Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1892-11-12
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 novembre 1892 12 novembre 1892
Description : 1892/11/12 (N55). 1892/11/12 (N55).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32632559
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
2* Année — N° B5 — Samedi 12 Novembre 1892.
DIX CENTIMES LE NUMÉRO
2 e Année — 22 Brumaire An 101 — N° 55.
Réveil
Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN
PBIX DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Lé Havre....' 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
ADMINISTRATION k RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
BOMBE
ET
RÉACTION
Il s’est produit, cette semaine, à Paris, un
acte de sauvagerie stupide, qui a coûté la vie
à cinq personnes.
Quels en sont les auteurs ? on l’ignore à
l’heure actuelle. Mais il n’y a dans tout
notre pays, nous devons dire dans tout le
monde civilisé, qu’un cri pour condamner de
tels attentats.
On pouvait croire que le seul désir de tous
les partis était la prompte punition des
criminels. Ce serait mal connaître les passions
politiques que de les croire capables d’abdi
quer devant un fait qui mérite la réprobation
de tous les honnêtes gens.
Il y a des esprits subtils, dans le parti
conservateur, ennemi déclaré de notre démo
cratie, et aussi, hélas ! dans la fraction
modérée du parti républicain qui ont fait
cette découverte : la dynamite serait un
produit de la liberté de la presse et de la
liberté de réunion, et il faudrait réagir bru
talement contre le progrès social. Il est même
un journal, le Gaulois, qui faisant allusion
aux tueries du 2 Décembre, ose écrire cette
phrase qu’un anarchiste ne désavouerait
pas : (.( Il faut une saignée ! » Un autre
journal V Estafette, organe de^M. Ferry,
trouve l’occasion excellente d’assouvir ses
rancunes tonkinoises contre les députés radi
caux qui lui déplaisent. D’après lui, si une
marmite, déposée dans les bureaux de la
Société de Carmaux, a éclaté dans la rue des
Bons-Enfants, ce serait imputable à ceux qui
ont défendu les mineurs de Carmaux contre
la Compagnie. Et l’on désigne clairement
MM. Clémenceau, Millerand et Pelletan,
comme ayant dans F affaire une complicité
morale.
Voilà à quelles aberrations peut conduire
l’esprit de parti ! Voilà à quelles déductions,
on en arrive quand on laisse les ressenti
ments l’emporter sur la sage raison !
Il y a autre chose encore dans ces appré
ciations des rétrogrades ou des modérés.
Il y a un peu de cet affolement bourgeois qui,
au lieu d’envisager une situation avec cou
rage, porte les hommes publics à se retran
cher, sans aucune utilité, dans les mesures
exceptionnelles.
En quoi donc, nous le demandons à tout
esprit impartial, la liberté de la presse et la
liberté de réunion, sont-elles solidaires de
l’anarchie ? En quoi les anarchistes tireraient-
ils profit d’un droit de réunion, eux qui, nous
l’avons constaté au Havre même, ne s’adres
sent au public que pour entendre huer leurs
théories subversives?
En quoi surtout les mineurs de Carmaux
ou leurs amis seraient-ils responsables de ce
crime, alors qu’on se souvient qu’à Carmaux
les anarchistes qui se sont présentés devant les
grévistes pour y propager leurs idées ont été
éconduits plus que vivement.
Un peu de bonne foi, s’il vous plaît. Mes
sieurs les modérés. Et n’exploitez pas contre
le socialisme un lait qu’il réprouve autant
que vous.
On conçoit que la peur fasse déraisonner.
Mais il ne faut pourtant pas que certains ré
publicains aillent de gaîté de cœur sacrifier
nos conquêtes démocratiques à la première
panique.
Autrement il dépendrait d’un fou de chan
ger du jour au lendemain la législation liber
taire d’une société et de modifier même le
régime politique d’un pays.
Cet exemple ne serait pas perdu pour la
réaction et nous verrions sans doute se repro
duire le fait de cet épicier clérical qui, pour
préparer de bonnes élections à une commune
dont la municipalité était trop républicaine,
installait une bombe dans un urinoir.
Avec de tels moyens la propagande réac
tionnaire serait facile et sûre, si le sang froid
venait à faire défaut aux républicains.
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Chambre des Députés. - a La Chambre a
discuté le projet de loi sur l’interaiction du travail
des accouchées.
Ce projet interdit le travail pendant un mois
aux accouchées.
Un amendement de M. Deniau, étendant le bé
néfice de cette disposition aux femmes employées
aux travaux agricoles, a été adopté par 465 voix
contre 44.
La disposition de l’article premier, fixant l’in
demnité journalière à 75 centimes au minimum,
2 francs au maximum, a été remplacée par la
fixation de l’indemnité à 1 franc; sans maximum
ni minimum, proposée par un amendement de
M. Deniau adopté par la Chambre.
M. Lafargue avait voulu une indemnité de 3 à
6 francs, selon le prix des vivres de la localité où
la citoyenne habite.
« La citoyenne, mariée ou non, qui met au
« monde un enfant et qui l’allaite, accomplit un
« travail sacré et une fonction sociale. »
Aussi, demandait-il que l’indemnité fût accordée
pendant plusieurs mois.
Cette expression de fonction sociale , appliquée
à la situation d’une femme accouchée, donné
l’occasion au Temps de s’esclafer. « L’accouche
ment, dit-il, passait jusqu’ici pour une fonction
physiologique ; le voilà élevé du coup à iajiignité
de fonction publique ! »
Eh! il n’y a pas de quoi rire; bièù ufié
fonction sociale , que l’accomplissement dé l’acte
sans lequel la société n’existerait pas l'Nous trou
vons, quant à nous, l’expression de M. Lafargue
très juste ; elle s’applique parfaitement a la situa
tion.
La discussion s’est longuement engagée sur le
point de savoir qui paiera l’indemnité.
La commission proposait le paiement par l’Etat,
le 1 Département,;la Commune, pour un tiers cha
cun. Cette disposition a été vivement combattue
par MM. Lafargue, de Mun, le Ministre des
finances, demandant, l’un, qu’elle soit Supportée
par les patrons ; l’autre, soit par les patrons, soit
par des. sociétés de maternité ; M. Rouvier, par la
Commune et le Département, mais pas par l’Etat.
Finalement, c’est le système de la commission
qui l’a emportée, et l’ensemble de la loi a été
adopté.
Elle n’avait d’ailleurs donné lieu qu’à un débat
assez limité, presque tous les orateurs se réservant
d’examiner la question plus profondément lors de
la deuxième délibération.
•y ■ - *
* *
La Chambre s’est occupée également du projet
de loi tendant à modifier la loi du li mai 1884, sur
les Syndicats professionnels. Cette nouvelle dis-,
position a pour but de permettre aux Syndicats
professionnels de se recruter désormais parmi
d’anciens ouvriers qui n’ont pas quitté depuis
plus de dix ans Vexercice de la profession.
Le projet de loi a été adopté.
* *
*
La Chambre a discité, en outre, le projet relatif
aux règlements d’ateliers, pour lequel l’urgence a
été prononcée.
L’article 1 er en est ainsi conçu :
« Tout patron pourra établir un règlement d’a
telier sur l’organisation du travail, sur la police
de la fabrique, du magasin ou du chantier, sur les
conditions d’admission et de sortie, sur le paie
ment du salaire, en se conformant aux prescrip
tions suivantes. »
MM. Ferroul et Lafargue auraient voulu que
dans les centres industriels, fonctionnât une com
mission de travail, composée en nombre égal de
délégués élus par les ouvriers et par les patrons,
chargée de réviser les règlements d’atelier qui,
jusqu’à présent, sont l’expression exclusive de la
volonté de l’une des parties et à laquelle devrait
être soumis dorénavant tous les règlements d’ate
lier, qui ne pourraient être mis en exécution avant
d’avoir été acceptés par elle.
Leur contre-projet n’a pas été adopté.'
L’article 2 indiquait la manière d’employer le
produit des amendes que le projet autorisait les
règlements d’édicter dans la proportion du dixième,
au plus, du montant du salaire de la journée.
Mais la Chambre a repoussé cette disposition en
adoptant l’amendement suivant de M. Dumay, par
340 voix contre 116 :
« Sont interdits d’une façon absolue tous les
articles de règlements instituant des retenues de
salaires, soit sous le nom d’amendes, soit sous
toute autre interpellation. »
Nous constatons que M. Siegfried n’a pas pris
part au vote de cet important amendement; M.
Faure était retenu à la commission du budget.
Après une modification proposée par M. Bovier-
Lapierre et acceptée par la Chambre, l’article 3
est adopté comme suit :
« Les déductions de soldes pour le travail défec
tueux dit malfaçon, ou détérioration de matières
premières, ne doivent pas être considérées comme
des amendes, mais comme des dommages et inté
rêts, et sont, en cas de contestations, portées
devant le Conseil des prud’hommes ou, à son
défaut, devant le juge de paix. »
L'article 4 stipule que les règlements d’atelier
et leurs modifications devront être soumis à l’ho
mologation du Conseil des prud’hommes ou, à leur
défaut, du juge de paix du canton. Le règlement
devra être imprimé en gros caractère et affiché en
un endroit de la fabrique où il soit en vue. —
Adopté.
L’article 5, après une assez longue discussion et
un renvoi à la commission, a été adopté avec la
rédaction finale suivante :
l’ouvrier ne peut prendre fin qu’après l’expiration
d’un délai, dit de prévenance, dont la durée sera
conforme aux usages locaux, mais ne pourra être
inférieure à une semaine.
« Cette disposition du délai de congé ne s’ap
plique pas aux travaux temporaires dont la durée
est déterminée aji moment de l’embauchage.
« L’ouvrier qui travaille aux pièces doit, en
tous cas, terminer la pièce commencée. Le congé
ne peut être donné avant ce terme que si l’ouvrier
s’est montré incapable de terminer le travail
ou s’est rendu coupable d’une violation très
grave du règlement de la fabrique. Il ne peut
être donné par l’ouvrier que si le patron ne
remplit pas ses obligations envers lui, s’il le
traite d’une manière contraire à la loi ou au
contrat, ou s’il tolère, de la part de quelque
autre, un traitement de ce genre.
c Le tout sans préjudice de l’applicatiQn de
T article 1780 du Coüe civil. »
L’article 6 dit :
« Les patrons sont tenus de régler leurs ouvriers
au moins toutes les quinzaines, au comptant,
en monnaie ayant cours légal, et dans la fabrique
ou le chantier.
« Lorsqu’il n’y aura pas de règlement d’atelier
ou lorsqu’il sera muet sur ce sujet, le payement
devra avoir lieu toutes les semaines.
« Pour le travail aux pièces, les conditions de
payement, jusqu’à l’acnèvement de l’ouvrage,
seront fixés de gré à gré par les intéressés.
« En cas de mise à pied d’une durée supérieure
à trois jours, les salaires dus à l’ouvrier devront
être réglés immédiatement.
« Il est interdit de faire sur le salaire des
ouvriers une retenue quelconque, si cette retenue
ne résulte pas d’une convention écrite entre
l’ouvrier et le patron, sauf dans les cas prévus
par l’article 3 de la présente loi. Le tout sans
préjudice du droit des tiers. Adopté. »
*
* *
Une interpellation de M. Chiché sur le Tonkin,
a eu lieu mardi dernier à la Chambre. Elle a four
ni à M. Jamais l’occasion de déclarer que ses rap
ports avec M.de Lanessan étaient excellents, et la
Chambre a accepté de sa faveur, l’ordre du jour
de M. Delpech, disant que « la Chambre approu
vant les déclarations au gouvernement, passe à
l’ordre du jour ».
fr
* ¥
Cette discussion n’a pas eu, d’ailleurs, toute
l’attention qu’elle comportait.
L’épouvantable catastrophe de l’explosion qui
venait d’avoir lieu au bureau de police de la rue
des Bons-Enfants, remplissait d’une émotion trop
vive les ' députés pour leur permettre d'assister
avec le calme nécessaire à ce débat.
M. Reinach a adressé, au sujet de cet attentat,
une question au ministre de l’intérieur, qui y a
répondu en ces termes :
« Ce matin, vers onze heures, un employé de
l’administration de Carmaux, sortant des bureaux
de cette société, 11, avenue de l’Opéra, a aperçu
sur le palier et contre la porte un engin qui a
éveillé ses soupçons. Il a fait immédiatement
appel au gardien de la paix de service dans la rue
d’Argenteuil, où se trouve une sortie de l’immet -
ble qui porte le numéro 11 de l’avenue de l’Opéra.
Le gardien de la paix et son sous-brigadier se
sont transportés sur les lieux et ont décidé d’en
voyer l’engin au bureau du commissaire de police
du quartier.
« Ils ont eux-mêmes accompagné le garçon de
bureau de l’administration de Carmaux, qui portait
l’engin explosif. Ces trois personnes sont arrivées
au bureau du commissariat, rue des Bons-Enfants,
vers onze heures vingt-cinq ou onze heures et demie.
Que s’est-il passé, et comment l’explosion s’est-elle
produite ? 11 est imposible de le savoir à l’heure
q'ù’il est, car, malheureusement, très malheureu
sement, toutes les personnes qui se trouvaient
dans le bureau n’existent plus. (Sensation.)
« Le secrétaire de M. le commissaire de police,
le sous-brigadier, l’agent et le garçon de bureau de
la mine de Carmaux ont été littéralement pulvé
risés. Uft cinquième agent a été grièvement bles
sé, je crains d’être obligé de dire mortellement
blessé. Il a été transporté à l’Hôtel-Dieu, ou M. 1 ô
garde des sceaux et moi l’avons vu au moment où
on lui prodiguait les soins nécessaires.
« Messieurs, ce n’est pas sans émotion que l’on
constate de tels crimes et de tels méfaits. On se
dirait véritablement revenu à l’état de la bar
barie. »
La droite a profité de cette triste circonstance
pour se livrer à de vives attaques contre le gou
vernement et contre la République. La Chambre
après un débat sans suite et marqué d’interrup
tions continuelles, a fini par adopter l’ordre du
jour suivant, proposé par M. Arène :
« La Chambre indignée des actes odieux qui
viennnent de se produire, et confiante dans la vi
gilance et dans la fermeté du gouvernement pour
en empêcher le retour, passe à l’ordre.
ÉTATS-UNIS
M. Cleveland vient d'être élu à une grande ma
jorité, président des Etats-Unis. r
L’ENTENTE FRANCO-SUISSE
AU CONSEIL MUNICI PA L
Dans sa séance de mercredi dernier, le Conseil
municipal du Havre a adopté, à l’unanimité moins
2 voix, le projet de délibération suivant, proposé
par MM. Acher, Cherfils, Denis Guillot et Mundler.
Vu la délibération du 15 avril 1891, par
laquelle le Conseil municipal, à l’unanimité,
protestait, avec énergie, contre les droits, en
général, manifestement exagérés, proposés
par la Commission parlementaire des Douanes.
Considérant que le Gouvernement a déposé,
le 18 octobre, à la Chambre des Députés, un
projet de loi modifiant le tarif minimum des
Douanes pour un certain nombre de mar
chandises.
Que ce projet comporte des concessions sur
55 articles r alors que le tarif en comprend
796, et que ces concessions ont été, après de
longs pourparlers, réclamées par la Suisse
comme le minimum indispensable en échange
de l’application du tarif conventionnel Suisse
à nos produits.
Considérant que les marchandises exportées
de France en Suisse pendant l’année 1891,
représentent une valeur de 234 millions de
francs, et que les marchandises importées de
Suisse, représentent une valeur de 103 mil
lions ; et qu’en conséquence l’application du
tarif général Suisse à nos produits ne pourrait
que compromettre notre balance commerciale
au profit de l’Allemagne, FAutriche-Hongrie
et l’Italie qui jouissent du tarif convention
nel Suisse, en vertu de traités conclus pour
une période étendue.
Considérant que nos importations et nos
exportations avec l’Angleterre, l’Allemagne
et la Belgique pendant l’année 1891, se chif
frent comme suit :
Importations Exportations
Angleterre 589 millions 1.016 millions
Allemagne 366 » 364 »
Belgique.. 486 » 500 »
et que l’application des nouveaux tarifs ré
duits, à ces pays qui jouissent chez nous du
traitement de la nation la plus favorisée ne
pourrait donc compromettre, non plus; notre
balance commerciale.
Considérant que les droits du tarif des
douanes ont été, en maintes circonstances,
votés au hasard des dispositions du moment;
que les textes adoptés en séance ont même été
modifiés après coup ; qu’une œuvre ainsi accom
plie ne saurait être regardée comme définitive
et immuable.
Considérant qu’en raison des observations
qui précèdent, il ne peut y avoir, même en se
plaçant au point de vue protectionniste, de
raisons sérieuses pour repousser le projet du
Gouvernement.
Considérant que l’intérêt de la France, en
général, et du port du Havre, en particulier,
est d'avoir un régime douanier aussi libéral
que possible.
Félicite le Gouvernement d’avoir négocié
/
DIX CENTIMES LE NUMÉRO
2 e Année — 22 Brumaire An 101 — N° 55.
Réveil
Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN
PBIX DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Lé Havre....' 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
ADMINISTRATION k RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
BOMBE
ET
RÉACTION
Il s’est produit, cette semaine, à Paris, un
acte de sauvagerie stupide, qui a coûté la vie
à cinq personnes.
Quels en sont les auteurs ? on l’ignore à
l’heure actuelle. Mais il n’y a dans tout
notre pays, nous devons dire dans tout le
monde civilisé, qu’un cri pour condamner de
tels attentats.
On pouvait croire que le seul désir de tous
les partis était la prompte punition des
criminels. Ce serait mal connaître les passions
politiques que de les croire capables d’abdi
quer devant un fait qui mérite la réprobation
de tous les honnêtes gens.
Il y a des esprits subtils, dans le parti
conservateur, ennemi déclaré de notre démo
cratie, et aussi, hélas ! dans la fraction
modérée du parti républicain qui ont fait
cette découverte : la dynamite serait un
produit de la liberté de la presse et de la
liberté de réunion, et il faudrait réagir bru
talement contre le progrès social. Il est même
un journal, le Gaulois, qui faisant allusion
aux tueries du 2 Décembre, ose écrire cette
phrase qu’un anarchiste ne désavouerait
pas : (.( Il faut une saignée ! » Un autre
journal V Estafette, organe de^M. Ferry,
trouve l’occasion excellente d’assouvir ses
rancunes tonkinoises contre les députés radi
caux qui lui déplaisent. D’après lui, si une
marmite, déposée dans les bureaux de la
Société de Carmaux, a éclaté dans la rue des
Bons-Enfants, ce serait imputable à ceux qui
ont défendu les mineurs de Carmaux contre
la Compagnie. Et l’on désigne clairement
MM. Clémenceau, Millerand et Pelletan,
comme ayant dans F affaire une complicité
morale.
Voilà à quelles aberrations peut conduire
l’esprit de parti ! Voilà à quelles déductions,
on en arrive quand on laisse les ressenti
ments l’emporter sur la sage raison !
Il y a autre chose encore dans ces appré
ciations des rétrogrades ou des modérés.
Il y a un peu de cet affolement bourgeois qui,
au lieu d’envisager une situation avec cou
rage, porte les hommes publics à se retran
cher, sans aucune utilité, dans les mesures
exceptionnelles.
En quoi donc, nous le demandons à tout
esprit impartial, la liberté de la presse et la
liberté de réunion, sont-elles solidaires de
l’anarchie ? En quoi les anarchistes tireraient-
ils profit d’un droit de réunion, eux qui, nous
l’avons constaté au Havre même, ne s’adres
sent au public que pour entendre huer leurs
théories subversives?
En quoi surtout les mineurs de Carmaux
ou leurs amis seraient-ils responsables de ce
crime, alors qu’on se souvient qu’à Carmaux
les anarchistes qui se sont présentés devant les
grévistes pour y propager leurs idées ont été
éconduits plus que vivement.
Un peu de bonne foi, s’il vous plaît. Mes
sieurs les modérés. Et n’exploitez pas contre
le socialisme un lait qu’il réprouve autant
que vous.
On conçoit que la peur fasse déraisonner.
Mais il ne faut pourtant pas que certains ré
publicains aillent de gaîté de cœur sacrifier
nos conquêtes démocratiques à la première
panique.
Autrement il dépendrait d’un fou de chan
ger du jour au lendemain la législation liber
taire d’une société et de modifier même le
régime politique d’un pays.
Cet exemple ne serait pas perdu pour la
réaction et nous verrions sans doute se repro
duire le fait de cet épicier clérical qui, pour
préparer de bonnes élections à une commune
dont la municipalité était trop républicaine,
installait une bombe dans un urinoir.
Avec de tels moyens la propagande réac
tionnaire serait facile et sûre, si le sang froid
venait à faire défaut aux républicains.
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Chambre des Députés. - a La Chambre a
discuté le projet de loi sur l’interaiction du travail
des accouchées.
Ce projet interdit le travail pendant un mois
aux accouchées.
Un amendement de M. Deniau, étendant le bé
néfice de cette disposition aux femmes employées
aux travaux agricoles, a été adopté par 465 voix
contre 44.
La disposition de l’article premier, fixant l’in
demnité journalière à 75 centimes au minimum,
2 francs au maximum, a été remplacée par la
fixation de l’indemnité à 1 franc; sans maximum
ni minimum, proposée par un amendement de
M. Deniau adopté par la Chambre.
M. Lafargue avait voulu une indemnité de 3 à
6 francs, selon le prix des vivres de la localité où
la citoyenne habite.
« La citoyenne, mariée ou non, qui met au
« monde un enfant et qui l’allaite, accomplit un
« travail sacré et une fonction sociale. »
Aussi, demandait-il que l’indemnité fût accordée
pendant plusieurs mois.
Cette expression de fonction sociale , appliquée
à la situation d’une femme accouchée, donné
l’occasion au Temps de s’esclafer. « L’accouche
ment, dit-il, passait jusqu’ici pour une fonction
physiologique ; le voilà élevé du coup à iajiignité
de fonction publique ! »
Eh! il n’y a pas de quoi rire; bièù ufié
fonction sociale , que l’accomplissement dé l’acte
sans lequel la société n’existerait pas l'Nous trou
vons, quant à nous, l’expression de M. Lafargue
très juste ; elle s’applique parfaitement a la situa
tion.
La discussion s’est longuement engagée sur le
point de savoir qui paiera l’indemnité.
La commission proposait le paiement par l’Etat,
le 1 Département,;la Commune, pour un tiers cha
cun. Cette disposition a été vivement combattue
par MM. Lafargue, de Mun, le Ministre des
finances, demandant, l’un, qu’elle soit Supportée
par les patrons ; l’autre, soit par les patrons, soit
par des. sociétés de maternité ; M. Rouvier, par la
Commune et le Département, mais pas par l’Etat.
Finalement, c’est le système de la commission
qui l’a emportée, et l’ensemble de la loi a été
adopté.
Elle n’avait d’ailleurs donné lieu qu’à un débat
assez limité, presque tous les orateurs se réservant
d’examiner la question plus profondément lors de
la deuxième délibération.
•y ■ - *
* *
La Chambre s’est occupée également du projet
de loi tendant à modifier la loi du li mai 1884, sur
les Syndicats professionnels. Cette nouvelle dis-,
position a pour but de permettre aux Syndicats
professionnels de se recruter désormais parmi
d’anciens ouvriers qui n’ont pas quitté depuis
plus de dix ans Vexercice de la profession.
Le projet de loi a été adopté.
* *
*
La Chambre a discité, en outre, le projet relatif
aux règlements d’ateliers, pour lequel l’urgence a
été prononcée.
L’article 1 er en est ainsi conçu :
« Tout patron pourra établir un règlement d’a
telier sur l’organisation du travail, sur la police
de la fabrique, du magasin ou du chantier, sur les
conditions d’admission et de sortie, sur le paie
ment du salaire, en se conformant aux prescrip
tions suivantes. »
MM. Ferroul et Lafargue auraient voulu que
dans les centres industriels, fonctionnât une com
mission de travail, composée en nombre égal de
délégués élus par les ouvriers et par les patrons,
chargée de réviser les règlements d’atelier qui,
jusqu’à présent, sont l’expression exclusive de la
volonté de l’une des parties et à laquelle devrait
être soumis dorénavant tous les règlements d’ate
lier, qui ne pourraient être mis en exécution avant
d’avoir été acceptés par elle.
Leur contre-projet n’a pas été adopté.'
L’article 2 indiquait la manière d’employer le
produit des amendes que le projet autorisait les
règlements d’édicter dans la proportion du dixième,
au plus, du montant du salaire de la journée.
Mais la Chambre a repoussé cette disposition en
adoptant l’amendement suivant de M. Dumay, par
340 voix contre 116 :
« Sont interdits d’une façon absolue tous les
articles de règlements instituant des retenues de
salaires, soit sous le nom d’amendes, soit sous
toute autre interpellation. »
Nous constatons que M. Siegfried n’a pas pris
part au vote de cet important amendement; M.
Faure était retenu à la commission du budget.
Après une modification proposée par M. Bovier-
Lapierre et acceptée par la Chambre, l’article 3
est adopté comme suit :
« Les déductions de soldes pour le travail défec
tueux dit malfaçon, ou détérioration de matières
premières, ne doivent pas être considérées comme
des amendes, mais comme des dommages et inté
rêts, et sont, en cas de contestations, portées
devant le Conseil des prud’hommes ou, à son
défaut, devant le juge de paix. »
L'article 4 stipule que les règlements d’atelier
et leurs modifications devront être soumis à l’ho
mologation du Conseil des prud’hommes ou, à leur
défaut, du juge de paix du canton. Le règlement
devra être imprimé en gros caractère et affiché en
un endroit de la fabrique où il soit en vue. —
Adopté.
L’article 5, après une assez longue discussion et
un renvoi à la commission, a été adopté avec la
rédaction finale suivante :
d’un délai, dit de prévenance, dont la durée sera
conforme aux usages locaux, mais ne pourra être
inférieure à une semaine.
« Cette disposition du délai de congé ne s’ap
plique pas aux travaux temporaires dont la durée
est déterminée aji moment de l’embauchage.
« L’ouvrier qui travaille aux pièces doit, en
tous cas, terminer la pièce commencée. Le congé
ne peut être donné avant ce terme que si l’ouvrier
s’est montré incapable de terminer le travail
ou s’est rendu coupable d’une violation très
grave du règlement de la fabrique. Il ne peut
être donné par l’ouvrier que si le patron ne
remplit pas ses obligations envers lui, s’il le
traite d’une manière contraire à la loi ou au
contrat, ou s’il tolère, de la part de quelque
autre, un traitement de ce genre.
c Le tout sans préjudice de l’applicatiQn de
T article 1780 du Coüe civil. »
L’article 6 dit :
« Les patrons sont tenus de régler leurs ouvriers
au moins toutes les quinzaines, au comptant,
en monnaie ayant cours légal, et dans la fabrique
ou le chantier.
« Lorsqu’il n’y aura pas de règlement d’atelier
ou lorsqu’il sera muet sur ce sujet, le payement
devra avoir lieu toutes les semaines.
« Pour le travail aux pièces, les conditions de
payement, jusqu’à l’acnèvement de l’ouvrage,
seront fixés de gré à gré par les intéressés.
« En cas de mise à pied d’une durée supérieure
à trois jours, les salaires dus à l’ouvrier devront
être réglés immédiatement.
« Il est interdit de faire sur le salaire des
ouvriers une retenue quelconque, si cette retenue
ne résulte pas d’une convention écrite entre
l’ouvrier et le patron, sauf dans les cas prévus
par l’article 3 de la présente loi. Le tout sans
préjudice du droit des tiers. Adopté. »
*
* *
Une interpellation de M. Chiché sur le Tonkin,
a eu lieu mardi dernier à la Chambre. Elle a four
ni à M. Jamais l’occasion de déclarer que ses rap
ports avec M.de Lanessan étaient excellents, et la
Chambre a accepté de sa faveur, l’ordre du jour
de M. Delpech, disant que « la Chambre approu
vant les déclarations au gouvernement, passe à
l’ordre du jour ».
fr
* ¥
Cette discussion n’a pas eu, d’ailleurs, toute
l’attention qu’elle comportait.
L’épouvantable catastrophe de l’explosion qui
venait d’avoir lieu au bureau de police de la rue
des Bons-Enfants, remplissait d’une émotion trop
vive les ' députés pour leur permettre d'assister
avec le calme nécessaire à ce débat.
M. Reinach a adressé, au sujet de cet attentat,
une question au ministre de l’intérieur, qui y a
répondu en ces termes :
« Ce matin, vers onze heures, un employé de
l’administration de Carmaux, sortant des bureaux
de cette société, 11, avenue de l’Opéra, a aperçu
sur le palier et contre la porte un engin qui a
éveillé ses soupçons. Il a fait immédiatement
appel au gardien de la paix de service dans la rue
d’Argenteuil, où se trouve une sortie de l’immet -
ble qui porte le numéro 11 de l’avenue de l’Opéra.
Le gardien de la paix et son sous-brigadier se
sont transportés sur les lieux et ont décidé d’en
voyer l’engin au bureau du commissaire de police
du quartier.
« Ils ont eux-mêmes accompagné le garçon de
bureau de l’administration de Carmaux, qui portait
l’engin explosif. Ces trois personnes sont arrivées
au bureau du commissariat, rue des Bons-Enfants,
vers onze heures vingt-cinq ou onze heures et demie.
Que s’est-il passé, et comment l’explosion s’est-elle
produite ? 11 est imposible de le savoir à l’heure
q'ù’il est, car, malheureusement, très malheureu
sement, toutes les personnes qui se trouvaient
dans le bureau n’existent plus. (Sensation.)
« Le secrétaire de M. le commissaire de police,
le sous-brigadier, l’agent et le garçon de bureau de
la mine de Carmaux ont été littéralement pulvé
risés. Uft cinquième agent a été grièvement bles
sé, je crains d’être obligé de dire mortellement
blessé. Il a été transporté à l’Hôtel-Dieu, ou M. 1 ô
garde des sceaux et moi l’avons vu au moment où
on lui prodiguait les soins nécessaires.
« Messieurs, ce n’est pas sans émotion que l’on
constate de tels crimes et de tels méfaits. On se
dirait véritablement revenu à l’état de la bar
barie. »
La droite a profité de cette triste circonstance
pour se livrer à de vives attaques contre le gou
vernement et contre la République. La Chambre
après un débat sans suite et marqué d’interrup
tions continuelles, a fini par adopter l’ordre du
jour suivant, proposé par M. Arène :
« La Chambre indignée des actes odieux qui
viennnent de se produire, et confiante dans la vi
gilance et dans la fermeté du gouvernement pour
en empêcher le retour, passe à l’ordre.
ÉTATS-UNIS
M. Cleveland vient d'être élu à une grande ma
jorité, président des Etats-Unis. r
L’ENTENTE FRANCO-SUISSE
AU CONSEIL MUNICI PA L
Dans sa séance de mercredi dernier, le Conseil
municipal du Havre a adopté, à l’unanimité moins
2 voix, le projet de délibération suivant, proposé
par MM. Acher, Cherfils, Denis Guillot et Mundler.
Vu la délibération du 15 avril 1891, par
laquelle le Conseil municipal, à l’unanimité,
protestait, avec énergie, contre les droits, en
général, manifestement exagérés, proposés
par la Commission parlementaire des Douanes.
Considérant que le Gouvernement a déposé,
le 18 octobre, à la Chambre des Députés, un
projet de loi modifiant le tarif minimum des
Douanes pour un certain nombre de mar
chandises.
Que ce projet comporte des concessions sur
55 articles r alors que le tarif en comprend
796, et que ces concessions ont été, après de
longs pourparlers, réclamées par la Suisse
comme le minimum indispensable en échange
de l’application du tarif conventionnel Suisse
à nos produits.
Considérant que les marchandises exportées
de France en Suisse pendant l’année 1891,
représentent une valeur de 234 millions de
francs, et que les marchandises importées de
Suisse, représentent une valeur de 103 mil
lions ; et qu’en conséquence l’application du
tarif général Suisse à nos produits ne pourrait
que compromettre notre balance commerciale
au profit de l’Allemagne, FAutriche-Hongrie
et l’Italie qui jouissent du tarif convention
nel Suisse, en vertu de traités conclus pour
une période étendue.
Considérant que nos importations et nos
exportations avec l’Angleterre, l’Allemagne
et la Belgique pendant l’année 1891, se chif
frent comme suit :
Importations Exportations
Angleterre 589 millions 1.016 millions
Allemagne 366 » 364 »
Belgique.. 486 » 500 »
et que l’application des nouveaux tarifs ré
duits, à ces pays qui jouissent chez nous du
traitement de la nation la plus favorisée ne
pourrait donc compromettre, non plus; notre
balance commerciale.
Considérant que les droits du tarif des
douanes ont été, en maintes circonstances,
votés au hasard des dispositions du moment;
que les textes adoptés en séance ont même été
modifiés après coup ; qu’une œuvre ainsi accom
plie ne saurait être regardée comme définitive
et immuable.
Considérant qu’en raison des observations
qui précèdent, il ne peut y avoir, même en se
plaçant au point de vue protectionniste, de
raisons sérieuses pour repousser le projet du
Gouvernement.
Considérant que l’intérêt de la France, en
général, et du port du Havre, en particulier,
est d'avoir un régime douanier aussi libéral
que possible.
Félicite le Gouvernement d’avoir négocié
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