Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1892-12-10
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 10 décembre 1892 10 décembre 1892
Description : 1892/12/10 (N59). 1892/12/10 (N59).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263259z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
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Vv-
2 e Année — S 6 59 — Samedi 10 Décembre 1S92. DIX CENTIMES LE NUMERO 2 e Année — 19 Frimaire An 101 — N° 59.
Le Réveil du Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN
ADMINISTRATION & RÉDACTION -
15, RUE CASIMXR-PÉRIER, 15
LE REVEIL I)TI LJ A VRE narn.î.t le Samedi
faisait bonne figure au Ministère de l'Instruc
tion publique qu'il commençait à bien con
naître et à bien diriger, a-t-il troqué son
portefeuille contre celui de la Justice? S’il
donne raison à M. Ricard, pourquoi consent-
il à prendre sa place dans une combinaison
qui lui donne tort ?
Tout cela, il faut en convenir, manque de
netteté et de franchise. Et la déclaration que
M. Ribot a, parait-il, déclamée à la Cham
bre, n'y changera rien. Il est facile, sans
doute, d’aligner des phrases habiles destinées
à contenter tout le monde. Il est moins aisé
d’agir. La première escarmouche du Cabinet
avec la Commission d’enquête montre bien
que les choses n’iront pas avec cette aisance
prédite par les feuilles ministérielles et que
les principales difficultés ne sont point
résolues.
Bref, le Ministère Ribot est un recul sur
le Ministère Loubet. Et nous ne pousserons
certes pas l’amour du clocher jusqu’à consi
dérer comme une compensation suffisante
l’entrée de M. Siegfried, au ministère du
commerce. Il est plaisant, sans doute, pour
ceux qui mettent les rivalités locales et les
questions personnelles au premier rang de
leurs préoccupations, de constater que toute
cette crise et tout ce tapage ont abouti au
remplacement d’un rouennais par un havrais
sur le banc des Ministres.
On est également curieux de savoir si
M. Siegfried^ qui a mis pas mal de désordre
dans les finances de notre ville, vaudra mieux
comme ministre que comme maire. Mais nous
sommes de ceux qui, en politique, mettent
l’intérêt général au-dessus de l’intérêt par
ticulier. Et nous sommes trop modestes pour
croire qu’une cave est bonne uniquement
parce qu’on y trouve du vin de notre cru.
« Député et ex-maire du Havre — armateur. —
Ni libre-échangiste — ni protectionniste. — A
été choisi à cause de ses opinions mixtes.
« Au point de vue politique, appartient au Ceti*
tre Gauche, ami personnel de M.Ribot. A une très
grosse fortune, son frère est un financier connu.
Appartient à la religion protestante. A été un des
organisateurs des Sociétés pour la construction
des maisons ouvrières.
« Air physique, aspect rébarbatif, cinquante ans
environ, rouge de cheveux et de barbe. Orateur
médiocre. »
N’est-ce pas cela ?
Nous verrons l’attitude qu’aura notre sympa
thique au moment de la discussion du traité
Franco-Suisse, si toutefois Dieu lui prête vie
ministérielle jusque-là !
En attendant, nous verrons peut-être les affaires
de la France prospérer d’une façon inattendue,
grâce à la présence, dans le cabinet, d’un saint
homme dont les prières vers l’Eternel ne manque
ront pas d’avoir une heureuse influence sur le
commerce de notre pays.
Ainsi soit-il !
*
* *
La Commission d’enquête sur les affaires du
Panama travaille ferme. Elle reçoit d’un grand
nombre de personnes, les dépositions qui remplis
sent les colonnes des journaux quotidiens; nous 11 e
pouvons, on le comprend, nous livrer à une
pareille publication. Espérons qu’un jour ou
l’autre, nous aurons l’occasion et le moyen de
montrer à quels résultats auront abouti ces dépo
sitions et ces travaux.
~k k
*
ALLEMAGNE
Le procès à sensation contre Ahlwardt se pour
suit à Berlin, où il passionne vivement le public.
L’Allemagne, la pure, la vertueuse Allemagne,
toujours prête à insulter la France dans les cir
constances les plus insignifiantes, a là un joli
scandale ! Il s’agit de fusils fournis par la manu
facture Loewe, dont un nombre considérable ont
été trouvés mauvais et impropres au service.
Déclaration du Gouvernement
PRIX BIS AIÎOWœYrsS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
Messieurs les Abonnés qui, à l’expiration
de leur abonnement, n’auront pas donné
avis de le suspendre seront considérés
comme réabonnés pour le même laps de
temps. Le prix de l’abonnement annuel
est de cinq francs pour un an et de trois
francs pour six mois.
REPLÂTRAGE
Nous avons enfin un ministère, et ça n’a
pas été sans peine. On s’étonnera d autant
plus de cette éclosion laborieuse, que le nou
veau cabinet est, à peu de chose près, le
même que l’ancien : car on ne voit pas
clairement quelle orientation inédite pourrait
résulter de l’entrée aux affaires de MM. Du-
puy et 8iegfried, deux députés qui ne passent
pas pour avoir, en matière politique, des
idées bien personnelles.
Quand M. Loubet a mis à la Chambre le
marché à la main et a provoqué ainsi la re
traite du-mixistère qu’on a qualifiée de suicide,
on le disait fatigué de l’exercice du pouvoir.
Il voulait, croyait-on, chercher dans le seul
acccomplissement de ses devoirs de député, le
repos nécessaire à son amour de la quiétude.
11 n’en était rien.
M. Ricard s’en va, et soudain nous voyons
se manifester en M. Loubet une nouvelle
ardeur. L’entrée de M. Bourgeois a la justice
produit sur l’arbitre de Carmaux les effets
bien connus de la liqueur de Brown-Séquard,
et il se promet d’être, désormais, un modèle
de virilité. Grand bien lui fasse !
Toutefois, comme Président du Conseil, il
passe la main à M. Ribot, Et les modérés
d’exulter !
Pensez donc ! M. Ribot, c’est tout une po
litique. M. Ribot, c’est l’ancêtre le plus véné
rable des ralliés, une sorte de grand’père de
M. Piou. Ancien Procureur impérial
n’est-il pas devenu, il y a quelques années,
républicain ? N’est-il pas entré au pouvoir
en passant par le Centre gauche, ce rendez-
vous de toutes les opinions indécises, cette
pépinière de tous les hommes politiques qui
veulent attendre d’où soufflera le vent ?
Telle nous paraît être, en effet, la véritable
signification du nouveau ministère. Et à
l’Elysée, on né s’y est pas mépris en appelant
M* Ribot à la présidence du Conseil. C’est la
suite du plan que l’on suit lentement mais
sûrement dans l’entourage de M. Carnot.
Avec deux ou trois dégringolades comme celle-
là, en tombant de Loubet à Ribot et de Ribot
à quelque autre d’un républicanisme encore
plus pâle, on prépare à notre pays de singu
lières destinées.
La Chambre de 1885, certes, n’était pas
une merveille de sens politique. Mais au
moins eût-elle regimbé si Grévy avait émis la
prétention de lui imposer un ministère Ribot.
Une chose en toute cette affaire, est assez
attristante. C'est le rôle qu’on fait jouer à
M. Bourgeois et qu’il accepte sans sourciller
'dans cette combinaison. Comment ne com
prend-il pas que les mêmes inimitiés sous le
poids desquelles a succombé M. Ricard se
retrouveront contre lui s’il fait son devoir ?
Dans le discours qu’il a prononcé à la suite
de la Déclaration, M. Bourgeois a fait l'éloge
de son prédécesseur. C’est fort bien. Mais s’il
accepte, comme il a dit « cette solidarité de
droiture et d’honneur », pourquoi, lui qui
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Les négociateurs ministériels pour la formation
d’un cabinet ont été MM. Brisson, Casimir-Périer,
Loubet, Develle et Ribot. Les trois premiers ont
échoué ; M. Ribot a fini par réunir le bouquet de
ministres que... n’attendait certes pas la France!
Le aoici : y ' ê .. ? t .
MM. Ribot, président du Conseil, affaires étran
gères ;
Bourgeois, justice ;
Loubet, intérieur ;
de Freycinet, guerre ;
Burdeau, marine ;
Rônvier, finances ;
Develle, agriculture ;
Charles Dupuy, instruction publique et
cultes ;
Siegfried, commerce et industrie.
s Viette, travaux publics ;
Jamais, sous-secrétaire d’Etataux Colonies.
Ce ministère, on le voit, n’a rien de radical et
les bons bourgeois de notre vieille France peuvent
dormir rassurés !
Il renferme deux noms nouveaux : M. Charles
Dupuy, un universitaire qui connaît bien les
questions d’enseignement et a été plusieurs fois
rapporteur du budget de l’instruction publique ; et
M. Jules Siegfried, très connu au Havre, où l’on
a pavoisé, à l’Hôtel de Ville et à la Chambre de
commerce qui lui a même envoyé une adresse !!
Le Havre et Le Petit Havre exultent naturelle
ment en style dithyrambique. Nous,qui n’avons pas
les mêmes motifs d’exulter, nous allons, impartia
lement, reproduire la courte note biographique
donnée par f Evénement sur M. Siegfried. Elle
est parfaitement exacte, à l’exception du mot
armateur, qui est de trop :
M. Ribot, Président du Conseil, a lu la décla
ration suivante, à la Chambre des députés :
« Messieurs,
« La confiance de M. le Président de la Répu
blique nous appelle à prendre le gouvernement
dans des circonstances difficiles. Nous nous
présentons devant vous avec la ferme volonté
de poursuivre, au dedans et au dehors, une
politique qui n’a pas cessé d’obtenir votre ap
probation, mais aussi avec la résolution de faire
tout notre devoir en face d’une situation qui
exige impérieusement une lumière complète et
de promptes résolutions. (Très bien à gauche.)
« Des allégations graves ont été portées à la
tribune ; elles ne mettent pas seulement en
cause l’honneur de plusieurs membres des deux
Chambres ; elles tendent à jeter la déconsidéra
tion sur la représentation nationale. (Très bien !
à gauche).
« Une commission a été chargée par vous
de rechercher et de faire connaître ce qu’il peut
y avoir de fondé dans ces allégations. Nous
sommes convaincus que l’accord entre la com
mission d’enquête et le gouvernement assurera
la pleine manifestation de la vérité. (Très bien !)
« Nous sommes convaincus aussi que cet ac
cord peut s’établir sans porter atteinte à aucun
des principes que nous avons également à cœur
de sauvegarder. (Très bien I au centre.)
« Messieurs, des défaillances individuelles ne
sauraient constituer autre chose qu’un accident
dans l’existence d’un grand peuple honnête et
laborieux. (Applaudissements.)
« L’œuvre de justice actuellement poursuivie
ne peut suspendre le cours régulier de la vie
publique ; nous vous convions donc à reprendre
sans délai la suite de vos travaux, à pourvoir au
vote des lois urgentes, telles que la réforme des
boissons et la convention commerciale franco-
suisse (Mouvements divers) et à vous assurer à
vous-mêmes par des douzièmes provisoires le
temps nécessaire pour un sérieux examen du
budget de 1893. Vous vous apprêterez ainsi à
achever utilement l’œuvre d’une législature qui
n’a été ni sans profit pour le pays, ni sans hon
neur pour vous-mêmes.
« Nos budgets ramenés à l’unité et à l’équi
libre, notre régime douanier réformé selon les
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces.... 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
vœux du pays, les lois sur lesquelles reposent
l’éducation et la défense nationales fermement
maintenues, la législation du travail développée
dans un esprit de justice et de solidarité, la
République ralliant à chaque consultation
nationale des suffrages plus compacts et deve
nant comme la forme naturelle de la vie -publi
que française, en même temps qu’elle recueil
lait au dehors de précieux témoignages d’estime,
telle a été, Messieurs, l’œuvre des trois pre
miers années de votre législature.
« Cette œuvre, un instant arrêtée, il dépend
de vous de la reprendre dès demain avec une
énergie nouvelle. Vous déjouerez ainsi les
pièges semés sur votre route (applaudissements
au centre et à gauche), et vous donnerez au
pays, demeuré calme au milieu des incidents
de ces derniers jours, une impression forti
fiante.
« La démocratie française a déjà fait justice
des calomnies que l’esprit de parti essaye de
diriger contre nos institutions. (Très bien ! sur
les mêmes bancs ; rumeurs à droite ; applau
dissements à gauche et au centre).
« Elle comprend que c’est l’honneur de la
République de ne pas étouffer parle silence des
-scandales ou des faiblesses qui ne sauraient
l’atteindre, et d’en tirer, au contraire, une
leçon de haute moralité. (Nouveaux applaudis
sements).
« Gardons, nous aussi, Messieurs, notre
sang-froid : ne nous laissons pas émouvoir par
cette fureur de délations qui s’abat, à certains
jours, sur notre pays.
« Soyons sévères pour les fautes commises,
mais n’arrêtons pas trop longtemps nos regards
sur ces misères et reprenons notre marche en
avant, la tête haute (applaudissements), comme
il convient aux représentants d’un grand pays.
« G’est dans cet esprit que le gouvernement
fait appel au concours des deux Chambres et
qu’il ose compter sur la confiance de tous les
républicains, unis dans un sentiment commun,
rendu plus profond par les difficultés de l'heure
présente, de dévouement envers la République
et envers la patrie. »
Ce discours, lu d’une voix ferme, est vivement
applaudi à gauche et au centre.
—
Les Trafiqueurs de Panam
Le Petit Journal , un des organes les plus lus
de toute la France, écrit sur ce sujet, un remar
quable article intitulé : le Déshonneur, voilà,
l'ennemi. Nous croyons être agréable à nos lec
teurs en leur en donnant quelques extraits :
Les scandales de Panama n’ont pas seule
ment révélé des hontes ignorées, ils ont accentué
la mésintelligence de tous les pouvoirs.
Il y a lutte dans le Palais-Bourbon entre les
députés qui ont chargé la commission d’enquête
de poursuivre les tripotages, et les commissaires
débordés par leur mandat, lutte entre la Chambre
et le Sénat qui proteste contre le travail de la
commission, lutte entre l’autorité parlementais, et
l’autorité judiciaire qui s’insurge contre l’usurpa
tion de ses prérogatives, lutte entre les magistrats
eux-mêmes, dont les uns obéissent aux injonctions
de l’enquête, et les autres flétrissent ceux qui ont
obéi.
S’il y avait demain, lutte entre la Chambre et le
ministère, ce ne serait plus la confusion, ce serait
l’anarchie généralisée.
Voilà pourquoi il faut que les ministres nou
veaux ou revenus avec une nouvelle investiture
aient conscience de la situation, l’envisagent avec
fermeté et ne capitulent pas en route. x
*
- * *
.... Les politiciens, avec leur insouciance et
leur aveuglement ordinaires, ont failli tout per
dre ; ils ont manœuvré comme aux beaux jours de
calme plat, sous le feu des questions les plus in
quiétantes.
Ils ne se sont pas avoué que l’opinion publique,
pénétrant de gré ou de force dans les mystères du
Parlement par la porte redoutable de l’indigna
tion, transformait la crise tout entière.
Ils n’ont pas vu que l’heure des petites intri
gues, des petits complots était passée, qu’il ne
suffisait plus de rapprocher des noms et de juxta
poser des étiquettes, d’après la formule cou
rante, trois sous d’opportunisme par ci, deux sous
de radicalisme par là.
L’Elysée qui avait une belle occasion d’indi
quer la voie'droite, de porter la parole du pays à
ces inconscients, s’est lui aussi livré au hasard
malencontreux des listes. Mais la gravité des
événements est telle, que les gropuements tentés
avec les vieux procédés de la routine parlemen
taire se sont disloqués avant d’avoir pris consis
tance.
Pendant que les candidats, entêtés et absorbés
par leurs jolousies, continuaient à se tendre des
.pièges devant le pays silencieux, mais très ému,
pendant que les concours s’offraient sans sincérité,
que les appétits jouaient à cache-cache avec des
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Vv-
2 e Année — S 6 59 — Samedi 10 Décembre 1S92. DIX CENTIMES LE NUMERO 2 e Année — 19 Frimaire An 101 — N° 59.
Le Réveil du Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN
ADMINISTRATION & RÉDACTION -
15, RUE CASIMXR-PÉRIER, 15
LE REVEIL I)TI LJ A VRE narn.î.t le Samedi
faisait bonne figure au Ministère de l'Instruc
tion publique qu'il commençait à bien con
naître et à bien diriger, a-t-il troqué son
portefeuille contre celui de la Justice? S’il
donne raison à M. Ricard, pourquoi consent-
il à prendre sa place dans une combinaison
qui lui donne tort ?
Tout cela, il faut en convenir, manque de
netteté et de franchise. Et la déclaration que
M. Ribot a, parait-il, déclamée à la Cham
bre, n'y changera rien. Il est facile, sans
doute, d’aligner des phrases habiles destinées
à contenter tout le monde. Il est moins aisé
d’agir. La première escarmouche du Cabinet
avec la Commission d’enquête montre bien
que les choses n’iront pas avec cette aisance
prédite par les feuilles ministérielles et que
les principales difficultés ne sont point
résolues.
Bref, le Ministère Ribot est un recul sur
le Ministère Loubet. Et nous ne pousserons
certes pas l’amour du clocher jusqu’à consi
dérer comme une compensation suffisante
l’entrée de M. Siegfried, au ministère du
commerce. Il est plaisant, sans doute, pour
ceux qui mettent les rivalités locales et les
questions personnelles au premier rang de
leurs préoccupations, de constater que toute
cette crise et tout ce tapage ont abouti au
remplacement d’un rouennais par un havrais
sur le banc des Ministres.
On est également curieux de savoir si
M. Siegfried^ qui a mis pas mal de désordre
dans les finances de notre ville, vaudra mieux
comme ministre que comme maire. Mais nous
sommes de ceux qui, en politique, mettent
l’intérêt général au-dessus de l’intérêt par
ticulier. Et nous sommes trop modestes pour
croire qu’une cave est bonne uniquement
parce qu’on y trouve du vin de notre cru.
« Député et ex-maire du Havre — armateur. —
Ni libre-échangiste — ni protectionniste. — A
été choisi à cause de ses opinions mixtes.
« Au point de vue politique, appartient au Ceti*
tre Gauche, ami personnel de M.Ribot. A une très
grosse fortune, son frère est un financier connu.
Appartient à la religion protestante. A été un des
organisateurs des Sociétés pour la construction
des maisons ouvrières.
« Air physique, aspect rébarbatif, cinquante ans
environ, rouge de cheveux et de barbe. Orateur
médiocre. »
N’est-ce pas cela ?
Nous verrons l’attitude qu’aura notre sympa
thique au moment de la discussion du traité
Franco-Suisse, si toutefois Dieu lui prête vie
ministérielle jusque-là !
En attendant, nous verrons peut-être les affaires
de la France prospérer d’une façon inattendue,
grâce à la présence, dans le cabinet, d’un saint
homme dont les prières vers l’Eternel ne manque
ront pas d’avoir une heureuse influence sur le
commerce de notre pays.
Ainsi soit-il !
*
* *
La Commission d’enquête sur les affaires du
Panama travaille ferme. Elle reçoit d’un grand
nombre de personnes, les dépositions qui remplis
sent les colonnes des journaux quotidiens; nous 11 e
pouvons, on le comprend, nous livrer à une
pareille publication. Espérons qu’un jour ou
l’autre, nous aurons l’occasion et le moyen de
montrer à quels résultats auront abouti ces dépo
sitions et ces travaux.
~k k
*
ALLEMAGNE
Le procès à sensation contre Ahlwardt se pour
suit à Berlin, où il passionne vivement le public.
L’Allemagne, la pure, la vertueuse Allemagne,
toujours prête à insulter la France dans les cir
constances les plus insignifiantes, a là un joli
scandale ! Il s’agit de fusils fournis par la manu
facture Loewe, dont un nombre considérable ont
été trouvés mauvais et impropres au service.
Déclaration du Gouvernement
PRIX BIS AIÎOWœYrsS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
Messieurs les Abonnés qui, à l’expiration
de leur abonnement, n’auront pas donné
avis de le suspendre seront considérés
comme réabonnés pour le même laps de
temps. Le prix de l’abonnement annuel
est de cinq francs pour un an et de trois
francs pour six mois.
REPLÂTRAGE
Nous avons enfin un ministère, et ça n’a
pas été sans peine. On s’étonnera d autant
plus de cette éclosion laborieuse, que le nou
veau cabinet est, à peu de chose près, le
même que l’ancien : car on ne voit pas
clairement quelle orientation inédite pourrait
résulter de l’entrée aux affaires de MM. Du-
puy et 8iegfried, deux députés qui ne passent
pas pour avoir, en matière politique, des
idées bien personnelles.
Quand M. Loubet a mis à la Chambre le
marché à la main et a provoqué ainsi la re
traite du-mixistère qu’on a qualifiée de suicide,
on le disait fatigué de l’exercice du pouvoir.
Il voulait, croyait-on, chercher dans le seul
acccomplissement de ses devoirs de député, le
repos nécessaire à son amour de la quiétude.
11 n’en était rien.
M. Ricard s’en va, et soudain nous voyons
se manifester en M. Loubet une nouvelle
ardeur. L’entrée de M. Bourgeois a la justice
produit sur l’arbitre de Carmaux les effets
bien connus de la liqueur de Brown-Séquard,
et il se promet d’être, désormais, un modèle
de virilité. Grand bien lui fasse !
Toutefois, comme Président du Conseil, il
passe la main à M. Ribot, Et les modérés
d’exulter !
Pensez donc ! M. Ribot, c’est tout une po
litique. M. Ribot, c’est l’ancêtre le plus véné
rable des ralliés, une sorte de grand’père de
M. Piou. Ancien Procureur impérial
n’est-il pas devenu, il y a quelques années,
républicain ? N’est-il pas entré au pouvoir
en passant par le Centre gauche, ce rendez-
vous de toutes les opinions indécises, cette
pépinière de tous les hommes politiques qui
veulent attendre d’où soufflera le vent ?
Telle nous paraît être, en effet, la véritable
signification du nouveau ministère. Et à
l’Elysée, on né s’y est pas mépris en appelant
M* Ribot à la présidence du Conseil. C’est la
suite du plan que l’on suit lentement mais
sûrement dans l’entourage de M. Carnot.
Avec deux ou trois dégringolades comme celle-
là, en tombant de Loubet à Ribot et de Ribot
à quelque autre d’un républicanisme encore
plus pâle, on prépare à notre pays de singu
lières destinées.
La Chambre de 1885, certes, n’était pas
une merveille de sens politique. Mais au
moins eût-elle regimbé si Grévy avait émis la
prétention de lui imposer un ministère Ribot.
Une chose en toute cette affaire, est assez
attristante. C'est le rôle qu’on fait jouer à
M. Bourgeois et qu’il accepte sans sourciller
'dans cette combinaison. Comment ne com
prend-il pas que les mêmes inimitiés sous le
poids desquelles a succombé M. Ricard se
retrouveront contre lui s’il fait son devoir ?
Dans le discours qu’il a prononcé à la suite
de la Déclaration, M. Bourgeois a fait l'éloge
de son prédécesseur. C’est fort bien. Mais s’il
accepte, comme il a dit « cette solidarité de
droiture et d’honneur », pourquoi, lui qui
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
Les négociateurs ministériels pour la formation
d’un cabinet ont été MM. Brisson, Casimir-Périer,
Loubet, Develle et Ribot. Les trois premiers ont
échoué ; M. Ribot a fini par réunir le bouquet de
ministres que... n’attendait certes pas la France!
Le aoici : y ' ê .. ? t .
MM. Ribot, président du Conseil, affaires étran
gères ;
Bourgeois, justice ;
Loubet, intérieur ;
de Freycinet, guerre ;
Burdeau, marine ;
Rônvier, finances ;
Develle, agriculture ;
Charles Dupuy, instruction publique et
cultes ;
Siegfried, commerce et industrie.
s Viette, travaux publics ;
Jamais, sous-secrétaire d’Etataux Colonies.
Ce ministère, on le voit, n’a rien de radical et
les bons bourgeois de notre vieille France peuvent
dormir rassurés !
Il renferme deux noms nouveaux : M. Charles
Dupuy, un universitaire qui connaît bien les
questions d’enseignement et a été plusieurs fois
rapporteur du budget de l’instruction publique ; et
M. Jules Siegfried, très connu au Havre, où l’on
a pavoisé, à l’Hôtel de Ville et à la Chambre de
commerce qui lui a même envoyé une adresse !!
Le Havre et Le Petit Havre exultent naturelle
ment en style dithyrambique. Nous,qui n’avons pas
les mêmes motifs d’exulter, nous allons, impartia
lement, reproduire la courte note biographique
donnée par f Evénement sur M. Siegfried. Elle
est parfaitement exacte, à l’exception du mot
armateur, qui est de trop :
M. Ribot, Président du Conseil, a lu la décla
ration suivante, à la Chambre des députés :
« Messieurs,
« La confiance de M. le Président de la Répu
blique nous appelle à prendre le gouvernement
dans des circonstances difficiles. Nous nous
présentons devant vous avec la ferme volonté
de poursuivre, au dedans et au dehors, une
politique qui n’a pas cessé d’obtenir votre ap
probation, mais aussi avec la résolution de faire
tout notre devoir en face d’une situation qui
exige impérieusement une lumière complète et
de promptes résolutions. (Très bien à gauche.)
« Des allégations graves ont été portées à la
tribune ; elles ne mettent pas seulement en
cause l’honneur de plusieurs membres des deux
Chambres ; elles tendent à jeter la déconsidéra
tion sur la représentation nationale. (Très bien !
à gauche).
« Une commission a été chargée par vous
de rechercher et de faire connaître ce qu’il peut
y avoir de fondé dans ces allégations. Nous
sommes convaincus que l’accord entre la com
mission d’enquête et le gouvernement assurera
la pleine manifestation de la vérité. (Très bien !)
« Nous sommes convaincus aussi que cet ac
cord peut s’établir sans porter atteinte à aucun
des principes que nous avons également à cœur
de sauvegarder. (Très bien I au centre.)
« Messieurs, des défaillances individuelles ne
sauraient constituer autre chose qu’un accident
dans l’existence d’un grand peuple honnête et
laborieux. (Applaudissements.)
« L’œuvre de justice actuellement poursuivie
ne peut suspendre le cours régulier de la vie
publique ; nous vous convions donc à reprendre
sans délai la suite de vos travaux, à pourvoir au
vote des lois urgentes, telles que la réforme des
boissons et la convention commerciale franco-
suisse (Mouvements divers) et à vous assurer à
vous-mêmes par des douzièmes provisoires le
temps nécessaire pour un sérieux examen du
budget de 1893. Vous vous apprêterez ainsi à
achever utilement l’œuvre d’une législature qui
n’a été ni sans profit pour le pays, ni sans hon
neur pour vous-mêmes.
« Nos budgets ramenés à l’unité et à l’équi
libre, notre régime douanier réformé selon les
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces.... 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
vœux du pays, les lois sur lesquelles reposent
l’éducation et la défense nationales fermement
maintenues, la législation du travail développée
dans un esprit de justice et de solidarité, la
République ralliant à chaque consultation
nationale des suffrages plus compacts et deve
nant comme la forme naturelle de la vie -publi
que française, en même temps qu’elle recueil
lait au dehors de précieux témoignages d’estime,
telle a été, Messieurs, l’œuvre des trois pre
miers années de votre législature.
« Cette œuvre, un instant arrêtée, il dépend
de vous de la reprendre dès demain avec une
énergie nouvelle. Vous déjouerez ainsi les
pièges semés sur votre route (applaudissements
au centre et à gauche), et vous donnerez au
pays, demeuré calme au milieu des incidents
de ces derniers jours, une impression forti
fiante.
« La démocratie française a déjà fait justice
des calomnies que l’esprit de parti essaye de
diriger contre nos institutions. (Très bien ! sur
les mêmes bancs ; rumeurs à droite ; applau
dissements à gauche et au centre).
« Elle comprend que c’est l’honneur de la
République de ne pas étouffer parle silence des
-scandales ou des faiblesses qui ne sauraient
l’atteindre, et d’en tirer, au contraire, une
leçon de haute moralité. (Nouveaux applaudis
sements).
« Gardons, nous aussi, Messieurs, notre
sang-froid : ne nous laissons pas émouvoir par
cette fureur de délations qui s’abat, à certains
jours, sur notre pays.
« Soyons sévères pour les fautes commises,
mais n’arrêtons pas trop longtemps nos regards
sur ces misères et reprenons notre marche en
avant, la tête haute (applaudissements), comme
il convient aux représentants d’un grand pays.
« G’est dans cet esprit que le gouvernement
fait appel au concours des deux Chambres et
qu’il ose compter sur la confiance de tous les
républicains, unis dans un sentiment commun,
rendu plus profond par les difficultés de l'heure
présente, de dévouement envers la République
et envers la patrie. »
Ce discours, lu d’une voix ferme, est vivement
applaudi à gauche et au centre.
—
Les Trafiqueurs de Panam
Le Petit Journal , un des organes les plus lus
de toute la France, écrit sur ce sujet, un remar
quable article intitulé : le Déshonneur, voilà,
l'ennemi. Nous croyons être agréable à nos lec
teurs en leur en donnant quelques extraits :
Les scandales de Panama n’ont pas seule
ment révélé des hontes ignorées, ils ont accentué
la mésintelligence de tous les pouvoirs.
Il y a lutte dans le Palais-Bourbon entre les
députés qui ont chargé la commission d’enquête
de poursuivre les tripotages, et les commissaires
débordés par leur mandat, lutte entre la Chambre
et le Sénat qui proteste contre le travail de la
commission, lutte entre l’autorité parlementais, et
l’autorité judiciaire qui s’insurge contre l’usurpa
tion de ses prérogatives, lutte entre les magistrats
eux-mêmes, dont les uns obéissent aux injonctions
de l’enquête, et les autres flétrissent ceux qui ont
obéi.
S’il y avait demain, lutte entre la Chambre et le
ministère, ce ne serait plus la confusion, ce serait
l’anarchie généralisée.
Voilà pourquoi il faut que les ministres nou
veaux ou revenus avec une nouvelle investiture
aient conscience de la situation, l’envisagent avec
fermeté et ne capitulent pas en route. x
*
- * *
.... Les politiciens, avec leur insouciance et
leur aveuglement ordinaires, ont failli tout per
dre ; ils ont manœuvré comme aux beaux jours de
calme plat, sous le feu des questions les plus in
quiétantes.
Ils ne se sont pas avoué que l’opinion publique,
pénétrant de gré ou de force dans les mystères du
Parlement par la porte redoutable de l’indigna
tion, transformait la crise tout entière.
Ils n’ont pas vu que l’heure des petites intri
gues, des petits complots était passée, qu’il ne
suffisait plus de rapprocher des noms et de juxta
poser des étiquettes, d’après la formule cou
rante, trois sous d’opportunisme par ci, deux sous
de radicalisme par là.
L’Elysée qui avait une belle occasion d’indi
quer la voie'droite, de porter la parole du pays à
ces inconscients, s’est lui aussi livré au hasard
malencontreux des listes. Mais la gravité des
événements est telle, que les gropuements tentés
avec les vieux procédés de la routine parlemen
taire se sont disloqués avant d’avoir pris consis
tance.
Pendant que les candidats, entêtés et absorbés
par leurs jolousies, continuaient à se tendre des
.pièges devant le pays silencieux, mais très ému,
pendant que les concours s’offraient sans sincérité,
que les appétits jouaient à cache-cache avec des
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