Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1892-11-19
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 19 novembre 1892 19 novembre 1892
Description : 1892/11/19 (N56). 1892/11/19 (N56).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
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Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263256q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
1
2 e Année — fi 6 56 — Samedi 16 Novembre 1892.
DIX CENTIMES LE NUMERO
2 e Année — 29 Brumaire An 101 — S° 56.
Réveil
ORGANE RÉPUBLICAIN
i
mx DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements G fr. 3 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER,
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
1 5
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
Messieurs les Abonnés qui, àl’expiration
de leur abonnement, n’auront pas donné
avis de le suspendre seront considérés
comme réabonnés pour le même laps de
temps. Le prix de l’abonnement annuel
est de cinq francs pour un an et de trois
francs pour six mois.
A l’heure où nous écrivons ces lignes, la
Chambre ne s’est pas encore prononcée sur le
projet du gouvernement relatif à une aggra
vation de la loi sur la presse. Mais il est facile
de dégager, des deux jours de discussion qui
viennent d’avoir lieu, un enseignement des
plus utiles pour le parti républicain.
Le gouvernement et la Chambre qui ne
trouvent jamaisle temps nécessaire pour faire
aboutir les lois d’intérêt social qui leur sont
soumises, dépensent de longues heures à des
débats passionnés sur un projet rétrograde.
Cette attitude est à la fois dangereuse et
maladroite.
Croit-on, de bonne foi, qu’il soit intelligent
de la part de M. Loubet de faire croire au pays,
dont il dirige la politique intérieure, que le
pouvoir n’est pas suffisamment armé contre le
crime par les lois existantes ? Si M. Loubet
veut persuader aux timorés, notamment à
la bourgeoisie timide et sans virilité, au nom
de laquelle il gouverne, que l’ère des répres
sions doit s'ouvrir au lieu de celle des réfor
me qu’on attendait, croit-il être l’homme de
la situation, le personnage providentiel des
tiné à sauver la société ? Est-il assez naïf
pour croire qu’après avoir enrayé, grâce à ses
amis les ralliés, la marche en avant du parti
républicain, il ne sera pas remplacé par ceux
qui l’auront compromis ?
Des symptômes graves pour l’idée démocra
tique viennent de se révéler, qui montrent
bien la nécessité de réagir vigoureusement
contre les tendances de M. Loubet, et de ses
amis des centres. On a pu voir, dans la séance
de mercredi, M. de Mun monter à la tribune
pour récriminer à nouveau contre les lois sco
laires et la loi militaire et indiquer les condi
tions de son appui éventuel au gouvernement.
Le seul fait que de telles déclarations puissent
se produire sans être couvertes de huées et
que le ministère ne repousse pas avec indi
gnation la main que lui tendent les éternels
adversaires de nos institutions, devraient
éclairer le parti républicain sur le devoir qui
incombe de trouver un ministre de l’intérieur
qui cesse d’orienter sa politique vers la droite.
On ne fera rien, au point de vue social, tant
qu’on verra les ministres de la République
échanger des sourires avec le cléricaux seus
l’œil bienveillant des modérés.
L’attitude du Ministère est, de plus, outra
geante pour toute la fraction avancée du parti
républicain. Venir dire que les socialistes sont
moralement responsables des explosions dont
la police de M. Loubet ne sait.jamais décou
vrir les auteurs, c’est dépasser la mesure de la
mauvaise foi. C’est employer, pour renforcer
le pouvoir, des moyens d’une honnêteté fort
contestable.
Le pays ne s'y trompera pas. 11 verra les
ficelles de la comédie que l’on joue depuis
quelque temps pour égarer l’opinion publique.
Il se dira que le gouvernement se retranche
dans les mesures d’exception, uniquement
parce qu’il est impuissant à résoudre les ques
tions économiques et sociales de l'heure pré.-
sente, et même a les poser.
11 joue, qu’il le veuille ou non, le rôle de
cette triste Chambre de 1849 qui, par haine
du peuple, restreignait les droits du suffrage
universel et préparait ainsi le coup d’Etat.
M. Loubet procède par les mêmes moyens.
Il laisse faire les cléricaux, — mécontente les
travailleurs qui sont l’appui et la sauvegarde
de la République, — fait tout son possible
pour apeurer les populations qu’il devrait
rassurer, — propose des mesures de répression
qu’il n’appliquera même pas, s’il les fait voter.
Et ce brave homme s’imagine défendre la
République ?
Que ferait-il de plus pour la perdre ?
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Election législative défi 3 novembre 1892
HAUTES-PYRÉNÉES
Arrondissement d'Argelès
M. Alicot, ancien député, républicain, 8,159
voix, élu, en remplacement du marquis de Bre-
teuil, réactionnaire, démissionnaire.
Conseil d’Arrondissement
Dimanche dernier, M. Culine a été nommé
Conseiller d’arrondissement du canton Est de
Roubaix, par 2,928 voix contre 1,706 données à
M. Orange, réactionnaire.
s
La Chambre a continué la discussion du
budget de l’exercice 1893. (Régime des boissons).
Sans entrer dans les détails de ces longs débats,
signalons le vote de l’article décidant que
« l’exercice des débits de boissons est supprimé. »
La commission avait proposé de remplacer les
droits de détails et de circulation sur les vins,
cidres, poirés et hydromels, par un droit général
de consommation.
Mais M. Doumer a obtenu de faire prendre en
considération un amendement disant : « sont
« supprimés tous les droits perçus au profit de
« l’Etat sur les vins, bières, cidres, poirés et
■« hydromels. »
Il a exposé que les impôts sur ces boissons,
dites « boissons hygiéniques », sont mauvais
en eux-mêmes et contraires à la justice ; 349
députés contre 195 ont été de son avis.
Pour remplacer les ressources d’environ quatre-
vingt-dix millions qui se trouvaient ainsi sup
primées du budget, la Chambre a voté les propo
sitions suivantes de M. Furrel :
l ü Suppression du privilège des bouilleurs de
crû ;
2° Augmentation de l’impôt sur l’alcool ;
3 a Augmentation des licences.
La commission du budget aura à présenter les
mesures nécessaires, pour l’application de ces
résolutions, au point de vue budgétaire.
*
* *
Mercredi dernier a commencé la discussion
du projet de loi sur la presse.
Le débat de cette séance n’a rien offert, au
grand désespoir du public accouru en grand
nombre dans les ftribunes, qui étaient bondées.
Du moins, jusqu’au dernier moment, nous ne
connaissons pas encore les conséquences de la
discussion de ce projet de loi qui devait amener
la démission de M. Loubet.
*
* *
Nous avons à signaler la mort de deux person
nages, qui ont eu leurs moments de triste célé
brité.
L’un, M. Ducros, ancien préfet de la Loire et
f du Rhône, qui s’illustra par sa haine passionnée
contre la République.
Après, le 24 mai 1873, surtout, il se signala,
comme préfet du Rhône, par les plus odieuses
vexations qu’il fit subir aux Lyonnais.
On n’a pas oublié son arrêté sur les enterre
ments civils, interdits après sept heures du matin
en été et huit heures en hiver, et auxquels trois
cents personnes au maximum pouvaient assister,
avec défense de prononcer des discours sur la
tombe, sans autorisation préfectorale.
Il est mort à quatre-vingts ans ; nous n’avons
pas à le regretter.
L’autre célèbre est le fameux de Failly, qui fut
ce général de malheur, auteur de la dépêche qu’il
adressa à son sire Napoléon III, après Mentana,
pour lui apprendre que nos chassepots avaient
fait merveille en défendant le pape contre les
Garibaldiens.
Cela le fît, d’ailleurs, entrer au Sénat de l’épo
que.
En 1870, il fut la cause du désastre de Woerth,
en ne sachant pas seconder le maréchal de Mac-
Mahon.
Napoléon III lui conserva, malgré cela, son
commandement du 8 a corps. Hélas ! bientôt après,
le 30 août, il se fit surprendre par les Prussiens à
Beaumont, où, sans avant-postes, sans éclaireurs,
son camp était à découvert. Ses troupes étaient
en train de nettoyer leurs armes, faisaient la
soupe, ou étaient dispersés tout autour du camp,
lorsque tout d’un coup, les Allemands attaquèrent
nos soldats qui se réunirent tant bien que mal,
sans chefs, et se défendirent comme ils purent ; ce
fut, comme on s’en souvient, une déroute qui nous
coûta 3,000 morts ou blessés, et qui eut son contre
coup sur Sedan, où le corps de Failly ne put plus
être d’aucun secours.
Il est mort à 82 ans. S’il était mort à 50 ans, il
aurait épargné bien des malheurs à la France !
JETONS DES ENTREPRENEURS
Havre, 15 novembre 1892.
Citoyen Rédacteur,
J’ai vu dans la Semaine politique du dernier
numéro du Réveil que la Chambre des députés
avait voté un projet de loi concernant les règle
ments d’atelier.
Dans ce projet, je remarque un article qui
oblige les patrons à régler leurs ouvriers au
moins toutes les quinzaines, au comptant, en mon
naie ayant cours légal et dans la fabrique ou le
chantier.
Ces quelques lignes n’ont, l’air de rien ; cepen
dant elles me semblent constituer une réforme
des plus importantes, en ce qu’elle interdit la
coutume si fâcheuse des jetons que l’on remet aux
ouvriers employés aux déchargements de navires,
en paiement de leur travail, coutume si onéreuse
pour beaucoup de travailleurs et dont depuis fort
longtemps l’on réclame la suppression.
Je vous salue, citoyen Rédacteur, bien frater
nellement.
Un Ouvrier.
*
* *
Ainsi que le fait remarquer notre correspon
dant, le vote de l’article 6 de la proposition de loi
dont il parle aura pour conséquence naturelle la
suppression des jetons que l’on remet en paiement
aux ouvriers occupés au débarquement' des na
vires.
Le rapporteur, M. de Saint-Romme, s’est, à ce”
sujet., nettement expliqué ; les paiements, quels
qu’ils soient, a-t-il déclaré, ceux par acompte
comme tous les autres, devront être faits aux ou
vriers « en monnaie ayant cours légal, et non pas
« en cachets sortant d’une officine quelconque
« où Von envoie les ouvriers se nourrir et où,
« pas besoin de faire. » (séance du 5 novembre
1892).
Voilà qui est clair. La loi, si elle est définitive
ment votée par le Sénat, visera donc l’usage du
Havre, et nos ouvriers du port pourront enfin être
payés en espèces sonnantes.
Les termes du projet ne laissent aucun doute
à cet égard et ne peuvent donner lieu à aucune
contestation : « Les patrons seront tenus de
* payer leurs ouvriers au comptant, en mon-
a naie ayant cours légal, et dans la fabrique ou
demment, l’endroit , le lieu où les ouvriers tra
vaillent.
Il est assez étrange, au surplus, que nos dépu
tés, MM. Siegfried et F. Faure, soient restés
muets dans cette circonstance et n’aient pas cru
devoir introduire dans la loi en préparation, une
disposition nette, claire, formelle, concernant le
paiement du travail journalier des ouvriers du
port, ou au moins provoquer à cet égard une dé
claration précise de la part du rapporteur. Car,
quoique les termes de l’article en question nous
paraissent, sans contredit, applicables aux ou
vriers du port du Havre, il aurait été prudent
de les formuler de façon à ce que, dans la pratique,
il n’y ait aucune discussion, aucun conflit possi
ble ; nos députés avaient pour devoir d’intervenir
au moment du débat et de réclamer, dans l’intérêt
des travailleurs du Havre, une précision autour
de laquelle il n’y eut plus eu moyen d’épiloguer
plus tard.
Nous ne comprenons pas, d’ailleurs, pourquoi
ils ne l’ont pas fait. Ils étaient assurément au
courant de la question, qui, fréquemment, a été
soulevée dans notre ville, et récemment encore
la Chambre de commerce dont font partie nos deux
députés, s’en occupait dans sa séance du 14 octobre
dans laquelle M. de Querhoent rappelait ce qui
avait été déjà fait précédemment par cette assem
blée.
La Chambre de commerce, en effet, avait dans
une lettre lue dans la séance du Conseil municipal
du 9 novembre 1887, demandé à l’administration
municipale de nommer une Commission pour exa
miner, de concert avec celle de la Chambre de
commerce, les moyens de remédier aux abus aux
quels donne lieu l’échange des jetons.
Le Conseil municipal désigna MM. Moisy, Le
febvre et Brehm ; la Chambre de commerce avait
désigné MM. de Querhoent, Génestal et Cazavan.
Mais la question ne reçut aucune solution, ainsi
que le déclarèrent, dans la séance municipale du 6 '
mars 1889, M. Rispal, alors adjoint, répondant à
une question de M. G. Nicolle, etM. Genestal.
D une part, disait M. Rispal, les entrepreneurs
n’ont pas voulu renoncer à l’usage des jetons et,
d’autre part, M. le préfet n’a pas pensé qu’il lui
appartient légalement de prendre l’arrêté que la
Commission avait cru devoir lui proposer.
Cette Commission avait pensé que l’on pourrait
peut-être regarder les jetons comme constituant
de la fausse monnaie ou tout au moins comme
une émission illégale de monnaie fiduciaire et
demander, par conséquent, au Préfet d’interdire
cette émission ; mais, a dit, à son tour, M.
Genestal, « le moyen légal fait défaut. Les
« entrepreneurs de déchargements paient leurs
* ouvriers le samedi ; jusque-là ils délivrent aux
« ouvriers des jetons qui constituent la consta-
« tation, la reconnaissance d’une journée ou d’une
« demi-journée de travail ; ces jetons sont accep-
« peut empêcher un entrepreneur de délivrer aux
« personnes qu’il emploie un titre constatant
« un travail accompli ; si, d’autre part, un débi-
« tant veut bien échanger ces jetons contre des
« espèces, oa ne peut pas non plus l’en empêcher;
« aucune loi n’y met obstacle. M. le Préfet a
« pensé que l’arrêté qui serait pris pour interdire
« les opérations de cette nature, serait illégal et
« non obligatoire. »
Ceci se disait en mars 1889, et bon s’appuyait
sur une argumentation à base contestable à notre
avis.
Mais aujourd’hui, si le projet de loi est adopté
par le Sénat, le moyen légal ne fera plus défaut,
et 1 ouvrier du port sera en droit d’exiger tout
payement, acompte ou autre, en espèces,
monnaie courante. Nous espérons que le
Sénat confirmera le vote démocratique de la
Chambre. Dans tous les cas, nous engageons les
ouvriers intéressés à agir auprès des sénateurs
pour ne pas perdre l’occasion d’obtenir une réforme
depuis si longtemps attendue.
QUESTIONS SCOLAIRES
Autre chasse à l’Elève
M. Rispal a bien signalé au Conseil municipal
une chasse aux élèves, dont nous avons, d’ailleurs,
ici même, dénoncé un fait, qui consiste à aller
chercher l'enfant à la porte de l’école voisine et,
pardonnez-moi l’expression, sous le nez du collè
gue. Mais il existe une autre chasse à l’élève
absolument contraire, puisqu’elle a pour but d’en
voyer à l’école voisine l’enfant qu’on ne veut pas.
C’est là, du moins, ce qui a lien dans Tune de
nos écoles du centre.
Voici, en deux mots, comment les choses se
passent. Le directeur de cet établissement reçoit-ii
ia visite d’un® mère de famille qui lui amène son
fils, soyez sûr que si la mise des visiteurs trahit
la misère, il fait cette réponse invariable qui nous
a été répétée bien souvent : « Je regrette, madame,
je ne puis recevoir votre fils, je n’ai plus une seule
place ; mais pour que ce cher petit ne soit pas
. privé d’instruetion ni exposé aux dangers des rues,
adressez-vous donc à mqn collègue de la rue Au
gustin-Normand avec qui je suis très bien. Vous
lui direz que vous venez de ma part. » Et le tour
est joué. La bonne mère se retire, heureuse après
tout de pouvoir trouver une place pour son fils à
l’école désignée. Le directeur, lui, rit dans sa
moustache.
Comment le tour est joué, comment le directeur
rit dans sa moustache ?
Ce langage ne part donc pas d’un bon naturel ?
Nenni ! Nenni !
Attendez la fin.
Une heure après, se présente-t-il un enfant à la
mise élégante, un enfant de la bourgeoisie, oh I
alors, M. le directeur s’empresse de le recevoir,
on ouvre toutes grandes les portes des classes *
pour lui, il y a toujours une place. Et s’il osait, il
écrirait sur son chapeau : C’est moi qui suis,
directeur aristocratique, pasteur de ce troupeau
(le troupeau, ce sont les enfants des bourgeois).
N’avais-je pas raison de vous dire en commen
çant qu’il existe une autre chasse à l’élève. Car,
n’est-ce pas, dites-moi, chasser un enfant que de.
ne pas le recevoir parce qu’il est pauvre ?
2 e Année — fi 6 56 — Samedi 16 Novembre 1892.
DIX CENTIMES LE NUMERO
2 e Année — 29 Brumaire An 101 — S° 56.
Réveil
ORGANE RÉPUBLICAIN
i
mx DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements G fr. 3 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER,
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
1 5
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
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de leur abonnement, n’auront pas donné
avis de le suspendre seront considérés
comme réabonnés pour le même laps de
temps. Le prix de l’abonnement annuel
est de cinq francs pour un an et de trois
francs pour six mois.
A l’heure où nous écrivons ces lignes, la
Chambre ne s’est pas encore prononcée sur le
projet du gouvernement relatif à une aggra
vation de la loi sur la presse. Mais il est facile
de dégager, des deux jours de discussion qui
viennent d’avoir lieu, un enseignement des
plus utiles pour le parti républicain.
Le gouvernement et la Chambre qui ne
trouvent jamaisle temps nécessaire pour faire
aboutir les lois d’intérêt social qui leur sont
soumises, dépensent de longues heures à des
débats passionnés sur un projet rétrograde.
Cette attitude est à la fois dangereuse et
maladroite.
Croit-on, de bonne foi, qu’il soit intelligent
de la part de M. Loubet de faire croire au pays,
dont il dirige la politique intérieure, que le
pouvoir n’est pas suffisamment armé contre le
crime par les lois existantes ? Si M. Loubet
veut persuader aux timorés, notamment à
la bourgeoisie timide et sans virilité, au nom
de laquelle il gouverne, que l’ère des répres
sions doit s'ouvrir au lieu de celle des réfor
me qu’on attendait, croit-il être l’homme de
la situation, le personnage providentiel des
tiné à sauver la société ? Est-il assez naïf
pour croire qu’après avoir enrayé, grâce à ses
amis les ralliés, la marche en avant du parti
républicain, il ne sera pas remplacé par ceux
qui l’auront compromis ?
Des symptômes graves pour l’idée démocra
tique viennent de se révéler, qui montrent
bien la nécessité de réagir vigoureusement
contre les tendances de M. Loubet, et de ses
amis des centres. On a pu voir, dans la séance
de mercredi, M. de Mun monter à la tribune
pour récriminer à nouveau contre les lois sco
laires et la loi militaire et indiquer les condi
tions de son appui éventuel au gouvernement.
Le seul fait que de telles déclarations puissent
se produire sans être couvertes de huées et
que le ministère ne repousse pas avec indi
gnation la main que lui tendent les éternels
adversaires de nos institutions, devraient
éclairer le parti républicain sur le devoir qui
incombe de trouver un ministre de l’intérieur
qui cesse d’orienter sa politique vers la droite.
On ne fera rien, au point de vue social, tant
qu’on verra les ministres de la République
échanger des sourires avec le cléricaux seus
l’œil bienveillant des modérés.
L’attitude du Ministère est, de plus, outra
geante pour toute la fraction avancée du parti
républicain. Venir dire que les socialistes sont
moralement responsables des explosions dont
la police de M. Loubet ne sait.jamais décou
vrir les auteurs, c’est dépasser la mesure de la
mauvaise foi. C’est employer, pour renforcer
le pouvoir, des moyens d’une honnêteté fort
contestable.
Le pays ne s'y trompera pas. 11 verra les
ficelles de la comédie que l’on joue depuis
quelque temps pour égarer l’opinion publique.
Il se dira que le gouvernement se retranche
dans les mesures d’exception, uniquement
parce qu’il est impuissant à résoudre les ques
tions économiques et sociales de l'heure pré.-
sente, et même a les poser.
11 joue, qu’il le veuille ou non, le rôle de
cette triste Chambre de 1849 qui, par haine
du peuple, restreignait les droits du suffrage
universel et préparait ainsi le coup d’Etat.
M. Loubet procède par les mêmes moyens.
Il laisse faire les cléricaux, — mécontente les
travailleurs qui sont l’appui et la sauvegarde
de la République, — fait tout son possible
pour apeurer les populations qu’il devrait
rassurer, — propose des mesures de répression
qu’il n’appliquera même pas, s’il les fait voter.
Et ce brave homme s’imagine défendre la
République ?
Que ferait-il de plus pour la perdre ?
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Election législative défi 3 novembre 1892
HAUTES-PYRÉNÉES
Arrondissement d'Argelès
M. Alicot, ancien député, républicain, 8,159
voix, élu, en remplacement du marquis de Bre-
teuil, réactionnaire, démissionnaire.
Conseil d’Arrondissement
Dimanche dernier, M. Culine a été nommé
Conseiller d’arrondissement du canton Est de
Roubaix, par 2,928 voix contre 1,706 données à
M. Orange, réactionnaire.
s
La Chambre a continué la discussion du
budget de l’exercice 1893. (Régime des boissons).
Sans entrer dans les détails de ces longs débats,
signalons le vote de l’article décidant que
« l’exercice des débits de boissons est supprimé. »
La commission avait proposé de remplacer les
droits de détails et de circulation sur les vins,
cidres, poirés et hydromels, par un droit général
de consommation.
Mais M. Doumer a obtenu de faire prendre en
considération un amendement disant : « sont
« supprimés tous les droits perçus au profit de
« l’Etat sur les vins, bières, cidres, poirés et
■« hydromels. »
Il a exposé que les impôts sur ces boissons,
dites « boissons hygiéniques », sont mauvais
en eux-mêmes et contraires à la justice ; 349
députés contre 195 ont été de son avis.
Pour remplacer les ressources d’environ quatre-
vingt-dix millions qui se trouvaient ainsi sup
primées du budget, la Chambre a voté les propo
sitions suivantes de M. Furrel :
l ü Suppression du privilège des bouilleurs de
crû ;
2° Augmentation de l’impôt sur l’alcool ;
3 a Augmentation des licences.
La commission du budget aura à présenter les
mesures nécessaires, pour l’application de ces
résolutions, au point de vue budgétaire.
*
* *
Mercredi dernier a commencé la discussion
du projet de loi sur la presse.
Le débat de cette séance n’a rien offert, au
grand désespoir du public accouru en grand
nombre dans les ftribunes, qui étaient bondées.
Du moins, jusqu’au dernier moment, nous ne
connaissons pas encore les conséquences de la
discussion de ce projet de loi qui devait amener
la démission de M. Loubet.
*
* *
Nous avons à signaler la mort de deux person
nages, qui ont eu leurs moments de triste célé
brité.
L’un, M. Ducros, ancien préfet de la Loire et
f du Rhône, qui s’illustra par sa haine passionnée
contre la République.
Après, le 24 mai 1873, surtout, il se signala,
comme préfet du Rhône, par les plus odieuses
vexations qu’il fit subir aux Lyonnais.
On n’a pas oublié son arrêté sur les enterre
ments civils, interdits après sept heures du matin
en été et huit heures en hiver, et auxquels trois
cents personnes au maximum pouvaient assister,
avec défense de prononcer des discours sur la
tombe, sans autorisation préfectorale.
Il est mort à quatre-vingts ans ; nous n’avons
pas à le regretter.
L’autre célèbre est le fameux de Failly, qui fut
ce général de malheur, auteur de la dépêche qu’il
adressa à son sire Napoléon III, après Mentana,
pour lui apprendre que nos chassepots avaient
fait merveille en défendant le pape contre les
Garibaldiens.
Cela le fît, d’ailleurs, entrer au Sénat de l’épo
que.
En 1870, il fut la cause du désastre de Woerth,
en ne sachant pas seconder le maréchal de Mac-
Mahon.
Napoléon III lui conserva, malgré cela, son
commandement du 8 a corps. Hélas ! bientôt après,
le 30 août, il se fit surprendre par les Prussiens à
Beaumont, où, sans avant-postes, sans éclaireurs,
son camp était à découvert. Ses troupes étaient
en train de nettoyer leurs armes, faisaient la
soupe, ou étaient dispersés tout autour du camp,
lorsque tout d’un coup, les Allemands attaquèrent
nos soldats qui se réunirent tant bien que mal,
sans chefs, et se défendirent comme ils purent ; ce
fut, comme on s’en souvient, une déroute qui nous
coûta 3,000 morts ou blessés, et qui eut son contre
coup sur Sedan, où le corps de Failly ne put plus
être d’aucun secours.
Il est mort à 82 ans. S’il était mort à 50 ans, il
aurait épargné bien des malheurs à la France !
JETONS DES ENTREPRENEURS
Havre, 15 novembre 1892.
Citoyen Rédacteur,
J’ai vu dans la Semaine politique du dernier
numéro du Réveil que la Chambre des députés
avait voté un projet de loi concernant les règle
ments d’atelier.
Dans ce projet, je remarque un article qui
oblige les patrons à régler leurs ouvriers au
moins toutes les quinzaines, au comptant, en mon
naie ayant cours légal et dans la fabrique ou le
chantier.
Ces quelques lignes n’ont, l’air de rien ; cepen
dant elles me semblent constituer une réforme
des plus importantes, en ce qu’elle interdit la
coutume si fâcheuse des jetons que l’on remet aux
ouvriers employés aux déchargements de navires,
en paiement de leur travail, coutume si onéreuse
pour beaucoup de travailleurs et dont depuis fort
longtemps l’on réclame la suppression.
Je vous salue, citoyen Rédacteur, bien frater
nellement.
Un Ouvrier.
*
* *
Ainsi que le fait remarquer notre correspon
dant, le vote de l’article 6 de la proposition de loi
dont il parle aura pour conséquence naturelle la
suppression des jetons que l’on remet en paiement
aux ouvriers occupés au débarquement' des na
vires.
Le rapporteur, M. de Saint-Romme, s’est, à ce”
sujet., nettement expliqué ; les paiements, quels
qu’ils soient, a-t-il déclaré, ceux par acompte
comme tous les autres, devront être faits aux ou
vriers « en monnaie ayant cours légal, et non pas
« en cachets sortant d’une officine quelconque
« où Von envoie les ouvriers se nourrir et où,
1892).
Voilà qui est clair. La loi, si elle est définitive
ment votée par le Sénat, visera donc l’usage du
Havre, et nos ouvriers du port pourront enfin être
payés en espèces sonnantes.
Les termes du projet ne laissent aucun doute
à cet égard et ne peuvent donner lieu à aucune
contestation : « Les patrons seront tenus de
* payer leurs ouvriers au comptant, en mon-
a naie ayant cours légal, et dans la fabrique ou
vaillent.
Il est assez étrange, au surplus, que nos dépu
tés, MM. Siegfried et F. Faure, soient restés
muets dans cette circonstance et n’aient pas cru
devoir introduire dans la loi en préparation, une
disposition nette, claire, formelle, concernant le
paiement du travail journalier des ouvriers du
port, ou au moins provoquer à cet égard une dé
claration précise de la part du rapporteur. Car,
quoique les termes de l’article en question nous
paraissent, sans contredit, applicables aux ou
vriers du port du Havre, il aurait été prudent
de les formuler de façon à ce que, dans la pratique,
il n’y ait aucune discussion, aucun conflit possi
ble ; nos députés avaient pour devoir d’intervenir
au moment du débat et de réclamer, dans l’intérêt
des travailleurs du Havre, une précision autour
de laquelle il n’y eut plus eu moyen d’épiloguer
plus tard.
Nous ne comprenons pas, d’ailleurs, pourquoi
ils ne l’ont pas fait. Ils étaient assurément au
courant de la question, qui, fréquemment, a été
soulevée dans notre ville, et récemment encore
la Chambre de commerce dont font partie nos deux
députés, s’en occupait dans sa séance du 14 octobre
dans laquelle M. de Querhoent rappelait ce qui
avait été déjà fait précédemment par cette assem
blée.
La Chambre de commerce, en effet, avait dans
une lettre lue dans la séance du Conseil municipal
du 9 novembre 1887, demandé à l’administration
municipale de nommer une Commission pour exa
miner, de concert avec celle de la Chambre de
commerce, les moyens de remédier aux abus aux
quels donne lieu l’échange des jetons.
Le Conseil municipal désigna MM. Moisy, Le
febvre et Brehm ; la Chambre de commerce avait
désigné MM. de Querhoent, Génestal et Cazavan.
Mais la question ne reçut aucune solution, ainsi
que le déclarèrent, dans la séance municipale du 6 '
mars 1889, M. Rispal, alors adjoint, répondant à
une question de M. G. Nicolle, etM. Genestal.
D une part, disait M. Rispal, les entrepreneurs
n’ont pas voulu renoncer à l’usage des jetons et,
d’autre part, M. le préfet n’a pas pensé qu’il lui
appartient légalement de prendre l’arrêté que la
Commission avait cru devoir lui proposer.
Cette Commission avait pensé que l’on pourrait
peut-être regarder les jetons comme constituant
de la fausse monnaie ou tout au moins comme
une émission illégale de monnaie fiduciaire et
demander, par conséquent, au Préfet d’interdire
cette émission ; mais, a dit, à son tour, M.
Genestal, « le moyen légal fait défaut. Les
« entrepreneurs de déchargements paient leurs
* ouvriers le samedi ; jusque-là ils délivrent aux
« ouvriers des jetons qui constituent la consta-
« tation, la reconnaissance d’une journée ou d’une
« demi-journée de travail ; ces jetons sont accep-
« personnes qu’il emploie un titre constatant
« un travail accompli ; si, d’autre part, un débi-
« tant veut bien échanger ces jetons contre des
« espèces, oa ne peut pas non plus l’en empêcher;
« aucune loi n’y met obstacle. M. le Préfet a
« pensé que l’arrêté qui serait pris pour interdire
« les opérations de cette nature, serait illégal et
« non obligatoire. »
Ceci se disait en mars 1889, et bon s’appuyait
sur une argumentation à base contestable à notre
avis.
Mais aujourd’hui, si le projet de loi est adopté
par le Sénat, le moyen légal ne fera plus défaut,
et 1 ouvrier du port sera en droit d’exiger tout
payement, acompte ou autre, en espèces,
monnaie courante. Nous espérons que le
Sénat confirmera le vote démocratique de la
Chambre. Dans tous les cas, nous engageons les
ouvriers intéressés à agir auprès des sénateurs
pour ne pas perdre l’occasion d’obtenir une réforme
depuis si longtemps attendue.
QUESTIONS SCOLAIRES
Autre chasse à l’Elève
M. Rispal a bien signalé au Conseil municipal
une chasse aux élèves, dont nous avons, d’ailleurs,
ici même, dénoncé un fait, qui consiste à aller
chercher l'enfant à la porte de l’école voisine et,
pardonnez-moi l’expression, sous le nez du collè
gue. Mais il existe une autre chasse à l’élève
absolument contraire, puisqu’elle a pour but d’en
voyer à l’école voisine l’enfant qu’on ne veut pas.
C’est là, du moins, ce qui a lien dans Tune de
nos écoles du centre.
Voici, en deux mots, comment les choses se
passent. Le directeur de cet établissement reçoit-ii
ia visite d’un® mère de famille qui lui amène son
fils, soyez sûr que si la mise des visiteurs trahit
la misère, il fait cette réponse invariable qui nous
a été répétée bien souvent : « Je regrette, madame,
je ne puis recevoir votre fils, je n’ai plus une seule
place ; mais pour que ce cher petit ne soit pas
. privé d’instruetion ni exposé aux dangers des rues,
adressez-vous donc à mqn collègue de la rue Au
gustin-Normand avec qui je suis très bien. Vous
lui direz que vous venez de ma part. » Et le tour
est joué. La bonne mère se retire, heureuse après
tout de pouvoir trouver une place pour son fils à
l’école désignée. Le directeur, lui, rit dans sa
moustache.
Comment le tour est joué, comment le directeur
rit dans sa moustache ?
Ce langage ne part donc pas d’un bon naturel ?
Nenni ! Nenni !
Attendez la fin.
Une heure après, se présente-t-il un enfant à la
mise élégante, un enfant de la bourgeoisie, oh I
alors, M. le directeur s’empresse de le recevoir,
on ouvre toutes grandes les portes des classes *
pour lui, il y a toujours une place. Et s’il osait, il
écrirait sur son chapeau : C’est moi qui suis,
directeur aristocratique, pasteur de ce troupeau
(le troupeau, ce sont les enfants des bourgeois).
N’avais-je pas raison de vous dire en commen
çant qu’il existe une autre chasse à l’élève. Car,
n’est-ce pas, dites-moi, chasser un enfant que de.
ne pas le recevoir parce qu’il est pauvre ?
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