Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1899-08-12
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 août 1899 12 août 1899
Description : 1899/08/12 (N172). 1899/08/12 (N172).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263371r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
4“ Année — S® 172.
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
Samedi 12 AoM 1899.
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure . par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET REDACTION
15, RUE GASIMXR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction F. thoxumeket
L’Imprimeur-Gérant F. ILE ROY
MBMWWBBMga———
Prix des Insertions :
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50 »
On traite à forfait
L’Impôt
sur
Un journal qui n’aura jamais cessé
les
sion scupuleuse avec laquelle
charges ont été établies.
Quant à la perception, elle est
toute simple, elle se fait d’après la
déclaration qui est produite par le
contribuable, sous la garantie d’une
commission de contrôle nommée par
d’être partisan de l’impôt sur le la commune et qui agit au nom de
revenu, quand il sera appliqué à la l’Etat.
satisfaction générale (comme il est
maintenant favorable à la révision
après l’avoir combattue), le Petit
Havre , puisqu’il faut le nommer,
écho des mêmes inepties, s’attachait,
avant-hier, sous la signature de M.
Nadal, à dénigrer la réforme si utile
de l’assiette de l’impôt. Il allait,
pour donner un point d’appui à sa
verve, tirer argument d’une opinion
émise par l’empereur Guillaume II
sur le fisc, dans un récent discours.
Bien entendu, il n’était pas plus
question de l'impôt sur le revenu
que du Grand Turc dans la pensée
du kaiser allemand. Il s’agissait,
tout simplement, d’une boutade lan
cée contre l’abus du fonctionnarisme
dans un pays où il est moins déve
loppé que dans le nôtre, quand Guil
laume II disait : « Je hais le fisc à
cause de son exagération bureau
cratique >. Il a fallu toute la bonne
volonté de M. Nadal et aussi la pé
nurie d’arguments valables pour
interpréter les choses ainsi qu’il Ta
fait.
De l’enquête à laquelle nous nous
sommes livré et des renseignements
que nous tenons de source sûre,
l’impôt sur le revenu existe en
Prusse, de même que dans toute
l’Allemagne, sans entrave, sans
vexation, sans inquisition et de la
façon la plus simple du monde. Na
turellement, ceux qui paient la forte
somme ne sont pas sans élever
quelque objection au système en
vigueur et c’est ce que semblait
reconnaître avec bonhomie l’empe
reur teuton ; mais est-ce que les
rédacteurs du Petit Havre ne font
pas eux-mêm3s la grimace quand le
percepteur leur présente la feuille
des contributions, quoiqu’ils la trou
vent parfaite ? Est-ce que les récri
minations de quelques-uns ne seraient
pas celles de la masse si le système
français était appliqué au-delà de
la Moselle ?
En Allemagne, l’impôt est pro
gressif, il commence aux revenus de
900 marks (soit 1,125 fr., le mark
valant 1 fr. 25), qui, jusqu’à 1,050
En cas de fausse déclaration, une
amende est appliquée au délinquant
et le taux de l’impôt est considéra
blement augmenté ; aussi les fraudes
sont-elles relativement rares. Le
gouvernement, d’ailleurs, peut aisé
ment vérifier les fortunes par les
successions, quand un décès sur
vient, et l’arriéré des impôts est
perçu sur l’héritage avec des inté
rêts de retard qui 11 ’encouragent
pas les abus.
Les fonctionnaires ont, en Alle
magne, la bonne habitude de payer
des impôts sur leur traitement,
comme un simple particulier, ce qui
n’a[pas lieu chez nous. De plus, tout
allemand qui se fixe à l’étranger,
acquitte encore, durant deux ans,
ses contributions. N’entrent pas,
seuls, en ligne de compte les revenus
produits par les terrains possédés
par les Allemands en pays étranger.
Voilà, rapidement esquissé, le
système fiscal de l’Allemagne qui
constitue la grosse partie du budget
de l’empire voisin. Il existe bien
quelques impôts secondaires, mais
insignifiants, tels que les redevances
à l’Eglise et les taxes scolaires.
Nos charges nous écrasent, para
lysent notre agriculture, notre com
merce et notre industrie. L’Allema
gne, T Angleterre, comme toutes les
nations qui ont assumé l’impôt sur le
revenu, malgré des dépenses à peu
près équivalentes aux nôtres, en
supportent allègrement le fardeau
et nous livrent sur tous les points
du globe une concurrence mortelle
parce que leurs organes vitaux ne
sont point ankylosés comme les
nôtres.
M. Nadal, nous n’avons pas aban
donné nos projets de réforme, ni nos
espérances, quoique vous en disiez.
Si des circonstances impérieuses ne
nous avaient contraint à des luttes
quotidiennes, que' vous n’avez pas
connues, pour le maintien de la Ré
publique, nous en aurions poursuivi
la réalisation. Mais ce n’est que
partie remise. J’ose espérer que les
électeurs en feront un article de foi
« ECLAIR »
ET CE « CANAILLE DE D... »
Au début de l’affaire Dreyfus,
l’Eclair publia une pièce figurant au
fameux dossier secret. 11 y était ques
tion de « ce canaille de D .. ». Le
journal antirevisionniste avait rem
placé cette phrase qui ne lui semblait
pas assez précise par celle-ci : « Déci
dément, cet animal de Dreyfus devient
trop exigeant ».
Pendant longtemps, on chercha
l’auteur de cet article quand, ces
jours-ci, Y Aurore mit en cause M. Be-
lon, rédacteur du Petit Journal. Celui-
ci protesta et, hier, Y Eclair a publié
la déposition de son directeur, M. Sa
batier, devant le capitaine Tavernier.
11 en résulte que l’auteur de l’ar
ticle est M. Lissajoux, rédacteur du
Petit Journal , et non M. Belon. Ce
monsieur vint trouver le directeur de
Y Eclair y lui donna communication de
la pièce du dossier secret et lui fournit,
à ce sujet, plusieurs renseignements
qui furent utilisés par la rédaction de
YEclair pour faire son fameux article.
Pendant longtemps, le document tron
qué publié par Y Eclair fut, aux yeux
des antirevisionnistes, la preuve la
plus décisive de la culpabilité de
Dreyfus. Ab uno disce omnes.
LETTRE DE RENNES
{de notre envoyé spécial)
marks paient 6 marks, soit environ ! républicaine dans leurs consuba-
fr. 0,60 %. Il s’élève par cédules,
suivant un tableau établi à : 3 % sur
un revenu de 9,500 à 10,500 marks.
11 est de 4,000 marks sur un revenu
de 100,000 à 105,000 marks, soit de*
3,80 à 4%.
On le voit, il suit une échelle
sagement établie, dont les degrés ! que tous doivent contribuer, propor-
différentiels ou échelons sont de plus | tionnellement à leur revenu, aux
en plus frappés à mesure qu’ils J charges de l’Etat et j’ajoute, suivant
atteignent le faîte de la fortune. j sa pensée, non d’après leurs besoins.
On comprendra aisément cette j Vos paroles, M. Nadal, sont des
métaphore qui marque la progrès-; actes de réaction. Alf. HENRI.
tions.
Agir autrement serait se reporter
à plus de cent aimées en arrière,
vers l’ancien régime, de triste mé
moire, avant que l’Assemblée cons
tituante n’ait proclamé solennelle
ment, sous la Révolution française,
La première audience du Conseil de guerre
Lundi 7 août 1899, midi.
Je sors de Taudience du Conseil de
guerre qui va j uger Dreyfus, et je suis
encore troublé par l’émotion que j’y
ai ressentie.
Je ne vais pas vous faire un compte
rendu de cette audience qui aurait le
grand tort, lorsqu’il paraîtrait dans
le Réveil du Havre, d'être en retard de
quelques jours puisque, provisoire
ment, nous ne sommes qu’hebdoma
daire, mais je veux vous conter, sans
perdre un instant, les sensations par
lesquelles je viens de passer.
Dreyfus est innocent ! avons-nous
crié cent fois à nos lecteurs, oui !
certes oui ! ! Dreyfus est innocent, et
j’affirme que s’il s’était trouvé là un
Français n’ayant jamais rien lu de
l’Affaire, n’ayant point l’esprit et le
jugement atrophiés par les polémi
ques, les racontars et les mensonges
qui nous sont servis depuis tantôt
deux ans et demi, ce Français, unique
en son genre, n’aurait pas douté un
seul instant que les juges de 1894
avaient condamné un innocent.
Rien, en effet, n’était plus impres
sionnant, rien n’était plus significatif
que de voir ce grand vieillard tout
| blanc, âgé de trente-neuf ans à peine
• qui, dans sa tenu'e de capitaine d’ar-
tilierie regardait hautement et fière
ment ses juges en leur criant son
innocence, cette innocence qu’il ne
cesse d’affirmer depuis cinq années
quels que soient les terribles circon
stances qu’il a dû traverser.
Je rTai jamais ou émotion plus poi
gnante que lorsque j’ai vu cet homme
qui, depuis cinq ans, subit un martyr
sans précédent, s’écrier d’une voix
forte et claire : « Je le jure, de par
l’honneur de ma femme et de mes
enfants, je suis innocent ! » et malgré
les yeux obstinément rivés au sol,
ainsi que ceux d’ailleurs de chacun
des dix généraux, venus là en grande
tenue pour faire encore plus de fracas
de leurs plumes blanches et de leurs
étoiles qui finiront bien, espèrent-ils,
par impressionner les jeunes capitaines
ou commandants qui composent le
Conseil de guérie.
Et il en sera ainsi tant que dureront
les protestations d'innocence de Drey
fus, protestations faites aV^c le plus
grand accent de sincérité, d’une voix
mâle, ferme, énergique, par moments
altérée par les sanglots qui remontent
à la gorge de ce malheureux pendant
qu’il se débat, non contre des preuves,
mais contre les haines criminelles
créées contre lui.
L’on a à cet instant si bien la sensa
tion que les vrais coupables sont sur
les bancs des témoins que chacun, les
larmes aux yeux, se retourne instinc
tivement, et tous ces regards mouillés
dirigés vers eux, sont autant de muets
et redoutables reproches.
Quel est le traître, quel est le crimi
nel si noir, débarquant de son bagne,
qui même, un seul moment, eut pu
faire naître semblable concours de
sympathie dans une salle composée
d’éléments si divers.
Voici ce que je tenais à vous dire,
voici le seul point intéressant de la
première audience ; Dreyfus a produit
la sensation qu’il était bien innocent,
et tous les gens de bonne foi qui l’ont
vu et entendu ce mafin, n’ont plus
aucun doute à cet égard.
Lorsque je dis que c’est là le seul
point intéressant, il en est un autre
que je tiens à relever, car il m’a sem
blé bien singulier :
L’on sait que le Q de Beaurepaire
a raconté, dans Y Echo de Paris et un
peu partout, que le colonel Jouault,
président du Conseil de guerre, l’avait
évincé, refusant de prendre au sérieux
l’enquête qu’il a élucubrée avec tant
de soin...
Or, au début de l’audience, le
même colonel Jouault a annoncé
qu’usant de son pouvoir discrétion
naire, il avait fait citer une quinzaine
de témoins, lesquels sont ceux du seul capitaine de gendarmerie l’accom
pagnait, ce qui paraît suffisant quand
on songe qu’il passe entre deux baies
de fantassins.
M b Démangé, que j’ai pu voir à la
sortie de la séance, me confirme que
c’est aujourd’hui samedi matin, à six
heures, que reprennent les débats publics.
LE CONSEIL DE GUERRE
DE RENNES
L’audience de jeudi
La troisième matinée de huit clos
a ressemblé, pour les spectateurs du
dehors, aux deux premières. Aussi,
aurai-je tôt fait de vous mettre au
courant quand je vous aurai dit que
l’examen du dossier militaire est ter
miné et qu’à dix heures a commencé
l’étude du dossier diplomatique. A dix
heures, en effet, après avoir remis en
lieu sûr la dernière des pièces placées
avec commentaires sous les yeux des
membres du Conseil, de la défense et
du capitaine Dreyfus, le général Cha-
moin quittait la salle des fêtes du lycée
et, quelques minutes plus tard, après
une courte suspension de séance, M.
Paléologue lui succédait.
Le dossier diplomatique, non moins
célèbre que le dossier militaire, était
alors apporté avec toutes les garanties
de discrétion que l’on doit à un dos*
sier aussi respectable ; il était déposé
par le greffier Goupois sur la table au
classique tapis vert autour de laquelle
s’étaient assis le colonel Jouaust et
ses assesseurs, le commandant Car
rière et son greffier, M es Labori, Dé
mangé et leur client, qui, entre pa-
ranthèse, subit ces formalités prélimi
naires, quoique essentielles, avec un
ressort incroyable, et aussitôt, M.
Paléologue entamait sa démonstra
tion.
Tandis que tout cela se passait dans
la salle du Conseil, les journalistes
parcouraient l’avenue de la gare où
stationnent quelques curieux incorri
gibles qui ne peuvent rien voir et qui
le savent, ce qui ne les empêche pas
d’être là tous les matins, à la même
heure et par les mêmes heures d’at
tente.
Bref, à midi, suivant l’habitude
prise, le capitaine Dreyfus était ra
mené à la prison militaire ; seulement
on avait aujourd’hui supprimé, pour
les quelques pas qu’il était obligé de
faire, les quatre gendarmes qui l’en
cadraient les jours précédents; un
moi mon
regard
s’est dirigé vers
l’autre accusé, le général Mercier,
mais à celui-là je n’ai pu rencontrer
même Q de Beaurepaire.
Que cela veut-il bien vouloir dire???
J’ai entendu des personnes à Rennes
qui disaient tout bas que l’on aurait
bien voulu rouler la défense !
Ne faut-il pas s’attendre à tout
depuis 1894 ?
Cette contradiction plutôt curieuse
était vivement commentée à la sortie
de Taudience dans le groupe des
Dreyfusistes, car il est inutile de
vous le dire, le groupement s’est fait
ici d’une façon naturelle et chacun a
pu retrouver facilement ses amis.
Cependant, à quelques pas des
groupes, aiiti-dreyfusard, je vois un
homme errer, cherchant un camarade
à qui causer, donnant force coups de
chapeau non rendus, tendant fré
quemment la main à des gens qui ne eü
veulent pas le reconnaître.
Je demande quel est cet homme
dont tout le monde s’éloigne comme
d’un pestiféré ?
C’est Lebon ! le tortionnaire, Le
bon, me répond-on !
Je comprends alors le dégoût qu’il
inspire, meme a ses peu recomman
dables amis.
Et je ne puis m’empêcher de dire à
voix haute :
La vérité est en marche !
La vérité parvient au but, et rien
ne peut l’arrêter.
FIAT LUX.
L’Anniversaire
du 10 Août
L’anniversaire de la journée du 10
août 1792, a été célébré, cette année,
par quelques rares républicains qui
comprennent toute l’importance
historique. Une forte leçon de civis
me et de pujr patriotisme en ressort.
La prise de la Bastille, le 14 juil
let 1789, nous avait conquis la
liberté ; Tannée suivante, la fête de
la Fédération semblait nous apporter
le concours généreux du roi et de la
cour. On se rappelle des solennelles
déclarations de Louis XYI et dej
Marie-Antoinette en faveur du parti
de la Révolution. Tristes mensonges "
la Cour, tout entière, complotait avec
l’étranger pour le rétablissement en
1
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
Samedi 12 AoM 1899.
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure . par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET REDACTION
15, RUE GASIMXR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction F. thoxumeket
L’Imprimeur-Gérant F. ILE ROY
MBMWWBBMga———
Prix des Insertions :
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50 »
On traite à forfait
L’Impôt
sur
Un journal qui n’aura jamais cessé
les
sion scupuleuse avec laquelle
charges ont été établies.
Quant à la perception, elle est
toute simple, elle se fait d’après la
déclaration qui est produite par le
contribuable, sous la garantie d’une
commission de contrôle nommée par
d’être partisan de l’impôt sur le la commune et qui agit au nom de
revenu, quand il sera appliqué à la l’Etat.
satisfaction générale (comme il est
maintenant favorable à la révision
après l’avoir combattue), le Petit
Havre , puisqu’il faut le nommer,
écho des mêmes inepties, s’attachait,
avant-hier, sous la signature de M.
Nadal, à dénigrer la réforme si utile
de l’assiette de l’impôt. Il allait,
pour donner un point d’appui à sa
verve, tirer argument d’une opinion
émise par l’empereur Guillaume II
sur le fisc, dans un récent discours.
Bien entendu, il n’était pas plus
question de l'impôt sur le revenu
que du Grand Turc dans la pensée
du kaiser allemand. Il s’agissait,
tout simplement, d’une boutade lan
cée contre l’abus du fonctionnarisme
dans un pays où il est moins déve
loppé que dans le nôtre, quand Guil
laume II disait : « Je hais le fisc à
cause de son exagération bureau
cratique >. Il a fallu toute la bonne
volonté de M. Nadal et aussi la pé
nurie d’arguments valables pour
interpréter les choses ainsi qu’il Ta
fait.
De l’enquête à laquelle nous nous
sommes livré et des renseignements
que nous tenons de source sûre,
l’impôt sur le revenu existe en
Prusse, de même que dans toute
l’Allemagne, sans entrave, sans
vexation, sans inquisition et de la
façon la plus simple du monde. Na
turellement, ceux qui paient la forte
somme ne sont pas sans élever
quelque objection au système en
vigueur et c’est ce que semblait
reconnaître avec bonhomie l’empe
reur teuton ; mais est-ce que les
rédacteurs du Petit Havre ne font
pas eux-mêm3s la grimace quand le
percepteur leur présente la feuille
des contributions, quoiqu’ils la trou
vent parfaite ? Est-ce que les récri
minations de quelques-uns ne seraient
pas celles de la masse si le système
français était appliqué au-delà de
la Moselle ?
En Allemagne, l’impôt est pro
gressif, il commence aux revenus de
900 marks (soit 1,125 fr., le mark
valant 1 fr. 25), qui, jusqu’à 1,050
En cas de fausse déclaration, une
amende est appliquée au délinquant
et le taux de l’impôt est considéra
blement augmenté ; aussi les fraudes
sont-elles relativement rares. Le
gouvernement, d’ailleurs, peut aisé
ment vérifier les fortunes par les
successions, quand un décès sur
vient, et l’arriéré des impôts est
perçu sur l’héritage avec des inté
rêts de retard qui 11 ’encouragent
pas les abus.
Les fonctionnaires ont, en Alle
magne, la bonne habitude de payer
des impôts sur leur traitement,
comme un simple particulier, ce qui
n’a[pas lieu chez nous. De plus, tout
allemand qui se fixe à l’étranger,
acquitte encore, durant deux ans,
ses contributions. N’entrent pas,
seuls, en ligne de compte les revenus
produits par les terrains possédés
par les Allemands en pays étranger.
Voilà, rapidement esquissé, le
système fiscal de l’Allemagne qui
constitue la grosse partie du budget
de l’empire voisin. Il existe bien
quelques impôts secondaires, mais
insignifiants, tels que les redevances
à l’Eglise et les taxes scolaires.
Nos charges nous écrasent, para
lysent notre agriculture, notre com
merce et notre industrie. L’Allema
gne, T Angleterre, comme toutes les
nations qui ont assumé l’impôt sur le
revenu, malgré des dépenses à peu
près équivalentes aux nôtres, en
supportent allègrement le fardeau
et nous livrent sur tous les points
du globe une concurrence mortelle
parce que leurs organes vitaux ne
sont point ankylosés comme les
nôtres.
M. Nadal, nous n’avons pas aban
donné nos projets de réforme, ni nos
espérances, quoique vous en disiez.
Si des circonstances impérieuses ne
nous avaient contraint à des luttes
quotidiennes, que' vous n’avez pas
connues, pour le maintien de la Ré
publique, nous en aurions poursuivi
la réalisation. Mais ce n’est que
partie remise. J’ose espérer que les
électeurs en feront un article de foi
« ECLAIR »
ET CE « CANAILLE DE D... »
Au début de l’affaire Dreyfus,
l’Eclair publia une pièce figurant au
fameux dossier secret. 11 y était ques
tion de « ce canaille de D .. ». Le
journal antirevisionniste avait rem
placé cette phrase qui ne lui semblait
pas assez précise par celle-ci : « Déci
dément, cet animal de Dreyfus devient
trop exigeant ».
Pendant longtemps, on chercha
l’auteur de cet article quand, ces
jours-ci, Y Aurore mit en cause M. Be-
lon, rédacteur du Petit Journal. Celui-
ci protesta et, hier, Y Eclair a publié
la déposition de son directeur, M. Sa
batier, devant le capitaine Tavernier.
11 en résulte que l’auteur de l’ar
ticle est M. Lissajoux, rédacteur du
Petit Journal , et non M. Belon. Ce
monsieur vint trouver le directeur de
Y Eclair y lui donna communication de
la pièce du dossier secret et lui fournit,
à ce sujet, plusieurs renseignements
qui furent utilisés par la rédaction de
YEclair pour faire son fameux article.
Pendant longtemps, le document tron
qué publié par Y Eclair fut, aux yeux
des antirevisionnistes, la preuve la
plus décisive de la culpabilité de
Dreyfus. Ab uno disce omnes.
LETTRE DE RENNES
{de notre envoyé spécial)
marks paient 6 marks, soit environ ! républicaine dans leurs consuba-
fr. 0,60 %. Il s’élève par cédules,
suivant un tableau établi à : 3 % sur
un revenu de 9,500 à 10,500 marks.
11 est de 4,000 marks sur un revenu
de 100,000 à 105,000 marks, soit de*
3,80 à 4%.
On le voit, il suit une échelle
sagement établie, dont les degrés ! que tous doivent contribuer, propor-
différentiels ou échelons sont de plus | tionnellement à leur revenu, aux
en plus frappés à mesure qu’ils J charges de l’Etat et j’ajoute, suivant
atteignent le faîte de la fortune. j sa pensée, non d’après leurs besoins.
On comprendra aisément cette j Vos paroles, M. Nadal, sont des
métaphore qui marque la progrès-; actes de réaction. Alf. HENRI.
tions.
Agir autrement serait se reporter
à plus de cent aimées en arrière,
vers l’ancien régime, de triste mé
moire, avant que l’Assemblée cons
tituante n’ait proclamé solennelle
ment, sous la Révolution française,
La première audience du Conseil de guerre
Lundi 7 août 1899, midi.
Je sors de Taudience du Conseil de
guerre qui va j uger Dreyfus, et je suis
encore troublé par l’émotion que j’y
ai ressentie.
Je ne vais pas vous faire un compte
rendu de cette audience qui aurait le
grand tort, lorsqu’il paraîtrait dans
le Réveil du Havre, d'être en retard de
quelques jours puisque, provisoire
ment, nous ne sommes qu’hebdoma
daire, mais je veux vous conter, sans
perdre un instant, les sensations par
lesquelles je viens de passer.
Dreyfus est innocent ! avons-nous
crié cent fois à nos lecteurs, oui !
certes oui ! ! Dreyfus est innocent, et
j’affirme que s’il s’était trouvé là un
Français n’ayant jamais rien lu de
l’Affaire, n’ayant point l’esprit et le
jugement atrophiés par les polémi
ques, les racontars et les mensonges
qui nous sont servis depuis tantôt
deux ans et demi, ce Français, unique
en son genre, n’aurait pas douté un
seul instant que les juges de 1894
avaient condamné un innocent.
Rien, en effet, n’était plus impres
sionnant, rien n’était plus significatif
que de voir ce grand vieillard tout
| blanc, âgé de trente-neuf ans à peine
• qui, dans sa tenu'e de capitaine d’ar-
tilierie regardait hautement et fière
ment ses juges en leur criant son
innocence, cette innocence qu’il ne
cesse d’affirmer depuis cinq années
quels que soient les terribles circon
stances qu’il a dû traverser.
Je rTai jamais ou émotion plus poi
gnante que lorsque j’ai vu cet homme
qui, depuis cinq ans, subit un martyr
sans précédent, s’écrier d’une voix
forte et claire : « Je le jure, de par
l’honneur de ma femme et de mes
enfants, je suis innocent ! » et malgré
les yeux obstinément rivés au sol,
ainsi que ceux d’ailleurs de chacun
des dix généraux, venus là en grande
tenue pour faire encore plus de fracas
de leurs plumes blanches et de leurs
étoiles qui finiront bien, espèrent-ils,
par impressionner les jeunes capitaines
ou commandants qui composent le
Conseil de guérie.
Et il en sera ainsi tant que dureront
les protestations d'innocence de Drey
fus, protestations faites aV^c le plus
grand accent de sincérité, d’une voix
mâle, ferme, énergique, par moments
altérée par les sanglots qui remontent
à la gorge de ce malheureux pendant
qu’il se débat, non contre des preuves,
mais contre les haines criminelles
créées contre lui.
L’on a à cet instant si bien la sensa
tion que les vrais coupables sont sur
les bancs des témoins que chacun, les
larmes aux yeux, se retourne instinc
tivement, et tous ces regards mouillés
dirigés vers eux, sont autant de muets
et redoutables reproches.
Quel est le traître, quel est le crimi
nel si noir, débarquant de son bagne,
qui même, un seul moment, eut pu
faire naître semblable concours de
sympathie dans une salle composée
d’éléments si divers.
Voici ce que je tenais à vous dire,
voici le seul point intéressant de la
première audience ; Dreyfus a produit
la sensation qu’il était bien innocent,
et tous les gens de bonne foi qui l’ont
vu et entendu ce mafin, n’ont plus
aucun doute à cet égard.
Lorsque je dis que c’est là le seul
point intéressant, il en est un autre
que je tiens à relever, car il m’a sem
blé bien singulier :
L’on sait que le Q de Beaurepaire
a raconté, dans Y Echo de Paris et un
peu partout, que le colonel Jouault,
président du Conseil de guerre, l’avait
évincé, refusant de prendre au sérieux
l’enquête qu’il a élucubrée avec tant
de soin...
Or, au début de l’audience, le
même colonel Jouault a annoncé
qu’usant de son pouvoir discrétion
naire, il avait fait citer une quinzaine
de témoins, lesquels sont ceux du seul capitaine de gendarmerie l’accom
pagnait, ce qui paraît suffisant quand
on songe qu’il passe entre deux baies
de fantassins.
M b Démangé, que j’ai pu voir à la
sortie de la séance, me confirme que
c’est aujourd’hui samedi matin, à six
heures, que reprennent les débats publics.
LE CONSEIL DE GUERRE
DE RENNES
L’audience de jeudi
La troisième matinée de huit clos
a ressemblé, pour les spectateurs du
dehors, aux deux premières. Aussi,
aurai-je tôt fait de vous mettre au
courant quand je vous aurai dit que
l’examen du dossier militaire est ter
miné et qu’à dix heures a commencé
l’étude du dossier diplomatique. A dix
heures, en effet, après avoir remis en
lieu sûr la dernière des pièces placées
avec commentaires sous les yeux des
membres du Conseil, de la défense et
du capitaine Dreyfus, le général Cha-
moin quittait la salle des fêtes du lycée
et, quelques minutes plus tard, après
une courte suspension de séance, M.
Paléologue lui succédait.
Le dossier diplomatique, non moins
célèbre que le dossier militaire, était
alors apporté avec toutes les garanties
de discrétion que l’on doit à un dos*
sier aussi respectable ; il était déposé
par le greffier Goupois sur la table au
classique tapis vert autour de laquelle
s’étaient assis le colonel Jouaust et
ses assesseurs, le commandant Car
rière et son greffier, M es Labori, Dé
mangé et leur client, qui, entre pa-
ranthèse, subit ces formalités prélimi
naires, quoique essentielles, avec un
ressort incroyable, et aussitôt, M.
Paléologue entamait sa démonstra
tion.
Tandis que tout cela se passait dans
la salle du Conseil, les journalistes
parcouraient l’avenue de la gare où
stationnent quelques curieux incorri
gibles qui ne peuvent rien voir et qui
le savent, ce qui ne les empêche pas
d’être là tous les matins, à la même
heure et par les mêmes heures d’at
tente.
Bref, à midi, suivant l’habitude
prise, le capitaine Dreyfus était ra
mené à la prison militaire ; seulement
on avait aujourd’hui supprimé, pour
les quelques pas qu’il était obligé de
faire, les quatre gendarmes qui l’en
cadraient les jours précédents; un
moi mon
regard
s’est dirigé vers
l’autre accusé, le général Mercier,
mais à celui-là je n’ai pu rencontrer
même Q de Beaurepaire.
Que cela veut-il bien vouloir dire???
J’ai entendu des personnes à Rennes
qui disaient tout bas que l’on aurait
bien voulu rouler la défense !
Ne faut-il pas s’attendre à tout
depuis 1894 ?
Cette contradiction plutôt curieuse
était vivement commentée à la sortie
de Taudience dans le groupe des
Dreyfusistes, car il est inutile de
vous le dire, le groupement s’est fait
ici d’une façon naturelle et chacun a
pu retrouver facilement ses amis.
Cependant, à quelques pas des
groupes, aiiti-dreyfusard, je vois un
homme errer, cherchant un camarade
à qui causer, donnant force coups de
chapeau non rendus, tendant fré
quemment la main à des gens qui ne eü
veulent pas le reconnaître.
Je demande quel est cet homme
dont tout le monde s’éloigne comme
d’un pestiféré ?
C’est Lebon ! le tortionnaire, Le
bon, me répond-on !
Je comprends alors le dégoût qu’il
inspire, meme a ses peu recomman
dables amis.
Et je ne puis m’empêcher de dire à
voix haute :
La vérité est en marche !
La vérité parvient au but, et rien
ne peut l’arrêter.
FIAT LUX.
L’Anniversaire
du 10 Août
L’anniversaire de la journée du 10
août 1792, a été célébré, cette année,
par quelques rares républicains qui
comprennent toute l’importance
historique. Une forte leçon de civis
me et de pujr patriotisme en ressort.
La prise de la Bastille, le 14 juil
let 1789, nous avait conquis la
liberté ; Tannée suivante, la fête de
la Fédération semblait nous apporter
le concours généreux du roi et de la
cour. On se rappelle des solennelles
déclarations de Louis XYI et dej
Marie-Antoinette en faveur du parti
de la Révolution. Tristes mensonges "
la Cour, tout entière, complotait avec
l’étranger pour le rétablissement en
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