Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1893-03-25
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 25 mars 1893 25 mars 1893
Description : 1893/03/25 (N74). 1893/03/25 (N74).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263274n
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
1
ORGANE RÉPUBLICAIN
PRIX DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
LA MORT
DE
JULES FERRY
La disparition soudaine de Jules Ferry, au
lendemain de son élévation à la Présidence
du Sénat, en pleine crise de Panama, a pro
voqué dans le pays une émotion profonde.
Emotion d’autant plus naturelle que tout le
monde le savait appelé à jouer un rôle dans
les événements qui se préparent.
Bien diverses sont les appréciations de
l’opinion à l’occasion de cette mort.
Tandis que les organes de la réaction conti
nuent leurs invectives à l’adresse du laïcisa-
teur, et ne désarment pas devant ce cadavre,
les républicains, en grande majorité, expri
ment leur reconnaissance et leurs regrets.
Peu d’hommes ont soulevé autant de haines,
ont attiré sur leur tête autant d’accusations :
Ferry-famine, Ferry le crocheteur, — Ferry
le Tonkinois, — Ferry l’allié de Bismarck ;
il connut toutes les épithètes. Si l'importance
des hommes se mesure, comme la violence des
vents, aux houles qu’ils soulèvent, Jules Ferry
fut une force.
Ce fut avant tout un combattant, un lut
teur jamais las.
Lorsqu’il résolut de livrer au cléricalisme
la bataille décisive, que rencontra-t-il contre
lui ? Les plus grands pouvoirs de l’Etat, c’est-
à-dire la Magistrature, le Sénat, l’Université,
le Clergé. Il marcha quand même, rien ne
Parrêta, ni le rejet de l’article 7 par le Sénat,
ni l’hostilité des corps enseignants, ni les ana
thèmes des prêtres. Tantôt il renversa les
obstacles, tantôt il les franchit, — car il était
agile en politique, — et tantôt il les tourna,
car il était rusé.
Quoi que l’on pense de lui et des moyens
qu’il employa, on est forcé de convenir que
son œuvre est debout. Son œuvre, c’est-à-dire :
ïa loi sur l’enseignement primaire, gratuit,
laïque et obligatoire, l’expulsion des congré
gations non autorisées, la main-mise de la
France sur la Tunisie et sur le Tonkin.
Certains de ses actes de politique intérieure
méritent d’être critiqués. Un moment, il
parut, en dénonçant le péril à gauche, faire
les affaires des modérés. Et ce jour-là, il
mérita les reproches du parti républicain qu’il
divisa si maladroitement.
Après sa chute du ministère causée, par un
affollement inexplicable de la Chambre, il
rentra dans l’ombre et n’en sortit que dans
des occasions rares, notamment pour dire son
fait au peu estimable Boulanger.
Ce qu’il y eut toujours de remarquable chez
cet homme d’action, ce fut son mépris absolu
de la popularité. Et c’est un côté par lequel il
mérite certainement l’estime. Il sut montrer,
par son exemple, que le rôle des hommes poli
tiques ne consiste pas seulement à résumer
dans leurs actes la volonté moyenne du corps
électoral parfois difficile à dégager, mais qu’il
faut aussi qu’ils paient de leur personne et
luttent au premier rang pour l’idée qu’ils
croient juste.
Jules Ferry, si discutable à tant de points
de vue, vivra surtout comme un adversaire
résolu de l’Eglise, comme un laïcisateur.
Plus que l’éloquence de Gambetta, les
actes de Ferry portèrent la désolation dans le
camp des cléricaux.
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RXJE CASIÏIR-PÉRIEE,
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
1 5
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
A ce titre, nous ne pouvons qu’approuver
l’Administration municipale du Havre d’avoir
délégué spontanément à ses obsèques, trois de
ses membres. Derrière ce cercueil que n’es
cortait aucun prêtre, ils ont fait, nous l’espé
rons, amende honorable de l’appui équivoque
qu’ils prêtaient naguère aux congréganistes
du Bureau de bienfaisance.
Suivre le convoi civil d’un républicain est
un acte méritoire. Mais s’inspirer de sa haine
de l’ignorantisme serait un hommage plus
complet rendu à son œuvre et à sa mémoire.
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Election sénatoriale du 19 Mars 1893
Haute-Saône
MM. Coillot, conseiller général,
républicain 475 voix. Elu.
Mercier, député républic. 372 » »
En remplacement de M. John Lemoinne, séna
teur inamovible, décédé.
*
* *
Jules Ferry est mort, le 17, à 6 heures un quart
du soir, à la suite d’une crise de suffocation qui
l’avait retenu alité pendant une journéé à peine.
L’impartialité et l’indépendance du Réveil en ce
qui concerne Jules Ferry nous permet de consta
ter en toute franchise la perte que vient de faire
la République.
Sans doute, sa vie, toute de travail, n’a pas été
exempte d’erreurs. Mais il a été l’auteur de ré
formes nombreuses et de la plus haute impor
tance; il a été en lutfe avec l’Eglise et une bonne
partie de l’Université pour la réorganisation de
1’enseignement public ; il a eu à essuyer les ré
sistances de la magistrature lors de l’application
des fameux décrets de mars 1880, dont l’un pro
nonça la dissolution des jésuites et l’autre obligea
les congrégations non autorisées à produire leurs
statuts et à demander la reconnaissance légale !
Il a opéré la laïcisation scolaire en France ; ce
qui sera un de ses plus beaux titres !
Il est vrai que, dans les dernières années, il a
montré à l’égard des radicaux, une méfiance exa
gérée que l’on ne saurait oublier facilement ; il a
été opportuniste et on l’a appelé le Tonkinois !
Mais en présence de son œuvre d’ensemble nous
voulons, en ce jour de deuil, faire abstraction de
nos critiques pour ne considérer que les services
généraux et nous saluons le républicain dont les
réformes ont été et sont encore la bête noire des
réactionnaires.
*
* *
Jules Ferry était né à St-Dié (Vosges), le 5
avril 1832. Ses funérailles ont eu lieu, mercredi
dernier, aux frais de l’Etat. Comme celles de
Gambetta, de Louis Blanc, de Victor Hugo, elles
ont été civiles.
Les discours ont été prononcés dans la cour
d’honneur du Sénat, par MM. Bardoux, vice-pré
sident du Sénat ; Casimir-Périer, président de la
Chambre des Députés ; Ribot, président du Con
seil ; Charles Dupuy, ministre de l’instruction
publique ; Méline, vice-président du Conseil géné
ral des Vosges.
Le cortège est parti de la cour du Sénat pour se
rendre à la gare de l’Est, où de nouveaux discours
ont été prononcés par MM. Spuller, au nom de
l’Association nationale républicaine ; Boutin,
Schlumberger, au nom de l’Association générale
d’Alsace-Lorraine ; Woirhaye, au nom de la Loge
Alsacienne-Lorraine ; Salmon, au nom de l’Union
française de la jeunesse ; Wehrung, au nom des
B’rancais ayant résidé au Tonkin ; Chancal, au
nom de l’Association philotechnique.
Le soir, le corps a été transporté à St-Dié, où
aura lieu l’inhumation.
★
* *
La Chambre des Députés a continué l’exa
men du projet de loi concernant le classement et
le traitement des instituteurs.
La question du pourcentage a donné lieu à un
débat assez vif. On sait que dans ce système, il
faut, pour passer d’une classe aune autre, d’abord
un minimum d’ancienneté, puis des vacances dans
la classe supérieure, enfin être choisi par l’admi
nistration.
MM. Bouge et Cabart-Danneville ont vu, dans
ce système, un obstacle à l’avancement d’un grand
nombre d’instituteurs. M. Bouge aurait voulu que
l’avancement se fît d’une manière mécanique et
que l’ancienneté fît passer de droit l’instituteur
d’une classe à une autre.
Ce mode entraînerait une dépense que le rap
porteur a estimé 40 millions ; c’est ce qui a évidem
ment empêché la Chambre de le voter.
A
* *
Par le vote de son article 29 (nouveau), la Cham
bre a décidé que dans les villes de plus de 150,000
habitants, le montant des dépenses mises à la
charge de l’Etat n’excédera pas le produit des
8 centimes additionnels généraux qui y seront
perçus, et, à Paris, le produit de 4 centimes.
Le Havre ne se trouvera donc plus compris dans
les villes qui auront à supporter les traitements
des instituteurs.
Par contre, la Chambre, dans la même séance,
avant élevé de 800 à 1,000 fr. les indemnités de
résidence dans les villes de 100,000 habitants et
au-dessus, le budget de notre ville aura à supporter
cette augmentation, dont profiteront les institu
teurs havrais.
* t
* *
Le verdict a été rendu dans l’affaire de cor
ruption panamiste.
Il est négatif à l’égard de MM. Fontane, Béral,
Gobron, Sans-Leroy, Dugué de la Fauconnerie et
Antonin Proust, qui sont, en conséquence, ac
quittés.
Il reconnaît coupables, Baïhaut, sans circons-
1 tances atténuantes, Charles de Lesseps et Blondin,
avec circonstances atténuantes, et la Cour pro
nonce l’arrêt suivant :
Baïhaut, cinq ans de prison, dégradation civi
que et 750,000 francs d’amende ;
Charles de Lesseps, un an de prison, qui se
confondra avec la précédente condamnation de
cinq ans ;
Blondin, deux ans de prison.
La Cour condamne, en outre, ces trois derniers
solidairement à payer à la liquidation de la Com
pagnie du Panama la somme de 375,000 francs.
★
* *
Les huit secrétaires de la Chambre des députés
ont résolu d’organiser un banquet des anciens
secrétaires du Parlement.
Il y a actuellement dans les deux Chambres
cinquante-trois membres exerçant ou ayant exercé
les fonctions de secrétaires et soixante-sept an
ciens secrétaires ne faisant plus partie du Parle
ment, soit au total, cent-vingt membres.
Décidément, le temps est aux banquets!
A
* *
ALLEMAGNE
Ahlwardt, le député antisémite, fait passer de
vilains moments aux ministres de l’empire.
Il a renouvelé, dans une des dernières séances
du Reichstag, ses accusations contre l’adminis
tration militaire, au sujet des fusils livrés par la
fabrique d’armes Loewe.
11 a dit que de même qu’en 1870, les soldats
français étaient chaussés de souliers à semelles
de carton, de même, aujourd’hui, les soldats alle
mands sont armés de fusils juifs, fabriqués avec
les pièces défectueuses refusées par le gouverne
ment italien.
Il rappelle les six cent vingt-cinq fusils inuti
lisables dans un seul bataillon de la garnison c’e
Wesel.
*
* *
Dans une séance suivante, il a déchaîné une
nouvelle tempête en disant que les fonds de la
caisse des Invalides étaient insuffisants, parce
qu’on avait donné à l’argent destiné à alimenter
cette caisse une destination qu’il ne devait pas
avoir. Cela remonte après 1870 ; d.es tripotages
ont eu lieu dans les coulisses et l’on a trompé le
peuple allemand au sujet de l’emploi de millions
et de millions !
On comprend l’émotion causée par ces affir*
mations, à l’appui desquelles M. Ahlwardt a
promis de fournir des documents signés !
★
* *
Dans la même séance, M. Bebel ayant parlé des
mauvais traitements dans l’armée, le ministre de
la guerre a déclaré que ces allégations ne sont que
d’infàmes calomnies.
M. Bebel a répondu : * Vous êtes un insolent ! »
Le président a rappelé le ministre de la guerre à
l’ordre.
Cela va bien, Messieurs les allemands ! Conti
nuez ainsi ! / %
UNE DÉCORATION BIEN MÉRITÉE
Le bruit court avec une certaine persistance
qu’à l’occasion du centenaire de Casimir Dela-
vigne, il serait question de nommer chevalier de
la Légion-d’honneur un des professeurs de notre
Lycée de garçons.
Nous n’aurions rien à dire si cette distinction
s’appliquait à quelqu’un de ces professeurs qui
l’ont méritée par leur valeur personnelle, leurs
travaux et la dignité de leur caractère. 11 en est
plus d’un dans notre Lycée.
Mais il paraît que, par un choix des plus mal
heureux, on va donner la croix à un universitaire
réputé pour sa pratique du commérage. C’est une
véritable gazette ambulante, un émule de M. Pi
pelet. Avec lui, les élèves sont au courant de tous
les potins de la ville, ce qui n’est peut-être pas
suffisant pour les examens.
Ajoutons pour terminer que cette merveille pé
dagogique appartient au parti conservateur mili
tant. Les républicains sincères n’ont pas d’adver
saire plus venimeux.
Comme on le voit les titres ne manqueront pas
à ce nouveau crucifère
Bravo, M. Dupuy ! Votre sagacité ministérielle
sait découvrir le vrai mérite !
jjfcfcj
La Police et les Scandales de la
.Foire Thiers
Le Conseil municipal a, dans sa dernière séance,
voté un crédit de 5,256 francs pour distribuer des
gratifications au personnel de la police, en raison
du concours tiès actif et souvent périlleux qu’il a
prêté pendant l’épidémie cholérique.
Personne ne se douterait de l’étrange manière
dont M. Brindeau, qui a la police dans ses attri
butions spéciales, a procédé à la répartition de ce
crédit. Une somme de 1,100 francs a été allouée
aux cent douze agents du service actif, y compris
l’adjudant et le brigadier, qui ont ainsi à recevoir
6 fr. 40 par tête. Quant au surplus du crédit,
4,156 francs, il a été partagé, nous dit-on, entre
le commissaire central, les commissaires de po
lice et les employés de bureau ou agents spéciaux,
en un mot l’état-major qui comprend, si nous
sommes bien renseignés, une vingtaine de per
sonnes. M. Brindeau nous paraît avoir donné,
dans la circonstance, la mesure de ses sentiments
démocratiques ; il a profondément froissé de bons
et dévoués serviteurs de la Ville qui n’admettent
pas que le Maire, ayant demandé un crédit à leur
intention, l’emploie presque entièrement à récom
penser leurs chefs, et ne leur alloue qu’une indem
nité dérisoire. Aussi la plupart des agents ont-ils
purement et simplement refusé de recevoir leurs
six francs quarante centimes.
Il est indispensable que la répartition soit
refaite sur d’autres bases ; en principe, une dis
tribution proportionnelle aux traitements serait
équitable.
Puisque les circonstances nous amènent au
jourd’hui à nous occuper de la police, nous
croyons de notre devoir de faire connaître à nos
lecteurs des faits révoltants qui prouvent l’incurie
du haut personnel de la police du Havre, et nous
ajouterons même de l’Administration municipale.
Certaines baraques de la foire Thiers ont été
ORGANE RÉPUBLICAIN
PRIX DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
LA MORT
DE
JULES FERRY
La disparition soudaine de Jules Ferry, au
lendemain de son élévation à la Présidence
du Sénat, en pleine crise de Panama, a pro
voqué dans le pays une émotion profonde.
Emotion d’autant plus naturelle que tout le
monde le savait appelé à jouer un rôle dans
les événements qui se préparent.
Bien diverses sont les appréciations de
l’opinion à l’occasion de cette mort.
Tandis que les organes de la réaction conti
nuent leurs invectives à l’adresse du laïcisa-
teur, et ne désarment pas devant ce cadavre,
les républicains, en grande majorité, expri
ment leur reconnaissance et leurs regrets.
Peu d’hommes ont soulevé autant de haines,
ont attiré sur leur tête autant d’accusations :
Ferry-famine, Ferry le crocheteur, — Ferry
le Tonkinois, — Ferry l’allié de Bismarck ;
il connut toutes les épithètes. Si l'importance
des hommes se mesure, comme la violence des
vents, aux houles qu’ils soulèvent, Jules Ferry
fut une force.
Ce fut avant tout un combattant, un lut
teur jamais las.
Lorsqu’il résolut de livrer au cléricalisme
la bataille décisive, que rencontra-t-il contre
lui ? Les plus grands pouvoirs de l’Etat, c’est-
à-dire la Magistrature, le Sénat, l’Université,
le Clergé. Il marcha quand même, rien ne
Parrêta, ni le rejet de l’article 7 par le Sénat,
ni l’hostilité des corps enseignants, ni les ana
thèmes des prêtres. Tantôt il renversa les
obstacles, tantôt il les franchit, — car il était
agile en politique, — et tantôt il les tourna,
car il était rusé.
Quoi que l’on pense de lui et des moyens
qu’il employa, on est forcé de convenir que
son œuvre est debout. Son œuvre, c’est-à-dire :
ïa loi sur l’enseignement primaire, gratuit,
laïque et obligatoire, l’expulsion des congré
gations non autorisées, la main-mise de la
France sur la Tunisie et sur le Tonkin.
Certains de ses actes de politique intérieure
méritent d’être critiqués. Un moment, il
parut, en dénonçant le péril à gauche, faire
les affaires des modérés. Et ce jour-là, il
mérita les reproches du parti républicain qu’il
divisa si maladroitement.
Après sa chute du ministère causée, par un
affollement inexplicable de la Chambre, il
rentra dans l’ombre et n’en sortit que dans
des occasions rares, notamment pour dire son
fait au peu estimable Boulanger.
Ce qu’il y eut toujours de remarquable chez
cet homme d’action, ce fut son mépris absolu
de la popularité. Et c’est un côté par lequel il
mérite certainement l’estime. Il sut montrer,
par son exemple, que le rôle des hommes poli
tiques ne consiste pas seulement à résumer
dans leurs actes la volonté moyenne du corps
électoral parfois difficile à dégager, mais qu’il
faut aussi qu’ils paient de leur personne et
luttent au premier rang pour l’idée qu’ils
croient juste.
Jules Ferry, si discutable à tant de points
de vue, vivra surtout comme un adversaire
résolu de l’Eglise, comme un laïcisateur.
Plus que l’éloquence de Gambetta, les
actes de Ferry portèrent la désolation dans le
camp des cléricaux.
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RXJE CASIÏIR-PÉRIEE,
LE RÉVEIL DU HA VRE paraît le Samedi
1 5
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
A ce titre, nous ne pouvons qu’approuver
l’Administration municipale du Havre d’avoir
délégué spontanément à ses obsèques, trois de
ses membres. Derrière ce cercueil que n’es
cortait aucun prêtre, ils ont fait, nous l’espé
rons, amende honorable de l’appui équivoque
qu’ils prêtaient naguère aux congréganistes
du Bureau de bienfaisance.
Suivre le convoi civil d’un républicain est
un acte méritoire. Mais s’inspirer de sa haine
de l’ignorantisme serait un hommage plus
complet rendu à son œuvre et à sa mémoire.
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Election sénatoriale du 19 Mars 1893
Haute-Saône
MM. Coillot, conseiller général,
républicain 475 voix. Elu.
Mercier, député républic. 372 » »
En remplacement de M. John Lemoinne, séna
teur inamovible, décédé.
*
* *
Jules Ferry est mort, le 17, à 6 heures un quart
du soir, à la suite d’une crise de suffocation qui
l’avait retenu alité pendant une journéé à peine.
L’impartialité et l’indépendance du Réveil en ce
qui concerne Jules Ferry nous permet de consta
ter en toute franchise la perte que vient de faire
la République.
Sans doute, sa vie, toute de travail, n’a pas été
exempte d’erreurs. Mais il a été l’auteur de ré
formes nombreuses et de la plus haute impor
tance; il a été en lutfe avec l’Eglise et une bonne
partie de l’Université pour la réorganisation de
1’enseignement public ; il a eu à essuyer les ré
sistances de la magistrature lors de l’application
des fameux décrets de mars 1880, dont l’un pro
nonça la dissolution des jésuites et l’autre obligea
les congrégations non autorisées à produire leurs
statuts et à demander la reconnaissance légale !
Il a opéré la laïcisation scolaire en France ; ce
qui sera un de ses plus beaux titres !
Il est vrai que, dans les dernières années, il a
montré à l’égard des radicaux, une méfiance exa
gérée que l’on ne saurait oublier facilement ; il a
été opportuniste et on l’a appelé le Tonkinois !
Mais en présence de son œuvre d’ensemble nous
voulons, en ce jour de deuil, faire abstraction de
nos critiques pour ne considérer que les services
généraux et nous saluons le républicain dont les
réformes ont été et sont encore la bête noire des
réactionnaires.
*
* *
Jules Ferry était né à St-Dié (Vosges), le 5
avril 1832. Ses funérailles ont eu lieu, mercredi
dernier, aux frais de l’Etat. Comme celles de
Gambetta, de Louis Blanc, de Victor Hugo, elles
ont été civiles.
Les discours ont été prononcés dans la cour
d’honneur du Sénat, par MM. Bardoux, vice-pré
sident du Sénat ; Casimir-Périer, président de la
Chambre des Députés ; Ribot, président du Con
seil ; Charles Dupuy, ministre de l’instruction
publique ; Méline, vice-président du Conseil géné
ral des Vosges.
Le cortège est parti de la cour du Sénat pour se
rendre à la gare de l’Est, où de nouveaux discours
ont été prononcés par MM. Spuller, au nom de
l’Association nationale républicaine ; Boutin,
Schlumberger, au nom de l’Association générale
d’Alsace-Lorraine ; Woirhaye, au nom de la Loge
Alsacienne-Lorraine ; Salmon, au nom de l’Union
française de la jeunesse ; Wehrung, au nom des
B’rancais ayant résidé au Tonkin ; Chancal, au
nom de l’Association philotechnique.
Le soir, le corps a été transporté à St-Dié, où
aura lieu l’inhumation.
★
* *
La Chambre des Députés a continué l’exa
men du projet de loi concernant le classement et
le traitement des instituteurs.
La question du pourcentage a donné lieu à un
débat assez vif. On sait que dans ce système, il
faut, pour passer d’une classe aune autre, d’abord
un minimum d’ancienneté, puis des vacances dans
la classe supérieure, enfin être choisi par l’admi
nistration.
MM. Bouge et Cabart-Danneville ont vu, dans
ce système, un obstacle à l’avancement d’un grand
nombre d’instituteurs. M. Bouge aurait voulu que
l’avancement se fît d’une manière mécanique et
que l’ancienneté fît passer de droit l’instituteur
d’une classe à une autre.
Ce mode entraînerait une dépense que le rap
porteur a estimé 40 millions ; c’est ce qui a évidem
ment empêché la Chambre de le voter.
A
* *
Par le vote de son article 29 (nouveau), la Cham
bre a décidé que dans les villes de plus de 150,000
habitants, le montant des dépenses mises à la
charge de l’Etat n’excédera pas le produit des
8 centimes additionnels généraux qui y seront
perçus, et, à Paris, le produit de 4 centimes.
Le Havre ne se trouvera donc plus compris dans
les villes qui auront à supporter les traitements
des instituteurs.
Par contre, la Chambre, dans la même séance,
avant élevé de 800 à 1,000 fr. les indemnités de
résidence dans les villes de 100,000 habitants et
au-dessus, le budget de notre ville aura à supporter
cette augmentation, dont profiteront les institu
teurs havrais.
* t
* *
Le verdict a été rendu dans l’affaire de cor
ruption panamiste.
Il est négatif à l’égard de MM. Fontane, Béral,
Gobron, Sans-Leroy, Dugué de la Fauconnerie et
Antonin Proust, qui sont, en conséquence, ac
quittés.
Il reconnaît coupables, Baïhaut, sans circons-
1 tances atténuantes, Charles de Lesseps et Blondin,
avec circonstances atténuantes, et la Cour pro
nonce l’arrêt suivant :
Baïhaut, cinq ans de prison, dégradation civi
que et 750,000 francs d’amende ;
Charles de Lesseps, un an de prison, qui se
confondra avec la précédente condamnation de
cinq ans ;
Blondin, deux ans de prison.
La Cour condamne, en outre, ces trois derniers
solidairement à payer à la liquidation de la Com
pagnie du Panama la somme de 375,000 francs.
★
* *
Les huit secrétaires de la Chambre des députés
ont résolu d’organiser un banquet des anciens
secrétaires du Parlement.
Il y a actuellement dans les deux Chambres
cinquante-trois membres exerçant ou ayant exercé
les fonctions de secrétaires et soixante-sept an
ciens secrétaires ne faisant plus partie du Parle
ment, soit au total, cent-vingt membres.
Décidément, le temps est aux banquets!
A
* *
ALLEMAGNE
Ahlwardt, le député antisémite, fait passer de
vilains moments aux ministres de l’empire.
Il a renouvelé, dans une des dernières séances
du Reichstag, ses accusations contre l’adminis
tration militaire, au sujet des fusils livrés par la
fabrique d’armes Loewe.
11 a dit que de même qu’en 1870, les soldats
français étaient chaussés de souliers à semelles
de carton, de même, aujourd’hui, les soldats alle
mands sont armés de fusils juifs, fabriqués avec
les pièces défectueuses refusées par le gouverne
ment italien.
Il rappelle les six cent vingt-cinq fusils inuti
lisables dans un seul bataillon de la garnison c’e
Wesel.
*
* *
Dans une séance suivante, il a déchaîné une
nouvelle tempête en disant que les fonds de la
caisse des Invalides étaient insuffisants, parce
qu’on avait donné à l’argent destiné à alimenter
cette caisse une destination qu’il ne devait pas
avoir. Cela remonte après 1870 ; d.es tripotages
ont eu lieu dans les coulisses et l’on a trompé le
peuple allemand au sujet de l’emploi de millions
et de millions !
On comprend l’émotion causée par ces affir*
mations, à l’appui desquelles M. Ahlwardt a
promis de fournir des documents signés !
★
* *
Dans la même séance, M. Bebel ayant parlé des
mauvais traitements dans l’armée, le ministre de
la guerre a déclaré que ces allégations ne sont que
d’infàmes calomnies.
M. Bebel a répondu : * Vous êtes un insolent ! »
Le président a rappelé le ministre de la guerre à
l’ordre.
Cela va bien, Messieurs les allemands ! Conti
nuez ainsi ! / %
UNE DÉCORATION BIEN MÉRITÉE
Le bruit court avec une certaine persistance
qu’à l’occasion du centenaire de Casimir Dela-
vigne, il serait question de nommer chevalier de
la Légion-d’honneur un des professeurs de notre
Lycée de garçons.
Nous n’aurions rien à dire si cette distinction
s’appliquait à quelqu’un de ces professeurs qui
l’ont méritée par leur valeur personnelle, leurs
travaux et la dignité de leur caractère. 11 en est
plus d’un dans notre Lycée.
Mais il paraît que, par un choix des plus mal
heureux, on va donner la croix à un universitaire
réputé pour sa pratique du commérage. C’est une
véritable gazette ambulante, un émule de M. Pi
pelet. Avec lui, les élèves sont au courant de tous
les potins de la ville, ce qui n’est peut-être pas
suffisant pour les examens.
Ajoutons pour terminer que cette merveille pé
dagogique appartient au parti conservateur mili
tant. Les républicains sincères n’ont pas d’adver
saire plus venimeux.
Comme on le voit les titres ne manqueront pas
à ce nouveau crucifère
Bravo, M. Dupuy ! Votre sagacité ministérielle
sait découvrir le vrai mérite !
jjfcfcj
La Police et les Scandales de la
.Foire Thiers
Le Conseil municipal a, dans sa dernière séance,
voté un crédit de 5,256 francs pour distribuer des
gratifications au personnel de la police, en raison
du concours tiès actif et souvent périlleux qu’il a
prêté pendant l’épidémie cholérique.
Personne ne se douterait de l’étrange manière
dont M. Brindeau, qui a la police dans ses attri
butions spéciales, a procédé à la répartition de ce
crédit. Une somme de 1,100 francs a été allouée
aux cent douze agents du service actif, y compris
l’adjudant et le brigadier, qui ont ainsi à recevoir
6 fr. 40 par tête. Quant au surplus du crédit,
4,156 francs, il a été partagé, nous dit-on, entre
le commissaire central, les commissaires de po
lice et les employés de bureau ou agents spéciaux,
en un mot l’état-major qui comprend, si nous
sommes bien renseignés, une vingtaine de per
sonnes. M. Brindeau nous paraît avoir donné,
dans la circonstance, la mesure de ses sentiments
démocratiques ; il a profondément froissé de bons
et dévoués serviteurs de la Ville qui n’admettent
pas que le Maire, ayant demandé un crédit à leur
intention, l’emploie presque entièrement à récom
penser leurs chefs, et ne leur alloue qu’une indem
nité dérisoire. Aussi la plupart des agents ont-ils
purement et simplement refusé de recevoir leurs
six francs quarante centimes.
Il est indispensable que la répartition soit
refaite sur d’autres bases ; en principe, une dis
tribution proportionnelle aux traitements serait
équitable.
Puisque les circonstances nous amènent au
jourd’hui à nous occuper de la police, nous
croyons de notre devoir de faire connaître à nos
lecteurs des faits révoltants qui prouvent l’incurie
du haut personnel de la police du Havre, et nous
ajouterons même de l’Administration municipale.
Certaines baraques de la foire Thiers ont été
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