantaine d’années envi
ron ; et, dans ce laps, de temps, l’exploitation de fa
mine passa aux mains de plusieurs directeurs dont
un des derniers, M. Mony, devenu actionnaire de
la compagnie, s’est retiré il y a quelques années,
avec un petit pécule évalué à 72 millions. Ces éco
nomies raisonnables prouvent péremptoirement
que l’on peut encore vivre sur la mine — à la con
dition de n’y jamais descendre.
Les salaires : Les salaires atteignent une moyen
ne de 3 fr. par journée de travail, ce qui, repos
déduit, donne une moyenne réelle de. 2 fr. 60
à 2 fr.75. Le mineur doit, avec cette somme, nour
rir sg femme et ses enfants, payer son loyer, etc.
Combien de ménagères parisiennes, en voyant
ces chiffres, se demanderont comment les femmes
de mineurs arrivent à résoudre le problème si
ardu de l’existence ?
Même en admettant d’ailleurs que le mineur
dans la force de l’âge gagne un salaire quelque
peu supérieur à la moyenne, lui est-il possible de
vivre autrement qu’une brute ? Il n’est pas d’exem
ple qu’un mineur ait touché comme solde men
suelle plus de cent francs.
Et, cela va de soi, au fur et à mesure que la ma
chine humaine s’use, que les muscles s’amolissent,
que le travailleur s’épuise, sa production se fait
moindre, et c’est par une diminution de salaire
que la compagnie répond aux besoins grandissants
du vieillard.
La grève d’aujourd’hui. — Après les détails
que l’on vient de lire sur cette fosse minière de
Commentry, la plus belle de France, ne l’oublions
pas, peut-on donner tort aux mineurs du Nord dix
fois plus misérables parce qu’ils réclament une
rémunération supérieure ou un labeur moins abru
tissant ?
La grève qui commence dans le Nord prend des
proportions inquiétantes. Coïncidant avec celles
d’Angleterre et demain, sans doute, de Belgique,
elle affecte des allures de grève générale corpora
tive. Qu’en sortira-t-il ? Il serait peut-être préma
turé de le prévoir.
Souhaitons, toutefois, dans l’intérêt général,
que les administrateurs des compagnies et les ac
tionnaires, dans le genre de M. Mony, cité plus
haut, ne laissent pas affamer toute une popula
tion aussi nombreuse et aussi intéressante que les
travailleurs des mines. Autrement, la France en-
tière, avant que la disette de charbon ne se fasse
sentir et devant l’approche de l’hiver et ses ri
gueurs, verrait avec plaisir le gouvernement in
tervenir et prendre toutes les mesures nécessaires
pour le fonctionnement des mines pour cause d’u
tilité publique. — Njni.
LES MINISTERES DE CONCENTRATION
La composition de la nouvelle Chambre rend
presque impossible tout pronostic sur la durée du
ministère Dupuy.
Les uns, et c’est le plus grand nombre, pensent
qu’ayant à sa disposition la vieille balançoire du
spectre rouge et la menace de la dissolution, le
ministère actuel pourra faire voter comme un seul
homme ses 319 oppprtunistes.
D’autres basent sur l’alliance des radicaux et des
socialistes, sur l’opposition systématique de la
droite, enfin sur un certain nombre de défections
récentes parmi les gouvernementaux, la possibilité
du renversement immédiat de Dupuy et de ses
acolytes.
Sans se prononcer entre ces deux opinions, nous
pouvons cependant envisager l’attitude probable
des partis avancés dans l’une et l’autre hypothèse.
Si Dupuy se maintient au ministère, nous le
verrons, a l’occasion de tous les incidents politi
ques, se montrer nettement rétrograde, conduite
que pourront facilement exploiter les radicaux-
socialistes, pour le plus grand bien de leur doctrine
et de leur propagande. Il ne faudrait pas, en effet,
beaucoup de collisions comme celles du quartier
Latin, pour jeter au socialisme tout ce qui, en
France, hésite encore. Pour nous, nous sommes
intimement persuadés que la maladresse bien con
nue'de nos gouvernants rend imminentes d’aussi
regrettables bagarres.
Dans la seconde hypothèse, c’est-à-dire dans le
cas où il faudrait procéder à de nouvelles combi
naisons gouvernementales, les radicaux se trouvent
èn face de la fameuse question des ministères
mixtes que l’on peut poser ainsi : Les radicaux
peuvent-ils entrer individuellement dans un minis
tère qui ne serait pas tout entier composé des
membres du parti ?
A celte question, M. Gobïet répond nettement
par la négative. Un gouvernement, pense-t-il, doit
résumer un système politique et en assumer la
responsabilité. Toute compromission entre les
partis ne peut servir qu’à tromper le pays sur les
résultats des diverses politiques. Un ministère
doit être, soit recruté dans les partis avancés et
alors prendre hardiment l’initiative des réformes
sociales les plus pressées, soit composé unique
ment d’opportunistes et alors maintenir le statu
quo par tous les moyens, et défendre même par la
force, contre les revendications ouvrières, les pri
vilèges du capitaliste. Entre ces deux politiques,
le pays prononcera.
Aux yeux de certains politiciens, l’abandon
définitif des ministères mixtes aurait, outre les
avantages précédents, celui d’assurer à chaque
combinaison gouvernementale, par l’absence de
compétitions individuelles, une durée beaucoup
plus longue, durée assurée encore par ce fait, que
les partis qui seraient convaincus une bonne fois
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