Si, lorsque nous visitons des lieux ou des monuments célè- bres, nous savions nous pénétrer de leur histoire, faire entrer même un peu de leur ancienne vie et de l'âme des êtres qui les ont hantés, construits et ornés pendant des existences en- tières, quelle jouissance intellectuelle et artistique immense n'éprouverions-nous pas, transportés à des siècles en arrière, en des milieux évanouis, leurs compléments harmonieux et nécessaires ?
L'imagination ne saurait seule suffire à nous procurer cette jouissance, un guide avisé et instruit nous est indispensable.
Et voici que grâce au nôtre tout nous parle et nous initie, dès le seuil du péristyle, au langage du temple dans son ensemble et dans ses détails.
Les chapiteaux de l'un des premiers piliers traduisent les pa- roles de l'Apocalypse qui révèlent la vision de saint Jean, si admirable de poésie, vision qu'il lui est, dit-il, enjoint d'écrire et d'adresser aux sept églises d'Asie :
« Derrière moi, au milieu des sept chandeliers d'or, je vis quelqu'un qui ressemblait au Fils de l'homme, vêtu d'une lon- gue robe et ceint au-dessous des mamelles d'une ceinture d'or. Sa tête et ses cheveux étaient blancs comme la neige, ses yeux paraissaient comme des flammes de feu, ses pieds étaient sem- blables à l'airain le plus fin, tel qu'il est dans une fournaise ar- dente, et sa voix retentissait comme le bruit des grandes eaux.
» Il tenait en sa main droite sept étoiles et de sa bouche sortait une épée à deux tranchants, et son visage était plus bril- lant que le soleil dans sa force. »
Le sculpteur, évidemment un moine habite et méditatif, a rendu avec une netteté et une exactitude parfaites autant que naïves, les beaux passages du texte de cet apôtre que le Maître avait plus particulièrement aimé et qui, ayant dormi sur son épaule, avait senti l'Esprit divin le transporter dans son do- maine mystérieux et éblouissant.
Ainsi le porche est bien la préface éloquente du livre qui se dresse devant nous, et avec lui, comme un frontispice d'une ri- chesse admirable, cette porte du Nord qui ne le cède en rien aux plus belles sculptures de Bourges et de Chartres et qui servait
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