Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1893-02-25
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 25 février 1893 25 février 1893
Description : 1893/02/25 (N70). 1893/02/25 (N70).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32632700
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
1
2 e Année — N° 70 — Samedi 25 février 1893.
DIX CENTIMES LE NUMÉRO
2 e Année — 1 Ventôse An 101 — N° 10.
Réveil
/PL
ORGANE RÉPUBLICAIN
PttlX DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre... 5 fr. 3 fr.
Départements.. 6 fr. 3 50
RÉPUBLIQUE
ET
CLÉRICALISME
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉ VE IL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent. la ligne
On traite à Forfait
Nous recevons de notre ami, M. Monsallié,
membre de la corporation des métallurgistes où il
s’est déjà distingué par plusieurs rapports remar
quables, l’intéressant article ci-après.
Nous sommes heureux de le publier in-extenso.
C’est, en effet, un modèle de logique républicaine
et de sincérité.
En ce temps de défaillances morales, où l’on
voit des journaux se disant républicains-socia
listes, faire l’éloge enthousiaste de la Papauté, où
l’on voit un Président de la République, petit-fils
d’un conventionnel, victime de sollicitations con
jugales, baiser la mule papale. — il est consolant
de noter que, dans la classe des travailleurs, res
source suprême de la République menacée, le bon
sens et l’honneur ont trouvé un refuge inviolé.
Voilà de quoi nous consoler du gâtisme rétro
grade de certains bourgeois qui se pâment en
songeant au jubilé de Léon XIII.
AUX TRAVAILLEURS
Dans la très intéressante conférence faite
au Cercle Franklin, le 7 décembre 1891, par
M. Millerand, sur L’Eglise et la République ,
l’honorable député de la Seine a établi d’une
manière irréfutable que l’Etat est impuissant
à désarmer le parti'clérical et qu’il y a in
compatibilité absolue entre les doctrines de ce
dernier et les principes républicains.
Il existe partout, surtout en France, un
grand nombre d’esprits, non seulement indif
férents, mais même hostiles à toute morale
théologique ; c’est un fait que constatent
ceux qui déplorent la désuétude croissante du
théologisme. Les intéressés se plaignent que,
de plus en plus, la société s’éloigne de Dieu,
et ils attribuent ce délaissement à la cor
ruption humaine. Cette raison est au moins
puérile : puisqu’ils font profession de diriger
et de convertir les hommes, qu’ils se
fassent croire ; s’il faut des gendarmes pour
obliger à les suivre, ils deviennent inutiles.
Eu réalité, cette émancipation est une
conséquence du passé ; si nous sommes deve
nus incrédules c’est que nos pères nous ont
fait comme cela ; nous n’y pouvons rien.
Cette incrédulité a gagné tout le monde en
France ; l’intelligence, le capital, le travail,
le peuple, tout est devenu indifférent ou
hostile au théologisme, et le mouvement ne
fera que s’accentuer, car comment le catho
licisme qui, dans sa splendeur, n'a pu em
pêcher l’essor de l’esprit révolutionnaire,
serait-il apte à discipliner nos esprits qui
n’ont plus ni peur de son enfer, ni d’attraits
pour son paradis ?
Non ! le procédé jésuitique n’attrape plus
personne ! On ne croit plus, c’est parfaite
ment certain.
Malgré cela, cependant, le plus grand
nombre n’est pas encore affranchi des pra
tiques qu’impose le dogme cacholique. Or,
c’est là, suivant moi, où se trouve l’obstacle
pour obtenir le résultat que nous poursui
vons : la séparation des églises et de l’Etat.
Comme nous le disons plus haut, l’Etat ne
peut rien, ou à peu près, contre le clergé,
malgré les déclarations du gouvernement
répétées dans plusieurs circonstances.
En fait, il ne peut que proclamer qu’il est
résolu à faire observer strictement par le
clergé nos institutions et nos lois et qu’il
suffit pour cela d’appliquer le Concordat, de
suspendre, comme on l’a fait pour les évêques
qui se sont rendus à Rome sans autorisation,
le traitement des ecclésiastiques qui ne se
conformeront pas aux prescriptions concor
dataires, que l’Eglise a la direction des
âmes, mais qu’à l’autorité civile et laïque
doit appartenir sans partage le gouverne
ment du pays et la direction de la Répu
blique.
Le point grave, pourtant, c’est que pour
cet office de directeur des âmes, l’Etat sub
ventionne le clergé. Il s'agit dès lors de
savoir si le clergé remplit convenablement sa
fonction ; s'il enseigne la bonne morale ; si
sa doctrine rend les hommes meilleurs et
plus instruits !
S’il n’est pas à la hauteur de ce qu’on lui
demande, il est inutile de lui continuer sa
subvention. Or, nous avons constaté qu’il
est devenu absolument insuffisant et ne répond
phis aux besoins actuels.
Cependant, un ministre des cultes a affirmé
que la séparation des églises et de l’Etat ne
pouvait pas se faire encore parce que la démo
cratie n’était pas prête pour cette mesure.
Cette observation est, d’ailleurs, fréquem
ment émise sur le compte de la démocratie,
et peut-être n’est-elle pas sans fondement
lorsque l’on voit la grande majorité des ci
toyens français, émancipée de la croyance au
surnaturel et à tout ce qffoasffigtnà le clergé,
jouer aux dévots en acceptant de suivre les
pratiques extérieures des lois de l’église.
C’est un phénomène étrange de voir
des hommes qui répudient ouvertement ren
seignement tliéologique et déclarent journel
lement à qui veut les entendre, par exemple,
que la confession est une institution inqui
sitoriale ; que la communion est une mysti
fication ; que les prières adressées à un dieu
imaginaire-sont du charlatanisme, etc., con
sentir à énvoyer leurs enfants à l’église, au
catéchisme, quelques-uns même dans les
écoles congréganistes.
Cela est-il logique ?
Quoi ! vous êtes républicains ; vous défen
driez au péril de la vie, je n’en doute pas, les
principes de la Révolution française, les
droits de l’homme, la liberté ! Vous savez,
d’un autre côté, que le clergé qui doit obéis
sance au syllabus, excommunie tout bon
républicain ! Et vous lui envoyez vos enfants
pour qu’il leur inculque la haine des institu
tions de leur pays, institutions que vous
défendez, vous !
Vos enfants sont à peine nés que, sans
attendre pour eux l’âge de raison, vous les
enrôlez de force dans telle ou telle religion, —
vous qui, cependant, proclamez la liberté de
conscience !
Plus tard, à onze ans, vous leur faites faire
la première communion, à l’utilité de laquelle
vous ne croyez pas !
Lorsque l’heure de la mort approche, les
républicains libres penseurs ont recours à
l’Eglise pour les derniers sacrements!
Cela est-il digne d’hommes véritablement
convaincus et émancipés ?
Certes non ! et c’est à déplorer pour plu
sieurs motifs.
D’abord, en confiant vos enfants au clergé
que vous critiquez devant eux, vous leur
apprenez à faire une pratique sans conviction ;
vos enfants connaissent vos opinions ; vous
les contraignez donc à des actes qui les ren
dent hypocrites.
Puis, vous les amenez à perdre la confiance
en vos propres paroles, puisque vous leur
déclarez qu’ils ont à observer les pratiques
de la religion, par devoir et que, d’un autre
côté, vous déclarez, en paroles, qu’elles sont
absurdes.
Vous faussez ainsi leur jeune imagination
et, plus tard, ils deviennent des citoyens dont
la morale est sans conseil.
Ayons donc tous le courage de nos opinions!
Que ceux qui ne croient pas à l’enseigne
ment théologique, sachent enfin mettre d’accord
leurs actes avec les principes qu’ils professent!
Laissons aux vrais croyants, seuls, la place
libre à l’Eglise ; il sera plus facile alors d’éva
luer à combien s’en élève le chiffre réel.
Le gouvernement ne pourra plus déclarer
alors, que le parti démocratique n’est pas
organisé en vue de la séparation des Eglises**
et de l’Etat. Il n’aura plus le prétexte de frois
ser l’opinion publique dans ses croyances et la
séparation s’imposera; l’Etat aura disponibles
les millions qu'il distribue au clergé; ils lui
serviront à améliorer les conditions d’existence
des travailleurs, ce qui ne sera pas à dédai
gner; et les villes, en louant les bâtiments
affectés aux cultes, se créeront d’importants
revenus qui permettront de dégrever d’autant
les objets de première nécessité que frappe
si chèrement l’octroi, aujourd’hui.
MONSALLIÉ.
MAINE POLITIQUE
FRANCE
M. Le Royer vient de -donner, sa démission de
président du Sénat. Il l’a motivée par des raisons
de santé, des douleurs névralgiques qui, depuis
quelques années, le frappent tous les jours dans
la matinée, « se dissipent un peu vers midi pour
reprendre avec plus de force à la fin de la jour
née. »
- La nomination de son successeur au fauteuil de
la présidence du Sénat est fixée au vendredi 24 ;
c’est-à-dire trop tard pour que nous puissions
informer les lecteurs du Réveil, dans le présent
numéro, du résultat du scrutin qui aura lieu à ce
sujet. Tout fait supposer, cependant, que ce sera
M. Jules Ferry, dont la candidature a été admise
par la réunion plénière des gauches, mercredi
dernier, dans laquelle il a obtenu 87 voix et M.
Magnin, 56 voix.
La Chambre des députés a discuté les modi
fications proposées à l’impôt actuel des patentes.
La question des grands et des petits magasins a
été vivement agitée ; des arguments, pour et
contre, ont été présentés et développés avec une
égale ardeur, de part et d’autre ; les uns défen
dant les grands magasins au nom de la liberté du
commerce et des intérêts des consommateurs ; les
autres, les combattant comme des puissants dont
l’omnipotence est la ruine et la disparition pro
chaine de la classe des petits commerçants.
En définitive, la discussion a duré plusieurs
jours ; d’importants discours ont été prononcés
dans cette circonstance et finalement l’ensemble
de la loi a été adopté dans la séance de mercredi,
par 395 voix contre 55.
Avant le vote sur l’ensemble du projet, M.
Lagnel a signalé au gouvernement ce fait que des
curés, dans beaucoup de communes, se livrent à
de véritables opérations commerciales et font
concurrence aux négociants patentés. Les curés,
en leur qualité de ministres d’un culte et de fonc
tionnaires salariés par l’Etat, ont-ils le droit de
faire du commerce ? S’ils ont ce droit, il y a lieu
de leur imposer la patente. S’ils n’ont point ce
droit, le gouvernement devrait les empêcher de se
livrer à des opérations commerciales.
M. Boutin, le commissaire du gouvernement, a
répondu qu’il a fait faire une enquête sur le point
soulevé par M. Lagnel et qui lui avait déjà été
signalé. Il a été constaté, en effet, que certains
desservants sont imposés aux professions que
voici : l’un en qualité de maître d’hôtel et de
fabricant de cierges (rires à gauche) , un
autre en qualité de marchand de vins en gros et
d’exploitant de blanchisserie de cire ; un autre en
qualité de marchand d’huiles en détail; d’autres en
qualité de commissionnaires en marchandises; un
autre en qualité de couturier à façon (nouveaux
rires à gauche ) , un autre comme marchand
d’eaux minérales naturelles (à gauche : d’eau de
Lourdes ! on rit ).
L’administration, on le voit, applique donc
l’article fondamental de la loi sur les patentes.,
qui prescrit d’assujettir à cette contribution tout
Français ou étranger qui exerce en France un
commerce ou une profession non comprise dans
les exceptions déterminées par la loi.
Quant à la question de savoir si un ecclésias
tique a le droit de vendre telle ou telle denrée ou
marchandise, il n’appartient pas au commissaire
du gouvernement d’y répondre.
M. Tirard, ministre des finances, s’en est
chargé. — Il a dit, tout d’abord, qu’une sorte de
dignité professionnelle impose aux prêtres, eu
dehors de tout règlement positif, l’interdiction de
se livrer à certains commerces. Il faut pourtant
distinguer entre les ecclésiastiques libres et les
desservants attachés à des paroisses. Les char
treux, par exemple, sont des industriels qui paient
une patente très considérable. Quant aux desser
vants et curés, le ministre des finances donne
lecture d’une lettre émanant de l'administration
des cultes, datée du 28 décembre 1891, dans la
quelle on lit les passages suivants :
« Dès que la direction des cultes est avisée
« qu’un membre du clergé, dont la surveillance
« lui est confiée, se livre à des actes de com-
« merce, elle invite l’autorité départementale à
« vérifier l'exactitude des faits signalés.
« Si le rapport du préfet est affirmatif, elle en
« réfère à l’évêque diocésain, qui, dans la plupart
« des cas, impose à son subordonné l’obligation
« de renoncer immédiatement à des actes con-
« damnés par les lois ecclésiastiques aussi bien
« que par les règlements administratifs. »
M. Leydet : Il partage les bénéfices, générale -
ment ! (rires à gauche).
Le ministre : « Si la direction des cultes
« n’obtient pas la satisfaction sur laquelle elle est
« en droit de compter, elle ne se préoccupe pas de
« savoir si l’intéressé est inscrit ou non sur le
« rôle des patentes .et elle supprime le paiement
« du traitement ou de l’indemnité que cet ecclé-
« siastique reçoit pour remplir convenablement
« tous les devoirs de sa charge.
« C’est, ainsi qu’il a récemment procédé vis-à-
« vis de deux prêtres du département des Pyré-
« nées-Orientales qui faisaient ouvertement le
« commerce des vins du pays. »
En résumé, ce ne sont donc que les prêtres
libres, ne figurant pas, à un titre quelconque, sur
les contrôles du clergé paroissial rétribué sur les
fonds du budget des cultes, qui peuvent se trouver
dans le cas d’être assujettis à la contribution des
patentes, et, par conséquent, de se livrer à des
actes de commerce.
Dégrèvement des Boissons dites hygiéniques
et l’Impôt sur l’Alcool
On n’ignore pas que la Chambre des Députés,
dans une récente séance, a voté une augmen
tation de 88 fr. 75 par hectolitre d’alcool, sur le
droit de consommation actuellement en vigueur,
et cela, après un dégrèvement factice sur les bois
sons dites hygiéniques : vins, bières et cidres.
Nous disons factice, car il est bien prouvé que,
dans nos régions, l’ouvrier continuera, comme par
le passé, à payer son litre de boisson, dix centimes.
Cette augmentation excessive sur l’alcool attein
drait directement la population ouvrière de notre
ville ; tout le monde admettra, qu’après de lon
gues heures d’un dur labeur, la nécessité se fait
sentir, pour le travailleur, de se réconforter.
Ce droit supplémentaire est donc antisocial.
C’est ce qu’a très bien compris, le Syndicat du
Commerce en Gros des Vins et Spiritueux de
l'arrondissement du Havre, qui, depuis quelques
semaines, fait tout ce qu’il est humainement pos
sible de faire, pour que cette augmentation sur le
droit de consommation ne reçoive pas la sanction
du Sénat.
Dans ce but, de nombreuses feuilles de pétition
ont été mises en circulation et sont, dès à présent,
recouvertes de près de six mille signatures.
Dans sa lettre du 2 février, au. Conseil munici
pal, le Syndicat fait valoir d’excellents arguments
contre l’augmentation :
« Nous serions, dit-il, les premiers à applau
dir au dégrèvement des vins , bières et cidres ,
si l’aggravation des charges, pour les consom
mateurs, n’excédait pas, et de beaucoup, le dé
grèvement.
2 e Année — N° 70 — Samedi 25 février 1893.
DIX CENTIMES LE NUMÉRO
2 e Année — 1 Ventôse An 101 — N° 10.
Réveil
/PL
ORGANE RÉPUBLICAIN
PttlX DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre... 5 fr. 3 fr.
Départements.. 6 fr. 3 50
RÉPUBLIQUE
ET
CLÉRICALISME
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉ VE IL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent. la ligne
On traite à Forfait
Nous recevons de notre ami, M. Monsallié,
membre de la corporation des métallurgistes où il
s’est déjà distingué par plusieurs rapports remar
quables, l’intéressant article ci-après.
Nous sommes heureux de le publier in-extenso.
C’est, en effet, un modèle de logique républicaine
et de sincérité.
En ce temps de défaillances morales, où l’on
voit des journaux se disant républicains-socia
listes, faire l’éloge enthousiaste de la Papauté, où
l’on voit un Président de la République, petit-fils
d’un conventionnel, victime de sollicitations con
jugales, baiser la mule papale. — il est consolant
de noter que, dans la classe des travailleurs, res
source suprême de la République menacée, le bon
sens et l’honneur ont trouvé un refuge inviolé.
Voilà de quoi nous consoler du gâtisme rétro
grade de certains bourgeois qui se pâment en
songeant au jubilé de Léon XIII.
AUX TRAVAILLEURS
Dans la très intéressante conférence faite
au Cercle Franklin, le 7 décembre 1891, par
M. Millerand, sur L’Eglise et la République ,
l’honorable député de la Seine a établi d’une
manière irréfutable que l’Etat est impuissant
à désarmer le parti'clérical et qu’il y a in
compatibilité absolue entre les doctrines de ce
dernier et les principes républicains.
Il existe partout, surtout en France, un
grand nombre d’esprits, non seulement indif
férents, mais même hostiles à toute morale
théologique ; c’est un fait que constatent
ceux qui déplorent la désuétude croissante du
théologisme. Les intéressés se plaignent que,
de plus en plus, la société s’éloigne de Dieu,
et ils attribuent ce délaissement à la cor
ruption humaine. Cette raison est au moins
puérile : puisqu’ils font profession de diriger
et de convertir les hommes, qu’ils se
fassent croire ; s’il faut des gendarmes pour
obliger à les suivre, ils deviennent inutiles.
Eu réalité, cette émancipation est une
conséquence du passé ; si nous sommes deve
nus incrédules c’est que nos pères nous ont
fait comme cela ; nous n’y pouvons rien.
Cette incrédulité a gagné tout le monde en
France ; l’intelligence, le capital, le travail,
le peuple, tout est devenu indifférent ou
hostile au théologisme, et le mouvement ne
fera que s’accentuer, car comment le catho
licisme qui, dans sa splendeur, n'a pu em
pêcher l’essor de l’esprit révolutionnaire,
serait-il apte à discipliner nos esprits qui
n’ont plus ni peur de son enfer, ni d’attraits
pour son paradis ?
Non ! le procédé jésuitique n’attrape plus
personne ! On ne croit plus, c’est parfaite
ment certain.
Malgré cela, cependant, le plus grand
nombre n’est pas encore affranchi des pra
tiques qu’impose le dogme cacholique. Or,
c’est là, suivant moi, où se trouve l’obstacle
pour obtenir le résultat que nous poursui
vons : la séparation des églises et de l’Etat.
Comme nous le disons plus haut, l’Etat ne
peut rien, ou à peu près, contre le clergé,
malgré les déclarations du gouvernement
répétées dans plusieurs circonstances.
En fait, il ne peut que proclamer qu’il est
résolu à faire observer strictement par le
clergé nos institutions et nos lois et qu’il
suffit pour cela d’appliquer le Concordat, de
suspendre, comme on l’a fait pour les évêques
qui se sont rendus à Rome sans autorisation,
le traitement des ecclésiastiques qui ne se
conformeront pas aux prescriptions concor
dataires, que l’Eglise a la direction des
âmes, mais qu’à l’autorité civile et laïque
doit appartenir sans partage le gouverne
ment du pays et la direction de la Répu
blique.
Le point grave, pourtant, c’est que pour
cet office de directeur des âmes, l’Etat sub
ventionne le clergé. Il s'agit dès lors de
savoir si le clergé remplit convenablement sa
fonction ; s'il enseigne la bonne morale ; si
sa doctrine rend les hommes meilleurs et
plus instruits !
S’il n’est pas à la hauteur de ce qu’on lui
demande, il est inutile de lui continuer sa
subvention. Or, nous avons constaté qu’il
est devenu absolument insuffisant et ne répond
phis aux besoins actuels.
Cependant, un ministre des cultes a affirmé
que la séparation des églises et de l’Etat ne
pouvait pas se faire encore parce que la démo
cratie n’était pas prête pour cette mesure.
Cette observation est, d’ailleurs, fréquem
ment émise sur le compte de la démocratie,
et peut-être n’est-elle pas sans fondement
lorsque l’on voit la grande majorité des ci
toyens français, émancipée de la croyance au
surnaturel et à tout ce qffoasffigtnà le clergé,
jouer aux dévots en acceptant de suivre les
pratiques extérieures des lois de l’église.
C’est un phénomène étrange de voir
des hommes qui répudient ouvertement ren
seignement tliéologique et déclarent journel
lement à qui veut les entendre, par exemple,
que la confession est une institution inqui
sitoriale ; que la communion est une mysti
fication ; que les prières adressées à un dieu
imaginaire-sont du charlatanisme, etc., con
sentir à énvoyer leurs enfants à l’église, au
catéchisme, quelques-uns même dans les
écoles congréganistes.
Cela est-il logique ?
Quoi ! vous êtes républicains ; vous défen
driez au péril de la vie, je n’en doute pas, les
principes de la Révolution française, les
droits de l’homme, la liberté ! Vous savez,
d’un autre côté, que le clergé qui doit obéis
sance au syllabus, excommunie tout bon
républicain ! Et vous lui envoyez vos enfants
pour qu’il leur inculque la haine des institu
tions de leur pays, institutions que vous
défendez, vous !
Vos enfants sont à peine nés que, sans
attendre pour eux l’âge de raison, vous les
enrôlez de force dans telle ou telle religion, —
vous qui, cependant, proclamez la liberté de
conscience !
Plus tard, à onze ans, vous leur faites faire
la première communion, à l’utilité de laquelle
vous ne croyez pas !
Lorsque l’heure de la mort approche, les
républicains libres penseurs ont recours à
l’Eglise pour les derniers sacrements!
Cela est-il digne d’hommes véritablement
convaincus et émancipés ?
Certes non ! et c’est à déplorer pour plu
sieurs motifs.
D’abord, en confiant vos enfants au clergé
que vous critiquez devant eux, vous leur
apprenez à faire une pratique sans conviction ;
vos enfants connaissent vos opinions ; vous
les contraignez donc à des actes qui les ren
dent hypocrites.
Puis, vous les amenez à perdre la confiance
en vos propres paroles, puisque vous leur
déclarez qu’ils ont à observer les pratiques
de la religion, par devoir et que, d’un autre
côté, vous déclarez, en paroles, qu’elles sont
absurdes.
Vous faussez ainsi leur jeune imagination
et, plus tard, ils deviennent des citoyens dont
la morale est sans conseil.
Ayons donc tous le courage de nos opinions!
Que ceux qui ne croient pas à l’enseigne
ment théologique, sachent enfin mettre d’accord
leurs actes avec les principes qu’ils professent!
Laissons aux vrais croyants, seuls, la place
libre à l’Eglise ; il sera plus facile alors d’éva
luer à combien s’en élève le chiffre réel.
Le gouvernement ne pourra plus déclarer
alors, que le parti démocratique n’est pas
organisé en vue de la séparation des Eglises**
et de l’Etat. Il n’aura plus le prétexte de frois
ser l’opinion publique dans ses croyances et la
séparation s’imposera; l’Etat aura disponibles
les millions qu'il distribue au clergé; ils lui
serviront à améliorer les conditions d’existence
des travailleurs, ce qui ne sera pas à dédai
gner; et les villes, en louant les bâtiments
affectés aux cultes, se créeront d’importants
revenus qui permettront de dégrever d’autant
les objets de première nécessité que frappe
si chèrement l’octroi, aujourd’hui.
MONSALLIÉ.
MAINE POLITIQUE
FRANCE
M. Le Royer vient de -donner, sa démission de
président du Sénat. Il l’a motivée par des raisons
de santé, des douleurs névralgiques qui, depuis
quelques années, le frappent tous les jours dans
la matinée, « se dissipent un peu vers midi pour
reprendre avec plus de force à la fin de la jour
née. »
- La nomination de son successeur au fauteuil de
la présidence du Sénat est fixée au vendredi 24 ;
c’est-à-dire trop tard pour que nous puissions
informer les lecteurs du Réveil, dans le présent
numéro, du résultat du scrutin qui aura lieu à ce
sujet. Tout fait supposer, cependant, que ce sera
M. Jules Ferry, dont la candidature a été admise
par la réunion plénière des gauches, mercredi
dernier, dans laquelle il a obtenu 87 voix et M.
Magnin, 56 voix.
La Chambre des députés a discuté les modi
fications proposées à l’impôt actuel des patentes.
La question des grands et des petits magasins a
été vivement agitée ; des arguments, pour et
contre, ont été présentés et développés avec une
égale ardeur, de part et d’autre ; les uns défen
dant les grands magasins au nom de la liberté du
commerce et des intérêts des consommateurs ; les
autres, les combattant comme des puissants dont
l’omnipotence est la ruine et la disparition pro
chaine de la classe des petits commerçants.
En définitive, la discussion a duré plusieurs
jours ; d’importants discours ont été prononcés
dans cette circonstance et finalement l’ensemble
de la loi a été adopté dans la séance de mercredi,
par 395 voix contre 55.
Avant le vote sur l’ensemble du projet, M.
Lagnel a signalé au gouvernement ce fait que des
curés, dans beaucoup de communes, se livrent à
de véritables opérations commerciales et font
concurrence aux négociants patentés. Les curés,
en leur qualité de ministres d’un culte et de fonc
tionnaires salariés par l’Etat, ont-ils le droit de
faire du commerce ? S’ils ont ce droit, il y a lieu
de leur imposer la patente. S’ils n’ont point ce
droit, le gouvernement devrait les empêcher de se
livrer à des opérations commerciales.
M. Boutin, le commissaire du gouvernement, a
répondu qu’il a fait faire une enquête sur le point
soulevé par M. Lagnel et qui lui avait déjà été
signalé. Il a été constaté, en effet, que certains
desservants sont imposés aux professions que
voici : l’un en qualité de maître d’hôtel et de
fabricant de cierges (rires à gauche) , un
autre en qualité de marchand de vins en gros et
d’exploitant de blanchisserie de cire ; un autre en
qualité de marchand d’huiles en détail; d’autres en
qualité de commissionnaires en marchandises; un
autre en qualité de couturier à façon (nouveaux
rires à gauche ) , un autre comme marchand
d’eaux minérales naturelles (à gauche : d’eau de
Lourdes ! on rit ).
L’administration, on le voit, applique donc
l’article fondamental de la loi sur les patentes.,
qui prescrit d’assujettir à cette contribution tout
Français ou étranger qui exerce en France un
commerce ou une profession non comprise dans
les exceptions déterminées par la loi.
Quant à la question de savoir si un ecclésias
tique a le droit de vendre telle ou telle denrée ou
marchandise, il n’appartient pas au commissaire
du gouvernement d’y répondre.
M. Tirard, ministre des finances, s’en est
chargé. — Il a dit, tout d’abord, qu’une sorte de
dignité professionnelle impose aux prêtres, eu
dehors de tout règlement positif, l’interdiction de
se livrer à certains commerces. Il faut pourtant
distinguer entre les ecclésiastiques libres et les
desservants attachés à des paroisses. Les char
treux, par exemple, sont des industriels qui paient
une patente très considérable. Quant aux desser
vants et curés, le ministre des finances donne
lecture d’une lettre émanant de l'administration
des cultes, datée du 28 décembre 1891, dans la
quelle on lit les passages suivants :
« Dès que la direction des cultes est avisée
« qu’un membre du clergé, dont la surveillance
« lui est confiée, se livre à des actes de com-
« merce, elle invite l’autorité départementale à
« vérifier l'exactitude des faits signalés.
« Si le rapport du préfet est affirmatif, elle en
« réfère à l’évêque diocésain, qui, dans la plupart
« des cas, impose à son subordonné l’obligation
« de renoncer immédiatement à des actes con-
« damnés par les lois ecclésiastiques aussi bien
« que par les règlements administratifs. »
M. Leydet : Il partage les bénéfices, générale -
ment ! (rires à gauche).
Le ministre : « Si la direction des cultes
« n’obtient pas la satisfaction sur laquelle elle est
« en droit de compter, elle ne se préoccupe pas de
« savoir si l’intéressé est inscrit ou non sur le
« rôle des patentes .et elle supprime le paiement
« du traitement ou de l’indemnité que cet ecclé-
« siastique reçoit pour remplir convenablement
« tous les devoirs de sa charge.
« C’est, ainsi qu’il a récemment procédé vis-à-
« vis de deux prêtres du département des Pyré-
« nées-Orientales qui faisaient ouvertement le
« commerce des vins du pays. »
En résumé, ce ne sont donc que les prêtres
libres, ne figurant pas, à un titre quelconque, sur
les contrôles du clergé paroissial rétribué sur les
fonds du budget des cultes, qui peuvent se trouver
dans le cas d’être assujettis à la contribution des
patentes, et, par conséquent, de se livrer à des
actes de commerce.
Dégrèvement des Boissons dites hygiéniques
et l’Impôt sur l’Alcool
On n’ignore pas que la Chambre des Députés,
dans une récente séance, a voté une augmen
tation de 88 fr. 75 par hectolitre d’alcool, sur le
droit de consommation actuellement en vigueur,
et cela, après un dégrèvement factice sur les bois
sons dites hygiéniques : vins, bières et cidres.
Nous disons factice, car il est bien prouvé que,
dans nos régions, l’ouvrier continuera, comme par
le passé, à payer son litre de boisson, dix centimes.
Cette augmentation excessive sur l’alcool attein
drait directement la population ouvrière de notre
ville ; tout le monde admettra, qu’après de lon
gues heures d’un dur labeur, la nécessité se fait
sentir, pour le travailleur, de se réconforter.
Ce droit supplémentaire est donc antisocial.
C’est ce qu’a très bien compris, le Syndicat du
Commerce en Gros des Vins et Spiritueux de
l'arrondissement du Havre, qui, depuis quelques
semaines, fait tout ce qu’il est humainement pos
sible de faire, pour que cette augmentation sur le
droit de consommation ne reçoive pas la sanction
du Sénat.
Dans ce but, de nombreuses feuilles de pétition
ont été mises en circulation et sont, dès à présent,
recouvertes de près de six mille signatures.
Dans sa lettre du 2 février, au. Conseil munici
pal, le Syndicat fait valoir d’excellents arguments
contre l’augmentation :
« Nous serions, dit-il, les premiers à applau
dir au dégrèvement des vins , bières et cidres ,
si l’aggravation des charges, pour les consom
mateurs, n’excédait pas, et de beaucoup, le dé
grèvement.
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