Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1894-08-25
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 25 août 1894 25 août 1894
Description : 1894/08/25 (N159). 1894/08/25 (N159).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263358w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
i* Année — S° 159 — Samedi 25 Août i89i CINQ CENTIMES LE NUMÉRO I e Année - 8 Fructidor An 162 — N° 159.
L
Réveil du Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN-SOCIALISTE INDÉPENDANT
PRIX DES ABONNEMENTS
UN AN
Le Havre 3 fr.
Départements 4 fr.
•
SIX MOIS
2 fr.
2 50
1 ADMINISTRATION & RÉDAC1
1 15. RtTE CASIMIR-PÉRI
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît tous les
s „ Ni
'ION 1 PRIX DES INSERTIONS:
ïlR, 15 1 Annonces 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
Samedis gj On traite à Forfait
i
Deux
Poids et Deux Mesures
DEUX POIDS
ET
DEUX MESURES
En cette époque de déséquilibration politi
que et gouvernementale, qui semble être une
deuxième phase de l’ordre moral, nous assis
tons — en payant fort cher nos places, mal
heureusement — à une série de comédies
dépassant celles eréées journellement par nos
auteurs contemporains les plus abracada
brants.
Tout homme sensé ne peut retenir le rire en
voyant un ministre, dit à poigne, trembler
comme un enfant et, tel un aliéné atteint du
délire de la persécution, craindre de trouver
dans quiconque l’approche le ministricide qui
remplacera pour lui l’inexorable Àtropcs.
N’est-il pas curieux, cet homme d’Etat, atteint
de la colique qui fit entrer Plomplon dans la
célébrité, se tenant le ventre à deux mains,
inspectant minutieusement les draperies de
ses appartements et, sans doute, le soir, se
mettant a quatre pattes pour regarder sous le
lit si un anarchiste militant n’a pas pris la
place d’un ustensile plus intime?
La chose n’aurait qu’une importance secon
daire si d’honnêtes citoyens n’avaient à souf
frir mille vexations dont l’unique cause est
la terreur du président du Conseil.
A chaque instant, ce sont perquisitions
chez de braves gens inoffensifs, arrestations
de pauvres diables qu’un juge d’instruction
tourmente pendant quinze jours ou trois
semaines, et relâche ensuite sans même leur
tirer sa toque. . }
Et notez que les malheureux soupçonnés
d’anarchisme, emprisonnés sur une dénoncia
tion, souvent anonyme, parfois signée d’un
nom appartenant à un individu dont la mora
lité laisse beaucoup à désirer, sont traités plus
durement que les détenus incarcérés pour
crimes de droit commun. A ces derniers, pourvu
qu’ils fassent montre d’une certaine souplesse,
on accorde volontiers quelques faveurs ; au
régime alimentaire de la prison viennent
s’ajouter quelques douceurs : rôt, vin, tabac.
Du pain et de l’eau aux citoyens arrêtés par
erreur ; c'est bien assez pour les honnêtes
gens !
De tous ces complots ourdis dans l’ombre et
le mystère... de l’intérieur, on n’a pu, malgré
d’actives recherches (???) trouver la moindre
trace; à la police, on les ignore.N’existeraient-
ils que dans l’imagination surchauffée de
Dupuy ? C’est l’opinion générale, et nous la
partageons entièrement.
Nous avons dit, au commencement de cet
article, que les scènes d’un haut comique
auxquelles nous assistons appelaient le rire.
Certes, lorsqu’on envisage la chose superfi
ciellement, cela est vrai ; mais, si l’on songe
aux nombreuses victimes de l’affolement minis
tériel, on éprouve, malgré soi, une grande
tristesse..
Est-il possible, se demande-t-on, que dans
le pays qui vit éclore la Liberté, on puisse,
dépassant les prouesses de Josué, non arrêter
l’astre radieux, mais le forcer à aller du Cou
chant au Levant ? — Pauvre Phœbus ! tu ne
te doutais guère, qu’un jour, la politique
t’arracherait à la poésie. — Cependant, il est
indiscutable que nous marchons à reculons.
Le partisan le plus enragé de l’état de ehoses
actuel ne pourrait, quelque talent qu’il y
mette, nous dire quelle différence il y a entre
le régime présent et le règne de Louis XIV.
Quand quelqu’un gênait le Roi-Soleil ou un
de ses courtisans, vite une lettre de cachet; la
Bastille comptait un habitant de plus, et voilà
tout. Que votre femme plaise à un huissier de
Dupuy, il vous dénoncera comme anarchiste,
et crac !... les portes de la maison d’arrêt se
refermeront sur votre encombrante personne.
11 n’est peut-être pas mauvais, pour l’édifi
cation des électeurs, de mettre en regard de
cet abus formidable du pouvoir que la récente
loi sur la presse a mis aux mains de quelques
hommes, un abus non moins formidable de
protection.
Il y a huit ans, le préfet de l’Eure, M.
Barême, était assassiné en chemin de fer.
L’affaire fit un bruit énorme, la police, la
justice cherchèrent ou firent semblant de
chercher le coupable. On ne put le découvrir;
l’affaire fut classée.
Peu à peu, le bruit fait autour de cette
affaire s’était apaisé. On n’y pensait plus.
Mais voilà qu’il y a quelques jours, deux poli
ciers se prennent de querelle, des injures on
eh vient aux insinuations malveillantes; bref,
l’un d’eux écrit au chef de la sûreté que si on
on ne lui fait des excuses, il racontera tout ce
qu’il sait sur l’affaire Barême. Grand émoi à
la Préfecture ; les excuses demandées sont
faites — l’histoire ne dit pas si elles étaient
plates ou sonnantes —- procureur et préfet se
rendorment tranquillement.
Tout eut marché à souhait sans ces gredins
de journalistes qui veulent toujours savoir ce
qu’on leur cache.
Pour éviter un plus grand scandale, on nous
dit aujourd’hui, par l’entremise des feuilles
officieuses, que l’assassin est connu, que c’est
un magistrat, un juge, mais que, maintenant
qu’il est mort, on ne peut plus le poursuivre.
Il est bien extraordinaire qu’on ait attendu
la mort de l’assassin pour déclarer qu’on le
connaissait. Il y a donc deux poids et deux
mesures ?
Et dire que ce juge assassin a peut-être
continué à siéger et à condamner des malheu
reux bien moins coupables que lui.
Quoi qu’il en soit, ceux qui l’ont épargné
ont commis une mauvaise action dont ils
doivent compte à la justice, et nous espérons
qu’il se trouvera des magistrats pour leur
infliger le châtiment qu’ils ont mérité.
Que pense le pays de ce singulier partisan
du gouvernement qui, commentant dans
un article furibond le verdict du jury
dans le procès des trente, excite les compagnons
à faire sauter en l’air les tripes des bons jurés.
C’est là de la provocation au crime ou,alors,
nous renonçons à comprendre le Français.
Comme il s’agit d’un ami du pouvoir, pas
de poursuites. Que fait donc le parquet? Sans
doute, il attend des ordres d’en haut, il guette
un signe de son Omnipotence Dupuy.
A la rentrée du Parlement, messieurs les
ministres auront, ce nous semble, des explica
tions à fournir. Il leur faudra des jarrets
d’acier pour franchir les obstacles amoncelés
sous leurs pas. S’ils les sautent, ce ne sera pas
sans attrapper quelques entorses. Depuis le
temp* qu’ils en donnent à la Constitution^ ce
sera bien leur tour.
Un projet de loi en deux articles s’impose :
l’un obligeant Ta justice à faire connaître au
dénoncé le nom du délateur ; l’autre permet
tant à la victime d’une erreur judiciaire ou
d’une dénonciation anonyme d’obtenir des
dommages-intérêts de l’Etat.
L’halluciné Dupuy s’y opposera ; si on passe
outre, nous y aurons gagné d’être débarrassés
de lui d’abord, et ensuite de ne pas voir, en
République, Thémis avec un bandeau trans
parent sur les yeux.
Pierre MÉRITEL.
RECTIFICATION
Par une erreur de mise en page, un article de
notre dernier numéro a été légèrement dénaturé,
c’est l’article intitulé : Tremblons, Amis! relatif
aux insinuations du Préfet Hendlé. La dernière
partie qui commente son attitude menaçante d’il
y a deux ans au banquet de Frascati est seule
sortie de notre plume ; la totalité de ce qui pré
cède a été empruntée à nos amis de la Petite
République.
Qu’ils reçoivent toutes nos excuses de cet invo
lontaire plagiat.
Les Gaietés de la Semaine
Que de conspirations, Bon Dieu, que de conspi
rations ! ^
La police est littéralement sur les dents et ne
sait plus à quel complot se vouer.
Le premier part de Lugano où des gens que
personnes ne connaît et qui se réunissent dans un
endroit qu’il a été impossible de déterminer, ont,
paraît-il, tiré au sort le nom du compagnon chargé
d’envoyer M. Casimir-Périer présider dans un
monde meilleur.
La découverte de cette conspiration fait le plus
grand honneur aux policiers, surtout lorsque l’on
sait que tant de malfaiteurs, sans parler d Arton,
dont on possède le signalement leur échappent si
facilement.
Des mauvaises langues prétendent, mais je ne
veux pas les croire, que cette conspiration qu’il
est impossible de ne pas qualifier de secrète, au
rait été dévoilée par une somnambule d’une luci
dité tellement extraordinaire qu’elle dégotte, je
demande pardon de l’expression, toutes ses con
frères présentes et passées.
On ne nous dit pas si ces conspirateurs, avaient
perruque blonde et collet noir, mais j’espère que
ce dernier point sera éclairci.
Le deuxième complot (on est obligé de les nu
méroter pour s’y reconnaître) est dirigé contre le
ventripotent Dupuy, actuellement occupé, dans
une ville d’eaux, à la confection de moellons.
Les propagandistes par l’assassinat, d’ailleurs
tout aussi inconnus que ceux de Lugano ont, s’il
faut en croire les journaux fonds stipendiés, quitté
l’Espagne dans un bateau pour venir débarquer
sur un point quelconque du littoral français.
Depuis que le départ de ces inconnus a été
signalé, les douaniers et les agents de police sur
veillent la côte, mais comme sœur Anne, ils ne
voient rien venir.
Enfin, le troisième complot (il vient du Nord,
celui-là) est dirigé contre un député majoritard
absolument inconnu et répondant au nom d’Esca-
nyé. Pourquoi Escanyé ? Serait-ce parce que nos
conspirateurs n° 3 sont des hommes du nord et
que le nom du député menacé est bien méridional.
La revanche du Nord sur le Midi. Troun de l’air !
*
* *
Décidément, dans sa chasse aux anarchistes, la
police a toujours l’adresse d’arrêter des proprié
taires, gens peu anarchistes de leur naturel.
Cette nouvelle mésaventure, pourrait s’intituler
le Distrait ou VAnarchiste sans le savoir.
Un brave homme de marchand de vins, nommé
Caze, établi boulevard Victor-Hugo, 73, à Clichy,
qui est en même temps propriétaire d’une maison
à Montreuil-sous-Bois se rendit dans cette der
nière localité pour toucher des loyers échus et ne
reparut pas.
Sa femme éplorée alla faire sa déposition au
commissaire de police de son quartier et lui expo
sa que son mari ayant dû toucher trois cents
francs, on avait dû rassassiner pour le dépouiller.
Promesse lui fut faite de procéder à des re
cherches.
Le lendemain, elle revint au commissariat où
on lui répondit d’un ton très mystérieux que son
mari se portait bien, mais que l’on ne pouvait pas
dire où il était.
Voici ce qu’il était advenu au malheureux mas-
troquet.
Après avoir touché ses loyers, il était allé à la
gare du Nord pour prendre le train de Clichy,
mais dans sa précipitation, il s’était trompé de
train et s’étant endormi il avait été tout surpris
de se réveiller à Tourcoing.
Comme le train qui devait le ramener à Paris
ne pouvait le prendre que dans quelques heures,
il s’était rendu dans un café pour y passer le
temps et il avait conté sa mésaventure aux per
sonnes présentes.
Un individu qui l’observait depuis quelques mi
nutes était allé chercher des agents et malgré ses
protestations on le conduisit à la prison de Lille.
Pendant son séjour à la dite prison, l’inévitable
Fédée avait tout bouleversé chez lui, jetant ainsi
la terreur dans une famille honorable et finale
ment était parti les mains vides, mais avec la sa
tisfaction d’avoir embêté un citoyen paisible.
D’autre part, les juges de Lille, qui avaient
pris des renseignements sur M. Caze, se voyaient
dans l'obligation de lui ouvrir les portes de sa
prison, mais avant de le mettre en liberté, ils lui
firent une verte semonce et enfin le laissèrent
partir en lui disant : « Tâchez de ne plus recom
mencer !»
On ne se moque pas plus agréablement du
monde.
J. NARZAC.
LETTRE DE Ste-ADRESSE
Comme nous l’avions annoncé, la fête dlgnauval
s’est terminée brillamment dimanche dernier, par
une retraite aux flambeaux suivie d’un feu d’arti
fice et du bal du Comité.
La retraite aux flambeaux a été très réussie et
le feu d'artifice, tiré par Guérard, artificier de la
ville du Havre, a eu un vif succès avec sa pièce
principale représentant le rêve des habitants du
Vallon : Une fontaine d’eau potable.
Malgré la période de froidure que nous traver
sons en ce moment, les disciples de Terpsychore
étaient accourus en si grand nombre sous la tente
dressée pour le bal, que celle-ci a été trop petite.
Voilà un résultat qui fait honneur aux organi
sateurs des 3 jours de fête du vallon. Aussi n’hési-
tons-nous pas à complimenter sans réserves MM.
Valois, Briand, Momenheim et Lécuyer, pour la
part active qu’ils on prise à l’organisation de cette
fête très bien comprise, sous tous les rapports, et
qui sera, espérons-le, d’un salutaire exemple pour
les autres quartiers de Ste-Adresse.
A quand la fête des Phares et celle de la Solitude.
*
* j f
Pour satisfaire au désir exprimé par un de nos
correspondants, dans la lettre dont nous avons
annoncé la réception dans notre avant-dernière
chronique, nous allons revenir aujourd’hui sur la
question du nouveau tarif des tramways et dire
toute notre façon de penser à ce sujet.
On se rappelle que nous avons demandé derniè
rement à nos édiles de poursuivre l’abaissement
du tarif ancien et de faire de cette réduction la
condition absolue du renouvellement de la conces
sion de la Compagnie. Or, au lieu d’une diminu
tion du prix des places, nous nous trouvons
aujourd’hui, avec la traction électrique, en présence
d’un tarif plus élevé que celui qui était en vigueur
à l’époque des anciens cars.
Cela ne se comprend pas et est absolument illo
gique !
Comment, au moment où la Ville du Havre
obtient de la Compagnie des Tramways l’unifica
tion de ses tarifs pour chacune des lignes de son
réseau ; alors qu’on peut traverser le Havre, d’une
extrémité à l’autre, pour 15 centimes en l re classe
et 10 centimes en seconde, c’est-à-dire avec une
réduction de 50 0/0 sur l’ancien tarif, nous obte
nons, nous, de payer 10 c. et 15 c. pour la faible
distance qui sépare le Carreau de Ste-Adresse du
casino Marie-Christine.
Quand la ville du Havre, non contente de son
tarif réduit, obtient encore l’établissement de
correspondances qui permettent aux voyageurs de
changer de ligne en payant un supplément de
5 c. et 10 c. suivant la classe, et de franchir ainsi
le parcours de la ligne de la Barrière d’Or au
Casino Marie-Christine et retour pour 30 c. en
seconde classe, nous devons payer, nous, 40 c.
aller et retour du Carreau de Sainte-Adresse à
l’Hôtel de Ville du Havre.
Avouons que c’est maigre comme résultat !
Mais, nous dira-t-on, nos administrateurs ont
obtenu que le commencement de la station de
Sain te-Adresse soit reporté aux Quatre-Chemins
au lieu d’être au Casino, notre station porte donc
sur une distance pour laquelle on payait autrefois
15 et 20 c. Oui ! mais, du même coup, ils ont
perdu l’avantage des aller et retour, en sorte
1
L
Réveil du Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN-SOCIALISTE INDÉPENDANT
PRIX DES ABONNEMENTS
UN AN
Le Havre 3 fr.
Départements 4 fr.
•
SIX MOIS
2 fr.
2 50
1 ADMINISTRATION & RÉDAC1
1 15. RtTE CASIMIR-PÉRI
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît tous les
s „ Ni
'ION 1 PRIX DES INSERTIONS:
ïlR, 15 1 Annonces 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
Samedis gj On traite à Forfait
i
Deux
Poids et Deux Mesures
DEUX POIDS
ET
DEUX MESURES
En cette époque de déséquilibration politi
que et gouvernementale, qui semble être une
deuxième phase de l’ordre moral, nous assis
tons — en payant fort cher nos places, mal
heureusement — à une série de comédies
dépassant celles eréées journellement par nos
auteurs contemporains les plus abracada
brants.
Tout homme sensé ne peut retenir le rire en
voyant un ministre, dit à poigne, trembler
comme un enfant et, tel un aliéné atteint du
délire de la persécution, craindre de trouver
dans quiconque l’approche le ministricide qui
remplacera pour lui l’inexorable Àtropcs.
N’est-il pas curieux, cet homme d’Etat, atteint
de la colique qui fit entrer Plomplon dans la
célébrité, se tenant le ventre à deux mains,
inspectant minutieusement les draperies de
ses appartements et, sans doute, le soir, se
mettant a quatre pattes pour regarder sous le
lit si un anarchiste militant n’a pas pris la
place d’un ustensile plus intime?
La chose n’aurait qu’une importance secon
daire si d’honnêtes citoyens n’avaient à souf
frir mille vexations dont l’unique cause est
la terreur du président du Conseil.
A chaque instant, ce sont perquisitions
chez de braves gens inoffensifs, arrestations
de pauvres diables qu’un juge d’instruction
tourmente pendant quinze jours ou trois
semaines, et relâche ensuite sans même leur
tirer sa toque. . }
Et notez que les malheureux soupçonnés
d’anarchisme, emprisonnés sur une dénoncia
tion, souvent anonyme, parfois signée d’un
nom appartenant à un individu dont la mora
lité laisse beaucoup à désirer, sont traités plus
durement que les détenus incarcérés pour
crimes de droit commun. A ces derniers, pourvu
qu’ils fassent montre d’une certaine souplesse,
on accorde volontiers quelques faveurs ; au
régime alimentaire de la prison viennent
s’ajouter quelques douceurs : rôt, vin, tabac.
Du pain et de l’eau aux citoyens arrêtés par
erreur ; c'est bien assez pour les honnêtes
gens !
De tous ces complots ourdis dans l’ombre et
le mystère... de l’intérieur, on n’a pu, malgré
d’actives recherches (???) trouver la moindre
trace; à la police, on les ignore.N’existeraient-
ils que dans l’imagination surchauffée de
Dupuy ? C’est l’opinion générale, et nous la
partageons entièrement.
Nous avons dit, au commencement de cet
article, que les scènes d’un haut comique
auxquelles nous assistons appelaient le rire.
Certes, lorsqu’on envisage la chose superfi
ciellement, cela est vrai ; mais, si l’on songe
aux nombreuses victimes de l’affolement minis
tériel, on éprouve, malgré soi, une grande
tristesse..
Est-il possible, se demande-t-on, que dans
le pays qui vit éclore la Liberté, on puisse,
dépassant les prouesses de Josué, non arrêter
l’astre radieux, mais le forcer à aller du Cou
chant au Levant ? — Pauvre Phœbus ! tu ne
te doutais guère, qu’un jour, la politique
t’arracherait à la poésie. — Cependant, il est
indiscutable que nous marchons à reculons.
Le partisan le plus enragé de l’état de ehoses
actuel ne pourrait, quelque talent qu’il y
mette, nous dire quelle différence il y a entre
le régime présent et le règne de Louis XIV.
Quand quelqu’un gênait le Roi-Soleil ou un
de ses courtisans, vite une lettre de cachet; la
Bastille comptait un habitant de plus, et voilà
tout. Que votre femme plaise à un huissier de
Dupuy, il vous dénoncera comme anarchiste,
et crac !... les portes de la maison d’arrêt se
refermeront sur votre encombrante personne.
11 n’est peut-être pas mauvais, pour l’édifi
cation des électeurs, de mettre en regard de
cet abus formidable du pouvoir que la récente
loi sur la presse a mis aux mains de quelques
hommes, un abus non moins formidable de
protection.
Il y a huit ans, le préfet de l’Eure, M.
Barême, était assassiné en chemin de fer.
L’affaire fit un bruit énorme, la police, la
justice cherchèrent ou firent semblant de
chercher le coupable. On ne put le découvrir;
l’affaire fut classée.
Peu à peu, le bruit fait autour de cette
affaire s’était apaisé. On n’y pensait plus.
Mais voilà qu’il y a quelques jours, deux poli
ciers se prennent de querelle, des injures on
eh vient aux insinuations malveillantes; bref,
l’un d’eux écrit au chef de la sûreté que si on
on ne lui fait des excuses, il racontera tout ce
qu’il sait sur l’affaire Barême. Grand émoi à
la Préfecture ; les excuses demandées sont
faites — l’histoire ne dit pas si elles étaient
plates ou sonnantes —- procureur et préfet se
rendorment tranquillement.
Tout eut marché à souhait sans ces gredins
de journalistes qui veulent toujours savoir ce
qu’on leur cache.
Pour éviter un plus grand scandale, on nous
dit aujourd’hui, par l’entremise des feuilles
officieuses, que l’assassin est connu, que c’est
un magistrat, un juge, mais que, maintenant
qu’il est mort, on ne peut plus le poursuivre.
Il est bien extraordinaire qu’on ait attendu
la mort de l’assassin pour déclarer qu’on le
connaissait. Il y a donc deux poids et deux
mesures ?
Et dire que ce juge assassin a peut-être
continué à siéger et à condamner des malheu
reux bien moins coupables que lui.
Quoi qu’il en soit, ceux qui l’ont épargné
ont commis une mauvaise action dont ils
doivent compte à la justice, et nous espérons
qu’il se trouvera des magistrats pour leur
infliger le châtiment qu’ils ont mérité.
Que pense le pays de ce singulier partisan
du gouvernement qui, commentant dans
un article furibond le verdict du jury
dans le procès des trente, excite les compagnons
à faire sauter en l’air les tripes des bons jurés.
C’est là de la provocation au crime ou,alors,
nous renonçons à comprendre le Français.
Comme il s’agit d’un ami du pouvoir, pas
de poursuites. Que fait donc le parquet? Sans
doute, il attend des ordres d’en haut, il guette
un signe de son Omnipotence Dupuy.
A la rentrée du Parlement, messieurs les
ministres auront, ce nous semble, des explica
tions à fournir. Il leur faudra des jarrets
d’acier pour franchir les obstacles amoncelés
sous leurs pas. S’ils les sautent, ce ne sera pas
sans attrapper quelques entorses. Depuis le
temp* qu’ils en donnent à la Constitution^ ce
sera bien leur tour.
Un projet de loi en deux articles s’impose :
l’un obligeant Ta justice à faire connaître au
dénoncé le nom du délateur ; l’autre permet
tant à la victime d’une erreur judiciaire ou
d’une dénonciation anonyme d’obtenir des
dommages-intérêts de l’Etat.
L’halluciné Dupuy s’y opposera ; si on passe
outre, nous y aurons gagné d’être débarrassés
de lui d’abord, et ensuite de ne pas voir, en
République, Thémis avec un bandeau trans
parent sur les yeux.
Pierre MÉRITEL.
RECTIFICATION
Par une erreur de mise en page, un article de
notre dernier numéro a été légèrement dénaturé,
c’est l’article intitulé : Tremblons, Amis! relatif
aux insinuations du Préfet Hendlé. La dernière
partie qui commente son attitude menaçante d’il
y a deux ans au banquet de Frascati est seule
sortie de notre plume ; la totalité de ce qui pré
cède a été empruntée à nos amis de la Petite
République.
Qu’ils reçoivent toutes nos excuses de cet invo
lontaire plagiat.
Les Gaietés de la Semaine
Que de conspirations, Bon Dieu, que de conspi
rations ! ^
La police est littéralement sur les dents et ne
sait plus à quel complot se vouer.
Le premier part de Lugano où des gens que
personnes ne connaît et qui se réunissent dans un
endroit qu’il a été impossible de déterminer, ont,
paraît-il, tiré au sort le nom du compagnon chargé
d’envoyer M. Casimir-Périer présider dans un
monde meilleur.
La découverte de cette conspiration fait le plus
grand honneur aux policiers, surtout lorsque l’on
sait que tant de malfaiteurs, sans parler d Arton,
dont on possède le signalement leur échappent si
facilement.
Des mauvaises langues prétendent, mais je ne
veux pas les croire, que cette conspiration qu’il
est impossible de ne pas qualifier de secrète, au
rait été dévoilée par une somnambule d’une luci
dité tellement extraordinaire qu’elle dégotte, je
demande pardon de l’expression, toutes ses con
frères présentes et passées.
On ne nous dit pas si ces conspirateurs, avaient
perruque blonde et collet noir, mais j’espère que
ce dernier point sera éclairci.
Le deuxième complot (on est obligé de les nu
méroter pour s’y reconnaître) est dirigé contre le
ventripotent Dupuy, actuellement occupé, dans
une ville d’eaux, à la confection de moellons.
Les propagandistes par l’assassinat, d’ailleurs
tout aussi inconnus que ceux de Lugano ont, s’il
faut en croire les journaux fonds stipendiés, quitté
l’Espagne dans un bateau pour venir débarquer
sur un point quelconque du littoral français.
Depuis que le départ de ces inconnus a été
signalé, les douaniers et les agents de police sur
veillent la côte, mais comme sœur Anne, ils ne
voient rien venir.
Enfin, le troisième complot (il vient du Nord,
celui-là) est dirigé contre un député majoritard
absolument inconnu et répondant au nom d’Esca-
nyé. Pourquoi Escanyé ? Serait-ce parce que nos
conspirateurs n° 3 sont des hommes du nord et
que le nom du député menacé est bien méridional.
La revanche du Nord sur le Midi. Troun de l’air !
*
* *
Décidément, dans sa chasse aux anarchistes, la
police a toujours l’adresse d’arrêter des proprié
taires, gens peu anarchistes de leur naturel.
Cette nouvelle mésaventure, pourrait s’intituler
le Distrait ou VAnarchiste sans le savoir.
Un brave homme de marchand de vins, nommé
Caze, établi boulevard Victor-Hugo, 73, à Clichy,
qui est en même temps propriétaire d’une maison
à Montreuil-sous-Bois se rendit dans cette der
nière localité pour toucher des loyers échus et ne
reparut pas.
Sa femme éplorée alla faire sa déposition au
commissaire de police de son quartier et lui expo
sa que son mari ayant dû toucher trois cents
francs, on avait dû rassassiner pour le dépouiller.
Promesse lui fut faite de procéder à des re
cherches.
Le lendemain, elle revint au commissariat où
on lui répondit d’un ton très mystérieux que son
mari se portait bien, mais que l’on ne pouvait pas
dire où il était.
Voici ce qu’il était advenu au malheureux mas-
troquet.
Après avoir touché ses loyers, il était allé à la
gare du Nord pour prendre le train de Clichy,
mais dans sa précipitation, il s’était trompé de
train et s’étant endormi il avait été tout surpris
de se réveiller à Tourcoing.
Comme le train qui devait le ramener à Paris
ne pouvait le prendre que dans quelques heures,
il s’était rendu dans un café pour y passer le
temps et il avait conté sa mésaventure aux per
sonnes présentes.
Un individu qui l’observait depuis quelques mi
nutes était allé chercher des agents et malgré ses
protestations on le conduisit à la prison de Lille.
Pendant son séjour à la dite prison, l’inévitable
Fédée avait tout bouleversé chez lui, jetant ainsi
la terreur dans une famille honorable et finale
ment était parti les mains vides, mais avec la sa
tisfaction d’avoir embêté un citoyen paisible.
D’autre part, les juges de Lille, qui avaient
pris des renseignements sur M. Caze, se voyaient
dans l'obligation de lui ouvrir les portes de sa
prison, mais avant de le mettre en liberté, ils lui
firent une verte semonce et enfin le laissèrent
partir en lui disant : « Tâchez de ne plus recom
mencer !»
On ne se moque pas plus agréablement du
monde.
J. NARZAC.
LETTRE DE Ste-ADRESSE
Comme nous l’avions annoncé, la fête dlgnauval
s’est terminée brillamment dimanche dernier, par
une retraite aux flambeaux suivie d’un feu d’arti
fice et du bal du Comité.
La retraite aux flambeaux a été très réussie et
le feu d'artifice, tiré par Guérard, artificier de la
ville du Havre, a eu un vif succès avec sa pièce
principale représentant le rêve des habitants du
Vallon : Une fontaine d’eau potable.
Malgré la période de froidure que nous traver
sons en ce moment, les disciples de Terpsychore
étaient accourus en si grand nombre sous la tente
dressée pour le bal, que celle-ci a été trop petite.
Voilà un résultat qui fait honneur aux organi
sateurs des 3 jours de fête du vallon. Aussi n’hési-
tons-nous pas à complimenter sans réserves MM.
Valois, Briand, Momenheim et Lécuyer, pour la
part active qu’ils on prise à l’organisation de cette
fête très bien comprise, sous tous les rapports, et
qui sera, espérons-le, d’un salutaire exemple pour
les autres quartiers de Ste-Adresse.
A quand la fête des Phares et celle de la Solitude.
*
* j f
Pour satisfaire au désir exprimé par un de nos
correspondants, dans la lettre dont nous avons
annoncé la réception dans notre avant-dernière
chronique, nous allons revenir aujourd’hui sur la
question du nouveau tarif des tramways et dire
toute notre façon de penser à ce sujet.
On se rappelle que nous avons demandé derniè
rement à nos édiles de poursuivre l’abaissement
du tarif ancien et de faire de cette réduction la
condition absolue du renouvellement de la conces
sion de la Compagnie. Or, au lieu d’une diminu
tion du prix des places, nous nous trouvons
aujourd’hui, avec la traction électrique, en présence
d’un tarif plus élevé que celui qui était en vigueur
à l’époque des anciens cars.
Cela ne se comprend pas et est absolument illo
gique !
Comment, au moment où la Ville du Havre
obtient de la Compagnie des Tramways l’unifica
tion de ses tarifs pour chacune des lignes de son
réseau ; alors qu’on peut traverser le Havre, d’une
extrémité à l’autre, pour 15 centimes en l re classe
et 10 centimes en seconde, c’est-à-dire avec une
réduction de 50 0/0 sur l’ancien tarif, nous obte
nons, nous, de payer 10 c. et 15 c. pour la faible
distance qui sépare le Carreau de Ste-Adresse du
casino Marie-Christine.
Quand la ville du Havre, non contente de son
tarif réduit, obtient encore l’établissement de
correspondances qui permettent aux voyageurs de
changer de ligne en payant un supplément de
5 c. et 10 c. suivant la classe, et de franchir ainsi
le parcours de la ligne de la Barrière d’Or au
Casino Marie-Christine et retour pour 30 c. en
seconde classe, nous devons payer, nous, 40 c.
aller et retour du Carreau de Sainte-Adresse à
l’Hôtel de Ville du Havre.
Avouons que c’est maigre comme résultat !
Mais, nous dira-t-on, nos administrateurs ont
obtenu que le commencement de la station de
Sain te-Adresse soit reporté aux Quatre-Chemins
au lieu d’être au Casino, notre station porte donc
sur une distance pour laquelle on payait autrefois
15 et 20 c. Oui ! mais, du même coup, ils ont
perdu l’avantage des aller et retour, en sorte
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