Titre : "Les Petites A" : organe de la Fédération régionale havraise des amicales laïques : journal mensuel / rédaction M. M. Pimon
Auteur : Fédération régionale havraise des amicales laïques. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1933-05-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328381105
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 mai 1933 01 mai 1933
Description : 1933/05/01 (N79)-1933/05/31. 1933/05/01 (N79)-1933/05/31.
Description : Collection numérique : Fonds régional :... Collection numérique : Fonds régional : Haute-Normandie
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k982717g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-46425
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 08/06/2015
Présidents d’Honneur :
MM. BACH et L. MEYER.
■
— '■ ■ ■
■
Vice-Présidents d’Honneur: i
■
MM. E. VITTECOQ
N. CAPPERON
G. LEFEBVRE \
M“» J. CANTOIS
L. DURIEZ
H. PIMONT
A. BOULINGUE
«S. A. G. N« 3762
Organe de la Fédération Régionale Havraise des Amicales et des Œuvres Laïques
Publicité : A. CANDELLIER
Rédaction : M. PIMONT
5, Rue des Etoupières - LE HAVRE
JOURNAL
jVL ±L! JM fc5 LJ -fcü
109, rue Massillon - LE HAVRE - Tél. 96.9 1
Secrétaire Général de la Fédération :
M. CANDELLIER, Ecole des Etoupières - LE
Téléphone 46.38
HAVRE
Président actif :
M. ARNAUDTIZON
19, Bd Foch, LE HAVRE Tél. 66-51
Secrétariat administratif:
Ecole de Filles
Rue Dauphine - LE HAVRE
Trésorier Général de la Fédération :
M. ROUSSEL, 36, rue Sadi-Carnot, SANVIC - Tél. 60-18
Olièciiaes ^Postaux Rouen 62 34
Un grand conventionnel : HENRI GREGOIRE
Nous avons eu le 29 Murs la ht une fortune
d'entendre une très belle Conférence organi
sée par noire Fédération Havraise des Œuvres
Laïques. M. Gourdeau, député de la Sarthe et
ancien Sous-Secrétaire d'Etat au Tourisme,
conférencier de la Ligue de VEnseignement,
invité par M. L. Meyer, député-maire du Ha
vre, est venu nous parler de l'abbé Grégoire,
le célèbre conventionnel } un des précurseurs
de l'enseignement populaire. L.'assistance,
nombreuse et choisie, sera peut-être heureuse
de retrouver ici un écho affaibli de la belle
et attachante biographie, à laquelle manque
ront, avec les citations et les notes qui l'illus
trèrent, l'atiiLit de la parole éloquente de M.
Gourdeau et la chaleur parfois émouvante de
ses convictions laïques et républicaines.
.xxx
Los fêtes (lu tuuquantonaire de 1 Lcole laï
que, célébrées ou ig3i et ig3a, ont été un
juste hommage, voulu par la Ligue de l’En
seignement, et rendu aux fondateurs de 1 E-
eole obligatoire^ gratuite et laïque. Elles ont
permis de glorifier les réalisations de la 3 me
République, pour l’instruction et l’émancipa
tion du peuple. Mais après le juste tribut d ad
miration rendu à Jean Macé, Jules Ferry, Paul
Bert, Ferdinand Buisson, Edouard Petit, nous
avons le devoir de songer aux litres qu’ont
des précurseurs à notre reconnaissance. Parmi
eux quelques-uns méritent plus particulière
ment d’èlrc remis en mémoire, ayant été in
justement oubliés. Àu premier rang de ces
bienfaiteurs et de ces amis du peuple, nous.
devons citer l’abbé Grégoire qui joua un rôle
de première importance dans les évènements
révolutionnaires qui, à la lin du XVIIl me siè
cle, préparèrent l’évolution de la Cité Mo
derne.
Et il sera infiniment honorable pour nous
laïques qu’on a si souvent accusés de secta
risme et d’intolérance, de proclamer notre
admiration pour un prêtre qui sans rien aban
donner de sa foi religieuse sut, malgré vents
et marées, rester fidèle à ses convictions dé
mocratiques et républicaines, en donnant tou
tes ses forces à la défense du peuple, des fai
bles et des opprimés.
Henri Grégoire, naquit à Vého, en Lorraine
(aujourd’hui département de Meurthe-et-Mo
selle), d’une famille très modeste, en 1750.
Il montra de très bonne heure un goût mar
qué pour l’étude ainsi qu’une intelligence pré
coce. Il fit ses études chez les Jésuites de
Nancy et entra très jeune dans les ordres, il
débuta dans la littérature par un Eloge de la
Poésie (1773) que l’Académie de Nancy cou
ronna. Il exerça son ministère avec la con
science la plus scrupuleuse tout en conti
nuant des études philosophiques et sociales
qui le préparaient au rôle que les évènements
devaient lui faire jouer. En 1788, il cueillit à
Metz, une nouvelle palme académique avec un
Essai sur la régénération physique, morale et
politique des Juifs. Celle œuvre lui acquit
dans sa province une notoriété qui divisa ses
compatriotes dans l’admiration qu’il avait déjà
conquise. Il faut en effet se souvenir que les
Juifs formaient à cette époque en France une
classe de parias relégués dans leurs ghettos,
méprisés de tous les chrétiens dont l’orthodo
xie prétendait venger sur eux l’antique mar
tyre du Christ. On sait d’ailleurs que -de tous
temps, y compris le nôtre, la race juive a été
l’objet d’une hostilité qui n’a pu que la for
tifier en développant ses qualités naturelles
(effet ordinaire des persécutions). Le jeune
prêtre Grégoire osa défendre la race opprimée
au nom des principes de justice, d’égalité, de
tolérance et de fraternité humaine que sa belle
conscience chrétienne donnait comme bases à
Faites vos Achats chez
niLUfiUD Fils
Le Bijoutier de la Place Thiers
(à côté du Printemps)
»o«
Le mieux assorti en Montres et Bijoux
Remise iO % à nos Sociétaires.
la vie des hommes en société. Il fut invité à
venir prêcher à Lunéville et sa renommée se
répandit vit dans toute la province. A la veille
des évènements de 1789, il était curé d’Em-
bermesnil non loin de Lunéville, lorsqu’il fut
envoyé, par le clergé de Lorraine, aux Etats
généraux. C’est alors que commença une vie
active où il devait utiliser ses qualités d’éner
gie, de persévérance et de droiture.
Représentant du bas-clergé, il fut le pre
mier à s’unir au Tiers-Etal pour l’œuvre de
réformes et d’émancipation. Son éloquence el
sa sincérité le mirent tout de suite en vue à
l’Assemblée nationale. 11 fut aux mémorables
séances du Jeu de Paume et de 1 ’Eglis e Saint-
Louis. Le splendide tableau de David peint en
1793 et qui, longtemps gardé au Musée de
Versailles, orne d e nos jours le mur d.u fond
de l’historique Salle du Jeu de Paume, repré
sente comme on le sait l’astronome Bailly,
debout sur une table, lisant la formule du
célèbre serment pendant que les Députés,
remplis d’enthousiasme et de foi, lèvent la
main et que les rideaux des fenêtres, claquant
au vent laissent d’intrépides curieux jouir
de haut, de l’immortel spectacle d’une résolu
tion délirante. Au premier plan, fraternelle
ment enlacés, trois ecclésiastiques, marquent
la belle union du clergé régulier, du clergé
séculier el du clergé protestant pour l’œuvre
d’émancipation commune. Le moine, c’est dom
Gerle le pasteur Rabaut St-Etienne, le prê
tre, c'est l’abbé Grégoire. Infatigable, il figura
à son poste de secrétaire de l’Assemblée natio
nale pendant 72 heures consécutives, tandis
que le peuple prenait la Bastille (i3, i4 et i5
Juillet). Tous ses voles à la Constituante ont
pour but le triomphe de la démocratie.
Préoccupée du règlement des affaires finan
cières de l’Etat, F Assemblée, après avoir voté
les articles fondamentaux de la Constitution,
envisagea diverses solutions : emprunts nou
veaux, dons volontaires, contribution générale
et exceptionnelle du quart du revenu, qui ne
donnèrent que de mauvais résultats. La ban
queroutc devenant imminente, des députés,
l’évêque d’Autun, Talleyrand, appuyé par Mi
rabeau, Sieyès el Grégoire qui gagna à l’idée
une partie des députés ecclésiastiques, propo
sèrent le 10 Octobre 1789 la vente des biens
du Clergé au profit de l'Etat ; sous la condi
tion pour celui-ci d’assurer tous les services
(cuite, entretien des églises, hôpitaux^ écoles,
assistance publique) dont jusqu’alors le clergé
assumait la charge.
Grégoire fut un ardent champion de la
Constitution .civile du clergé, dont l’idée fut
lancée, le 6 Février 1790, par Dupont de Ne
mours, et qui donnait à l’Eglise de France
une constitution calquée sur l’organisation
nouvelle du royaume : 83 évêchés à raison de
i par département (au lieu de i34) et groupés
en 10 métropoles. Métropolitains, évêques e t
curés devaient être élus à la pluralité des suf
frages par les électeurs (Rappelons qu’à l'épo
que « nul n’est vraiment citoyen s’il n'est
propriétaire »). Le pape était informé des élec
tions par les élus qu’il n’avait ni à approuver
ni à improuver. La grande majorité du clergé
refusa le serment de fidélité à la Constitution
civile. Ceux qui refusèrent furent les inser
mentés ou réfractaires. Les autres dont était
Grégoire furent les jureurs, ou constitution
nels ou assermentés.
L’Assemblée constituante s’était séparée en
décidant qu’aucun de ses membres ne pour
rait faire partie de la nouvelle assemblée qui
prit le nom de Législative. Grégoire revint
doùc à la vie sacerdotale et fut élevé en même
temps à l’épiscopat par la Sarthe el le Loir-et-
Cher. Il opta pour l’évêché de Blois et en
1792 entra à la Convention. Dès la première
séance^ porté à la présidence, il appuya Collot
d'Herbois et fil décréter la République, seule
capable à son sens de sauver la France enva
hie et de réaliser les réformes sociales neces
saires. On sait qu’un des premiers actes de la
Convention fut de mettre le roi en accusation.
Absent de Paris pendant le procès de Louis
XVI, Grégoire écrivit pour exprimer l’opinion
qu’il fût condamné. Accuse plus tard d’être
régicide, il prétendit qu'il n’avait jamais en
tendu que ce fût à la peine capitale, mais bien
au bannissement. On a retrouvé son autogra
phe sur lequel les mots : à mort sont barrés
d’un vigoureux trait de plume.
Son œuvre à la Convention fut active et gré-
néreuse. Il fut élu membre du Comité d’ins
truction publique. On sait que la Constituante
et la Législative n’avaient fait que préparer
des rapports et projets de décrets relatifs à
l’enseignement primaire sans avoir le temps
de les discuter ni de lés voter. (Projets de Mi
rabeau, de Talleyrand, de Condorcet). La Con
vention devait aller jusqu’au vote sans pour- J
tant que les évènements de la politique inté
rieure et les soucis de la politique extérieure J
lui permissent d’exécuter les décisions parfois
contradictoires ou incohérentes prises dans la
passion enthousiaste qu’elle témoignait pour
l’organisation de l’enseignement primaire.
Grégoire, qui pendant son année de retraite
parlementaire avait longuement médité sur les
questions que soulevait cette organisation, prit
une part active aux discussions et inspira sou
vent les projets Lanthenas, Sieyès-Daunou-
Lakanal, Lcpelletier, Romme, Bouquier, mais
combattit le nouveau projet Daunou, voté le
3 brumaire an IV, que présida à l’organisa
tion des écoles sous le Directoire, et rapetissa
l’œuvre pédagogique de la Convention.
Grégoire fui tout d’abord frappé de la diffi
culté d’établir un enseignement national dans
un pays où se parlaient une infinité de putois.
Il voulut qu’il fût donné en français partout.
Pour instruire le peuple, il fallait des insti
tuteurs instruits eux-mêmes et bien outillés.
Or les maîtres d’école étaient ignares et les
livres à peu près inexistants. Remarquons en
passant que ces deux préoccupations seront
encore 85 ans après celles de Paul Bert el de
Jules Ferry. Il préconisa la création d'écoles
normales (de normarègle) ? et la rédaction
de manuels scolaires. Comme Dumoustier,
recteur de l’Université de Paris en iG45, com
me l’abbé de La Sall e et l’abbé Courtalon au
XVIII me siècle, il pensait qu’il ne servirait à
rien d’ouvrir des écoles, si l’on n’avait préa
lablement formé de bans maîtres. Il voulait
qu on mît a la dispréi! .on‘de ceux qui ensei
gnent des méthodes simples, des livres bien
faits ; et il pensait qu’il n’y a que les hom
mes supérieurs dans une science, dans un art,
qui soient capables de faire des éléments où
il n’y ait plus rien à désirer. Il songeait à un
enseignement professionnel, à un enseigne
ment agricole et rural, à l’institution des
cours d'adultes et attribuait une grande impor
tance à l’influence éducative des fêtes natio
nales. 11 prit une large part à la création de
l'Institut, du Conservatoire des Arts et mé
tiers, du Bureau des Longitudes.
Cet homme, aux préoccupations universelles,
comme d ailleurs toute 1 élite de nos grands
conventionnels, fut un ennemi acharné de
l’idée de guerre. Il souffrait de voir les Fran
çais s’exterminer dans d’odieuses luttes civi
les, réprouvait toute guerre de conquêtes,
avait foi dans la force d’expansion des géné
reuses idées révolutionnaires qu’il jugeait con
traire à la morale humaine de propager par
la force des armes. 11 rejoignait ainsi l’abbé
de Saint-Pierre et était un précurseur des or
ganisations pacifistes modernes dont il entre
voyait la réalisation possible.
Se souvenant de son Essai de 1788, il avait
profité de son influence à la Constituante
pour faire donner dès 1791 aux Juifs, consi
dérés comme étrangers et soumis à ce titre à
un régime spècial, les droits civils et-politiques
ce qui entraîna le même traitement pour les
Protestants tenus a peu près hors la loi depuis
la Révocation de l’Edit de Nantes, et qui bé
néficièrent en plus de certaines me_sures de
réparation.
Grégoire s’intéressa, toujours au nom de ses
sentiments démocratiques et de fraternité chré
tienne, au sort des hommes de couleur. Sous
la Constituante, il ne put obtenir pour eux
1 application intégrale de la Déclaration des
Droits ; mais il fit concéder l’égalité des
Droits à ceux qui étaient nés de parents libres.
Une curieuse estampe populaire coloriée, con
servée à la Bibliothèque Nationale, est relative
à ce décret du 10 Mai 1791. Elle est intitulée:
Allégorie sur les hommes de couleur, et porte
comme légende : ,
« Les mortels sont égaux. Ce n’est pas la
[naissance.
C’est la seule vertu qui fait la différence ».
Au centre de la composition, la Raison,
avec une règle horizontale touchant leurs lè-
I les, met de niveau le blanc et le noir. Ce der
nier tient, de la main gauche, la déclaration
, des Droits de l’Ilommc, et de la main droite,
le? décret. La Raison est pousré e par la Nature.
Les démons de l’aristocratie, de l'égoïsme et
de la discorde s’enfuient au delà des mers.
Grégoire obtint le 4 Février 1794 de la Con
vention montagnarde, la suppression complète
de l'esclavage dans les colonies françaises. Ro
bespierre lui-même, avait hésité jusque-là de
vant une assimilation des esclaves à des ci
toyens français. Le retard à résoudre la ques
tion avait déterminé aux Antilles et notam
ment à Saint-Domingue une effroyable guerre
servile à partir de Juin 1793.
La Constitution de 1793 reconnaissait for
mellement 1’ « Etre suprême » et le libre .exer
cice des cultes. Elle ne portait aucune atteinte
an culte d’Etat, qui était celui de l’Eglise cons
titutionnelle et assermentée. Mais les a Enra
gés », ennemis des Montagnards « Indul
gents » (Danton, Camille Desmoulins, Hérault
de Séchelles, Fabre d’Eglantine lassés de la
Terreur) trouvant toujours insuffisant le nom
bre des exécutions à une époque où pourtant,
selon le ,mot de Fouquier-Tinville, « les têtes
tombaient comme des ardoises », voulaient
détruire le catholicisme, déchristianiser la
France et établir le culte de la Raison. Ils en
vahirent la Convention et firent décréter que
tout prêtre, fût-il fureur, qui refuserait de
célébrer le nouveau culte et de se « déprêtri-
ser » seéait traqué et mis à mort. Averti, l’ab
bé Grégoire, évêque de Blois court à la Con
vention, paraît à' la tribune revêtu de ses ba
bils ccd ésiastiques et prononce une véhémen
te protestation. Il affirme sa foi religieuse ca
tholique, réclame pour lui et pour tous la
liberté de la croyance, affirme qu’il restera
prêtre et s’engage par serment à ne jamais
paraître en public sous un autre costume que
celui qu’il est fier de porter. Le Comité de
Salut public blâme le ocnventionnel Anarchar-
sis Clools, prussien d’origine, chef de la Com
mune et des Enragés, au nom de la nécessité
de ne pas scandaliser l’Europe.
Grégoire tint son serment toute sa vie, ruais
il dut bientôt devant les excès révolutionnai
res, s’éloigner de Paris pour se consaci’er en
province à son ministère religieux.
Entré successivement aux Cinq Cents au
Corps Législatif et en 1801 au Sénat, il resta
lidèle à ses principes. Cette même année, il
se démit de son évêché, mais continua à exer
cer sa profession d’ecclésiastique, s’appliquant
à soulager les misères, à pacifier les esprits et
à calmer le désarroi moral des populations. Il
ne prit jamais le titre de comte, que Napo
léon donna à tous les sénateurs en masse. Du
reste, comme il s’était opposé à l'érection de
l Empire, il aida à sa chute qu’il salua d’une
diatribe violente contre l’usurpateur, assassin
des libertés publiques et des millions d’hom
mes morts pour la satisfaction de son ambi
tion néfaste et sacrilège de domination uni
verselle.
La Restauration l’élimina de l’Institut. En
rSig, l’Isère l’élut député; mais ses ennemis,
les ultra-royalistes et le clergé tout puissant,
1 écartèrent comme indigne. Les uns lui repro
chaient d’être régicide, accusation dont il se
défendit vivement sans parvenir à s’en laver.
Les autres voyaient en lui le prêtre assermenté,
un des auteurs de la constitution civile du
clergé, serment et conception auxquels il res
tait résolument fidèle. Son adversaire le plus
acharné fut Fouché qui pourtant n’aurait point
dû avoir la conscience tranquille au sujet de
son attachement à la monarchie légitime. 11
fut défendu avec énergie et éloquence par
deux hommes qui s’honorèrent en cette cir
constance : Lafayette et Benjamin Constant.
Dans leur rapport au Parlement, ils le repré
sentèrent comme un homme d’une parfaite
droiture, d’une scrupuleuse honnêteté et d’u
ne dignité de vie susceptible d’être donnée en
TRAVAUX & PRODUITS
pour
AMATEURS PHOTOGRAPHES
exemple.
Dès lors, il vécut dans la retraite et publia
divers ouvrages qui prouvent la ténacité de
ses principes plus qu e la supériorité de son
talent. Parmi ses nombreux ouvrages, les
principaux sont : Essai sur les arbres de la Li
berté (1794). Histoire des sectes religieuses qui
sont nées, se sont modifiées, se sont éteintes
dans les diverses contrées du globe depuis le
commencement du siècle dernier jusqu'à l’é
poque actuelle, (1810 et 1828). — Essai histo-
112 et 114, rue Maréchal-Joffre
-4» : —
Développement du Film.
0/9 8 poses •
rique sur les Libertés de l'Eglise gallicane
(1818). — Influence du christianisme sur la
condition des femmes (1821). — Histoire du
mariage des prêtres (r8à6), — Un’ de ses
grands admirateurs, Ilippolvte Carnot, a publié
en i84o, les Mémoires de l’abbé Grégoire, écrits
en 1808.
La rancune des gens d’Flglise s’exerça con
tre lui jusqu’à sa mort. Atteint d’une grave
maladie et sentant sa fin approcher, il récla
ma les secours de la religion. Les autorités ec
clésiastiques lui envoyèrent de notables émis
saires, chargés de lui arracher in extremis ~ des
témoignages de repentir pour s’en glorifier ;
avec dignité et fermeté, il n’accepta pas de
rétracter son serment à la Constitution civile '
du clergé. Les derniers sacrements lui furent
refusés. Dans une lettre écrite deux jours avant
sa mort, il accepta cette situation, persuadé de
la justice de Celui devant qui il allait compa
raître pour le prier « en faveur de ses enne
mis ».
Cet homme fut un juste et peut-être Vic
tor Hugo pensa-t-il à lui en écrivant « Les Mi
sérables ». L’abbé Myriel ressemble étrange
ment à l’abbé Grégoire (1). Pour nous, qui le
mettons au rang des pédagogues et des pré
curseurs de l’enseignement populaire, il reste
un bel exemple d’honneur et de vertu, de
probité et d’attachement à l’idéal républicain
1 ( > plus pur et le plus élevé.
M. PlMONT.
(i,<) Cependant, il est juste de dire que les
commentateurs de Hugo ne sont pas de cet
avis. Ils ont identifié le modèle de l’abbé My
riel dans l’évêque d’Aix-en-Provence.
LA VIE CONFÉDÉRALE
CmCULAIRE n° 68
L’application de la loi surJa gémination
A la dernière réunion du Conseil général de
la Ligue, nous avions été informés que cer
tains inspecteurs d’Académie croyaient ne pas
pouvoir appliquer la loi relative à la gémina
tion quand une classe enfantine était annexée
à l’une des deux classes spéciales susceptibles
d’être géminées.
Consulté sur cette interprétation de la loi 5
M. Rossel, directeur de l’Enseignement pri
maire a fait la réponse que voici:
« J’ai l’honneur de vous faire connaître que
« les classes enfantines ne sont pas çonsidé
« rées, aux termes de la jurisprudence du
(( Conseil d’Etat, comme classes élémentaires.
« Dès lors, rien ne s’oppose à ce qu’une
« classe enfantine continue à rester annexée
a à une école à deux classes, constituée en
(( application de la loi nouvelle, par la géir/i-
« nation des deux écoles spéciales à une
« classe ».
En portant cette interprétation à la connais
sance des Fédérations, nous pensons qu’aucil-
ne objection ne peut être faite par les Admi
nistrations départementales dans tous les cas
où la gémination serait demandée pour deux
écoles spéciales avec une classe enfantine an
nexée. En cas de difficultés, nos délégués fé
déraux n’auraient qu’à nous en aviser et nous
ferions immédiatement la démarche nécessaire
au Ministère.
Le Secrétaire, E. Glay.
-
LA VIE FEDERALE
Adhésions à la Fédération
1. - Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole
de Saint-Gilles de la Neuville.
2. - Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole
de Bretteville.
3. - Société de Mutualité et de Refraite entre
les Elèves et Anciens Elèves des Ecoles Publi
ques des 6 Cantons du Havre.
VÊTEMENTS
BIEN
HOBS VUS mmâm le G R A N D B A Z A R Un vendant lu Meilleur PM
AA HAVRE — 131. Ru* 4a Paris — LE HAVRE
WÈmààL*mHÉlËËlÊÈËÊÊt^
t
MM. BACH et L. MEYER.
■
— '■ ■ ■
■
Vice-Présidents d’Honneur: i
■
MM. E. VITTECOQ
N. CAPPERON
G. LEFEBVRE \
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L. DURIEZ
H. PIMONT
A. BOULINGUE
«S. A. G. N« 3762
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Publicité : A. CANDELLIER
Rédaction : M. PIMONT
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JOURNAL
jVL ±L! JM fc5 LJ -fcü
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Un grand conventionnel : HENRI GREGOIRE
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d'entendre une très belle Conférence organi
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Laïques. M. Gourdeau, député de la Sarthe et
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invité par M. L. Meyer, député-maire du Ha
vre, est venu nous parler de l'abbé Grégoire,
le célèbre conventionnel } un des précurseurs
de l'enseignement populaire. L.'assistance,
nombreuse et choisie, sera peut-être heureuse
de retrouver ici un écho affaibli de la belle
et attachante biographie, à laquelle manque
ront, avec les citations et les notes qui l'illus
trèrent, l'atiiLit de la parole éloquente de M.
Gourdeau et la chaleur parfois émouvante de
ses convictions laïques et républicaines.
.xxx
Los fêtes (lu tuuquantonaire de 1 Lcole laï
que, célébrées ou ig3i et ig3a, ont été un
juste hommage, voulu par la Ligue de l’En
seignement, et rendu aux fondateurs de 1 E-
eole obligatoire^ gratuite et laïque. Elles ont
permis de glorifier les réalisations de la 3 me
République, pour l’instruction et l’émancipa
tion du peuple. Mais après le juste tribut d ad
miration rendu à Jean Macé, Jules Ferry, Paul
Bert, Ferdinand Buisson, Edouard Petit, nous
avons le devoir de songer aux litres qu’ont
des précurseurs à notre reconnaissance. Parmi
eux quelques-uns méritent plus particulière
ment d’èlrc remis en mémoire, ayant été in
justement oubliés. Àu premier rang de ces
bienfaiteurs et de ces amis du peuple, nous.
devons citer l’abbé Grégoire qui joua un rôle
de première importance dans les évènements
révolutionnaires qui, à la lin du XVIIl me siè
cle, préparèrent l’évolution de la Cité Mo
derne.
Et il sera infiniment honorable pour nous
laïques qu’on a si souvent accusés de secta
risme et d’intolérance, de proclamer notre
admiration pour un prêtre qui sans rien aban
donner de sa foi religieuse sut, malgré vents
et marées, rester fidèle à ses convictions dé
mocratiques et républicaines, en donnant tou
tes ses forces à la défense du peuple, des fai
bles et des opprimés.
Henri Grégoire, naquit à Vého, en Lorraine
(aujourd’hui département de Meurthe-et-Mo
selle), d’une famille très modeste, en 1750.
Il montra de très bonne heure un goût mar
qué pour l’étude ainsi qu’une intelligence pré
coce. Il fit ses études chez les Jésuites de
Nancy et entra très jeune dans les ordres, il
débuta dans la littérature par un Eloge de la
Poésie (1773) que l’Académie de Nancy cou
ronna. Il exerça son ministère avec la con
science la plus scrupuleuse tout en conti
nuant des études philosophiques et sociales
qui le préparaient au rôle que les évènements
devaient lui faire jouer. En 1788, il cueillit à
Metz, une nouvelle palme académique avec un
Essai sur la régénération physique, morale et
politique des Juifs. Celle œuvre lui acquit
dans sa province une notoriété qui divisa ses
compatriotes dans l’admiration qu’il avait déjà
conquise. Il faut en effet se souvenir que les
Juifs formaient à cette époque en France une
classe de parias relégués dans leurs ghettos,
méprisés de tous les chrétiens dont l’orthodo
xie prétendait venger sur eux l’antique mar
tyre du Christ. On sait d’ailleurs que -de tous
temps, y compris le nôtre, la race juive a été
l’objet d’une hostilité qui n’a pu que la for
tifier en développant ses qualités naturelles
(effet ordinaire des persécutions). Le jeune
prêtre Grégoire osa défendre la race opprimée
au nom des principes de justice, d’égalité, de
tolérance et de fraternité humaine que sa belle
conscience chrétienne donnait comme bases à
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niLUfiUD Fils
Le Bijoutier de la Place Thiers
(à côté du Printemps)
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Le mieux assorti en Montres et Bijoux
Remise iO % à nos Sociétaires.
la vie des hommes en société. Il fut invité à
venir prêcher à Lunéville et sa renommée se
répandit vit dans toute la province. A la veille
des évènements de 1789, il était curé d’Em-
bermesnil non loin de Lunéville, lorsqu’il fut
envoyé, par le clergé de Lorraine, aux Etats
généraux. C’est alors que commença une vie
active où il devait utiliser ses qualités d’éner
gie, de persévérance et de droiture.
Représentant du bas-clergé, il fut le pre
mier à s’unir au Tiers-Etal pour l’œuvre de
réformes et d’émancipation. Son éloquence el
sa sincérité le mirent tout de suite en vue à
l’Assemblée nationale. 11 fut aux mémorables
séances du Jeu de Paume et de 1 ’Eglis e Saint-
Louis. Le splendide tableau de David peint en
1793 et qui, longtemps gardé au Musée de
Versailles, orne d e nos jours le mur d.u fond
de l’historique Salle du Jeu de Paume, repré
sente comme on le sait l’astronome Bailly,
debout sur une table, lisant la formule du
célèbre serment pendant que les Députés,
remplis d’enthousiasme et de foi, lèvent la
main et que les rideaux des fenêtres, claquant
au vent laissent d’intrépides curieux jouir
de haut, de l’immortel spectacle d’une résolu
tion délirante. Au premier plan, fraternelle
ment enlacés, trois ecclésiastiques, marquent
la belle union du clergé régulier, du clergé
séculier el du clergé protestant pour l’œuvre
d’émancipation commune. Le moine, c’est dom
Gerle le pasteur Rabaut St-Etienne, le prê
tre, c'est l’abbé Grégoire. Infatigable, il figura
à son poste de secrétaire de l’Assemblée natio
nale pendant 72 heures consécutives, tandis
que le peuple prenait la Bastille (i3, i4 et i5
Juillet). Tous ses voles à la Constituante ont
pour but le triomphe de la démocratie.
Préoccupée du règlement des affaires finan
cières de l’Etat, F Assemblée, après avoir voté
les articles fondamentaux de la Constitution,
envisagea diverses solutions : emprunts nou
veaux, dons volontaires, contribution générale
et exceptionnelle du quart du revenu, qui ne
donnèrent que de mauvais résultats. La ban
queroutc devenant imminente, des députés,
l’évêque d’Autun, Talleyrand, appuyé par Mi
rabeau, Sieyès el Grégoire qui gagna à l’idée
une partie des députés ecclésiastiques, propo
sèrent le 10 Octobre 1789 la vente des biens
du Clergé au profit de l'Etat ; sous la condi
tion pour celui-ci d’assurer tous les services
(cuite, entretien des églises, hôpitaux^ écoles,
assistance publique) dont jusqu’alors le clergé
assumait la charge.
Grégoire fut un ardent champion de la
Constitution .civile du clergé, dont l’idée fut
lancée, le 6 Février 1790, par Dupont de Ne
mours, et qui donnait à l’Eglise de France
une constitution calquée sur l’organisation
nouvelle du royaume : 83 évêchés à raison de
i par département (au lieu de i34) et groupés
en 10 métropoles. Métropolitains, évêques e t
curés devaient être élus à la pluralité des suf
frages par les électeurs (Rappelons qu’à l'épo
que « nul n’est vraiment citoyen s’il n'est
propriétaire »). Le pape était informé des élec
tions par les élus qu’il n’avait ni à approuver
ni à improuver. La grande majorité du clergé
refusa le serment de fidélité à la Constitution
civile. Ceux qui refusèrent furent les inser
mentés ou réfractaires. Les autres dont était
Grégoire furent les jureurs, ou constitution
nels ou assermentés.
L’Assemblée constituante s’était séparée en
décidant qu’aucun de ses membres ne pour
rait faire partie de la nouvelle assemblée qui
prit le nom de Législative. Grégoire revint
doùc à la vie sacerdotale et fut élevé en même
temps à l’épiscopat par la Sarthe el le Loir-et-
Cher. Il opta pour l’évêché de Blois et en
1792 entra à la Convention. Dès la première
séance^ porté à la présidence, il appuya Collot
d'Herbois et fil décréter la République, seule
capable à son sens de sauver la France enva
hie et de réaliser les réformes sociales neces
saires. On sait qu’un des premiers actes de la
Convention fut de mettre le roi en accusation.
Absent de Paris pendant le procès de Louis
XVI, Grégoire écrivit pour exprimer l’opinion
qu’il fût condamné. Accuse plus tard d’être
régicide, il prétendit qu'il n’avait jamais en
tendu que ce fût à la peine capitale, mais bien
au bannissement. On a retrouvé son autogra
phe sur lequel les mots : à mort sont barrés
d’un vigoureux trait de plume.
Son œuvre à la Convention fut active et gré-
néreuse. Il fut élu membre du Comité d’ins
truction publique. On sait que la Constituante
et la Législative n’avaient fait que préparer
des rapports et projets de décrets relatifs à
l’enseignement primaire sans avoir le temps
de les discuter ni de lés voter. (Projets de Mi
rabeau, de Talleyrand, de Condorcet). La Con
vention devait aller jusqu’au vote sans pour- J
tant que les évènements de la politique inté
rieure et les soucis de la politique extérieure J
lui permissent d’exécuter les décisions parfois
contradictoires ou incohérentes prises dans la
passion enthousiaste qu’elle témoignait pour
l’organisation de l’enseignement primaire.
Grégoire, qui pendant son année de retraite
parlementaire avait longuement médité sur les
questions que soulevait cette organisation, prit
une part active aux discussions et inspira sou
vent les projets Lanthenas, Sieyès-Daunou-
Lakanal, Lcpelletier, Romme, Bouquier, mais
combattit le nouveau projet Daunou, voté le
3 brumaire an IV, que présida à l’organisa
tion des écoles sous le Directoire, et rapetissa
l’œuvre pédagogique de la Convention.
Grégoire fui tout d’abord frappé de la diffi
culté d’établir un enseignement national dans
un pays où se parlaient une infinité de putois.
Il voulut qu’il fût donné en français partout.
Pour instruire le peuple, il fallait des insti
tuteurs instruits eux-mêmes et bien outillés.
Or les maîtres d’école étaient ignares et les
livres à peu près inexistants. Remarquons en
passant que ces deux préoccupations seront
encore 85 ans après celles de Paul Bert el de
Jules Ferry. Il préconisa la création d'écoles
normales (de normarègle) ? et la rédaction
de manuels scolaires. Comme Dumoustier,
recteur de l’Université de Paris en iG45, com
me l’abbé de La Sall e et l’abbé Courtalon au
XVIII me siècle, il pensait qu’il ne servirait à
rien d’ouvrir des écoles, si l’on n’avait préa
lablement formé de bans maîtres. Il voulait
qu on mît a la dispréi! .on‘de ceux qui ensei
gnent des méthodes simples, des livres bien
faits ; et il pensait qu’il n’y a que les hom
mes supérieurs dans une science, dans un art,
qui soient capables de faire des éléments où
il n’y ait plus rien à désirer. Il songeait à un
enseignement professionnel, à un enseigne
ment agricole et rural, à l’institution des
cours d'adultes et attribuait une grande impor
tance à l’influence éducative des fêtes natio
nales. 11 prit une large part à la création de
l'Institut, du Conservatoire des Arts et mé
tiers, du Bureau des Longitudes.
Cet homme, aux préoccupations universelles,
comme d ailleurs toute 1 élite de nos grands
conventionnels, fut un ennemi acharné de
l’idée de guerre. Il souffrait de voir les Fran
çais s’exterminer dans d’odieuses luttes civi
les, réprouvait toute guerre de conquêtes,
avait foi dans la force d’expansion des géné
reuses idées révolutionnaires qu’il jugeait con
traire à la morale humaine de propager par
la force des armes. 11 rejoignait ainsi l’abbé
de Saint-Pierre et était un précurseur des or
ganisations pacifistes modernes dont il entre
voyait la réalisation possible.
Se souvenant de son Essai de 1788, il avait
profité de son influence à la Constituante
pour faire donner dès 1791 aux Juifs, consi
dérés comme étrangers et soumis à ce titre à
un régime spècial, les droits civils et-politiques
ce qui entraîna le même traitement pour les
Protestants tenus a peu près hors la loi depuis
la Révocation de l’Edit de Nantes, et qui bé
néficièrent en plus de certaines me_sures de
réparation.
Grégoire s’intéressa, toujours au nom de ses
sentiments démocratiques et de fraternité chré
tienne, au sort des hommes de couleur. Sous
la Constituante, il ne put obtenir pour eux
1 application intégrale de la Déclaration des
Droits ; mais il fit concéder l’égalité des
Droits à ceux qui étaient nés de parents libres.
Une curieuse estampe populaire coloriée, con
servée à la Bibliothèque Nationale, est relative
à ce décret du 10 Mai 1791. Elle est intitulée:
Allégorie sur les hommes de couleur, et porte
comme légende : ,
« Les mortels sont égaux. Ce n’est pas la
[naissance.
C’est la seule vertu qui fait la différence ».
Au centre de la composition, la Raison,
avec une règle horizontale touchant leurs lè-
I les, met de niveau le blanc et le noir. Ce der
nier tient, de la main gauche, la déclaration
, des Droits de l’Ilommc, et de la main droite,
le? décret. La Raison est pousré e par la Nature.
Les démons de l’aristocratie, de l'égoïsme et
de la discorde s’enfuient au delà des mers.
Grégoire obtint le 4 Février 1794 de la Con
vention montagnarde, la suppression complète
de l'esclavage dans les colonies françaises. Ro
bespierre lui-même, avait hésité jusque-là de
vant une assimilation des esclaves à des ci
toyens français. Le retard à résoudre la ques
tion avait déterminé aux Antilles et notam
ment à Saint-Domingue une effroyable guerre
servile à partir de Juin 1793.
La Constitution de 1793 reconnaissait for
mellement 1’ « Etre suprême » et le libre .exer
cice des cultes. Elle ne portait aucune atteinte
an culte d’Etat, qui était celui de l’Eglise cons
titutionnelle et assermentée. Mais les a Enra
gés », ennemis des Montagnards « Indul
gents » (Danton, Camille Desmoulins, Hérault
de Séchelles, Fabre d’Eglantine lassés de la
Terreur) trouvant toujours insuffisant le nom
bre des exécutions à une époque où pourtant,
selon le ,mot de Fouquier-Tinville, « les têtes
tombaient comme des ardoises », voulaient
détruire le catholicisme, déchristianiser la
France et établir le culte de la Raison. Ils en
vahirent la Convention et firent décréter que
tout prêtre, fût-il fureur, qui refuserait de
célébrer le nouveau culte et de se « déprêtri-
ser » seéait traqué et mis à mort. Averti, l’ab
bé Grégoire, évêque de Blois court à la Con
vention, paraît à' la tribune revêtu de ses ba
bils ccd ésiastiques et prononce une véhémen
te protestation. Il affirme sa foi religieuse ca
tholique, réclame pour lui et pour tous la
liberté de la croyance, affirme qu’il restera
prêtre et s’engage par serment à ne jamais
paraître en public sous un autre costume que
celui qu’il est fier de porter. Le Comité de
Salut public blâme le ocnventionnel Anarchar-
sis Clools, prussien d’origine, chef de la Com
mune et des Enragés, au nom de la nécessité
de ne pas scandaliser l’Europe.
Grégoire tint son serment toute sa vie, ruais
il dut bientôt devant les excès révolutionnai
res, s’éloigner de Paris pour se consaci’er en
province à son ministère religieux.
Entré successivement aux Cinq Cents au
Corps Législatif et en 1801 au Sénat, il resta
lidèle à ses principes. Cette même année, il
se démit de son évêché, mais continua à exer
cer sa profession d’ecclésiastique, s’appliquant
à soulager les misères, à pacifier les esprits et
à calmer le désarroi moral des populations. Il
ne prit jamais le titre de comte, que Napo
léon donna à tous les sénateurs en masse. Du
reste, comme il s’était opposé à l'érection de
l Empire, il aida à sa chute qu’il salua d’une
diatribe violente contre l’usurpateur, assassin
des libertés publiques et des millions d’hom
mes morts pour la satisfaction de son ambi
tion néfaste et sacrilège de domination uni
verselle.
La Restauration l’élimina de l’Institut. En
rSig, l’Isère l’élut député; mais ses ennemis,
les ultra-royalistes et le clergé tout puissant,
1 écartèrent comme indigne. Les uns lui repro
chaient d’être régicide, accusation dont il se
défendit vivement sans parvenir à s’en laver.
Les autres voyaient en lui le prêtre assermenté,
un des auteurs de la constitution civile du
clergé, serment et conception auxquels il res
tait résolument fidèle. Son adversaire le plus
acharné fut Fouché qui pourtant n’aurait point
dû avoir la conscience tranquille au sujet de
son attachement à la monarchie légitime. 11
fut défendu avec énergie et éloquence par
deux hommes qui s’honorèrent en cette cir
constance : Lafayette et Benjamin Constant.
Dans leur rapport au Parlement, ils le repré
sentèrent comme un homme d’une parfaite
droiture, d’une scrupuleuse honnêteté et d’u
ne dignité de vie susceptible d’être donnée en
TRAVAUX & PRODUITS
pour
AMATEURS PHOTOGRAPHES
exemple.
Dès lors, il vécut dans la retraite et publia
divers ouvrages qui prouvent la ténacité de
ses principes plus qu e la supériorité de son
talent. Parmi ses nombreux ouvrages, les
principaux sont : Essai sur les arbres de la Li
berté (1794). Histoire des sectes religieuses qui
sont nées, se sont modifiées, se sont éteintes
dans les diverses contrées du globe depuis le
commencement du siècle dernier jusqu'à l’é
poque actuelle, (1810 et 1828). — Essai histo-
112 et 114, rue Maréchal-Joffre
-4» : —
Développement du Film.
0/9 8 poses •
rique sur les Libertés de l'Eglise gallicane
(1818). — Influence du christianisme sur la
condition des femmes (1821). — Histoire du
mariage des prêtres (r8à6), — Un’ de ses
grands admirateurs, Ilippolvte Carnot, a publié
en i84o, les Mémoires de l’abbé Grégoire, écrits
en 1808.
La rancune des gens d’Flglise s’exerça con
tre lui jusqu’à sa mort. Atteint d’une grave
maladie et sentant sa fin approcher, il récla
ma les secours de la religion. Les autorités ec
clésiastiques lui envoyèrent de notables émis
saires, chargés de lui arracher in extremis ~ des
témoignages de repentir pour s’en glorifier ;
avec dignité et fermeté, il n’accepta pas de
rétracter son serment à la Constitution civile '
du clergé. Les derniers sacrements lui furent
refusés. Dans une lettre écrite deux jours avant
sa mort, il accepta cette situation, persuadé de
la justice de Celui devant qui il allait compa
raître pour le prier « en faveur de ses enne
mis ».
Cet homme fut un juste et peut-être Vic
tor Hugo pensa-t-il à lui en écrivant « Les Mi
sérables ». L’abbé Myriel ressemble étrange
ment à l’abbé Grégoire (1). Pour nous, qui le
mettons au rang des pédagogues et des pré
curseurs de l’enseignement populaire, il reste
un bel exemple d’honneur et de vertu, de
probité et d’attachement à l’idéal républicain
1 ( > plus pur et le plus élevé.
M. PlMONT.
(i,<) Cependant, il est juste de dire que les
commentateurs de Hugo ne sont pas de cet
avis. Ils ont identifié le modèle de l’abbé My
riel dans l’évêque d’Aix-en-Provence.
LA VIE CONFÉDÉRALE
CmCULAIRE n° 68
L’application de la loi surJa gémination
A la dernière réunion du Conseil général de
la Ligue, nous avions été informés que cer
tains inspecteurs d’Académie croyaient ne pas
pouvoir appliquer la loi relative à la gémina
tion quand une classe enfantine était annexée
à l’une des deux classes spéciales susceptibles
d’être géminées.
Consulté sur cette interprétation de la loi 5
M. Rossel, directeur de l’Enseignement pri
maire a fait la réponse que voici:
« J’ai l’honneur de vous faire connaître que
« les classes enfantines ne sont pas çonsidé
« rées, aux termes de la jurisprudence du
(( Conseil d’Etat, comme classes élémentaires.
« Dès lors, rien ne s’oppose à ce qu’une
« classe enfantine continue à rester annexée
a à une école à deux classes, constituée en
(( application de la loi nouvelle, par la géir/i-
« nation des deux écoles spéciales à une
« classe ».
En portant cette interprétation à la connais
sance des Fédérations, nous pensons qu’aucil-
ne objection ne peut être faite par les Admi
nistrations départementales dans tous les cas
où la gémination serait demandée pour deux
écoles spéciales avec une classe enfantine an
nexée. En cas de difficultés, nos délégués fé
déraux n’auraient qu’à nous en aviser et nous
ferions immédiatement la démarche nécessaire
au Ministère.
Le Secrétaire, E. Glay.
-
LA VIE FEDERALE
Adhésions à la Fédération
1. - Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole
de Saint-Gilles de la Neuville.
2. - Amicale des Anciens Elèves de l’Ecole
de Bretteville.
3. - Société de Mutualité et de Refraite entre
les Elèves et Anciens Elèves des Ecoles Publi
ques des 6 Cantons du Havre.
VÊTEMENTS
BIEN
HOBS VUS mmâm le G R A N D B A Z A R Un vendant lu Meilleur PM
AA HAVRE — 131. Ru* 4a Paris — LE HAVRE
WÈmààL*mHÉlËËlÊÈËÊÊt^
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