Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1902-01-18
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 18 janvier 1902 18 janvier 1902
Description : 1902/01/18 (N299). 1902/01/18 (N299).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263498r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
? Année — f 299.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
Samedi 18 Janvier 1902.
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an
Départements »
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
KXJE GASIMIK-PÉRIER,
Secrétaire de la Rédaction.... Alfred Henri
L’Imprimeur-Gérant F. LE ROY
1 5
Annonces
Réclames.
Prix des Insertions :
25 centimes la ligne
50 »
On traite à forfait
V.
Prédictions pour 1902
L'année qui Tient de naître étant
encore au berceau, il n'est pas trop
tard pour faire connaître à nos lec
teurs les prédictions qui l’ont saluée
à son aurore. Les bonnes fées de
notre enfance se sont transformées
en modernes voyantes, mais le nom
ne fait rien à l’affaire, et les résul
tats sont identiques.
S’il faut en croire ces prophé-
tesses commencement de siècle, on
ne s'embêtera pas en l’an de grâce
1902. L’agriculture elle-même aura
sa part de joies et de tribulations,
car, si elle continue à manquer de
bras, il paraîtrait qu’elle ne man
quera pas de raisin, et je connais
bon nombre de consommateurs qui
s’en réjouiront avec elle, à condi
tion, bien entendu, que le bon vin
revienne de mode et que la con
sommation égale la production,
qu’on nous prédit devoir être ex
ceptionnelle.
Par contre, la température ferait
encore des siennes, et l’hiver qui a
si mal débuté, finirait de même :
dans l’eau et la boue. Puis, le prin
temps serait glacial, mais nous
sommes habitués à ce que le prin
temps n’existe plus que de nom, sur
le calendrier, et cela ne nous chan
gera point. Si nous devons rôtir cet
été, cela ne nous changera guère
non plus, et l’on se fait à tout. Faut-
il, pour mémoire, prédire la fin du
monde pour cette année ? Mais on
nous l’a prédite tant de fois, que
nous n’y croirons qu’après coup. Au
surplus, il en est de cette prophétie
comme des prédictions des astro
nomes : ne nous hâtons donc ni de
nous réjouir ni de nous attrister.
Qui vivra verra !
La politique est peut-être plus
intéressante, à certains égards,
encore que l’expérience nous ia-
dique que, là aussi, c’est souvent
l’imprévu qui arrive. Les faits $e
chargent de démentir les prédic
tions en apparence les mieux fon
dées. Cependant, par respect pour
la voyante de qui nous tenons ces
tuyaux, nous devons consigner que
la République sera, une fois de plus,
en danger, et que les élections gé
nérales donneront le signal de
luttes oîi partisans et adversaires
du régime actuel se livreront des
combats acharnés. Comme toujours
en pareille circonstance, le com
merce et l’industrie supporteront les
conséquences d’un tel état de choses
et payeront les pots cassés. Cela,
il n’est pas besoin d’être grand de
vin pour le prédire.
• •
La paix européenne, toujours si
précaire, sera-t-elle troublée ? Cer
tes, la Turquie, objet de tant de
convoitises, est mal en point, cela
est incontestable, et il se pourrait
que les menées russes et anglaises
nous ménageassent de ce côté quel
que surprise désagréable. La succes
sion d’Autriche, qu’un événement
peut faire entrer dans le domaine
de la réalité, constitue également
un aléa redoutable, et, tôt ou tard,
le gros nuage noir qui s’amoncelle
depuis si longtemps peut crever sur
nos têtes. Sera-ce cette année plutôt
qu’une autre ? Bien fin qui le pour
rait prédire avec certitude.
•
O ©
Si le militarisme est quelque peu
battu en brèche dans notre pays, il
commence à être aussi fort attaqué
en Allemagne, où il semble avoir
atteint son apogée. Cependant, tant
que Guillaume conservera la direc
tion toute puissante des affaires de
l’empire, son influence sur les des
tinées du peuple allemand ne saurait
décroître. Mais le jour où l’astre du
potentat pâlira, ce militarisme ou-
traneier perdra du terrain, avant
peut-être d’avoir produit tout son
effet. Le monde civilisé ne pourra
que saluer avec joie ce déclin iné
vitable. Quant à l’Angleterre, il lui
faudrait un rude coup de fortune,
en Europe ou ailleurs, pour recon
quérir un prestige qui parait déci
dément bien compromis.
*
* *
Notre voyante — c’est plutôt, en
somme, un oiseau de mauvais au
gure — prévoit de nouvelles ten
tatives anarchistes, c’est-à-dire cri
minelles, dont seraient victimes le
tsar et son entourage. Nous avouons
être très sceptiques à cet égard d’au
tant que la Russie a, depuis long
temps, cessé d’être le principal
champ d’action de messieurs les
compagnons. L’histoire de ces der
nières années nous enseigne que
l’anarchisme a des ramifications fort
étendues et que ses coups atteignent
successivement les têtes couronnées
ou non.
Nous ajouterions volontiers plus
de créance à cette prédiction qui
vise la Turquie et qui la représente
comme devant nous donner de nou
veau le scandaleux spectacle des
pires violences. Les massacres de
chrétiens y sont malheureusement
devenus d’une banale fréquence, et,
tant que l’Europe civilisée ne se dé
cidera pas à intervenir, il faut s’at
tendre à tout. La folie sanguinaire
du sultan est une de ces redoutables
affections qui ne disparaissent qu’a
vec celui qui en est atteint.
Mais, à côté des horreurs dont on
nous entretient, cette année verra,
juste compensation, la glorification
de personnalités dont l’existence
aura été consacrée tout entière au
bien et au beau. L’inauguration du
monument de Pasteur sera un écla
tant hommage rendu par l’humanité
à l’homme bienfaisant qui a su arra
cher à la mort tant de victimes
condamnées, avant ses admirables
travaux, à une fin prématurée.
Enfin, le mois prochain verra s’éle
ver le monument de Victor Hugo,
le grand poète dont les œuvres sont,
comme leur auteur, vouées à l’im
mortalité. Les conquêtes de l’esprit
et de la science sont les seules qui
n’aient rien à craindre du temps et
qui puissent braver impunément les
entreprises de la politique et des mé
chants.
En résumé, cette année 1902, si
elle doit voir beaucoup de mal,
verra aussi quelque bien, et, par
cela même, il lui sera sans doute
beaucoup pardonné. Quoi que fassent
les uns et les autres, la grande
œuvre de la civilisation, indépen
dante des fantaisies des mortels,
n’en continuera pas moins son petit
bonhomme de chemin.
Victorien Màubry.
C’est dans quatre mois que vont
avoir lieu les élections générales pour
le renouvellement de la Chambre des
députés.
La Chambre qu’il s’agit d’élire sera
la huitième de la République consti
tutionnelle, parlementaire et démo
cratique, fondée en 1875.
La première Chambre fut celle du
20 février 1876 ; elle vécut à peine
une année, dissoute brutalement par
les tristes personnages de la réaction
du 16 mai. Les autres Chambres ont
rempli régulièrement leur mandat;
elles portent les dates suivantes :
14-28 octobre 1877.
21 août-4 septembre 1881.
4-18 octobre 1885.
22 septembre-6 octobre 1889.
20 août-8 septembre 1893.
8 mai-22 mai 1898.
Et, comme le Président Grévy, sa
luant la première Chambre républi
caine qui était renvoyée prématuré
ment devant le suffrage universel,
pouvait lui dire que < dans sa trop
courte carrière, elle avait bien méritée
de la République » ; de même nous
pouvons dire des sept Chambres qui
lui succédèrent qu’elles ont toutes
bien mérité de la République et du
pays, malgré les fautes et les moments
de défaillance, puisqu’elles ont ci
menté d’une manière inébranlable
l’établissement républicain, supérieur
par sa durée à toutes les monarchies
depuis cent cinquante ans î
En 1876, il y eut 9,890,867 élec
teurs inscrits. Aux élections générales
suivantes, il y en eut toujours plus
de dix millions, à peu près dix mil
lions et demi, sur lesquels on compte
environ 3 millions d’abstentions.
Aux élections de 1879, celles où
l’on a le plus voté sous l’Empire et
qui furent .les dernières de la période
impériale, on compta 10,135,320 élec
teurs inscrits et 8,189,481 votants.
Le recensement officiel donna au
gouvernement de Napoléon III qua
tre millions, 636,713 votes, et à l’Op
position, 3,266,366.
Sous la République, les recense
ments officiels ont attribué successi
vement à l’Opposition 3 millions en
1876 et 1877, 1,789,767 en 1881,
puis de nouveau 3 millions en 1885
et 1889, enfin un million en 1893 et,
en 1898, 974,500.
Le nombre dss voix républicaines,
de toute nuance, qui était en 1876 de
4 millions, s’est élevé à prés de 7 mil
lions au dernier scrutin général de
1898.
Ces chiffres indiquent suffisamment
que, tandis que l’Empire allait en per
dant des voix d’une manière prodi
gieuse, la République a toujours été
en augmentant le nombre des suffra
ges républicains ! il y a là une diffé
rence d’évolution bien remarquable
entre les deux régimes !
Le RÉVEIL BU EAVRE
Nous lisons dans le Radical-Soda-
liste :
< L’honorable organe démocratique
le Réveil du Havre s’est attiré une lettre
en raison de son article intitulé :
UNE EXÉCUTION
DE M. CH. DÉLI0T
< Ce titre était-il voulu ? Nous ne
savons.
« En tous cas, il est à double en
tente et son ambiguité semble témoi
gner d’une certaine rouerie qu’un
journal, ami du progrès, ne devrait
pas employer à l’égard d’un homme
qui, lui aussi, est partisan du progrès
et s’est donné pour devoir de traquer
les abus où qu’ils soient. N’ajoutons
rien pour rester quand même loyaux
et sincères.
« Quel a été l’effet de notre accu
sation ?
« Qui sait?
« Nous nous attendions à une pro
testation indignée de la part de M.
Morgand. Nous croyions que, voulant
prouver que sa conscience est nette,
qu’il peut la montrer et la tourner à
tous les yeux sans qu’aucune tache y
paraisse, M. Morgand aurait à cœur
de se disculper.
« Mais rien. Un silence funèbre.
« Ne chercherait-il pas avec l’aide
de l’ange gardien, ce bon M. Géraut,
à biaiser, à trouver des faux-fuyants ?
Gageons que tous deux fouillent dans
les archives, qu’ils s’y entassent fiè
vreusement et qu’un de ces jours,
tout couverts de la poussière des pa
perasses, ils nous produiront de pous
siéreuses preuves. Hélas !
« L’homme de devoir ne reste pas
en marge des arrêtés ou des décisions,
il va droit au but et impose victo
rieusement à tous le respect et la
confiance.
RÉPONSE
« Le Réveil ayant pris la défense
de M. Morgand s’est attiré la lettre
suivante :
Monsieur le rédacteur
du Réveîl.
J'ai constaté avec surprise, que dans
votre dernier numéro vous avez pris la
défense de M. Morgand, adjoint, auquel
j'ai reproché une faute grave ; je pensais
qu’un a démocrate » devait plutôt dénon
cer les abus que de chercher à les expli
quer, surtout quand la vérité doit en
souffrir.
Vous en avez jugé autrement, c’est
votre droit ; mais le mien est de dissiper
toute équivoque et c’est ce que je vais
faire.
Vous dites que « les octrois ont été ré
visés en 1900 ». Ce qui tendrait à faire
croire à vos lecteurs qu’on a changé quel
que chose au tarif ou au règlement en ce
qui concerne les bois. Eh bien non, M. le
rédacteur, rien n’a été changé, ni le tarif
ni le règlement, car l’alinéa de la page 21
du dernier règlement que vous citez est
la reproduction exacte de celui de la page
21 du règlement de 1895.
Je les tiens tous les deux à votre dispo»
sition, ainsi que la fameuse note de ser
vice signée Gérault qui, seule, supprime
les droits d’octroi sur l’hickory et le teck.
Au surplus, je ferai la preuve de ce que
j’ai dit, dans la prochaine séance du Con
seil municipal.
Je regrette que vous n’ayez pas con
sulté mes deux collègues qui font partie
de votre rédaction, parce que vous n’au
riez pas fait l’erreur que je vous prie de
rectifier en insérant cette lettre sous ce
titre employé par vous même :
Une Exécution de M. Ch. Déliot
Agréez, Monsieur, mes salutations dis*
tinguées.
Ch. DÉLIOT.
En reproduisant in extenso , comme
nons le faisons, l’article et la Réponse
que nous adresse notre confrère Ch.
Déliot, il ne nous accusera plus, es-
pérons-le, « de rouerie, qu’un journal
ami du progrès ne devrait pas em
ployer à l’égard d’un homme qui, lui
aussi, est partisan du progrès et s’est
donné pour devoir de traquer les abus
o4 qu’ils soient. »
Votre conduite, cher confrère, ne
peut trouver que des approbateurs
pour vous encourager à persévérer
dans cette voie.
La vérité doit toujours être guidée
par le plus de lumière possible ; mais
sa recherche est difficile, dangereuse;
on éprouve parfois des meurtrissures,
et, pour notre part, nous en avons fait
quelquefois l’expérience, malgré la
vérité dont nous étions possesseurs.
Nous sommes fort à l’aise, du reste
d’écrire librement dans cette feuille
ce que nous pensons des actes de nos
élus, et la bombe épistolaire que vous
avez lancé dans les jambes de votre
collègue nous a paru tellement vio
lente que son éclat aurait dû le faire
trébucher.
Nous fûmes donc, comme beaucoup
d’autres, effrayés — pour vous — des
conséquences de votre pétard ; mais
aucune protestation n’étant venue de
puis relever vos assertions, dam!
nous inclinons à croire que vous avez
frappé sur un endroit sensible.
Nous nous étions dit que les bois
de teck et de hickory, rentrant dans
la catégorie des bois d’ébénisterie,
étaient, en vertu du nouveau tarif de
l’octroi, exempts de tout droit d’entrée..
Nous pensions aussi que les délibé
rations municipales des 19 octobre et
14 novembre,certifiés conformes et
exécutoires à partir du 1 er janvier
1901 devaient être sincères (ce que
nous croyons encore) et non un arrêté
illégal, pris en catimini, dans le ca
binet d’un adjoint quelconque.
C'est ce que vous prétendez, et,
ressemblant en cela avec notre con
frère Le Progrès, n’étant pas initié
aux secrets des dieux, nous attendrons
la prochaine séance du Conseil pour
connaître les résultats du débat dont
les conclusions devront être telles,
que le yaincu devra rester par terre.
G. T.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
Samedi 18 Janvier 1902.
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an
Départements »
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
KXJE GASIMIK-PÉRIER,
Secrétaire de la Rédaction.... Alfred Henri
L’Imprimeur-Gérant F. LE ROY
1 5
Annonces
Réclames.
Prix des Insertions :
25 centimes la ligne
50 »
On traite à forfait
V.
Prédictions pour 1902
L'année qui Tient de naître étant
encore au berceau, il n'est pas trop
tard pour faire connaître à nos lec
teurs les prédictions qui l’ont saluée
à son aurore. Les bonnes fées de
notre enfance se sont transformées
en modernes voyantes, mais le nom
ne fait rien à l’affaire, et les résul
tats sont identiques.
S’il faut en croire ces prophé-
tesses commencement de siècle, on
ne s'embêtera pas en l’an de grâce
1902. L’agriculture elle-même aura
sa part de joies et de tribulations,
car, si elle continue à manquer de
bras, il paraîtrait qu’elle ne man
quera pas de raisin, et je connais
bon nombre de consommateurs qui
s’en réjouiront avec elle, à condi
tion, bien entendu, que le bon vin
revienne de mode et que la con
sommation égale la production,
qu’on nous prédit devoir être ex
ceptionnelle.
Par contre, la température ferait
encore des siennes, et l’hiver qui a
si mal débuté, finirait de même :
dans l’eau et la boue. Puis, le prin
temps serait glacial, mais nous
sommes habitués à ce que le prin
temps n’existe plus que de nom, sur
le calendrier, et cela ne nous chan
gera point. Si nous devons rôtir cet
été, cela ne nous changera guère
non plus, et l’on se fait à tout. Faut-
il, pour mémoire, prédire la fin du
monde pour cette année ? Mais on
nous l’a prédite tant de fois, que
nous n’y croirons qu’après coup. Au
surplus, il en est de cette prophétie
comme des prédictions des astro
nomes : ne nous hâtons donc ni de
nous réjouir ni de nous attrister.
Qui vivra verra !
La politique est peut-être plus
intéressante, à certains égards,
encore que l’expérience nous ia-
dique que, là aussi, c’est souvent
l’imprévu qui arrive. Les faits $e
chargent de démentir les prédic
tions en apparence les mieux fon
dées. Cependant, par respect pour
la voyante de qui nous tenons ces
tuyaux, nous devons consigner que
la République sera, une fois de plus,
en danger, et que les élections gé
nérales donneront le signal de
luttes oîi partisans et adversaires
du régime actuel se livreront des
combats acharnés. Comme toujours
en pareille circonstance, le com
merce et l’industrie supporteront les
conséquences d’un tel état de choses
et payeront les pots cassés. Cela,
il n’est pas besoin d’être grand de
vin pour le prédire.
• •
La paix européenne, toujours si
précaire, sera-t-elle troublée ? Cer
tes, la Turquie, objet de tant de
convoitises, est mal en point, cela
est incontestable, et il se pourrait
que les menées russes et anglaises
nous ménageassent de ce côté quel
que surprise désagréable. La succes
sion d’Autriche, qu’un événement
peut faire entrer dans le domaine
de la réalité, constitue également
un aléa redoutable, et, tôt ou tard,
le gros nuage noir qui s’amoncelle
depuis si longtemps peut crever sur
nos têtes. Sera-ce cette année plutôt
qu’une autre ? Bien fin qui le pour
rait prédire avec certitude.
•
O ©
Si le militarisme est quelque peu
battu en brèche dans notre pays, il
commence à être aussi fort attaqué
en Allemagne, où il semble avoir
atteint son apogée. Cependant, tant
que Guillaume conservera la direc
tion toute puissante des affaires de
l’empire, son influence sur les des
tinées du peuple allemand ne saurait
décroître. Mais le jour où l’astre du
potentat pâlira, ce militarisme ou-
traneier perdra du terrain, avant
peut-être d’avoir produit tout son
effet. Le monde civilisé ne pourra
que saluer avec joie ce déclin iné
vitable. Quant à l’Angleterre, il lui
faudrait un rude coup de fortune,
en Europe ou ailleurs, pour recon
quérir un prestige qui parait déci
dément bien compromis.
*
* *
Notre voyante — c’est plutôt, en
somme, un oiseau de mauvais au
gure — prévoit de nouvelles ten
tatives anarchistes, c’est-à-dire cri
minelles, dont seraient victimes le
tsar et son entourage. Nous avouons
être très sceptiques à cet égard d’au
tant que la Russie a, depuis long
temps, cessé d’être le principal
champ d’action de messieurs les
compagnons. L’histoire de ces der
nières années nous enseigne que
l’anarchisme a des ramifications fort
étendues et que ses coups atteignent
successivement les têtes couronnées
ou non.
Nous ajouterions volontiers plus
de créance à cette prédiction qui
vise la Turquie et qui la représente
comme devant nous donner de nou
veau le scandaleux spectacle des
pires violences. Les massacres de
chrétiens y sont malheureusement
devenus d’une banale fréquence, et,
tant que l’Europe civilisée ne se dé
cidera pas à intervenir, il faut s’at
tendre à tout. La folie sanguinaire
du sultan est une de ces redoutables
affections qui ne disparaissent qu’a
vec celui qui en est atteint.
Mais, à côté des horreurs dont on
nous entretient, cette année verra,
juste compensation, la glorification
de personnalités dont l’existence
aura été consacrée tout entière au
bien et au beau. L’inauguration du
monument de Pasteur sera un écla
tant hommage rendu par l’humanité
à l’homme bienfaisant qui a su arra
cher à la mort tant de victimes
condamnées, avant ses admirables
travaux, à une fin prématurée.
Enfin, le mois prochain verra s’éle
ver le monument de Victor Hugo,
le grand poète dont les œuvres sont,
comme leur auteur, vouées à l’im
mortalité. Les conquêtes de l’esprit
et de la science sont les seules qui
n’aient rien à craindre du temps et
qui puissent braver impunément les
entreprises de la politique et des mé
chants.
En résumé, cette année 1902, si
elle doit voir beaucoup de mal,
verra aussi quelque bien, et, par
cela même, il lui sera sans doute
beaucoup pardonné. Quoi que fassent
les uns et les autres, la grande
œuvre de la civilisation, indépen
dante des fantaisies des mortels,
n’en continuera pas moins son petit
bonhomme de chemin.
Victorien Màubry.
C’est dans quatre mois que vont
avoir lieu les élections générales pour
le renouvellement de la Chambre des
députés.
La Chambre qu’il s’agit d’élire sera
la huitième de la République consti
tutionnelle, parlementaire et démo
cratique, fondée en 1875.
La première Chambre fut celle du
20 février 1876 ; elle vécut à peine
une année, dissoute brutalement par
les tristes personnages de la réaction
du 16 mai. Les autres Chambres ont
rempli régulièrement leur mandat;
elles portent les dates suivantes :
14-28 octobre 1877.
21 août-4 septembre 1881.
4-18 octobre 1885.
22 septembre-6 octobre 1889.
20 août-8 septembre 1893.
8 mai-22 mai 1898.
Et, comme le Président Grévy, sa
luant la première Chambre républi
caine qui était renvoyée prématuré
ment devant le suffrage universel,
pouvait lui dire que < dans sa trop
courte carrière, elle avait bien méritée
de la République » ; de même nous
pouvons dire des sept Chambres qui
lui succédèrent qu’elles ont toutes
bien mérité de la République et du
pays, malgré les fautes et les moments
de défaillance, puisqu’elles ont ci
menté d’une manière inébranlable
l’établissement républicain, supérieur
par sa durée à toutes les monarchies
depuis cent cinquante ans î
En 1876, il y eut 9,890,867 élec
teurs inscrits. Aux élections générales
suivantes, il y en eut toujours plus
de dix millions, à peu près dix mil
lions et demi, sur lesquels on compte
environ 3 millions d’abstentions.
Aux élections de 1879, celles où
l’on a le plus voté sous l’Empire et
qui furent .les dernières de la période
impériale, on compta 10,135,320 élec
teurs inscrits et 8,189,481 votants.
Le recensement officiel donna au
gouvernement de Napoléon III qua
tre millions, 636,713 votes, et à l’Op
position, 3,266,366.
Sous la République, les recense
ments officiels ont attribué successi
vement à l’Opposition 3 millions en
1876 et 1877, 1,789,767 en 1881,
puis de nouveau 3 millions en 1885
et 1889, enfin un million en 1893 et,
en 1898, 974,500.
Le nombre dss voix républicaines,
de toute nuance, qui était en 1876 de
4 millions, s’est élevé à prés de 7 mil
lions au dernier scrutin général de
1898.
Ces chiffres indiquent suffisamment
que, tandis que l’Empire allait en per
dant des voix d’une manière prodi
gieuse, la République a toujours été
en augmentant le nombre des suffra
ges républicains ! il y a là une diffé
rence d’évolution bien remarquable
entre les deux régimes !
Le RÉVEIL BU EAVRE
Nous lisons dans le Radical-Soda-
liste :
< L’honorable organe démocratique
le Réveil du Havre s’est attiré une lettre
en raison de son article intitulé :
UNE EXÉCUTION
DE M. CH. DÉLI0T
< Ce titre était-il voulu ? Nous ne
savons.
« En tous cas, il est à double en
tente et son ambiguité semble témoi
gner d’une certaine rouerie qu’un
journal, ami du progrès, ne devrait
pas employer à l’égard d’un homme
qui, lui aussi, est partisan du progrès
et s’est donné pour devoir de traquer
les abus où qu’ils soient. N’ajoutons
rien pour rester quand même loyaux
et sincères.
« Quel a été l’effet de notre accu
sation ?
« Qui sait?
« Nous nous attendions à une pro
testation indignée de la part de M.
Morgand. Nous croyions que, voulant
prouver que sa conscience est nette,
qu’il peut la montrer et la tourner à
tous les yeux sans qu’aucune tache y
paraisse, M. Morgand aurait à cœur
de se disculper.
« Mais rien. Un silence funèbre.
« Ne chercherait-il pas avec l’aide
de l’ange gardien, ce bon M. Géraut,
à biaiser, à trouver des faux-fuyants ?
Gageons que tous deux fouillent dans
les archives, qu’ils s’y entassent fiè
vreusement et qu’un de ces jours,
tout couverts de la poussière des pa
perasses, ils nous produiront de pous
siéreuses preuves. Hélas !
« L’homme de devoir ne reste pas
en marge des arrêtés ou des décisions,
il va droit au but et impose victo
rieusement à tous le respect et la
confiance.
RÉPONSE
« Le Réveil ayant pris la défense
de M. Morgand s’est attiré la lettre
suivante :
Monsieur le rédacteur
du Réveîl.
J'ai constaté avec surprise, que dans
votre dernier numéro vous avez pris la
défense de M. Morgand, adjoint, auquel
j'ai reproché une faute grave ; je pensais
qu’un a démocrate » devait plutôt dénon
cer les abus que de chercher à les expli
quer, surtout quand la vérité doit en
souffrir.
Vous en avez jugé autrement, c’est
votre droit ; mais le mien est de dissiper
toute équivoque et c’est ce que je vais
faire.
Vous dites que « les octrois ont été ré
visés en 1900 ». Ce qui tendrait à faire
croire à vos lecteurs qu’on a changé quel
que chose au tarif ou au règlement en ce
qui concerne les bois. Eh bien non, M. le
rédacteur, rien n’a été changé, ni le tarif
ni le règlement, car l’alinéa de la page 21
du dernier règlement que vous citez est
la reproduction exacte de celui de la page
21 du règlement de 1895.
Je les tiens tous les deux à votre dispo»
sition, ainsi que la fameuse note de ser
vice signée Gérault qui, seule, supprime
les droits d’octroi sur l’hickory et le teck.
Au surplus, je ferai la preuve de ce que
j’ai dit, dans la prochaine séance du Con
seil municipal.
Je regrette que vous n’ayez pas con
sulté mes deux collègues qui font partie
de votre rédaction, parce que vous n’au
riez pas fait l’erreur que je vous prie de
rectifier en insérant cette lettre sous ce
titre employé par vous même :
Une Exécution de M. Ch. Déliot
Agréez, Monsieur, mes salutations dis*
tinguées.
Ch. DÉLIOT.
En reproduisant in extenso , comme
nons le faisons, l’article et la Réponse
que nous adresse notre confrère Ch.
Déliot, il ne nous accusera plus, es-
pérons-le, « de rouerie, qu’un journal
ami du progrès ne devrait pas em
ployer à l’égard d’un homme qui, lui
aussi, est partisan du progrès et s’est
donné pour devoir de traquer les abus
o4 qu’ils soient. »
Votre conduite, cher confrère, ne
peut trouver que des approbateurs
pour vous encourager à persévérer
dans cette voie.
La vérité doit toujours être guidée
par le plus de lumière possible ; mais
sa recherche est difficile, dangereuse;
on éprouve parfois des meurtrissures,
et, pour notre part, nous en avons fait
quelquefois l’expérience, malgré la
vérité dont nous étions possesseurs.
Nous sommes fort à l’aise, du reste
d’écrire librement dans cette feuille
ce que nous pensons des actes de nos
élus, et la bombe épistolaire que vous
avez lancé dans les jambes de votre
collègue nous a paru tellement vio
lente que son éclat aurait dû le faire
trébucher.
Nous fûmes donc, comme beaucoup
d’autres, effrayés — pour vous — des
conséquences de votre pétard ; mais
aucune protestation n’étant venue de
puis relever vos assertions, dam!
nous inclinons à croire que vous avez
frappé sur un endroit sensible.
Nous nous étions dit que les bois
de teck et de hickory, rentrant dans
la catégorie des bois d’ébénisterie,
étaient, en vertu du nouveau tarif de
l’octroi, exempts de tout droit d’entrée..
Nous pensions aussi que les délibé
rations municipales des 19 octobre et
14 novembre,certifiés conformes et
exécutoires à partir du 1 er janvier
1901 devaient être sincères (ce que
nous croyons encore) et non un arrêté
illégal, pris en catimini, dans le ca
binet d’un adjoint quelconque.
C'est ce que vous prétendez, et,
ressemblant en cela avec notre con
frère Le Progrès, n’étant pas initié
aux secrets des dieux, nous attendrons
la prochaine séance du Conseil pour
connaître les résultats du débat dont
les conclusions devront être telles,
que le yaincu devra rester par terre.
G. T.
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