28* ANNEE
MENSUEL
JANVIER-FÉVRIER 1926
9
UNIVERSEL
Fondé en 1898, supprimé par la censure militaire pendant la Guerre mondiale
Mouoement Pacifique Chrétien
« L'INTERNATIONALE DE L AMOUR »
Directeur-Fondateur : Henri HUCHET.
REDACTION :
D r M. DUMESNIL, Rédacteur en chef. — Henriette DUMESNIL-HUCHET, Secrétaire
ERMENONVILLE, Général PERCIN, Frédéric BONHOMME, GRILLOT DE GIVRY,
Louis GUÉTANT, Claire GÉNIAUX, Joël THÉZARD, Dr Henry MARIAVÉ,
D r M. J. ELLIOTT, Mme MARFURT-TORFS, Pr Hermann KUTTER
Sophie TEDING van BERKHOUT van TAACK TRAKRANEN
Les articles n’engagent que leurs auteurs
ADMINISTRATION :
Abonnement
:
Chèques postaux :
Un an
5 francs.
D r DUMESNIL
Le numéro
O fr. 25
PARIS n* 217.31
Souscriptions :
Membre adhérent 5 Irancs,
Membre actif 1 O francs.
Membre militant..... 20 francs
37, Rue Poussin, PARIS, XVI e . Tél. : Auteuil 36-98
M. P. C.
La multiplicité des sociétés chrétiennes
de la Paix depuis l’Armistice exige que
le Mouvement Pacifique Chrétien, fondé
en Suisse en 1898, expose ses principes
pour éviter tout malentendu.
il y a donc lieu de rappeler à nos amis
de France et de l’Etranger que le M. P. C.
n’a aucune attache confessionnelle ou po
litique. Que l’Idéal est toujours le même :
Réconciliation franco-allemande pour
réaliser les Etats-Unis d’Europe.
Du reste, le programme de notre action
est publié à la 4 e page de l 'Universel en
quatre langues : ALLEMAND. ANGLAIS,
FRANÇAIS, HOLLANDAIS
Tous les renseignements, communications,
et souscriptions doivent être adressés au
Secrétaire Général, le docteur Marius Du-
rnesnil ou à l’Agent international, le Pasteur
Henri Huchet.
Il n’y a aucun engagement financier ou
moral pour les Membres adhérents, actifs et
militants, en dehors du témoignage spirituel
et de la contribution volontaire.
Toute personne peut, sur simple demande,
recevoir gratuitement le Journal, de la Paix
par l’Evangile.
Le Siège social est : 3 y Rue Poussin, 3 y ,
PARIS XVI e .
©®©©©©©©©«©©©©©©©©©©
Au Mouvement de
la Jeunesse allemande
A tous les camarades connus et inconnus
de la jeunesse Allemande qui travaillent et
qui luttent pour le progrès de notre idéal
commun de paix et de fraternité j’adresse
avec tous leurs camarades Français, un cor
dial salut à l’occasion de notre fête. En effet,
nous aussi, nous avons une fête particulière.
Les hommes tournés vers le passé et pour
lesquels une forte haine constitue encore un
idéal, ont leurs fêtes qui commémorent gé
néralement un massacre ou une boucherie
humaine, une victoire accompagnée de la
ruine de milliers de familles, de la souffrance
des mutilés, de la détresse des veuves, des
orphelins et des foyers en deuil. Ces fêtes
sopt particulières à chaque pays, à chaque
peuple, même les tribus les plus arriérées
ont les leurs, s’enorgueillissant de quelque
victoire remportée sur la tribu voisine.
Notre fête à nous, pacifistes, est commune
à toute l’humanité blanche. C’tbst celle qui
a été chantée par les choeurs des anges célé
brant la venue du fils de Dieu et proclamant
l’avènement de la Paix sur la terre pour les
hommes de bonne volonté. Certains hommes
sont fiers de leur vieux Dieu, le nôtre c’est
le jeune Dieu de l’amour et de la Paix, celui
qui a interdit aux hommes de porter les
armes et qui leur a ordonné d’aimer non
seulement leurs amis mais aussi leurs enne
mis, c’est-à-dire qu’il leur a ordonné de ne
plus connaître d’ennemis. Le Dieu du passé
était le Dieu de la colère, de la vengeance et
des armées. Christ lui, est le prince de 1 .
Paix et le patron des pacifistes, sa fête est
donc notre fête particulière. Cependant la
force de l'idéal qu’il a apporté au monde
est telle, que tous les hommes, même les
plus aveuglés par les passions et les supe s-
titions du passé célèbrent Noël, u weih nacht”,
fête de la paix sur la terre. Nous en sommes
heureux, car loin de vouloir faire de notre
idéal une nouvelle source de division entre
les hommes en faisant la guerre à ceux qui
ne pensent pas comme nous, nous n’avons
qu'un désir celui de le partager avec tous
nos frères en humanité. Nos ennemis ne
sont pas les hommes, qui pour la plupart
sont animés par un idéal respectable, mais
seulement les erreurs qui les empêchent de
suivre la voix de celui qui a dit : « Aimez-
vous les uns les autres ».
Notre travail, le devoir sacré qu’il nous
faut remplir vis-à-vis de l’avenir de l’huma
nité, consiste à dissiper ces erreurs qii.
je, fis - oqo
comme de noirs nuages empêchent les
hommes de percevoir la'lumière éclatante,
la richesse du message que le Christ, résu
mant l’enseignement de tous les surhommes
du passé, Socrate et Confucius, Zoroastre et
Bouddha, est venu nous apporter.
L’année qui finit a vu s’accomplir à Ge
nève et à Locarno beaucoup de bon travail.
Mais si important qu’il soit nous ne devons
pas nous endormir dans une trompeuse sé
curité! On sait, en effet, que les garanties
diplomatiques ne valent pas grand chose si
elles ne sont pas renforcées par une adhé
sion complète des peuples. Les diplomates
et les gouvernements préparent les plans du
futur palais de l’humanité, mais c’est aux
peuples de le bâtir, de transformer ce qui
n’est encore qu’un projet, en une réalité vi
vante. Nous autres idéalistes pacifistes nous
devons créer l’âme nouvelle de l’humanité
en dissipant les erreurs et les mensonges qui
troublent les rapports des peuples, ce qui
permettra à nos frères européens de se mieux
comprendre ei ainsi de mieux s’aimer. La
jeunesse, qui n’est pas encore empoisonnée
par les préjugés doit être le meilleur ou
vrier du monde nouveau. C’est à cette tâche
que nous devons consacrer toutes nos forces
pendant l’année qui va commencer. Puisse,
grâce à nos efforts réunis, l’année 1926 per
mettre à notre pauvre humanité souffrante et
meurtrie de faire un nouveau pas en avant
dans la voie qui la mène à la liberté, à la
lumière et au bonheur qui donne l’amour
fraternel, bonheur que nous avons eu le pri
vilège ce connaître au camp de Ciiecreuse.
En avant pour le progrès de l’humanité et
le triomphe de l’amour divin.
J. DEMARQUETTE.
PRÉLATS 1ELLIIIEIIX
Dans mon récent livre, le Règne de la Bête, j’ai
condensé dans un chapitre le dossier concernant
la complicité du Clergé catholique dans les respon
sabilités de la guerre. J’ai pu disposer quelques
faits de la déduction desquels il résulte que Mgr
Baudrillart a été l’un des principaux animateurs,
et sans doute le plus influent, de l’attitude chau
vine et belliqueuse par laquelle la morale du
« Prince de la Paix » a été prostituée à la politique
revancharde et jusqu’auboutiste dont Poincaré
était le chef et le drapeau.
.Je n’ai pu tout dire en ce chapitre. Je veux noter
ici quelques éléments qui lui feront un complément
utile.
Mgr. Baudrillart fit paraître au début de 1917,
une brochure intitulée la France, les Catholiques et
la Guerre (1). Elle est malheureusement devenue
rare, sans quoi je la recommanderais ; elle édifierait
singulièrement aujourd’hui, et alors que les résul
tats de ce que Benoit XV a nommé si bien, et si
inutilement, « la déshonorante boucherie », sont
visibles aux plus aveugles et sensibles aux plus
obtus.
Mgr. Baudrillart écrivait :
R y a des guerres justes, il y* a des guerres hon
nêtes, il y a même des guerres saintes. Quiconque y
participe, conformément à la nature de son état, ou
de son office, soldat, citoyen ou prêtre, fait un acte
juste, sage, honnête, et même saint.
La guerre sainte, pour le collègue de Poincaré à
l'Académie, c’était celle qu’il faisait — ou plutôt
qu’il faisait faire. Malheureusement, pour N. N.
S. S. Hartmann et Faulhaber, celle qui était sainte,
c’était celle qu’ils bénissaient de leur côté. 0 honte
et effondrement de la catholicité !
Dieu le Père dans l’ancienne Loi, et son divin
Fils dans la nouvelle, ont promulgué, impérative
ment :
VOUS NE TUEREZ PAS.
La guerre de Baudrillart était-elle homicide ?
Evidemment oui. Et dans quelles proportions !...
Donc, elle ne pouvait avoir les qualités dont il la
pare, puisqu’elle était la somme de désobéissance
à Dieu la plus grande de tous les siècles.
Mais venons plus explicitement à ce que je veux
signaler. On était au début de 1917. Les peuples
commençaient vraiment à en avoir assez, malgré
les bourrages de crânes profanes ou sacrés. Le Pape
avait multiplié les appels à l’humanité et à la rai
son. Encore le 30 juillet précédent il avait dit, s’a
dressant aux Enfants :
(1) Blond et Gay, éditeurs.
Fous êtes aujourd’hui les spectateurs inconscients
de la plus sombré tragédie de la haine humaine et
de l’humaine démence...
Ce qui, évidemment, ne signifiait pas que cette
tragédie fut « juste, sage, honnête et même sainte ».
Nous savons maintenant que les gouvernements
alliés avaient pris toutes précautions contre le pa
cifisme du Pape. En effet, leur traité secret du 26
avril 1915 comportait un article XV, que voici:
La France, la Grande Bretagne et la Russie s’en
gagent à soutenir /’ Italie en vue de ne pas permettre
aux Représentants du Saint-Siège d’entreprendre au
cune démarche diplomatique tendant à la conclusion
de la paix ou au règlement des questions se ratta
chant à la présente guerre.
D autre part, les Lettres, Encycliques, Mande
ments et discours émanant du Souverain Pontife
ne parvenaient aux fidèles que soigneusement ex
purgés par les Censures et par les publications dites
catholiques.
Nonobstant ces garanties draconiennes, les me
neurs de guerre de chez nous n’étaient pas sans
inquiétude. C’est alors que le prélat qui n’avait
pas craint de donner à son collègue d’Académie
une bénédiction nuptiale aussi irrégulière que clan
destine, vint derechef à son secours en publiant
la brochure dont je parle.
Or, on y lisait à la page 11 :
Mais si le Pape veut la paix P C’est la seconde
objection que nous avons prévue... Admirez la courte
phrase qui suit, elle est sursaturée de restriction
mentale : Le Pape ne change pas les lois de la mo
rale.
Cependant le Recteur de l’Institut catholique
était bien obligé d’accorder ceci :
En tant que chef d’une immense société, aux ra
mifications universelles, entouré d’informations qui
font défaut au commun des mortels, le Pape peut
dire : Le moment me paraît venu de faire la paix et
tous voue serez sages de la vouloir maintenant.
Voilà ce dont convenait Baudrillart au début
de 1917. Or. quelques mois après, exactement le
1 er août, lé Pape adressait à tous les gouvernements
belligérants sa NOTE AUX CHEFS DES PEU
PLES, et proposait officiellement la paix. Il écri
vait :
Pour rie plus nous renfermer dans les termes géné
raux comme les circonstances nous l’avaient con
seillé par le passé, nous voulons maintenant descendre
à des propositions plus concrètes et pratiques cl in
viter les gouvernements et les peuples belligérants à
se mettre d’accord sur les points suivants qui sem
blent devoir être les bases d’une paix juste et durable,
en leur laissant le soin de les préciser et de les complé
ter.
7 ont d’abord le point fondamental doit être qu’à
la force matérielle des armes soit substituée la force
morale du droit, d’où résulte nui fuste accord de tous
pour la diminution simultanée et réciproque des
armements... etc., etc. **
Qu’advint-il de cette proposition du Pape d’ar
rêter le carnage ? Ceci : les Empires centraux ac
ceptèrent ; les Alliés ne firent aucune réponse. Ils
étaient d’ailleurs liés par l’article secret ci-dessus
cité. (Que le Pape en sa candeur ignorait alors).
L’Europe n’était pas encore assez décimée et
ruinée.’ Les Alliés ne tinrent aucun compte de la
proposition pontificale ! En conséquence, ce même
Baudrillart qui avait déclaré quelques mois plus
tôt que le Pape pouvait dire : « Le moment me pa
raît venu de faire la paix, et tous vous serez sages
de la vouloir maintenant » ; ce même Baudrillart
n’avait plus qu’à faillir à sa parole, afin de conti
nuer à suivre son collègue d’Académie, le jusqu’au
boutiste Poincaré. C’est ce qu’il fit.
Or, le bout, nous y sommes depuis plusieurs
années. M. Baudrillart peut contempler l’étendue
de l’œuvre à laquelle il a prêté toutes les formes
de son zélé concours. Les résultats sont là : dix-sept
cent nulle morts, autant d’éclopés, la banqueroute
suspendue et une « paix malpropre », voilà pour
notre pays ! « L’ouvrage dira-t-il de celui qui l’a
fait : il ne m a point fait ». (1) Encore cette guerre
était-elle déclarée « sainte ». Qu’çût-ce été si Bau
drillart ne l’avait pas sanctifiée ?...
On ne saurait décrire la stupeur du clergé galli
can, travaillé depuis de longs mois par la psychose
guerrière hiérarchiquement ordonnée, en appre
nant, en août 1917, indirectement et par bribes,
que le Souverain Pontife avait proposé la paix.
On ne saurait croire ce que certains esprits épis
copaux en furent désemparés. Mgr. Touchet, évê
que d’Orléans, fit un petit livre : LA PAIX PON
TIFICALE, Etude sur la Note du Pape du 1 er août
dans lequel il déploya toute son adresse et toute
son onction pour tâcher de faire accepter les direc
tives du Saint Siège et les six points de sa propo
sition (2). Cependant, à la fin, une déplorable con
tradiction vient gâter toute la générosité de son
effort. Ayant communiqué les épreuves de son tra
vail, Mgr. Touchet reçut le conseil enveloppé de
se montrer moins « proboche ». Et alors le faible
prélat ajouta ceci, qui contredit grossièrement
toute sa brochure :
(1) Esaïe29,l6.
l2j Lethielleux, éditeur.
Qu ait été préféré par les chefs de peuple aux ré
solutions ainsi suggérées (les résolutions ppntifi-
cales) le programme : vaincre à tout prix et déduire
l ennemi à merci, nous impose d’austères devoirs
à tous, mais combien plus à nos incomparables sol
dats ; lesquels devoirs ne sauraient être déclinés sans
crime! Je preiïds ces mots dans toute l’énergie de leur
acception. Et Dieu juste donne la victoire à qui ne
voulut pas la guerre, au Droit !
L’évêque de Dijon se contredit aussi, mais par
un processus contraire. Le 15 juin 1917 il pronon
çait en sa cathédrale un sermon d’un bellicisme
ardent et contre les « rumeurs de paix ». Jugez-en :
Cette paix de défaillance ne serait pcùs la paix',
mais le geste découragé d’un peuple affolé qui, s’a
bandonne et se suicide. Ce serait une insulte à nos
morts, à nos mutilés... Lâcher pied quand VAmérique
jette dans la balance son or, ses flottes et son armée ;
quand tous les peuples du monde sont debout, sur la
terre qui tremble, pour réduire enfin VAllemagne,
fléau de l’hurndmité, ce serait plus qu’une folie : une
lâcheté et une trahison !
C’est quelques semaines après que Benoit XV
lança sa Note aux Chefs des Peuples, (1 er août)
proposant la paix.
Le 4 novembre suivant, l’évêque de Dijon avait
enfin dépouillé l’énergumène guerrier qu’on vient
de voir, et il faisait lire en chaire dans son dio
cèse — ce qui est une façon d’amende honorable
publique — une lettre où il disait :
Le Pape avait qualité pour intervenir. Outre que
c’est le rôle séculaire de l’Eglise de travailler à paci
fier les conflits, (on ne s’en serait pas douté à son
sermon du 15 juin !) il y était autorisé par les con
ventions internationales de 1907. (S. G. ignorait
encore le traité secret d’avril 1915, qui jugulait le .
Saint Siège). Il n’impose rien ; il ne tranche rien ;
il ne dicte pas des conditions de paix ; il propose
seulement, il invite ; il suggère, laissant aux inté
ressés le soin de discuter, d,e préciser... pour les con
jurer d’examiner s’il ne serait pas possible de conci
lier les intérêts supérieurs de l’humanité avec l’in
térêt national, et de voir si, vraiment, à tant de sang
et à, tant de ruines, il faut ajouter du sang toujours
et des ruines plus encore.
Et, comme s’il fallait qu’une note bouffonne se
mêlât à de tels manques de caractère, la Lettre épis
copale se terminait ainsi : Notre Mère.' la Sainte
Eglise attend sa fdle : puisse la fille ne pas faire
attendre plus longtemps sa Mère.
Il y avait plusieurs sanglantes années que Notre
Mère la Sainte Eglise catholique, représentée par le
Pape, attendait sa fille représentée par le Recteur
belliciste Baudrillart ! Et pour sa part, Mgr. de
Dijon avait attendu plusieurs mois avant de ré
pondre à la dernière invitation pontificale !...
Le bouillant cardinal de Rovérié de Cabrières,
évêque de Montpellier, Agde, Béziers et Saint Pons,
n’avait pas tergiversé, lui. Dès le 20 août sa déci
sion était prise et il promulguait :
Continuer la guerre pour conquérir la paix, voilà
une formule qui répondra certainement au vœu de
Benoît XV.
C’est ce qu’on a fait de mieux comme jocrisserie
clérico-guerrière. On comprend que le président
Millerand ait tenu à décerner la croix de la Légion
d’Honneur à un prélat aussi excitateur du carnage,
quelques jours avant que celui-ci allât rendre des
comptes à Celui qui a dit : Heureux les pacifiques !
Au surplus, Mgr. de Montpellier, dans sa brus
querie clemencis-te^ n’avait fait‘que traduire le
premier sentiment du haut clergé devant la Note
du Pape. L’épiscopat presque tout entier avait trop
aveuglément marché dans l’union sacrée de la
démence : il était prisonnier de son attitude. Que
venait-on lui parler de paix ?...
Nous avons de cet état de rébellion au S. P. un
témoignage important en un discours du P. Bailly
à Lourdes et reproduit par inadvertance dans
LA CROIX du 24 août. 'Le P. parlait de la nécessité
de la soumission absolue au Pape, et il ajoutait :
L’Eglise apporte l’ordre et la paix, non seulement
dans les individus, mais aussi dans les nations et
entre elles, et quelle affreuse conflagration quand
son autorité n’est plus reconnue ni écoutée !
Tel était en effet l’état d’esprit imprimé depuis
les débuts au clergé gallican par le Recteur « poin-
cariste » Baudrillart, et au moyen impérieux des
rouages de la discipline ecclésiastique. Jamais tout
au long de la « déshonorante boucherie » le Pontife
ne fut ni obéi, ni écouté.
Benoit XV écrivait en mars 1918 au catholique
patriote Geoffroy de Grandmaison, une lettre mé
lancolique et admirable, dont je ne puis faute de
place reproduire que des fragments. Le Pape con
firmait là toute son attitude contre la guerre, et re
nouvelait sa constante réprobation des crimes
magnifiés par les différents nationalismes. Enfin
il y montrait, touchant l’avenir, de sombres pres
sentiments, dont nous ne voyons que trop la réali
sation !
MENSUEL
JANVIER-FÉVRIER 1926
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Fondé en 1898, supprimé par la censure militaire pendant la Guerre mondiale
Mouoement Pacifique Chrétien
« L'INTERNATIONALE DE L AMOUR »
Directeur-Fondateur : Henri HUCHET.
REDACTION :
D r M. DUMESNIL, Rédacteur en chef. — Henriette DUMESNIL-HUCHET, Secrétaire
ERMENONVILLE, Général PERCIN, Frédéric BONHOMME, GRILLOT DE GIVRY,
Louis GUÉTANT, Claire GÉNIAUX, Joël THÉZARD, Dr Henry MARIAVÉ,
D r M. J. ELLIOTT, Mme MARFURT-TORFS, Pr Hermann KUTTER
Sophie TEDING van BERKHOUT van TAACK TRAKRANEN
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O fr. 25
PARIS n* 217.31
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Membre adhérent 5 Irancs,
Membre actif 1 O francs.
Membre militant..... 20 francs
37, Rue Poussin, PARIS, XVI e . Tél. : Auteuil 36-98
M. P. C.
La multiplicité des sociétés chrétiennes
de la Paix depuis l’Armistice exige que
le Mouvement Pacifique Chrétien, fondé
en Suisse en 1898, expose ses principes
pour éviter tout malentendu.
il y a donc lieu de rappeler à nos amis
de France et de l’Etranger que le M. P. C.
n’a aucune attache confessionnelle ou po
litique. Que l’Idéal est toujours le même :
Réconciliation franco-allemande pour
réaliser les Etats-Unis d’Europe.
Du reste, le programme de notre action
est publié à la 4 e page de l 'Universel en
quatre langues : ALLEMAND. ANGLAIS,
FRANÇAIS, HOLLANDAIS
Tous les renseignements, communications,
et souscriptions doivent être adressés au
Secrétaire Général, le docteur Marius Du-
rnesnil ou à l’Agent international, le Pasteur
Henri Huchet.
Il n’y a aucun engagement financier ou
moral pour les Membres adhérents, actifs et
militants, en dehors du témoignage spirituel
et de la contribution volontaire.
Toute personne peut, sur simple demande,
recevoir gratuitement le Journal, de la Paix
par l’Evangile.
Le Siège social est : 3 y Rue Poussin, 3 y ,
PARIS XVI e .
©®©©©©©©©«©©©©©©©©©©
Au Mouvement de
la Jeunesse allemande
A tous les camarades connus et inconnus
de la jeunesse Allemande qui travaillent et
qui luttent pour le progrès de notre idéal
commun de paix et de fraternité j’adresse
avec tous leurs camarades Français, un cor
dial salut à l’occasion de notre fête. En effet,
nous aussi, nous avons une fête particulière.
Les hommes tournés vers le passé et pour
lesquels une forte haine constitue encore un
idéal, ont leurs fêtes qui commémorent gé
néralement un massacre ou une boucherie
humaine, une victoire accompagnée de la
ruine de milliers de familles, de la souffrance
des mutilés, de la détresse des veuves, des
orphelins et des foyers en deuil. Ces fêtes
sopt particulières à chaque pays, à chaque
peuple, même les tribus les plus arriérées
ont les leurs, s’enorgueillissant de quelque
victoire remportée sur la tribu voisine.
Notre fête à nous, pacifistes, est commune
à toute l’humanité blanche. C’tbst celle qui
a été chantée par les choeurs des anges célé
brant la venue du fils de Dieu et proclamant
l’avènement de la Paix sur la terre pour les
hommes de bonne volonté. Certains hommes
sont fiers de leur vieux Dieu, le nôtre c’est
le jeune Dieu de l’amour et de la Paix, celui
qui a interdit aux hommes de porter les
armes et qui leur a ordonné d’aimer non
seulement leurs amis mais aussi leurs enne
mis, c’est-à-dire qu’il leur a ordonné de ne
plus connaître d’ennemis. Le Dieu du passé
était le Dieu de la colère, de la vengeance et
des armées. Christ lui, est le prince de 1 .
Paix et le patron des pacifistes, sa fête est
donc notre fête particulière. Cependant la
force de l'idéal qu’il a apporté au monde
est telle, que tous les hommes, même les
plus aveuglés par les passions et les supe s-
titions du passé célèbrent Noël, u weih nacht”,
fête de la paix sur la terre. Nous en sommes
heureux, car loin de vouloir faire de notre
idéal une nouvelle source de division entre
les hommes en faisant la guerre à ceux qui
ne pensent pas comme nous, nous n’avons
qu'un désir celui de le partager avec tous
nos frères en humanité. Nos ennemis ne
sont pas les hommes, qui pour la plupart
sont animés par un idéal respectable, mais
seulement les erreurs qui les empêchent de
suivre la voix de celui qui a dit : « Aimez-
vous les uns les autres ».
Notre travail, le devoir sacré qu’il nous
faut remplir vis-à-vis de l’avenir de l’huma
nité, consiste à dissiper ces erreurs qii.
je, fis - oqo
comme de noirs nuages empêchent les
hommes de percevoir la'lumière éclatante,
la richesse du message que le Christ, résu
mant l’enseignement de tous les surhommes
du passé, Socrate et Confucius, Zoroastre et
Bouddha, est venu nous apporter.
L’année qui finit a vu s’accomplir à Ge
nève et à Locarno beaucoup de bon travail.
Mais si important qu’il soit nous ne devons
pas nous endormir dans une trompeuse sé
curité! On sait, en effet, que les garanties
diplomatiques ne valent pas grand chose si
elles ne sont pas renforcées par une adhé
sion complète des peuples. Les diplomates
et les gouvernements préparent les plans du
futur palais de l’humanité, mais c’est aux
peuples de le bâtir, de transformer ce qui
n’est encore qu’un projet, en une réalité vi
vante. Nous autres idéalistes pacifistes nous
devons créer l’âme nouvelle de l’humanité
en dissipant les erreurs et les mensonges qui
troublent les rapports des peuples, ce qui
permettra à nos frères européens de se mieux
comprendre ei ainsi de mieux s’aimer. La
jeunesse, qui n’est pas encore empoisonnée
par les préjugés doit être le meilleur ou
vrier du monde nouveau. C’est à cette tâche
que nous devons consacrer toutes nos forces
pendant l’année qui va commencer. Puisse,
grâce à nos efforts réunis, l’année 1926 per
mettre à notre pauvre humanité souffrante et
meurtrie de faire un nouveau pas en avant
dans la voie qui la mène à la liberté, à la
lumière et au bonheur qui donne l’amour
fraternel, bonheur que nous avons eu le pri
vilège ce connaître au camp de Ciiecreuse.
En avant pour le progrès de l’humanité et
le triomphe de l’amour divin.
J. DEMARQUETTE.
PRÉLATS 1ELLIIIEIIX
Dans mon récent livre, le Règne de la Bête, j’ai
condensé dans un chapitre le dossier concernant
la complicité du Clergé catholique dans les respon
sabilités de la guerre. J’ai pu disposer quelques
faits de la déduction desquels il résulte que Mgr
Baudrillart a été l’un des principaux animateurs,
et sans doute le plus influent, de l’attitude chau
vine et belliqueuse par laquelle la morale du
« Prince de la Paix » a été prostituée à la politique
revancharde et jusqu’auboutiste dont Poincaré
était le chef et le drapeau.
.Je n’ai pu tout dire en ce chapitre. Je veux noter
ici quelques éléments qui lui feront un complément
utile.
Mgr. Baudrillart fit paraître au début de 1917,
une brochure intitulée la France, les Catholiques et
la Guerre (1). Elle est malheureusement devenue
rare, sans quoi je la recommanderais ; elle édifierait
singulièrement aujourd’hui, et alors que les résul
tats de ce que Benoit XV a nommé si bien, et si
inutilement, « la déshonorante boucherie », sont
visibles aux plus aveugles et sensibles aux plus
obtus.
Mgr. Baudrillart écrivait :
R y a des guerres justes, il y* a des guerres hon
nêtes, il y a même des guerres saintes. Quiconque y
participe, conformément à la nature de son état, ou
de son office, soldat, citoyen ou prêtre, fait un acte
juste, sage, honnête, et même saint.
La guerre sainte, pour le collègue de Poincaré à
l'Académie, c’était celle qu’il faisait — ou plutôt
qu’il faisait faire. Malheureusement, pour N. N.
S. S. Hartmann et Faulhaber, celle qui était sainte,
c’était celle qu’ils bénissaient de leur côté. 0 honte
et effondrement de la catholicité !
Dieu le Père dans l’ancienne Loi, et son divin
Fils dans la nouvelle, ont promulgué, impérative
ment :
VOUS NE TUEREZ PAS.
La guerre de Baudrillart était-elle homicide ?
Evidemment oui. Et dans quelles proportions !...
Donc, elle ne pouvait avoir les qualités dont il la
pare, puisqu’elle était la somme de désobéissance
à Dieu la plus grande de tous les siècles.
Mais venons plus explicitement à ce que je veux
signaler. On était au début de 1917. Les peuples
commençaient vraiment à en avoir assez, malgré
les bourrages de crânes profanes ou sacrés. Le Pape
avait multiplié les appels à l’humanité et à la rai
son. Encore le 30 juillet précédent il avait dit, s’a
dressant aux Enfants :
(1) Blond et Gay, éditeurs.
Fous êtes aujourd’hui les spectateurs inconscients
de la plus sombré tragédie de la haine humaine et
de l’humaine démence...
Ce qui, évidemment, ne signifiait pas que cette
tragédie fut « juste, sage, honnête et même sainte ».
Nous savons maintenant que les gouvernements
alliés avaient pris toutes précautions contre le pa
cifisme du Pape. En effet, leur traité secret du 26
avril 1915 comportait un article XV, que voici:
La France, la Grande Bretagne et la Russie s’en
gagent à soutenir /’ Italie en vue de ne pas permettre
aux Représentants du Saint-Siège d’entreprendre au
cune démarche diplomatique tendant à la conclusion
de la paix ou au règlement des questions se ratta
chant à la présente guerre.
D autre part, les Lettres, Encycliques, Mande
ments et discours émanant du Souverain Pontife
ne parvenaient aux fidèles que soigneusement ex
purgés par les Censures et par les publications dites
catholiques.
Nonobstant ces garanties draconiennes, les me
neurs de guerre de chez nous n’étaient pas sans
inquiétude. C’est alors que le prélat qui n’avait
pas craint de donner à son collègue d’Académie
une bénédiction nuptiale aussi irrégulière que clan
destine, vint derechef à son secours en publiant
la brochure dont je parle.
Or, on y lisait à la page 11 :
Mais si le Pape veut la paix P C’est la seconde
objection que nous avons prévue... Admirez la courte
phrase qui suit, elle est sursaturée de restriction
mentale : Le Pape ne change pas les lois de la mo
rale.
Cependant le Recteur de l’Institut catholique
était bien obligé d’accorder ceci :
En tant que chef d’une immense société, aux ra
mifications universelles, entouré d’informations qui
font défaut au commun des mortels, le Pape peut
dire : Le moment me paraît venu de faire la paix et
tous voue serez sages de la vouloir maintenant.
Voilà ce dont convenait Baudrillart au début
de 1917. Or. quelques mois après, exactement le
1 er août, lé Pape adressait à tous les gouvernements
belligérants sa NOTE AUX CHEFS DES PEU
PLES, et proposait officiellement la paix. Il écri
vait :
Pour rie plus nous renfermer dans les termes géné
raux comme les circonstances nous l’avaient con
seillé par le passé, nous voulons maintenant descendre
à des propositions plus concrètes et pratiques cl in
viter les gouvernements et les peuples belligérants à
se mettre d’accord sur les points suivants qui sem
blent devoir être les bases d’une paix juste et durable,
en leur laissant le soin de les préciser et de les complé
ter.
7 ont d’abord le point fondamental doit être qu’à
la force matérielle des armes soit substituée la force
morale du droit, d’où résulte nui fuste accord de tous
pour la diminution simultanée et réciproque des
armements... etc., etc. **
Qu’advint-il de cette proposition du Pape d’ar
rêter le carnage ? Ceci : les Empires centraux ac
ceptèrent ; les Alliés ne firent aucune réponse. Ils
étaient d’ailleurs liés par l’article secret ci-dessus
cité. (Que le Pape en sa candeur ignorait alors).
L’Europe n’était pas encore assez décimée et
ruinée.’ Les Alliés ne tinrent aucun compte de la
proposition pontificale ! En conséquence, ce même
Baudrillart qui avait déclaré quelques mois plus
tôt que le Pape pouvait dire : « Le moment me pa
raît venu de faire la paix, et tous vous serez sages
de la vouloir maintenant » ; ce même Baudrillart
n’avait plus qu’à faillir à sa parole, afin de conti
nuer à suivre son collègue d’Académie, le jusqu’au
boutiste Poincaré. C’est ce qu’il fit.
Or, le bout, nous y sommes depuis plusieurs
années. M. Baudrillart peut contempler l’étendue
de l’œuvre à laquelle il a prêté toutes les formes
de son zélé concours. Les résultats sont là : dix-sept
cent nulle morts, autant d’éclopés, la banqueroute
suspendue et une « paix malpropre », voilà pour
notre pays ! « L’ouvrage dira-t-il de celui qui l’a
fait : il ne m a point fait ». (1) Encore cette guerre
était-elle déclarée « sainte ». Qu’çût-ce été si Bau
drillart ne l’avait pas sanctifiée ?...
On ne saurait décrire la stupeur du clergé galli
can, travaillé depuis de longs mois par la psychose
guerrière hiérarchiquement ordonnée, en appre
nant, en août 1917, indirectement et par bribes,
que le Souverain Pontife avait proposé la paix.
On ne saurait croire ce que certains esprits épis
copaux en furent désemparés. Mgr. Touchet, évê
que d’Orléans, fit un petit livre : LA PAIX PON
TIFICALE, Etude sur la Note du Pape du 1 er août
dans lequel il déploya toute son adresse et toute
son onction pour tâcher de faire accepter les direc
tives du Saint Siège et les six points de sa propo
sition (2). Cependant, à la fin, une déplorable con
tradiction vient gâter toute la générosité de son
effort. Ayant communiqué les épreuves de son tra
vail, Mgr. Touchet reçut le conseil enveloppé de
se montrer moins « proboche ». Et alors le faible
prélat ajouta ceci, qui contredit grossièrement
toute sa brochure :
(1) Esaïe29,l6.
l2j Lethielleux, éditeur.
Qu ait été préféré par les chefs de peuple aux ré
solutions ainsi suggérées (les résolutions ppntifi-
cales) le programme : vaincre à tout prix et déduire
l ennemi à merci, nous impose d’austères devoirs
à tous, mais combien plus à nos incomparables sol
dats ; lesquels devoirs ne sauraient être déclinés sans
crime! Je preiïds ces mots dans toute l’énergie de leur
acception. Et Dieu juste donne la victoire à qui ne
voulut pas la guerre, au Droit !
L’évêque de Dijon se contredit aussi, mais par
un processus contraire. Le 15 juin 1917 il pronon
çait en sa cathédrale un sermon d’un bellicisme
ardent et contre les « rumeurs de paix ». Jugez-en :
Cette paix de défaillance ne serait pcùs la paix',
mais le geste découragé d’un peuple affolé qui, s’a
bandonne et se suicide. Ce serait une insulte à nos
morts, à nos mutilés... Lâcher pied quand VAmérique
jette dans la balance son or, ses flottes et son armée ;
quand tous les peuples du monde sont debout, sur la
terre qui tremble, pour réduire enfin VAllemagne,
fléau de l’hurndmité, ce serait plus qu’une folie : une
lâcheté et une trahison !
C’est quelques semaines après que Benoit XV
lança sa Note aux Chefs des Peuples, (1 er août)
proposant la paix.
Le 4 novembre suivant, l’évêque de Dijon avait
enfin dépouillé l’énergumène guerrier qu’on vient
de voir, et il faisait lire en chaire dans son dio
cèse — ce qui est une façon d’amende honorable
publique — une lettre où il disait :
Le Pape avait qualité pour intervenir. Outre que
c’est le rôle séculaire de l’Eglise de travailler à paci
fier les conflits, (on ne s’en serait pas douté à son
sermon du 15 juin !) il y était autorisé par les con
ventions internationales de 1907. (S. G. ignorait
encore le traité secret d’avril 1915, qui jugulait le .
Saint Siège). Il n’impose rien ; il ne tranche rien ;
il ne dicte pas des conditions de paix ; il propose
seulement, il invite ; il suggère, laissant aux inté
ressés le soin de discuter, d,e préciser... pour les con
jurer d’examiner s’il ne serait pas possible de conci
lier les intérêts supérieurs de l’humanité avec l’in
térêt national, et de voir si, vraiment, à tant de sang
et à, tant de ruines, il faut ajouter du sang toujours
et des ruines plus encore.
Et, comme s’il fallait qu’une note bouffonne se
mêlât à de tels manques de caractère, la Lettre épis
copale se terminait ainsi : Notre Mère.' la Sainte
Eglise attend sa fdle : puisse la fille ne pas faire
attendre plus longtemps sa Mère.
Il y avait plusieurs sanglantes années que Notre
Mère la Sainte Eglise catholique, représentée par le
Pape, attendait sa fille représentée par le Recteur
belliciste Baudrillart ! Et pour sa part, Mgr. de
Dijon avait attendu plusieurs mois avant de ré
pondre à la dernière invitation pontificale !...
Le bouillant cardinal de Rovérié de Cabrières,
évêque de Montpellier, Agde, Béziers et Saint Pons,
n’avait pas tergiversé, lui. Dès le 20 août sa déci
sion était prise et il promulguait :
Continuer la guerre pour conquérir la paix, voilà
une formule qui répondra certainement au vœu de
Benoît XV.
C’est ce qu’on a fait de mieux comme jocrisserie
clérico-guerrière. On comprend que le président
Millerand ait tenu à décerner la croix de la Légion
d’Honneur à un prélat aussi excitateur du carnage,
quelques jours avant que celui-ci allât rendre des
comptes à Celui qui a dit : Heureux les pacifiques !
Au surplus, Mgr. de Montpellier, dans sa brus
querie clemencis-te^ n’avait fait‘que traduire le
premier sentiment du haut clergé devant la Note
du Pape. L’épiscopat presque tout entier avait trop
aveuglément marché dans l’union sacrée de la
démence : il était prisonnier de son attitude. Que
venait-on lui parler de paix ?...
Nous avons de cet état de rébellion au S. P. un
témoignage important en un discours du P. Bailly
à Lourdes et reproduit par inadvertance dans
LA CROIX du 24 août. 'Le P. parlait de la nécessité
de la soumission absolue au Pape, et il ajoutait :
L’Eglise apporte l’ordre et la paix, non seulement
dans les individus, mais aussi dans les nations et
entre elles, et quelle affreuse conflagration quand
son autorité n’est plus reconnue ni écoutée !
Tel était en effet l’état d’esprit imprimé depuis
les débuts au clergé gallican par le Recteur « poin-
cariste » Baudrillart, et au moyen impérieux des
rouages de la discipline ecclésiastique. Jamais tout
au long de la « déshonorante boucherie » le Pontife
ne fut ni obéi, ni écouté.
Benoit XV écrivait en mars 1918 au catholique
patriote Geoffroy de Grandmaison, une lettre mé
lancolique et admirable, dont je ne puis faute de
place reproduire que des fragments. Le Pape con
firmait là toute son attitude contre la guerre, et re
nouvelait sa constante réprobation des crimes
magnifiés par les différents nationalismes. Enfin
il y montrait, touchant l’avenir, de sombres pres
sentiments, dont nous ne voyons que trop la réali
sation !
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