Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1893-04-29
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 29 avril 1893 29 avril 1893
Description : 1893/04/29 (N79). 1893/04/29 (N79).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263279q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
I
2 e Année — N° 79 — Samedi 29 Avril 1893-
DIX CENTIMES LE NUMÉRO
2 e Année — 10 Floréal An 101 — N° 79.
Réveil
Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN
mx DES ABOIEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
LE 1 er MAI
au Havre
Pour quiconque veut se rendre compte de
P affolement que cause dans un certain monde
le programme des revendications ouvrières,
il ;-uffit de lire, dans les journaux réaction
naires ou républicains modérés, les articles
consacrés au I er Mai.
Sans se rendre compte du ridicule qui enta
che ceux qui s’efforcent de représenter comme
une date révolutionnaire, comme un jour férié
de l’insurrection, cette fête du travail, ils
adjurent le Gouvernement d’agir contre les
manifestations pacifiques qui se préparent.
Le Gouvernement, malgré la faiblesse dont
il a fait preuve plus d’une fois envers la
réaction, hésitera, nous en sommes convain
cus, à suivre d’aussi déplorables conseils. Il
conservera le rôle de neutralité qui lui con
vient sans s’immiscer dans la forme que le
peuple entend donner à ses revendications.
Le 1 er Mai est bien, en effet, la fête des
travailleurs. Ils ont compris enfin qu’il était
nécessaire de choisir , en opposition avec ces
fêtes plus ou moins ridicules que nous devons
au calendrier chrétien, une date d’un carac
tère absolument laïque et facile à adopter
par mesure générale.
Sans doute, cette entente dans le monde
des travailleurs ne suffit pas à elle seule
pour résoudre la question sociale. Mais elle
montre, en tout cas, qu’il y a des aspirations
qui se font jour et qui ont conscience des
contingents dont elles disposent.
Le Réveil qui ne peut rester indifférent à ce
qui se passe en France et à l’étranger, au
point de vue socialiste, salue donc avec con
fiance cette fête que les réformateurs du parti
ouvrier ont fixée aux premiers beaux jours,
comme pour inviter la société a se rénover,
comme la nature le fait elle-même après 1 hi
ver. Et ce journal, qui a su grouper dans
notre ville, — nous en recevons chaque jour
de nouveaux témoignages, — de si précieuses
sympathies, est heureux de constater que les
ouvriers du Havre s’apprêtent à fêter cet an
niversaire.
Il y a chez nous en effet, depuis quelques
semaines, un véritable réveil de la classe ou
vrière. Et c’est d’un bon augure pour le pro
grès politique et social dans notre région.
Trop longtemps les dirigeants des ateliers et
fies groupes corporatifs ont été inféodes a la
bande réactionnaire ou à la faction opportu
niste, — ce qui est tout un. Il était grand
temps de s’affranchir. Nous constatons avec
satisfaction que, grâce à certaines per
sonnalités qui n’ont ménagé ni leur temps ni
leurs forces, même au risque de perdre leur
situation, cette œuvre d’émancipation s’ac
complit sûrement.
Cette marche en avant des travailleurs,
que les satisfaits ont trop longtemps considérés
comme des machines à voter, se poursuivra,
nous en sommes persuadés, en défit des efforts
des rétrogrades ou des modérés. Et nous saluons
d’avance le jour où les ouvriers de notre ville,
agissant avec esprit de suite et avec unité
d’action, et reconnaissant enfin où sont leurs
véritables amis, auront démasqué les faux
bonshommes tiendront à rendre aux dou
ceurs de la vie privée, certains élus qui, il
n’y a pas plus d’un an, trouvaient moyen, en
ménageant la chèvre et le chou, de faire voter
pour eux, — ô miracle ! — avec les cléricaux
toutes les nuances de l’opinion républicaine.
Il dépend des travailleurs de tout remettre
en ordre et de remplacer la duplicité par la
loyauté. On en a certes besoin au Havre, et
ce travail d’assainissement n'est pas le dernier
dont l'exécution s’impose.
Nous est-il permis, en terminant, de for
muler un vœu qui s’adresse à la classe ou
vrière tout entière et notamment à ceux qui
ont pris à charge de l'engager dans une nou
velle voie ? Qu’elle s’initie de plus en plus
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE C ASI1IR-PÉRIER , • 15
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
aux questions sociales. Qu’elle cherche toutes
les occasions de se mettre en rapport avec les
groupes de Paris, et d’ailleurs, qui luttent
pour l’émancipation de toute une classe.
A ces divers points de vue, la conférence
de dimanche prochain et la réunion populaire
de lundi soir seront du meilleur effet. Il en
sortira pour les travailleurs la conviction que
la désunion, savamment entretenue parmi
eux par certains bourgeois satisfaits, a fait
son temps. Ils auront conscience de leur force
et n’en feront usage que pour le progrès social
et pour la 'République.
VERUS.
; —— «sggjs*-
SEMAINE POLITIQUE
France
Elections législatives du 23 Avril 1893
AR1ÉGE (Arrondissement de Pamiers)
MM. Wickers,républicain radical 6,999 voix.
Fages 5,689 »
Goût, conservateur 2,506 »
Ballottage.
Il s’agissait de remplacer M. Lasbaysses, républi
cain, décédé, élu au premier tour de scrutin en
1889, contre M. Acloque, ancien député réaction
naire
HAUTE VlEiSNE (Arrond. de Rocheehouart) :
MM. Godet, ancien député radical 6,315 voix, élu.
Leouzon-Leduc, anc. député 3,480 »»
[.ors de l’élection du 12 janvier 1890, M Puyboye,
républicain, avait été élu contre M. Leouzon-Le-
duc, dont la Chambre avait invalidée l’élection.
*
* ¥
Les élections municipales de Paris. — Scrutin de
ballottage : Comme nous le disions, dans notre
dernière Semaine politique, les Parisiens n’ont pas
eu trop à souffrir de» 600.000 électeurs mécontents
dont les menaçait l’abbé Garnier, et qui devaient
amener, ce jour-là, la défaite certaine de la Répu
blique. Ces menaces sont restées vaines, les clé
ricaux ont èiè pour leurs frais et l’abbé. Garnier
pour une soutane , puisque son ordre lui interdit de
porter la veste. Quoi qu’il en soit, la France démo
cratique doit se réjouir de voir la représentation
républicaine de i’Hôtel-de-Yille, être aussi nom
breuse que précédemment, et si quelques-uns sont
restés sur le carreau, leurs successeurs ne néglige
ront rien pour les remplacer avantageusement.
Voici la classification, par groupements politi
ques des conseillers municipaux qui viennent d’ê
tre élus : 38 radicaux ; 11 républicains opportu
nistes ; 3 républicains libéraux ; 6 Broussistes
(parti ouvrier) ; 4 Allemanistes (parti ouvrier) ; 1
socialiste indépendant ; 2 Blanquistes ; 1 Boulan-
giste et 12 réactionnaires. Soit, 80 membres.
★
* *
Enregistrons, en passant, le passage de M. Ter
rier, ministre du commerce, qui, ulus heureux que
M. Siegfried, son ex-collègue, a pu faire une visite
triomphale en province et entendre des salves d ar
tillerie tirées en son honneur. C’est, en effet, au
bruit du canon que M. Terrier est descendu à
Dreux, à l’occasion de la pose de la première
pierre d’une Caisse d’épargne pour l’arrondisse
ment. A l’issue du grand banquet qui lui a été
offert, il a prononcé un discours duquel nous ex
trayons les lignes ci-dessous :
« Le ministère récemment constitué sous la pré
sidence de mon ami Charles Dupuy, un fils du
peuple, celui-là, et démocrate dans la plus forte
acception du mot. s’est inspiré de cette pensée
» Il est composé d’hommes de bon vouloir, prêts
à se donner sans réserve a leur mission, désireux
de trouver dans une loyale entente avec la majo
rité du Parlement une solution aux difficultés im
médiates et l’autorité nécessaire au gouvernement
républicain. (Applaudissements.)
« Cette autorité que nous puiserons dans la con-
üance de la nation républicaine et de ses élus, il
nous la faut complète, certaine, en ce moment où
le suffrage universel commence a se préoccuper
des élections générales, afin que npus puissions
affirmer bien haut les conquêtes déjà faites et le
ferme propos où nous sommes tous, non-seulement
de ne rien sacrifier de nos conquêtes, mais aussi
d’en poursuivre de nouvelles qui contribueront à
l’organisation progressive de la démocratie. » (Ap
plaudissements répétés.)
*
* *
Hélas ! nous craignons fort, malgré le bon vou
loir dont les ministres actuels semblent animés,
qu’ils ne puissent rester longtemps a poursuivre
Pobjet de leur rêve. . ,
Depuis la reprise des travaux parlementaires, on
a pu, en effet, constater qu’il y a plus de bruits en
l’air que d’accord,
Déjà nous voyons ce malheureux budget aux
prises avec les mêmes difficultés. A la Chambre,
la commission du budget s’est reunie pour étudier
officieusement les modifications apportées par le
Sénat d’accord avec le gouvernement.
M. Edouard Lockroy qui a remplacé M. Pom-
carré comme rapporteur général, et M. Peytral
comme président, a fait un exposé complet des
modifications. . , . ,, ,
C’est surtout sur la disjonction de la reforme des
boissons que paraît devoir se produire le plus gros
effort du débat.
En même temps que la commission du budget,
le groupe d’étudesse réunissait jeudi. Sans qu’il ait
émis de vote, il a paru néanmoins favorable en
majorilè a une transaction. Il s’est reuni de nou
veau vendredi, pour recnercher dans quelles con
ditions celle-ci pourrait être réalisée.
Au Sénat. — Le sénat vient de procéder à un
nouvel examen de cet infortuné budjet de 1893, si
en retard et si compromis.
Nos lecteurs connaissent l’histoire pleine de
cahots de ce budjet ; ils se rappellent qu’en dernier
lieu un conflit a surgi entre les deux fractions du
Parlement, le Sénat s’obstinant à disjoindre la
réforme de L’impôt des boissons, la Chambre persis
tant à se refuser à cette disjonction ; ceci indépen
damment, d’antres dissentiments portant sur l’im
pôt sur les opérations de Bourse, les modifications
apportées à la loi des patentes, etc.
Au Sénat, il n’y a pas eu de discussion générale,
ce qui est très bien. M. Boulanger, l’inamovible
rapporteur général de la commission des finances,
s’est borné a annoncer que l’accord s’était fait, le
plus heureusement du monde entre le gouverne
ment et la commission. A peine cette déclaration
était-elle formulée que M. Viette, ministre des
travaux publics, montait à la tribune, pour avec
sa faconde franc-comtoise, demander au Sénat de
lui donner raison contre la commission ; ce qui a
semblé prouver que l’accord n’était pas si parfai
tement établi que M. Boulanger voulait bien le
dire. Il s’agissait ici de la réorganisation du contrôle
d< j s chemins de fer. Et, par 144 voix contre 109 le
Sénat a donné raison à sa commission, contre le
gouvernement et contre la Chambre. Comme vous
voyez, ça commençait bien. Puis M. Bardoux a
demandé au Sénat'de reppousser l’augmentation
de patente imposée aux professions liberales, aug
mentation du 15 e au 12 e , adoptée par la Chambre.
Le commissaire du gouvernement, M. Boutin, et
M. Peytral, ministre des finances, ont, défendu le
texte de la Chambre.
Le Sénat s’est rangé à leur avis.
De même il a ratifié le vote de la Chambre en
fixant â 10 fr. le taux de l’impôt sur les véloci
pèdes. Cette fois-là, vous y êtes, mes pauvres vèlo-
cipédistes ! vous voilà imposés, tout comme nos
chiens. Vous aurez beau courir et jouer des jambes,
partout vous serez traqués. Payez 10 Francs., et on
vous laissera tranquille,
Par contre, il a de nouveau, et sans débats, à
mains levées, prononcé la disjonction de la réfor
me de l’impôt des boissons. — Suite du conflit.
Mais il a repoussé la disjonction, demandée par
M. Sèbline, des articles concernant les opérations
de Bourse, ft il a adopté l’article 1 er portant le
principe de la taxe appliquée sans ditinction à
toutes les operations de bourse.
'k
* *
Le 1 er Mai. — La fête du travail sera cette année
aussi calme que celle de l’année dernière.
A Paris, la commission d’organisation du 1 er
mai a tenu avant-hier une réunion, salle Léger.
Un grand nombre d’orateurs ont pris successi
vement la parole et, finalement, il a été décidé
qu’une nouvelle réunion, ayant surtout un carac
tère syndical aurait lieu ce jour dans la même
salle ; que toutes les corporations seraient spécia
lement convoquées sans distinction aucune et qu’il
serait demandé à la commission exécutive de la
Bourse du travail de se réunir avant sa séance
ordinaire pour permettre l’ouverture de la grande
salle et de la salle des grèves le jour du 1 er mai,
bien que la Bourse dût être fermée ce jour-là.
*
- * ¥
Des manifestations pacifiques se préparent dans
toutes les grandes villes de provinces. Le mot
d’ordre semble partout être le même. Il y a une
discipline qui démontre que la fête du travail
prend des proportions des plus sérieuses, et nous
voyons autres choses dans ces manifestations que
des démonstrations platoniques, fartes disent les
sceptiques, pour effrayer les capitalistes; nous
voyons, au contraire, un avertissement à nos lé
gislateurs, et ils auront grand tort s’ils continuent
à se montrer indifférents devant cette marée mon
tante, qui réclame la journée de huit heures.
Mais nous voyons encore autre chose et que nous
considérons comme le prélude d’une autre mani
festation non moins grandiose, qui doit s’accom
plir dans quelques mois : nous voulons parler
des nouvelles élections, si le parti ouvrier s’orga
nisait en lutte de classes, comme vont le conseiller
tous les conférenciers qui vont se faire entendre,
à l’occasion du 1 er mai, - chose que nous déplo
rerions, -- mais puisqu’on le contraint d’arriver à
cette extrémité — pour la conquête des pouvoirs
publics, afin de restituer à chacun les moyens
ae production et le droit au banquet de la vie.
L’ARMÉE ITALIENNE
A la suite de la visite de l’empereur d’Allemagne
et de l’impératrice en Italie, nous croyons utile de
faire connaître à peu près les vues de l’Italie si le
traité de la triple alliance l’obligeait à marcher
contre nous.
Déduction des troupes de milice qui sont spé
ciales à la Sardaigne et à la Sicile, l’armée ita
lienne pourrait mettre en campagne 670 bataillons
d’infanterie, 144 escadrons de cavalerie, 260 bat-,
teries attelées, soit 670,000 fusils, 20,000 sabres,
1,560 canons représentant un total de 900,000
hommes, dont 600,000 de l’armé et de la disponi
bilité, et 300,000 de la milice mobile.
Il lesterait encore sur le territoire environ
400,000 soldats instruits, dont 100,000 appartenant
aux trois classes précédentes et 300.000 à la milice
territoriale.
En réalité, les ressources totales s’élèvent à
3,200,000 hommes, mais, 550,000 n’ont qu’une
instruction militaire à peine ébauchée et 1,350,000
n’ont jamais été exercés.
Le plan de campagne : Comment seraient for
mées les armées ? — opèi'atioyis dirigées
contre nous : Quels seraient
leurs objectifs ?
Il est délicat de répondre à ces deux questions.
Le commandement en chef n’est pas organisé, en
effet, dans l’armée italienne, comme dans les
autres armées. Les lieutenants-généraux qui com
mandent les douze corps d’armée sont les plus an
ciens de la liste ; on les remplace souvent, et les
mutations sont si fréquentes, que, l’an dernier,
huit corps d’armée sur douze ont reçu un nouveau
chef. Ce mouvement s’est répercuté sur les divi
sions, dont dix-huit sur vingt-quatre ont changé
de commandant dans le même laps de temps. Ces
mouvements continuels se reproduisent,d’ailleurs,
dans les corps de troupes qui, sauf les bataillons
alpins, l’artillerie et le génie, se déplacent à des
époques très rapprochées.
On peut supposer, cependant, que dans la vallée
du Pô seront constituées trois armées de campa
gne ; qu’un corps d’armée de réserve gardera
Rome, un autre Naples, un troisième la Sicile ;
que la Sardaigne sera défendue par une division,
si ce u’est même un corps d’armée.
Les attaques principales se porteront sur les
Alpes, dans la zone frontière limitrophe de la
France, puis sur la Corse, enfin sur la Tunisie.
Il est à présumer, en outre, surtout depuis la
Terme attitude de la Suisse pour imposer le res
pect de sa neutralité, qu’une partie des armée ita
liennes tournera le territoire de la Confédération,
par les voies ferrées italiennes, autrichiennes et
allemandes, et débouchera à Huningue. De là, les
coalisés chercheraient à descendre vers le sud, k
occuper le Jura, à menacer Lyon et à joindre les
troupes italiennes qui feraient effort sur la crête
des Alpes.
Ce projet est fort beau, mais la Franc est
prête !
Lettres d’un rustre
Vallon d’Ignauval (Seine-Inf re )
- Des événements de Belgique, heureusement
terminés, il se dégage un enseignement pour
l’avenir et s’ils peuvent servir d’exemple aux peu
ples qui travaillent pour leur liberté, c’est par le
calme relatif avec lequel les choses se sont pas
sées. Il y a bien eu quelques pots cassés — ici,
comme toujours, dans les revendications popu
laires, les pots étaient des têtes humaines —
mais qu’importe, puisqu’à ce prix seulement il
était possible de réussir. Le vote plural admis
sous la pression de l’émeute de la rue, arraché
par la peur à une Chambre quelque peu affolée,
est un acheminement du peuple belge vers la
Liberté. Ce n’est pas payer trop cher cette con
cession aux droits du peuple que de la payer de la
vie de quelques-uns des individus qui la com
posent, victimes, comme il arrive le plus souvent
en pareil cas, absolument innocentes et descen
dues dans la rue pour tout autre chose que pour
prendre part à l’émeute.
Le premier pas est fait, d’autres libertés sui
vront, le peuple belge ne peut se contenter de
cela et quelque jour il jettera bas d’un coup
d’épaule la vieille monarchie, amie de l’Allema
gne, qui lui mesure les libertés, le jugeant sans
doute incapable de s’en servir, voulant les lui
doser comme on dose la nourriture forte d’un
convalescent. C’est que ceux qui régnent et leurs
sujets n’envisagent pas les choses au même point
de vue ; les premiers trouvent que tout est bien,
que le peuple est heureux dès l’instant qu’il ne
meurt pas tout à fait de faim, dédaignant, du
reste, de descendre assez bas pour s’en rendre
compte ; les seconds qui paient de leur personne,
qui peinent, suent et qui meurent de faim en
travaillant beaucoup, voient les choses sous un
jour tout autre et les sentent durement ; ils n’ont
pas pour eux le prisme enchanteur de la fortune
et des honneurs, à travers lequel on voit tout en
rose. Il est facile, dans le cas de ces derniers, de
trouver toutes les choses au point, et le malheur,
c’est que la richesse dessèche le plus souvent le
cœur de ceux qui en jouissent, les rend égoïstes et
qu’il ne font rien pour les classes moins favori
sées, oubliant dans une indifférence coupable la
solidarité humaine, oubliant les devoirs que créent
aussi bien la supériorité intellectuelle que la
supériorité de fortune ; devoirs qu’ils ne sauraient
satisfaire au moyen de quelques aumônes.
Il a suffi au lion populaire belge de secouer sa
crinière pour faire trembler le trône de Léo
pold II et pour qu’on lui jette en pâture une petite
liberté espérant l’apaiser. Peu à peu, elles y
passeront toutes, et le régime républicain, seul
compatible avec les progrès du siècle, succédera
v
?
*
2 e Année — N° 79 — Samedi 29 Avril 1893-
DIX CENTIMES LE NUMÉRO
2 e Année — 10 Floréal An 101 — N° 79.
Réveil
Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN
mx DES ABOIEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
LE 1 er MAI
au Havre
Pour quiconque veut se rendre compte de
P affolement que cause dans un certain monde
le programme des revendications ouvrières,
il ;-uffit de lire, dans les journaux réaction
naires ou républicains modérés, les articles
consacrés au I er Mai.
Sans se rendre compte du ridicule qui enta
che ceux qui s’efforcent de représenter comme
une date révolutionnaire, comme un jour férié
de l’insurrection, cette fête du travail, ils
adjurent le Gouvernement d’agir contre les
manifestations pacifiques qui se préparent.
Le Gouvernement, malgré la faiblesse dont
il a fait preuve plus d’une fois envers la
réaction, hésitera, nous en sommes convain
cus, à suivre d’aussi déplorables conseils. Il
conservera le rôle de neutralité qui lui con
vient sans s’immiscer dans la forme que le
peuple entend donner à ses revendications.
Le 1 er Mai est bien, en effet, la fête des
travailleurs. Ils ont compris enfin qu’il était
nécessaire de choisir , en opposition avec ces
fêtes plus ou moins ridicules que nous devons
au calendrier chrétien, une date d’un carac
tère absolument laïque et facile à adopter
par mesure générale.
Sans doute, cette entente dans le monde
des travailleurs ne suffit pas à elle seule
pour résoudre la question sociale. Mais elle
montre, en tout cas, qu’il y a des aspirations
qui se font jour et qui ont conscience des
contingents dont elles disposent.
Le Réveil qui ne peut rester indifférent à ce
qui se passe en France et à l’étranger, au
point de vue socialiste, salue donc avec con
fiance cette fête que les réformateurs du parti
ouvrier ont fixée aux premiers beaux jours,
comme pour inviter la société a se rénover,
comme la nature le fait elle-même après 1 hi
ver. Et ce journal, qui a su grouper dans
notre ville, — nous en recevons chaque jour
de nouveaux témoignages, — de si précieuses
sympathies, est heureux de constater que les
ouvriers du Havre s’apprêtent à fêter cet an
niversaire.
Il y a chez nous en effet, depuis quelques
semaines, un véritable réveil de la classe ou
vrière. Et c’est d’un bon augure pour le pro
grès politique et social dans notre région.
Trop longtemps les dirigeants des ateliers et
fies groupes corporatifs ont été inféodes a la
bande réactionnaire ou à la faction opportu
niste, — ce qui est tout un. Il était grand
temps de s’affranchir. Nous constatons avec
satisfaction que, grâce à certaines per
sonnalités qui n’ont ménagé ni leur temps ni
leurs forces, même au risque de perdre leur
situation, cette œuvre d’émancipation s’ac
complit sûrement.
Cette marche en avant des travailleurs,
que les satisfaits ont trop longtemps considérés
comme des machines à voter, se poursuivra,
nous en sommes persuadés, en défit des efforts
des rétrogrades ou des modérés. Et nous saluons
d’avance le jour où les ouvriers de notre ville,
agissant avec esprit de suite et avec unité
d’action, et reconnaissant enfin où sont leurs
véritables amis, auront démasqué les faux
bonshommes tiendront à rendre aux dou
ceurs de la vie privée, certains élus qui, il
n’y a pas plus d’un an, trouvaient moyen, en
ménageant la chèvre et le chou, de faire voter
pour eux, — ô miracle ! — avec les cléricaux
toutes les nuances de l’opinion républicaine.
Il dépend des travailleurs de tout remettre
en ordre et de remplacer la duplicité par la
loyauté. On en a certes besoin au Havre, et
ce travail d’assainissement n'est pas le dernier
dont l'exécution s’impose.
Nous est-il permis, en terminant, de for
muler un vœu qui s’adresse à la classe ou
vrière tout entière et notamment à ceux qui
ont pris à charge de l'engager dans une nou
velle voie ? Qu’elle s’initie de plus en plus
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE C ASI1IR-PÉRIER , • 15
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
aux questions sociales. Qu’elle cherche toutes
les occasions de se mettre en rapport avec les
groupes de Paris, et d’ailleurs, qui luttent
pour l’émancipation de toute une classe.
A ces divers points de vue, la conférence
de dimanche prochain et la réunion populaire
de lundi soir seront du meilleur effet. Il en
sortira pour les travailleurs la conviction que
la désunion, savamment entretenue parmi
eux par certains bourgeois satisfaits, a fait
son temps. Ils auront conscience de leur force
et n’en feront usage que pour le progrès social
et pour la 'République.
VERUS.
; —— «sggjs*-
SEMAINE POLITIQUE
France
Elections législatives du 23 Avril 1893
AR1ÉGE (Arrondissement de Pamiers)
MM. Wickers,républicain radical 6,999 voix.
Fages 5,689 »
Goût, conservateur 2,506 »
Ballottage.
Il s’agissait de remplacer M. Lasbaysses, républi
cain, décédé, élu au premier tour de scrutin en
1889, contre M. Acloque, ancien député réaction
naire
HAUTE VlEiSNE (Arrond. de Rocheehouart) :
MM. Godet, ancien député radical 6,315 voix, élu.
Leouzon-Leduc, anc. député 3,480 »»
[.ors de l’élection du 12 janvier 1890, M Puyboye,
républicain, avait été élu contre M. Leouzon-Le-
duc, dont la Chambre avait invalidée l’élection.
*
* ¥
Les élections municipales de Paris. — Scrutin de
ballottage : Comme nous le disions, dans notre
dernière Semaine politique, les Parisiens n’ont pas
eu trop à souffrir de» 600.000 électeurs mécontents
dont les menaçait l’abbé Garnier, et qui devaient
amener, ce jour-là, la défaite certaine de la Répu
blique. Ces menaces sont restées vaines, les clé
ricaux ont èiè pour leurs frais et l’abbé. Garnier
pour une soutane , puisque son ordre lui interdit de
porter la veste. Quoi qu’il en soit, la France démo
cratique doit se réjouir de voir la représentation
républicaine de i’Hôtel-de-Yille, être aussi nom
breuse que précédemment, et si quelques-uns sont
restés sur le carreau, leurs successeurs ne néglige
ront rien pour les remplacer avantageusement.
Voici la classification, par groupements politi
ques des conseillers municipaux qui viennent d’ê
tre élus : 38 radicaux ; 11 républicains opportu
nistes ; 3 républicains libéraux ; 6 Broussistes
(parti ouvrier) ; 4 Allemanistes (parti ouvrier) ; 1
socialiste indépendant ; 2 Blanquistes ; 1 Boulan-
giste et 12 réactionnaires. Soit, 80 membres.
★
* *
Enregistrons, en passant, le passage de M. Ter
rier, ministre du commerce, qui, ulus heureux que
M. Siegfried, son ex-collègue, a pu faire une visite
triomphale en province et entendre des salves d ar
tillerie tirées en son honneur. C’est, en effet, au
bruit du canon que M. Terrier est descendu à
Dreux, à l’occasion de la pose de la première
pierre d’une Caisse d’épargne pour l’arrondisse
ment. A l’issue du grand banquet qui lui a été
offert, il a prononcé un discours duquel nous ex
trayons les lignes ci-dessous :
« Le ministère récemment constitué sous la pré
sidence de mon ami Charles Dupuy, un fils du
peuple, celui-là, et démocrate dans la plus forte
acception du mot. s’est inspiré de cette pensée
» Il est composé d’hommes de bon vouloir, prêts
à se donner sans réserve a leur mission, désireux
de trouver dans une loyale entente avec la majo
rité du Parlement une solution aux difficultés im
médiates et l’autorité nécessaire au gouvernement
républicain. (Applaudissements.)
« Cette autorité que nous puiserons dans la con-
üance de la nation républicaine et de ses élus, il
nous la faut complète, certaine, en ce moment où
le suffrage universel commence a se préoccuper
des élections générales, afin que npus puissions
affirmer bien haut les conquêtes déjà faites et le
ferme propos où nous sommes tous, non-seulement
de ne rien sacrifier de nos conquêtes, mais aussi
d’en poursuivre de nouvelles qui contribueront à
l’organisation progressive de la démocratie. » (Ap
plaudissements répétés.)
*
* *
Hélas ! nous craignons fort, malgré le bon vou
loir dont les ministres actuels semblent animés,
qu’ils ne puissent rester longtemps a poursuivre
Pobjet de leur rêve. . ,
Depuis la reprise des travaux parlementaires, on
a pu, en effet, constater qu’il y a plus de bruits en
l’air que d’accord,
Déjà nous voyons ce malheureux budget aux
prises avec les mêmes difficultés. A la Chambre,
la commission du budget s’est reunie pour étudier
officieusement les modifications apportées par le
Sénat d’accord avec le gouvernement.
M. Edouard Lockroy qui a remplacé M. Pom-
carré comme rapporteur général, et M. Peytral
comme président, a fait un exposé complet des
modifications. . , . ,, ,
C’est surtout sur la disjonction de la reforme des
boissons que paraît devoir se produire le plus gros
effort du débat.
En même temps que la commission du budget,
le groupe d’étudesse réunissait jeudi. Sans qu’il ait
émis de vote, il a paru néanmoins favorable en
majorilè a une transaction. Il s’est reuni de nou
veau vendredi, pour recnercher dans quelles con
ditions celle-ci pourrait être réalisée.
Au Sénat. — Le sénat vient de procéder à un
nouvel examen de cet infortuné budjet de 1893, si
en retard et si compromis.
Nos lecteurs connaissent l’histoire pleine de
cahots de ce budjet ; ils se rappellent qu’en dernier
lieu un conflit a surgi entre les deux fractions du
Parlement, le Sénat s’obstinant à disjoindre la
réforme de L’impôt des boissons, la Chambre persis
tant à se refuser à cette disjonction ; ceci indépen
damment, d’antres dissentiments portant sur l’im
pôt sur les opérations de Bourse, les modifications
apportées à la loi des patentes, etc.
Au Sénat, il n’y a pas eu de discussion générale,
ce qui est très bien. M. Boulanger, l’inamovible
rapporteur général de la commission des finances,
s’est borné a annoncer que l’accord s’était fait, le
plus heureusement du monde entre le gouverne
ment et la commission. A peine cette déclaration
était-elle formulée que M. Viette, ministre des
travaux publics, montait à la tribune, pour avec
sa faconde franc-comtoise, demander au Sénat de
lui donner raison contre la commission ; ce qui a
semblé prouver que l’accord n’était pas si parfai
tement établi que M. Boulanger voulait bien le
dire. Il s’agissait ici de la réorganisation du contrôle
d< j s chemins de fer. Et, par 144 voix contre 109 le
Sénat a donné raison à sa commission, contre le
gouvernement et contre la Chambre. Comme vous
voyez, ça commençait bien. Puis M. Bardoux a
demandé au Sénat'de reppousser l’augmentation
de patente imposée aux professions liberales, aug
mentation du 15 e au 12 e , adoptée par la Chambre.
Le commissaire du gouvernement, M. Boutin, et
M. Peytral, ministre des finances, ont, défendu le
texte de la Chambre.
Le Sénat s’est rangé à leur avis.
De même il a ratifié le vote de la Chambre en
fixant â 10 fr. le taux de l’impôt sur les véloci
pèdes. Cette fois-là, vous y êtes, mes pauvres vèlo-
cipédistes ! vous voilà imposés, tout comme nos
chiens. Vous aurez beau courir et jouer des jambes,
partout vous serez traqués. Payez 10 Francs., et on
vous laissera tranquille,
Par contre, il a de nouveau, et sans débats, à
mains levées, prononcé la disjonction de la réfor
me de l’impôt des boissons. — Suite du conflit.
Mais il a repoussé la disjonction, demandée par
M. Sèbline, des articles concernant les opérations
de Bourse, ft il a adopté l’article 1 er portant le
principe de la taxe appliquée sans ditinction à
toutes les operations de bourse.
'k
* *
Le 1 er Mai. — La fête du travail sera cette année
aussi calme que celle de l’année dernière.
A Paris, la commission d’organisation du 1 er
mai a tenu avant-hier une réunion, salle Léger.
Un grand nombre d’orateurs ont pris successi
vement la parole et, finalement, il a été décidé
qu’une nouvelle réunion, ayant surtout un carac
tère syndical aurait lieu ce jour dans la même
salle ; que toutes les corporations seraient spécia
lement convoquées sans distinction aucune et qu’il
serait demandé à la commission exécutive de la
Bourse du travail de se réunir avant sa séance
ordinaire pour permettre l’ouverture de la grande
salle et de la salle des grèves le jour du 1 er mai,
bien que la Bourse dût être fermée ce jour-là.
*
- * ¥
Des manifestations pacifiques se préparent dans
toutes les grandes villes de provinces. Le mot
d’ordre semble partout être le même. Il y a une
discipline qui démontre que la fête du travail
prend des proportions des plus sérieuses, et nous
voyons autres choses dans ces manifestations que
des démonstrations platoniques, fartes disent les
sceptiques, pour effrayer les capitalistes; nous
voyons, au contraire, un avertissement à nos lé
gislateurs, et ils auront grand tort s’ils continuent
à se montrer indifférents devant cette marée mon
tante, qui réclame la journée de huit heures.
Mais nous voyons encore autre chose et que nous
considérons comme le prélude d’une autre mani
festation non moins grandiose, qui doit s’accom
plir dans quelques mois : nous voulons parler
des nouvelles élections, si le parti ouvrier s’orga
nisait en lutte de classes, comme vont le conseiller
tous les conférenciers qui vont se faire entendre,
à l’occasion du 1 er mai, - chose que nous déplo
rerions, -- mais puisqu’on le contraint d’arriver à
cette extrémité — pour la conquête des pouvoirs
publics, afin de restituer à chacun les moyens
ae production et le droit au banquet de la vie.
L’ARMÉE ITALIENNE
A la suite de la visite de l’empereur d’Allemagne
et de l’impératrice en Italie, nous croyons utile de
faire connaître à peu près les vues de l’Italie si le
traité de la triple alliance l’obligeait à marcher
contre nous.
Déduction des troupes de milice qui sont spé
ciales à la Sardaigne et à la Sicile, l’armée ita
lienne pourrait mettre en campagne 670 bataillons
d’infanterie, 144 escadrons de cavalerie, 260 bat-,
teries attelées, soit 670,000 fusils, 20,000 sabres,
1,560 canons représentant un total de 900,000
hommes, dont 600,000 de l’armé et de la disponi
bilité, et 300,000 de la milice mobile.
Il lesterait encore sur le territoire environ
400,000 soldats instruits, dont 100,000 appartenant
aux trois classes précédentes et 300.000 à la milice
territoriale.
En réalité, les ressources totales s’élèvent à
3,200,000 hommes, mais, 550,000 n’ont qu’une
instruction militaire à peine ébauchée et 1,350,000
n’ont jamais été exercés.
Le plan de campagne : Comment seraient for
mées les armées ? — opèi'atioyis dirigées
contre nous : Quels seraient
leurs objectifs ?
Il est délicat de répondre à ces deux questions.
Le commandement en chef n’est pas organisé, en
effet, dans l’armée italienne, comme dans les
autres armées. Les lieutenants-généraux qui com
mandent les douze corps d’armée sont les plus an
ciens de la liste ; on les remplace souvent, et les
mutations sont si fréquentes, que, l’an dernier,
huit corps d’armée sur douze ont reçu un nouveau
chef. Ce mouvement s’est répercuté sur les divi
sions, dont dix-huit sur vingt-quatre ont changé
de commandant dans le même laps de temps. Ces
mouvements continuels se reproduisent,d’ailleurs,
dans les corps de troupes qui, sauf les bataillons
alpins, l’artillerie et le génie, se déplacent à des
époques très rapprochées.
On peut supposer, cependant, que dans la vallée
du Pô seront constituées trois armées de campa
gne ; qu’un corps d’armée de réserve gardera
Rome, un autre Naples, un troisième la Sicile ;
que la Sardaigne sera défendue par une division,
si ce u’est même un corps d’armée.
Les attaques principales se porteront sur les
Alpes, dans la zone frontière limitrophe de la
France, puis sur la Corse, enfin sur la Tunisie.
Il est à présumer, en outre, surtout depuis la
Terme attitude de la Suisse pour imposer le res
pect de sa neutralité, qu’une partie des armée ita
liennes tournera le territoire de la Confédération,
par les voies ferrées italiennes, autrichiennes et
allemandes, et débouchera à Huningue. De là, les
coalisés chercheraient à descendre vers le sud, k
occuper le Jura, à menacer Lyon et à joindre les
troupes italiennes qui feraient effort sur la crête
des Alpes.
Ce projet est fort beau, mais la Franc est
prête !
Lettres d’un rustre
Vallon d’Ignauval (Seine-Inf re )
- Des événements de Belgique, heureusement
terminés, il se dégage un enseignement pour
l’avenir et s’ils peuvent servir d’exemple aux peu
ples qui travaillent pour leur liberté, c’est par le
calme relatif avec lequel les choses se sont pas
sées. Il y a bien eu quelques pots cassés — ici,
comme toujours, dans les revendications popu
laires, les pots étaient des têtes humaines —
mais qu’importe, puisqu’à ce prix seulement il
était possible de réussir. Le vote plural admis
sous la pression de l’émeute de la rue, arraché
par la peur à une Chambre quelque peu affolée,
est un acheminement du peuple belge vers la
Liberté. Ce n’est pas payer trop cher cette con
cession aux droits du peuple que de la payer de la
vie de quelques-uns des individus qui la com
posent, victimes, comme il arrive le plus souvent
en pareil cas, absolument innocentes et descen
dues dans la rue pour tout autre chose que pour
prendre part à l’émeute.
Le premier pas est fait, d’autres libertés sui
vront, le peuple belge ne peut se contenter de
cela et quelque jour il jettera bas d’un coup
d’épaule la vieille monarchie, amie de l’Allema
gne, qui lui mesure les libertés, le jugeant sans
doute incapable de s’en servir, voulant les lui
doser comme on dose la nourriture forte d’un
convalescent. C’est que ceux qui régnent et leurs
sujets n’envisagent pas les choses au même point
de vue ; les premiers trouvent que tout est bien,
que le peuple est heureux dès l’instant qu’il ne
meurt pas tout à fait de faim, dédaignant, du
reste, de descendre assez bas pour s’en rendre
compte ; les seconds qui paient de leur personne,
qui peinent, suent et qui meurent de faim en
travaillant beaucoup, voient les choses sous un
jour tout autre et les sentent durement ; ils n’ont
pas pour eux le prisme enchanteur de la fortune
et des honneurs, à travers lequel on voit tout en
rose. Il est facile, dans le cas de ces derniers, de
trouver toutes les choses au point, et le malheur,
c’est que la richesse dessèche le plus souvent le
cœur de ceux qui en jouissent, les rend égoïstes et
qu’il ne font rien pour les classes moins favori
sées, oubliant dans une indifférence coupable la
solidarité humaine, oubliant les devoirs que créent
aussi bien la supériorité intellectuelle que la
supériorité de fortune ; devoirs qu’ils ne sauraient
satisfaire au moyen de quelques aumônes.
Il a suffi au lion populaire belge de secouer sa
crinière pour faire trembler le trône de Léo
pold II et pour qu’on lui jette en pâture une petite
liberté espérant l’apaiser. Peu à peu, elles y
passeront toutes, et le régime républicain, seul
compatible avec les progrès du siècle, succédera
v
?
*
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 87.83%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 87.83%.
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k3263279q/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k3263279q/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k3263279q/f1.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k3263279q
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k3263279q