Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1899-10-14
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 14 octobre 1899 14 octobre 1899
Description : 1899/10/14 (N181). 1899/10/14 (N181).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263380q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/05/2019
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an
Départements »
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
RUE GASIMIR-PÉRIER,
; 1 !
Secrétaire de la Rédaction F. thommeret
L’Imprimeur-Gérant. F. LE ROY
15
Annonces
Réclames,
Prix des Insertions :
,. 25 centimes la ligne
50 »
On traite à forfait
Querelles de Prêtres
Le Diable en Rit
M. Jean de Bonnefon, en un fort
intéressant article publié dans le
Journal du 5 Octobre, nous narre
une curieuse histoire qui vaut vrai
ment la peine d’être redite et com
mentée. Voici :
Un jour, aux îles Saint-Pierre et
Miquelon, arrivèrent des moines
confits dans leur sainteté. Ils repré
sentaient « l’Œuvre de Mer ». Ils
s’installèrent à Saint-Pierre, puis,
profitant d’une absence de l’évêque,
voulurent ériger une chapelle et y
célébrer la messe. Or, le Concordat
ne permet l’érection d’une chapelle
que lorsque la paroisse dans laquelle
elle doit être édifiée est trop grande
ou que les limites n’en sont pas dé
finies, ce qui n’est pas le cas pour
la petite île de Saint-Pierre. Les
prêtres séculiers protestèrent. Les
moines sortirent alors une permis
sion -de Rome. Ce voyant, les “pré-*’
très se plaignirent à leur évêque.
Celui-ci, lésé dans son autorité de
prélat reconnu par l’Eglise et payé
par l’Etat, convaincu d’ailleurs que
les apôtres de « l’Œuvre de Mer »
voulaient lui faire une concurrence
déloyale et le berner, ordonna la
fermeture de la chapelle. Jusque là
rien que de très ordinaire en par
tant de ce principes que deux repré
sentants de Jésus-Christ ne peuvent
se voir sans que. l’un essaie de man
ger l’autre. Mais où l’histoire se
corse, c’est dans la suite.
M. Tiberi, évêque de Saint-Pier
re, avait affaire à forte partie. Le
27 mai 1899, il recevait du préfet
de la propagande, le cardinal Le-
dochowski, une lettre impérieuse
dans laquelle ce dernier lui enjoi
gnait de retirer sa défense et d’ac
cepter les moines. Le21 juillet 1899,
le cardinal Ledociiowski réitéra ses
ordres à l’évêque français, lui mar
quant en même temps un hautain
mécontentement. Et comme M. Ti
beri ne paraissait pas enthousiasmé
de s’humilier, le secrétaire de la
Propagande, en date da 12 août
1899, le ménagea en ces termes :
< Mais si pourtant je n’avais pas le
plaisir de recevoir la nouvelle que
j’attends (la soumission de l’évêque
aux moines), je me verrais forcé,
quoique à regret, de faire exécuter
les ordres donnés en dehors de vous,
ce que j’ai évité jusqu’ici, pour
tous ménager le prestige de votre
autorité ».
Je passe sur la réponse de M. Ti
beri à ce dernier factium. Au lieu
de protester à Rome et de prier
qu’on fit une enquête, M. Tiberi
aurait mieux fait (et, en cela, je
suis de l’avis de M. de Bonnefon),
de demander au Ministre des cultes
de continuer la conversation. C’eût
été plus digne pour lui et pour le
prestige du gouvernement français.
Mais on ne s’avise pas de tout et les
évêques oublient volontiers qu’ils
sont des fonctionnaires et, qu’en
cette qualité, ils doivent demander
aide et protection à l’Etat qui les
subventionne.
L’histoire ne va pas plus loin jus
qu’à présent, mais il y a déjà ma
tière à de fortes réflexions.
Comme confraternité d’abord,
c’est plutôt maigre. Ainsi, dans la
plainte des prêtres de St-Pierre à
M. Tiberi, il y a nombre de réflexions
désagréables sur les moines. Ceux-
ci, d’après cette épître, sont jugés
sévèrement par la population de
Saint-Pierre. On traite leur œuvre
de « blague », leur chapelle de
« repaire de déserteurs ». Le ba
teau-hôpital, qu’ils ont construit
avec le produit de quêtes nombreu
ses, est si peu utile qu’il apporte 8
malades sur 200. En un mot et je
prends les termes des curés et vi
caires de St-Pierre : « l’Œuvre de
Mer » est une « œuvre manquée ».
Et maintenant, le lecteur veut-il
savoir quelle est la nationalité du
cardinal qui donne des ordres à nos
« Monseigneur » français sans qu’il
en ait le droit et sans que ceux-ci
protestent auprès du Ministre des
cultes. C’est un allemand, notre
pire ennemi, le candidat de la triple
alliance à la Papauté.
Et si le lecteur insatiable veut
s’inquiéter de l’ordre de moines qui
a pour protecteur le plus haineux
adversaire la France à Rome, nous
ne pourrons lui cacher que cet
ordre est l’ordre des Assomption-
nistes, patriotes dans les feuilles
< Les Croix de Paris et de Pro
vince », mais internationalistes et,
au besoin, francophobes lorsqu’il
s’agit de leurs intérêts.
Il est compréhensible, du reste,
que le pape et les cardinaux ne re
fusent pas leur appui aux Assomp-
tionnistes. Ennemis de la France
parce qu’elle est d’esprit révolu
tionnaire, ils ne peuvent qu’être
reconnaissants à ces moines, car
ceux-ci ont failli anéantir dans
l’ineptie catholico - antisémite la
claire et intelligente bonté de notre
race. Ils ont créé un patriotisme
spécial, fait de boue et de sang,
une sorte d’hystérie religieusement
meurtrière, dont les suites auraient
pu perdre à jamais la patrie.
C’est pourquoi je me joins à M.
de Bonnefon pour demander au
Ministre des cultes de prendre la
défense de M. Tiberi contre les
moines de guerre civile qui, lors
qu’ils n’ont plus de juifs à se mettre
sous la dent, spolient les évêques.
Et on dit que les loups ne se
mangent pas entre eux !
Mais il y aurait une décision à
prendre qui finirait logiquement
cet incident et empêoherait le re
tour de faits semblables. Ce serait
d’expulser les jésuites (comme je l’ai
demandé en de précédents articles),
et de dissoudre définitivement toute
cette moinerie dont l’extension et la
vitalité menacent gravement notre
République.
Jean SERC.
LA SEMAINE
La Haute-Cour
L’iuterrogatoire des inculpés de la
Haute Cour s’est poursuivi sans inci
dents toute la semaine. Seul, M. An
dré Buffet a laissé entre les mains de
M. Bérenger une déclaration, n’ayant
pas voulu subir un interrogatoire. Il
entend se défendre publiquement.
C’est son droit... Mais auparavant,
il*a condamné la justice politique, et
il a cru flétrir ses juges en disant
qu’ils étaient des francs-maçons et
qu’ils devaient nécessairement se sou
mettre à un gouvernement qui, en le
faisant arrêter, a obéi à un ordre de
la franc-maçonnerie.
★
* *
L’incartade de Montéllmar
Il n’y a pas que M. Buffet qui voit
des francs-maçons partout. C’est aussi
le cas du sous-lieutenant de Bernardi,
signalé comme s’étant livré à une
manifestation inconvenante à Monté-
limart, et qui a été mis en retrait
d’emploi. Nous croyons que personne
ne blâmera une mesure qui était jus
tifiée par les récits publiés, dont l’en
quête a prouvé l’exactitude. Nous
voulons bien qu’il y ait des circons
tances atténuantes, que le sous-lieu
tenant ait été plus animé que de cou
tume à la suite de quelque agape
joyeuse. Mais, dans l’intérêt de la dis
cipline, on ne pouvait laisser cette
incartade impunie.
Le gouvernement fait œuvre de sa
gesse en réprimant sévèrement ceux-
là qui, sans raison, jettent le trouble
dans notre armée. On ne saurait trop
louer le général de Gallifet de sa fer
meté, comme on ne peut que remer
cier M. Waldeck-Rousseau du tact
qu’il a déployé en rendant une sen
tence arbitrale qui a mis fin à la grève
du Creuzot.
*
* *
La guerre au Transvaal
Cette fois, c’est bien la guerre. Le
Transvaal, par un dernier scrupule,
n’a pas voulu faire acte de légitime
défense sans mettre l’Angleterre en
demeure de retirer ses troupes de la
frontière. L’ultimatum annoncé la
semaine dernière a été officiellement
remis lundi soir à l’agent britannique
à Pretoria, et le delai fixé par le
Transvaal, dans son ultimatum, a
expiré mercredi à cinq heures. Comme
l’Angleterre ne s’est naturellement
pas soumise aux conditions qui lui
étaient dictées, que, au contraire, les
mouvements de troupes vers les fron
tières ont continué de plus belle, tant
à Natal qu’au Cap, et que, pour toute
réponse, M. Conningham Greene a dû
remettre à M. Reitz une courte note
déclarant que l’Angleterre, regrettant
la décision de M. Kriiger, n’avait au
cune communication à lui faire, nous
devons, même en l’absence de nou
velles, considérer que la guerre est
actuellement déclarée en fait comme
en droit.
Les Boers ont donc dû envahir
jeudi soir le territoire anglais.
LA JUSTICE
D’où vient que la justice légale
apparaît aux yeux d’un grand nom
bre comme un épouvantail et à ceux
de la masse du peuple comme une
institution inutile et tracassière ?
Alors qu’elle devrait se présenter aux
esprits pareille à un rempart qui
protège les faibles et les opprimés
contre la tyrannie des toutes puis
sances, rempart qui fasse reculer le
crime et la tyrannie quels qu’ils soient
jusqu’aux profondeurs des ténèbres.
Le besoin de justice à tous les de
grés ne s’était jamais fait sentir avéc
autant d’acuité que de nos jourk
Cela vient que la conscience impré
cise de l’homme s’éclaire dans cer
tains milieux d’où elle se répercute
trop faiblement, il est vrai, sur la
collectivité, sous l’empire du dévé-
loppement de la science. Cela vient
surtout qu’à son éveil, la conscience
ne découvre autour d’elle que le
dédale des lois où la raison se perd,
et où elle n’aperçoit pas le fil conduc
teur d’Ariane.
Nous avons trop de lois embrouil
lées les unes par les autres, sans
méthode, sans principe essentiel, vi
sant toutes des particularités à l’infini,
et se contredisant parfois mutuelle
ment. C’est ce que l’on a appelé le
maquis de la procédure. Chaque fois
que l’on va commettre un acte, bon
ou mauvais, peu importe, il faut
s’arrêter longuement et méditer si
l’on ne tombe pas sous la férule dès
lois. L’honnête homme, pour une
peccadille, peut être frappé, tandis
que le coquin exulte en tournant les
difficultés. Tout est permis, hors ce
que la législation défend. L’esprit
intègre ne franchit pas quand même
la barrière du droit naturel, s’en
rapportant à la justice immanente,
la idis que le délinquant, faufilé dans
les mailles du code, triomphe. Ah !
députés, sénateurs et ministres, vous
auriez de la besogne pour réparer le
mal que certains d’entre vous ont
commis, pour mettre de l’ordre au
lieu du désordre et pour ramener la
loi vers des principes sages parce-
qu’ils puiseraient dans la sagesse de
la nature et non dans l’autorité théo
logique.
La réfection des codes s’impose
dans ce sens, mais qui la fera ? Où
trouverons-nous des philosophes et
des hommes d’Etat capables de l’en
treprendre? Or, on l’ajourna.
La procédure est longue et oné
reuse. L’huître des plaideurs est tou
jours dévorée par le rat de la fable
sous la peau duquel on reconnaît le
procédurier. Selon que l’on est puis
sant et que l’on peut soutenir les
frais énormes du procès, les jugements
de cour vous donneront peut-être sa
tisfaction, mais, pour le misérable,
l’équité est un vain mot.
Voilà, dans toutes ces choses, pour
quoi dame Thémis passe à bien des
yeux pour une mégère ; que tous les
citoyens forment une coalition contre
la loi, plutôt que d’y aider. On la
fraude partout, comme pour le timbre,
en faveur de l’individu contre la col
lectivité, parce que l’on y sent trop
d’injustice. Oui, il y a encore des
bastilles à renverser, ainsi que le
disait un de nos amis, il y a des pri
vilèges à abattre. Notaires, avoués,
huissiers, n’en avez-vous point ? 11
faut que la démocratie prenne à sa
tâche l’établissement de la gratuité
de la justice, c’est une des réformes
les plus importantes, comme l’avait
compris M. Brisson dans un projet
naguère soumis à la Chambre. Une
nation civilisée doit la justice au
peuple comme une mère le lait à ses
enfants.
Point n’est besoin d’astrologues, de
docteurs en phraséologie et d’une
armée de paperassiers du timbre pour
rendre une sentencé équitable, avec
des lois simples,- précises, tout en
maintenant les garanties légales, im
prescriptibles à chaque citoyen. Ces
mots seuls de « droit et de devoir»,
renferment la formule de toutes les
lois. Aussi, j’ai souvent admiré, dans
mon âme d’écolier, en lisant l’his
toire de France, la façon simple et
grande de Saint-Louis ou, si vous
voulez, Louis Neuf rendant la jus
tice sous un chêne, à Vincennes. La
sentence arbitrale de M. Waldeck-
Rousseau, décidée en faveur de dix
mille grévistes, n’emprunte-t-elle pas
ce caractère de justice pastorale, qui,
je le reconnais, pour être décrétée
exécutoire et sanctionnée par des pé
nalités ne saurait toutefois être sou
mise à l’arbitraire ni au despotisme
possibles d’un seul homme. Les con
ventions sociales devant prendre leur
accord. Mais rendue librement, la
sentence a eu force de loi dans un
immense procès où la loi n’aurait
représenté que la tyrannie, probable
ment.
En résumé, nous ne saurions main
tenir dans nos codes l’arbitraire des
lois remplaçant l’arbitraire de l’iudi-
vidu. De nombreux juriconsultes s’en
rendent compte et je ne suis que l’in
terprète d’opinions naissantes. Réfor
mons la magistrature, débarrassons-
nous du parasitisme judiciaire et rem
plaçons la légalité vicieuse par une
légalité plus conforme à nos aspira
tions, en ce sens qu’elle se rappro
chera davantage du droit naturel.
Nous en recueillerons plus de bien-
être.
Alf. Henri.
LA POLITIQUE
Nous avons une commission du
budget qui se reunit d’une façon
plus ou moins régulière ; qui n’est,
d’ailleurs, jamais au complet, qui
meme, le plus souvent, ne comprend
pas la moitié de ses membres, qui
arrête les plus graves résolutions, qui
taille un peu au hasard dans les cré
dits, qui opère des réformes adminis
tratives par voie budgétaire, ou qui
même modifie l’économie d’une loi
par voie de simples réductions.
La commission actuelle n’a pas, du
reste, cette spécialité ; elle ne fait que
suivre l’exemple de ses devancières,
£[ui était détestable ; aussi, la plupart
du temps, ses décisions ne sont pas
ratifiées par la Chambre; elle s’est
purement et simplement livrée à des
démonstrations sans lendemain ; elle
a, de la sorte, perdu une grande par
tie de son autorité : et elle n’a pas
peu contribué, grâce à cette fâcheuse
méthode, a compliquer le travail par
lementaire.
Autrefois, une commission du bud
get votait la loi de finances sans se
permettre des fantaisies politiques ;
elle établissait solidement le budget,
elle faisait prévaloir ses résolutions
devant la Chambre, et la discussion
publique n’était que la ratification des
décisions prises. On gagnait du temps,
ou avait un budget qui avait quelque 1
apparence de solidité, on était d’accord
pour écarter tous les amendements
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Prix des Insertions :
,. 25 centimes la ligne
50 »
On traite à forfait
Querelles de Prêtres
Le Diable en Rit
M. Jean de Bonnefon, en un fort
intéressant article publié dans le
Journal du 5 Octobre, nous narre
une curieuse histoire qui vaut vrai
ment la peine d’être redite et com
mentée. Voici :
Un jour, aux îles Saint-Pierre et
Miquelon, arrivèrent des moines
confits dans leur sainteté. Ils repré
sentaient « l’Œuvre de Mer ». Ils
s’installèrent à Saint-Pierre, puis,
profitant d’une absence de l’évêque,
voulurent ériger une chapelle et y
célébrer la messe. Or, le Concordat
ne permet l’érection d’une chapelle
que lorsque la paroisse dans laquelle
elle doit être édifiée est trop grande
ou que les limites n’en sont pas dé
finies, ce qui n’est pas le cas pour
la petite île de Saint-Pierre. Les
prêtres séculiers protestèrent. Les
moines sortirent alors une permis
sion -de Rome. Ce voyant, les “pré-*’
très se plaignirent à leur évêque.
Celui-ci, lésé dans son autorité de
prélat reconnu par l’Eglise et payé
par l’Etat, convaincu d’ailleurs que
les apôtres de « l’Œuvre de Mer »
voulaient lui faire une concurrence
déloyale et le berner, ordonna la
fermeture de la chapelle. Jusque là
rien que de très ordinaire en par
tant de ce principes que deux repré
sentants de Jésus-Christ ne peuvent
se voir sans que. l’un essaie de man
ger l’autre. Mais où l’histoire se
corse, c’est dans la suite.
M. Tiberi, évêque de Saint-Pier
re, avait affaire à forte partie. Le
27 mai 1899, il recevait du préfet
de la propagande, le cardinal Le-
dochowski, une lettre impérieuse
dans laquelle ce dernier lui enjoi
gnait de retirer sa défense et d’ac
cepter les moines. Le21 juillet 1899,
le cardinal Ledociiowski réitéra ses
ordres à l’évêque français, lui mar
quant en même temps un hautain
mécontentement. Et comme M. Ti
beri ne paraissait pas enthousiasmé
de s’humilier, le secrétaire de la
Propagande, en date da 12 août
1899, le ménagea en ces termes :
< Mais si pourtant je n’avais pas le
plaisir de recevoir la nouvelle que
j’attends (la soumission de l’évêque
aux moines), je me verrais forcé,
quoique à regret, de faire exécuter
les ordres donnés en dehors de vous,
ce que j’ai évité jusqu’ici, pour
tous ménager le prestige de votre
autorité ».
Je passe sur la réponse de M. Ti
beri à ce dernier factium. Au lieu
de protester à Rome et de prier
qu’on fit une enquête, M. Tiberi
aurait mieux fait (et, en cela, je
suis de l’avis de M. de Bonnefon),
de demander au Ministre des cultes
de continuer la conversation. C’eût
été plus digne pour lui et pour le
prestige du gouvernement français.
Mais on ne s’avise pas de tout et les
évêques oublient volontiers qu’ils
sont des fonctionnaires et, qu’en
cette qualité, ils doivent demander
aide et protection à l’Etat qui les
subventionne.
L’histoire ne va pas plus loin jus
qu’à présent, mais il y a déjà ma
tière à de fortes réflexions.
Comme confraternité d’abord,
c’est plutôt maigre. Ainsi, dans la
plainte des prêtres de St-Pierre à
M. Tiberi, il y a nombre de réflexions
désagréables sur les moines. Ceux-
ci, d’après cette épître, sont jugés
sévèrement par la population de
Saint-Pierre. On traite leur œuvre
de « blague », leur chapelle de
« repaire de déserteurs ». Le ba
teau-hôpital, qu’ils ont construit
avec le produit de quêtes nombreu
ses, est si peu utile qu’il apporte 8
malades sur 200. En un mot et je
prends les termes des curés et vi
caires de St-Pierre : « l’Œuvre de
Mer » est une « œuvre manquée ».
Et maintenant, le lecteur veut-il
savoir quelle est la nationalité du
cardinal qui donne des ordres à nos
« Monseigneur » français sans qu’il
en ait le droit et sans que ceux-ci
protestent auprès du Ministre des
cultes. C’est un allemand, notre
pire ennemi, le candidat de la triple
alliance à la Papauté.
Et si le lecteur insatiable veut
s’inquiéter de l’ordre de moines qui
a pour protecteur le plus haineux
adversaire la France à Rome, nous
ne pourrons lui cacher que cet
ordre est l’ordre des Assomption-
nistes, patriotes dans les feuilles
< Les Croix de Paris et de Pro
vince », mais internationalistes et,
au besoin, francophobes lorsqu’il
s’agit de leurs intérêts.
Il est compréhensible, du reste,
que le pape et les cardinaux ne re
fusent pas leur appui aux Assomp-
tionnistes. Ennemis de la France
parce qu’elle est d’esprit révolu
tionnaire, ils ne peuvent qu’être
reconnaissants à ces moines, car
ceux-ci ont failli anéantir dans
l’ineptie catholico - antisémite la
claire et intelligente bonté de notre
race. Ils ont créé un patriotisme
spécial, fait de boue et de sang,
une sorte d’hystérie religieusement
meurtrière, dont les suites auraient
pu perdre à jamais la patrie.
C’est pourquoi je me joins à M.
de Bonnefon pour demander au
Ministre des cultes de prendre la
défense de M. Tiberi contre les
moines de guerre civile qui, lors
qu’ils n’ont plus de juifs à se mettre
sous la dent, spolient les évêques.
Et on dit que les loups ne se
mangent pas entre eux !
Mais il y aurait une décision à
prendre qui finirait logiquement
cet incident et empêoherait le re
tour de faits semblables. Ce serait
d’expulser les jésuites (comme je l’ai
demandé en de précédents articles),
et de dissoudre définitivement toute
cette moinerie dont l’extension et la
vitalité menacent gravement notre
République.
Jean SERC.
LA SEMAINE
La Haute-Cour
L’iuterrogatoire des inculpés de la
Haute Cour s’est poursuivi sans inci
dents toute la semaine. Seul, M. An
dré Buffet a laissé entre les mains de
M. Bérenger une déclaration, n’ayant
pas voulu subir un interrogatoire. Il
entend se défendre publiquement.
C’est son droit... Mais auparavant,
il*a condamné la justice politique, et
il a cru flétrir ses juges en disant
qu’ils étaient des francs-maçons et
qu’ils devaient nécessairement se sou
mettre à un gouvernement qui, en le
faisant arrêter, a obéi à un ordre de
la franc-maçonnerie.
★
* *
L’incartade de Montéllmar
Il n’y a pas que M. Buffet qui voit
des francs-maçons partout. C’est aussi
le cas du sous-lieutenant de Bernardi,
signalé comme s’étant livré à une
manifestation inconvenante à Monté-
limart, et qui a été mis en retrait
d’emploi. Nous croyons que personne
ne blâmera une mesure qui était jus
tifiée par les récits publiés, dont l’en
quête a prouvé l’exactitude. Nous
voulons bien qu’il y ait des circons
tances atténuantes, que le sous-lieu
tenant ait été plus animé que de cou
tume à la suite de quelque agape
joyeuse. Mais, dans l’intérêt de la dis
cipline, on ne pouvait laisser cette
incartade impunie.
Le gouvernement fait œuvre de sa
gesse en réprimant sévèrement ceux-
là qui, sans raison, jettent le trouble
dans notre armée. On ne saurait trop
louer le général de Gallifet de sa fer
meté, comme on ne peut que remer
cier M. Waldeck-Rousseau du tact
qu’il a déployé en rendant une sen
tence arbitrale qui a mis fin à la grève
du Creuzot.
*
* *
La guerre au Transvaal
Cette fois, c’est bien la guerre. Le
Transvaal, par un dernier scrupule,
n’a pas voulu faire acte de légitime
défense sans mettre l’Angleterre en
demeure de retirer ses troupes de la
frontière. L’ultimatum annoncé la
semaine dernière a été officiellement
remis lundi soir à l’agent britannique
à Pretoria, et le delai fixé par le
Transvaal, dans son ultimatum, a
expiré mercredi à cinq heures. Comme
l’Angleterre ne s’est naturellement
pas soumise aux conditions qui lui
étaient dictées, que, au contraire, les
mouvements de troupes vers les fron
tières ont continué de plus belle, tant
à Natal qu’au Cap, et que, pour toute
réponse, M. Conningham Greene a dû
remettre à M. Reitz une courte note
déclarant que l’Angleterre, regrettant
la décision de M. Kriiger, n’avait au
cune communication à lui faire, nous
devons, même en l’absence de nou
velles, considérer que la guerre est
actuellement déclarée en fait comme
en droit.
Les Boers ont donc dû envahir
jeudi soir le territoire anglais.
LA JUSTICE
D’où vient que la justice légale
apparaît aux yeux d’un grand nom
bre comme un épouvantail et à ceux
de la masse du peuple comme une
institution inutile et tracassière ?
Alors qu’elle devrait se présenter aux
esprits pareille à un rempart qui
protège les faibles et les opprimés
contre la tyrannie des toutes puis
sances, rempart qui fasse reculer le
crime et la tyrannie quels qu’ils soient
jusqu’aux profondeurs des ténèbres.
Le besoin de justice à tous les de
grés ne s’était jamais fait sentir avéc
autant d’acuité que de nos jourk
Cela vient que la conscience impré
cise de l’homme s’éclaire dans cer
tains milieux d’où elle se répercute
trop faiblement, il est vrai, sur la
collectivité, sous l’empire du dévé-
loppement de la science. Cela vient
surtout qu’à son éveil, la conscience
ne découvre autour d’elle que le
dédale des lois où la raison se perd,
et où elle n’aperçoit pas le fil conduc
teur d’Ariane.
Nous avons trop de lois embrouil
lées les unes par les autres, sans
méthode, sans principe essentiel, vi
sant toutes des particularités à l’infini,
et se contredisant parfois mutuelle
ment. C’est ce que l’on a appelé le
maquis de la procédure. Chaque fois
que l’on va commettre un acte, bon
ou mauvais, peu importe, il faut
s’arrêter longuement et méditer si
l’on ne tombe pas sous la férule dès
lois. L’honnête homme, pour une
peccadille, peut être frappé, tandis
que le coquin exulte en tournant les
difficultés. Tout est permis, hors ce
que la législation défend. L’esprit
intègre ne franchit pas quand même
la barrière du droit naturel, s’en
rapportant à la justice immanente,
la idis que le délinquant, faufilé dans
les mailles du code, triomphe. Ah !
députés, sénateurs et ministres, vous
auriez de la besogne pour réparer le
mal que certains d’entre vous ont
commis, pour mettre de l’ordre au
lieu du désordre et pour ramener la
loi vers des principes sages parce-
qu’ils puiseraient dans la sagesse de
la nature et non dans l’autorité théo
logique.
La réfection des codes s’impose
dans ce sens, mais qui la fera ? Où
trouverons-nous des philosophes et
des hommes d’Etat capables de l’en
treprendre? Or, on l’ajourna.
La procédure est longue et oné
reuse. L’huître des plaideurs est tou
jours dévorée par le rat de la fable
sous la peau duquel on reconnaît le
procédurier. Selon que l’on est puis
sant et que l’on peut soutenir les
frais énormes du procès, les jugements
de cour vous donneront peut-être sa
tisfaction, mais, pour le misérable,
l’équité est un vain mot.
Voilà, dans toutes ces choses, pour
quoi dame Thémis passe à bien des
yeux pour une mégère ; que tous les
citoyens forment une coalition contre
la loi, plutôt que d’y aider. On la
fraude partout, comme pour le timbre,
en faveur de l’individu contre la col
lectivité, parce que l’on y sent trop
d’injustice. Oui, il y a encore des
bastilles à renverser, ainsi que le
disait un de nos amis, il y a des pri
vilèges à abattre. Notaires, avoués,
huissiers, n’en avez-vous point ? 11
faut que la démocratie prenne à sa
tâche l’établissement de la gratuité
de la justice, c’est une des réformes
les plus importantes, comme l’avait
compris M. Brisson dans un projet
naguère soumis à la Chambre. Une
nation civilisée doit la justice au
peuple comme une mère le lait à ses
enfants.
Point n’est besoin d’astrologues, de
docteurs en phraséologie et d’une
armée de paperassiers du timbre pour
rendre une sentencé équitable, avec
des lois simples,- précises, tout en
maintenant les garanties légales, im
prescriptibles à chaque citoyen. Ces
mots seuls de « droit et de devoir»,
renferment la formule de toutes les
lois. Aussi, j’ai souvent admiré, dans
mon âme d’écolier, en lisant l’his
toire de France, la façon simple et
grande de Saint-Louis ou, si vous
voulez, Louis Neuf rendant la jus
tice sous un chêne, à Vincennes. La
sentence arbitrale de M. Waldeck-
Rousseau, décidée en faveur de dix
mille grévistes, n’emprunte-t-elle pas
ce caractère de justice pastorale, qui,
je le reconnais, pour être décrétée
exécutoire et sanctionnée par des pé
nalités ne saurait toutefois être sou
mise à l’arbitraire ni au despotisme
possibles d’un seul homme. Les con
ventions sociales devant prendre leur
accord. Mais rendue librement, la
sentence a eu force de loi dans un
immense procès où la loi n’aurait
représenté que la tyrannie, probable
ment.
En résumé, nous ne saurions main
tenir dans nos codes l’arbitraire des
lois remplaçant l’arbitraire de l’iudi-
vidu. De nombreux juriconsultes s’en
rendent compte et je ne suis que l’in
terprète d’opinions naissantes. Réfor
mons la magistrature, débarrassons-
nous du parasitisme judiciaire et rem
plaçons la légalité vicieuse par une
légalité plus conforme à nos aspira
tions, en ce sens qu’elle se rappro
chera davantage du droit naturel.
Nous en recueillerons plus de bien-
être.
Alf. Henri.
LA POLITIQUE
Nous avons une commission du
budget qui se reunit d’une façon
plus ou moins régulière ; qui n’est,
d’ailleurs, jamais au complet, qui
meme, le plus souvent, ne comprend
pas la moitié de ses membres, qui
arrête les plus graves résolutions, qui
taille un peu au hasard dans les cré
dits, qui opère des réformes adminis
tratives par voie budgétaire, ou qui
même modifie l’économie d’une loi
par voie de simples réductions.
La commission actuelle n’a pas, du
reste, cette spécialité ; elle ne fait que
suivre l’exemple de ses devancières,
£[ui était détestable ; aussi, la plupart
du temps, ses décisions ne sont pas
ratifiées par la Chambre; elle s’est
purement et simplement livrée à des
démonstrations sans lendemain ; elle
a, de la sorte, perdu une grande par
tie de son autorité : et elle n’a pas
peu contribué, grâce à cette fâcheuse
méthode, a compliquer le travail par
lementaire.
Autrefois, une commission du bud
get votait la loi de finances sans se
permettre des fantaisies politiques ;
elle établissait solidement le budget,
elle faisait prévaloir ses résolutions
devant la Chambre, et la discussion
publique n’était que la ratification des
décisions prises. On gagnait du temps,
ou avait un budget qui avait quelque 1
apparence de solidité, on était d’accord
pour écarter tous les amendements
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