Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1899-09-02
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 02 septembre 1899 02 septembre 1899
Description : 1899/09/02 (N175). 1899/09/02 (N175).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32633740
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
t Âanée — N° 175.
\\ &
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
Samedi 2 Septembre 1899.
Havre
Organe du Parti Républicain Démocraiiciue
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction F. THOHMEBET
L’Imprimeur-Gérant.. F. LEROY
Prix des Insertions
Annonces
Réclames.
25 centimes la ligne
50 î
On traite à forfait
Demandez le Réveil
i>u iïavre dans tou» le»
liiosque^ et mar-elianc!»
dè journaux le samedi
matin.
La réunion générale ordinaire du
Comité Démocratique, qui devait
avoir lieu vendredi, est reportée — à
cause de la séance du Conseil munici
pal— au Vendredi prochain# courant,
à neuf heures du soir, au Cercle
Franklin.
La présence de tous les membres
est obligatoire.
Ordre du Jour :
Lecture du dernier procès-verbal;
Communication importante.
Le présent avis tient lieu de convoca
tion.
Pour la France
Nous nous sommes toujours efforcé,
sous notre plume, à faire comprendre
que le, chauvinisme dont se targuent
les nationalistes est aussi éloigné du
véritable patriotisme que le pôle nord
l’est du pôle sud.
Quand donc les Drumont, les Mil-
ievoye, les Guérin, les Deroulede,
les Rochefort, les Arthur Meyer, b s
Judet — cœurs vides et cerveaux déso
rientés, — et tous îes déelamateurs de
l’antisémitisme le comprendront-ils ?
Quand donc reconnaîtront-ils l’œu
vre néfaste qu’ils ont entreprise pour
la gloire de l’église romaine? «La
France aux Français », disent-ils, c’est
la France sous la domination papale
qu’ils exigent, nous le savons. Et
pourquoi ne réclament-ils pas la
Gaule aux Gaulois ? Ce serait plus
logique. En effet, notre pays est
composé de races diverses, de tempé
rament différent et d’origine distincte :
des Romains de Jules César, des
Huns, des Francs, des Normands
venus du Danemark ou de la Nor
vège qui, associés à la race celtique,
ont fondé le point de départ de la
civilisation actuelle. Historiquement,
la France n’est d’aucune race. Sa
formation hétérogène a fait sa gran
deur. Et l’on voudrait qu’à l’en
contre de l’évolution naturelle des
peuples, attirés par un aimant in
vincible, autour du flambeau de la
gloire et du progrès, nous eussions
le triste privilège de renier la base
môme de notre génie, en banis-
sant le Juif parce qu’il s’assimile à
nos libertés, à notre tâche d’émanci
pation ; parce qu’il est un élément de
résistance aux préj ugés et aux vices
du catholicisme; parce que, fatale
ment et malgré lui, il est, de ce chef,
le serviteur de la pensée qui devra
bouleverser le vieux monde et ses
antiques croyances.
N’importe qui tu sois, si tu luttes
avec ardeur pour l’affranchissement
des destinées de l’homme, si tu tra
vailles de quelque façon pour le bien
commun, tu as ta place autour du
drapeau de la civilisation qui doit
être l’emblème de la nation.
Et l’on voudrait qu’à l’encontre de
notre grande œuvre dans le monde,
nous fissions autour de nos frontières
une muraille de Chine qui nous isole
rait de tous les continents et rapetis
serait la France sur elle-même jusqu’à
ce que ses enfants, écrasés comme dans
un étau par ses abornements, périssent
asphyxiés par les poisons délétères du
cléricalisme.
Ce n’est pas Dreyfus qu’on a
cherché seulement à anéantir dans
une case, c’est le pays tout entier.
Oh! je n’exagère rien.
Voyez autour de nous. Considérez
l’atteinte portée à notre prestige et à
notre influence dans le monde. En
Suisse, en Belgique, aux Etats-Unis,
en Angleterre, en Russie, même,
surtout dans les pays où nous avions
scellé les plus solides amitiés, l’atti
tude étrange de la conscience natio
nale dans l’affaire Dreyfus, décon
certe.
Ne vous êtes-vous point arrêté à la
lecture de ce télégramme américain
relatant l’intention du sénateur
Stuart, du Nebraska, de présenter au
Congrès un projet de loi portant que
l'Amérique retirerait son adhésion à
l’Exposition de 1900, en raison des
événements antisémites ?
Singulière idée, soit, mais qui ré
vèle dans son exagération, un état
d’esprit moyen peu en notre faveur.
Cependant, nous ne laisserons pas
méconnaître- les viriles vertus du peu
ple français, ses robustes qualités
d’intelligence et de savoir. Nous ne
permettrons pas que l’on cloue au
pilori le nom de la France, parce
qu’elle a devant l’univers de justes
titres de gloire ; le monde entier, qui
a hérité de ses admirables travaux
est tenu envers elle à une grande dette
de reconnaissance.
Elle est le foyer du génie. Jusqu’a
lors, notre pays avait toujours été le
protagoniste du droit, le champion de
la justice. S’il a eu quelque défail
lance, il se relèvera bientôt de ses dou
leurs et de nouveau le phare de la
liberté, qu’alimente notre sol, jettera
sur les mers et sur les continents, sa
lumière éclatante de science et de
vérité.
Alf. HENRI
Voici, notamment, la belle lettre
que M. Bertin, député de la Creuse,
vient d’adresser ail Cent-Kilos :
Crozant (Creuze), 29 août 1899.
Monsieur le président et cher collègue,
J’ai bien reçu votre lettre-circulaire par
laquelle vous m’invitez à me joindre à
vous pour demander la convocation des
Chambres.
Je ne puis que répondre ceci :
1° C’est que le groupe au nom duquel
vous parlez et que vous présidez, me
paraît être un gros sac enfariné ne me
disant rien qui vaille ;
2° Que vous ne me paraissez pas suffi
samment autorisé pour prendre souci de
la République ;
3° Qu’étant un des nombreux députés
ayant accordé sa confiance au gouverne
ment à la fin de la session, je ne pourrais
que la lui confirmer, parce qu’il a l’hon
neur d’avoir comme adversaires les réac
tionnaires de tous poils qui s’abritent
dans le& diverses chapelles baptisées
nationalistes, antisémites, groupe de
Courbevoie, etc., etc. ;
4° Qn’enfîn, vos amis font assez d’agi
tation dans le pays sans que les bons
citoyens, les députés républicains, colla
borent avec eux à entretenir cette agita
tion.
Je termine toutefois, cher collègue, en
rendant hommage au courage malheu
reux.
O. Berton,
Député de la Creuse.
est-il ???
LA CONVOCATION DES CHAMBRES
Lettre d’un Député républicain
Le chiffre des députés réactionnaires
qui réclament la convocation des
Chambres s’est accrue d’une unité en
trois jours : M. le duc de Rohan,
député royaliste du Morbihan, a écrit
dans ce sens à M. Descbanel. Cela fait
68 pétitionnaires sur 581 députés.
En revanche, un grand nombre de
députés républicains ont protesté très
vivement contre l’initiative prise par
le président d’un groupe qui ne compte
que des ennemis du régime républi
cain.
On passe son temps à chercher,
vainement, le duc d’Orléans à tra
vers l’Europe. Jusqu’à présent, on ne
signale son passage nulle part. Les
feuilles réactionnaires, d’ordinaire si
prodigues d'informations sur la moin
dre digestion de leur seigneur, se tai
sent. L'Aurore et quelques autres
journaux parisiens demandent si l’il
lustre Gamelle dont l’équipée qui lui
fit connaître la prison de Clair vaux,
est encore présente à la mémoire, ne
partagerait pas la détention de Jules
Guérin dans le fort Chabrol ?
Sans rien affirmer, cela est possible.
On s’expliquerait ainsi l’ardeur avec
laquelle les assiégés se disposent à
braver les lances des pompiers et la
longanimité du Gouvernement à ne
pas employer de moyens de vive force
pour s’emparer du Capitole antisé
mite.
Comme les chiens antiques ont
perdu la confiance à Rome, on em
ploie maintenant quelques douzaines
des oies nationalistes à monter nuit et
jour la garde dans la forteresse Gué
rin et sur le toit d’icelle, pour la
défense du lys royal. Le vieux rire
gaulois, gageous-le, suffira à mettre
les vaillants lutteurs en déroute.
Quoiqu’il en soit, si la nouvelle de
la présence du duc d’Orléans à Paris,
était fondée, nous aurions-là une
preuve évidente de l’existence du
complot monarchiste. L’infortuné duc
se serait laissé pincer aussi grossière
ment que l’escadre espagnole de l’a
miral suisse Elavien Brenier, dans
les eaux de Cuba, malgré la stratégie
en chambre de notre jeune confrère.
Ajoutons aux hypothèses, le bruit
répandu en ville, suivant lequel le
yacht à vapeur Maroussia amarré dans
le bassin du Commerce sous le nom du
duc de Lagrange, appartiendrait réel
lement au duc d’Orléarts.
Le yacht est entré en notre port
depuis plus d’un mois et Ton s’occupe
actuellement d’en repeindre la coque.
Serait-ce aux armes royales ?
Il a d’abord navigué sous le pavil
lon anglais et a été francisé récem
ment.
Malgré les chuchotements en cours,
à la vérité, nous ne savons rien de
précis en ce moment et nous nous
posons toujours à l’endroit de la pré
sence rue de Chabrol du fils à feu
papa le comte de Paris, la même
question : « Y est-il ».
Attendons.
Alf. HENRI.
PLAN DE BATAILLE
Pour tous ceux qui suivent de près
les débats du procès de Rennes et qui
assistent chaque jour à l’effondrement
de l’accusation, il devient de plus en
plus évident que les faussaires de l’E-
tat-Major préparent un coup suprême
Pourrait-on s’étonner que des gens
sur le point de partir pour le bagne
soient décidés à mettre tout en œuvre
avant d’abandonner une partie même
désespérée.
Quel est le plan de la nouvelle ma
nœuvre préparée par Mercier, Roget
et consorts, nul ne le sait avec certi
tude : on est réduit aux conjectures.
Les uns croient que la tactique pro
chainement inaugurée consistera à
vouloir prouver la complicité de Drey
fus et d’Esterhazy par l’intermédiaire
de Weil.
Les autres, et j’ai sur ce point quel
ques renseignements, pensent qu’on
sortira au dernier moment une nou
velle copie du bordereau, celle pré
sentée comme originale et annotée de
la main de l’empereur Guillaume lui-
même. Il serait par trop naïf d’atta
cher la moindre importance au coup
de théâtre qui se prépare.
Il est impossible, au cours des dé
bats compliqués qui se poursuivent
d’inaugurer une nouvelle version sans
l’exposer aussitôt à des contradictions
flagrantes.
Comment faire cadrer une fable
tout à coup imaginée avec toutes les
dépositions précédentes ? L’ingéniosité
de M. Roget n’y suffirait pas.
Nous attendons donc paisiblement
la suite du procès. Tout ce qui sera
tenté par les faussaires tournera à
leur propre confusion.
11 est vrai qu’ils ne risquent plus
rien, depuis si longtemps, qu’ils ont
descendu tous les degrés qui condui
sent à la honte suprême. T
LE PAPE & L’AFFAIRE DREYFUS
Ce n’est pas sans une certaine
crainte que Sa Sainteté Léon XIII
voit se dérouler, en France, les évé
nements de l’affaire Dreyfus. A la
suite d’une conférence avec le P.
Martin, supérieur général des Jé
suites, une circulaire a été envoyée
aux évêques afin qu’ils conseillent au
clergé français d’adopter une attitude
modérée et de s’abstenir de toute pa
role violente contre Dreyfus et ses
partisans. De son côté, le P. Martin a
donné aux supérieurs des Jésuites,
des ordres dans le même sens.
Le vieux chef de l’Eglise catholique
est un homme d’une haute intelli
gence qui, voyant les congrégations
religieuses fortement menacées, cher
che, par son influence, à concilier les
partis. C’est, du reste, toujours de
cette manière que la religion catho
lique a triomphé des difficultés ; c’est
la victoire de la ruse sur la franchise.
Quels que soient les efforts du pré
lat romain et de ses acolytes, il ne
parviendra jamais à ralentir le mou
vement antireligieux qui prend, cha
que jour, une importance des plus
grandes. Il nous faut, à tout prix,
débarrasser de ces hôtes dangereux,
qui n’ont absolument rien à faire
parmi nous.
Nous ne devons donc, à aucun prix,
prêter attention aux encycliques pa
pales ; ce sont des paroles de paix qui
contiennent le noir venin soigneuse
ment caché pour nous empoisonner.
LA HAUTE-COUR
Si la Haute-Cour est convoquée
dans quelques semaines, comme on
en répand le bruit, elle se réunira
juste un demi-siècle après la Haute-
Cour de la deuxième République,
laquelle siégea à Versailles dans les
premiers jours d’octobre 1849.
Les principaux accusés de ce procès
— Ledru-Rollin, Etienne Àrago,
Victor Considérant, Martin Bernard
— étaient en fuite.
Les inculpés étaient au nombre de
trente et un. Onze furent acquittés,
trois condamnés à cinq ans de déten
tion, dix-sept à la déportation.
Il n’est pas sans intérêt de rappeler
comment cette Haute-Cour était com
posée de par la Constitution de 1848.
Elle comportait cinq juges et trente-
six jurés, ces derniers tirés au sort
parmi les conseillers généraux des
départements.
M. de Freycinet, partisan de l’acquittement
De M. Gabiiel Monod, dans le
Figaro :
J’ai eu la bonne fortune de rencon
trer M. de Freycinet avec son secré
taire, à la gare du Mans, mardi soir,
comme il regagnait les solitudes alpes
tres. Nous avons échangé ces brèves
paroles :
— Permettez-moi, monsieur de
Freycinet, de vous dire avec quel
plaisir j’ai entendu ce matin votre
charmant discours. Vous lavez que,,
dans mes polémiques, je n’ai jamais
dit un mot, un seul, contre Parafée ;
jamais même attaqué violemment
l’état-major. J’ai été touché de votre
appel à la conciliation. Il y manquait
un seul mot : l’affirmation de l’inno
cence de Dreyfus ou du moins l’affir
mation que l’arrêt de la Cour de cas
sation est aujourd’hui la vérité légale
et que le conseil de guerre doit en
faire la vérité définitive et univer
selle.
— Je ne le pouvais ni ne le devais,
me dit l’ancien ministre. Je n’avais
pas à dicter aux juges leur verdict.
— D’autres, repris-je, ne s’en font,
pas faute. Mais vous savez bien que
l’acquittement seul peut donner
l’apaisement. Quelqu’un me disait
l’autre jour : « Si j’étais un ennemi
de la France, je ne désirerais qu’une
chose : la condamnation de Dreyfus, y>
— Votre interlocuteur a bien rai
son, répond M. de Freycinet. La con
damnation, c’est la perpétuité de nos
discordes. Tout le monde doit désirer
l’acquittement.
— Permettez-moi, M. de Freycinet,
de vous dire combien je suis heureux
d’avoir vu la légende du Syndicat
définitivement enterrée par vous.
— Oh ! oui, c’est absurde, ditM. de
Freycinet, c’est absurde !
Et ici, la voix délicate du délicieux
vieillard prit un accent d’énergie que
je ne lui avais jamais connu.
SiM. de Freycinet croit que l’acquit-
\\ &
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
Samedi 2 Septembre 1899.
Havre
Organe du Parti Républicain Démocraiiciue
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction F. THOHMEBET
L’Imprimeur-Gérant.. F. LEROY
Prix des Insertions
Annonces
Réclames.
25 centimes la ligne
50 î
On traite à forfait
Demandez le Réveil
i>u iïavre dans tou» le»
liiosque^ et mar-elianc!»
dè journaux le samedi
matin.
La réunion générale ordinaire du
Comité Démocratique, qui devait
avoir lieu vendredi, est reportée — à
cause de la séance du Conseil munici
pal— au Vendredi prochain# courant,
à neuf heures du soir, au Cercle
Franklin.
La présence de tous les membres
est obligatoire.
Ordre du Jour :
Lecture du dernier procès-verbal;
Communication importante.
Le présent avis tient lieu de convoca
tion.
Pour la France
Nous nous sommes toujours efforcé,
sous notre plume, à faire comprendre
que le, chauvinisme dont se targuent
les nationalistes est aussi éloigné du
véritable patriotisme que le pôle nord
l’est du pôle sud.
Quand donc les Drumont, les Mil-
ievoye, les Guérin, les Deroulede,
les Rochefort, les Arthur Meyer, b s
Judet — cœurs vides et cerveaux déso
rientés, — et tous îes déelamateurs de
l’antisémitisme le comprendront-ils ?
Quand donc reconnaîtront-ils l’œu
vre néfaste qu’ils ont entreprise pour
la gloire de l’église romaine? «La
France aux Français », disent-ils, c’est
la France sous la domination papale
qu’ils exigent, nous le savons. Et
pourquoi ne réclament-ils pas la
Gaule aux Gaulois ? Ce serait plus
logique. En effet, notre pays est
composé de races diverses, de tempé
rament différent et d’origine distincte :
des Romains de Jules César, des
Huns, des Francs, des Normands
venus du Danemark ou de la Nor
vège qui, associés à la race celtique,
ont fondé le point de départ de la
civilisation actuelle. Historiquement,
la France n’est d’aucune race. Sa
formation hétérogène a fait sa gran
deur. Et l’on voudrait qu’à l’en
contre de l’évolution naturelle des
peuples, attirés par un aimant in
vincible, autour du flambeau de la
gloire et du progrès, nous eussions
le triste privilège de renier la base
môme de notre génie, en banis-
sant le Juif parce qu’il s’assimile à
nos libertés, à notre tâche d’émanci
pation ; parce qu’il est un élément de
résistance aux préj ugés et aux vices
du catholicisme; parce que, fatale
ment et malgré lui, il est, de ce chef,
le serviteur de la pensée qui devra
bouleverser le vieux monde et ses
antiques croyances.
N’importe qui tu sois, si tu luttes
avec ardeur pour l’affranchissement
des destinées de l’homme, si tu tra
vailles de quelque façon pour le bien
commun, tu as ta place autour du
drapeau de la civilisation qui doit
être l’emblème de la nation.
Et l’on voudrait qu’à l’encontre de
notre grande œuvre dans le monde,
nous fissions autour de nos frontières
une muraille de Chine qui nous isole
rait de tous les continents et rapetis
serait la France sur elle-même jusqu’à
ce que ses enfants, écrasés comme dans
un étau par ses abornements, périssent
asphyxiés par les poisons délétères du
cléricalisme.
Ce n’est pas Dreyfus qu’on a
cherché seulement à anéantir dans
une case, c’est le pays tout entier.
Oh! je n’exagère rien.
Voyez autour de nous. Considérez
l’atteinte portée à notre prestige et à
notre influence dans le monde. En
Suisse, en Belgique, aux Etats-Unis,
en Angleterre, en Russie, même,
surtout dans les pays où nous avions
scellé les plus solides amitiés, l’atti
tude étrange de la conscience natio
nale dans l’affaire Dreyfus, décon
certe.
Ne vous êtes-vous point arrêté à la
lecture de ce télégramme américain
relatant l’intention du sénateur
Stuart, du Nebraska, de présenter au
Congrès un projet de loi portant que
l'Amérique retirerait son adhésion à
l’Exposition de 1900, en raison des
événements antisémites ?
Singulière idée, soit, mais qui ré
vèle dans son exagération, un état
d’esprit moyen peu en notre faveur.
Cependant, nous ne laisserons pas
méconnaître- les viriles vertus du peu
ple français, ses robustes qualités
d’intelligence et de savoir. Nous ne
permettrons pas que l’on cloue au
pilori le nom de la France, parce
qu’elle a devant l’univers de justes
titres de gloire ; le monde entier, qui
a hérité de ses admirables travaux
est tenu envers elle à une grande dette
de reconnaissance.
Elle est le foyer du génie. Jusqu’a
lors, notre pays avait toujours été le
protagoniste du droit, le champion de
la justice. S’il a eu quelque défail
lance, il se relèvera bientôt de ses dou
leurs et de nouveau le phare de la
liberté, qu’alimente notre sol, jettera
sur les mers et sur les continents, sa
lumière éclatante de science et de
vérité.
Alf. HENRI
Voici, notamment, la belle lettre
que M. Bertin, député de la Creuse,
vient d’adresser ail Cent-Kilos :
Crozant (Creuze), 29 août 1899.
Monsieur le président et cher collègue,
J’ai bien reçu votre lettre-circulaire par
laquelle vous m’invitez à me joindre à
vous pour demander la convocation des
Chambres.
Je ne puis que répondre ceci :
1° C’est que le groupe au nom duquel
vous parlez et que vous présidez, me
paraît être un gros sac enfariné ne me
disant rien qui vaille ;
2° Que vous ne me paraissez pas suffi
samment autorisé pour prendre souci de
la République ;
3° Qu’étant un des nombreux députés
ayant accordé sa confiance au gouverne
ment à la fin de la session, je ne pourrais
que la lui confirmer, parce qu’il a l’hon
neur d’avoir comme adversaires les réac
tionnaires de tous poils qui s’abritent
dans le& diverses chapelles baptisées
nationalistes, antisémites, groupe de
Courbevoie, etc., etc. ;
4° Qn’enfîn, vos amis font assez d’agi
tation dans le pays sans que les bons
citoyens, les députés républicains, colla
borent avec eux à entretenir cette agita
tion.
Je termine toutefois, cher collègue, en
rendant hommage au courage malheu
reux.
O. Berton,
Député de la Creuse.
est-il ???
LA CONVOCATION DES CHAMBRES
Lettre d’un Député républicain
Le chiffre des députés réactionnaires
qui réclament la convocation des
Chambres s’est accrue d’une unité en
trois jours : M. le duc de Rohan,
député royaliste du Morbihan, a écrit
dans ce sens à M. Descbanel. Cela fait
68 pétitionnaires sur 581 députés.
En revanche, un grand nombre de
députés républicains ont protesté très
vivement contre l’initiative prise par
le président d’un groupe qui ne compte
que des ennemis du régime républi
cain.
On passe son temps à chercher,
vainement, le duc d’Orléans à tra
vers l’Europe. Jusqu’à présent, on ne
signale son passage nulle part. Les
feuilles réactionnaires, d’ordinaire si
prodigues d'informations sur la moin
dre digestion de leur seigneur, se tai
sent. L'Aurore et quelques autres
journaux parisiens demandent si l’il
lustre Gamelle dont l’équipée qui lui
fit connaître la prison de Clair vaux,
est encore présente à la mémoire, ne
partagerait pas la détention de Jules
Guérin dans le fort Chabrol ?
Sans rien affirmer, cela est possible.
On s’expliquerait ainsi l’ardeur avec
laquelle les assiégés se disposent à
braver les lances des pompiers et la
longanimité du Gouvernement à ne
pas employer de moyens de vive force
pour s’emparer du Capitole antisé
mite.
Comme les chiens antiques ont
perdu la confiance à Rome, on em
ploie maintenant quelques douzaines
des oies nationalistes à monter nuit et
jour la garde dans la forteresse Gué
rin et sur le toit d’icelle, pour la
défense du lys royal. Le vieux rire
gaulois, gageous-le, suffira à mettre
les vaillants lutteurs en déroute.
Quoiqu’il en soit, si la nouvelle de
la présence du duc d’Orléans à Paris,
était fondée, nous aurions-là une
preuve évidente de l’existence du
complot monarchiste. L’infortuné duc
se serait laissé pincer aussi grossière
ment que l’escadre espagnole de l’a
miral suisse Elavien Brenier, dans
les eaux de Cuba, malgré la stratégie
en chambre de notre jeune confrère.
Ajoutons aux hypothèses, le bruit
répandu en ville, suivant lequel le
yacht à vapeur Maroussia amarré dans
le bassin du Commerce sous le nom du
duc de Lagrange, appartiendrait réel
lement au duc d’Orléarts.
Le yacht est entré en notre port
depuis plus d’un mois et Ton s’occupe
actuellement d’en repeindre la coque.
Serait-ce aux armes royales ?
Il a d’abord navigué sous le pavil
lon anglais et a été francisé récem
ment.
Malgré les chuchotements en cours,
à la vérité, nous ne savons rien de
précis en ce moment et nous nous
posons toujours à l’endroit de la pré
sence rue de Chabrol du fils à feu
papa le comte de Paris, la même
question : « Y est-il ».
Attendons.
Alf. HENRI.
PLAN DE BATAILLE
Pour tous ceux qui suivent de près
les débats du procès de Rennes et qui
assistent chaque jour à l’effondrement
de l’accusation, il devient de plus en
plus évident que les faussaires de l’E-
tat-Major préparent un coup suprême
Pourrait-on s’étonner que des gens
sur le point de partir pour le bagne
soient décidés à mettre tout en œuvre
avant d’abandonner une partie même
désespérée.
Quel est le plan de la nouvelle ma
nœuvre préparée par Mercier, Roget
et consorts, nul ne le sait avec certi
tude : on est réduit aux conjectures.
Les uns croient que la tactique pro
chainement inaugurée consistera à
vouloir prouver la complicité de Drey
fus et d’Esterhazy par l’intermédiaire
de Weil.
Les autres, et j’ai sur ce point quel
ques renseignements, pensent qu’on
sortira au dernier moment une nou
velle copie du bordereau, celle pré
sentée comme originale et annotée de
la main de l’empereur Guillaume lui-
même. Il serait par trop naïf d’atta
cher la moindre importance au coup
de théâtre qui se prépare.
Il est impossible, au cours des dé
bats compliqués qui se poursuivent
d’inaugurer une nouvelle version sans
l’exposer aussitôt à des contradictions
flagrantes.
Comment faire cadrer une fable
tout à coup imaginée avec toutes les
dépositions précédentes ? L’ingéniosité
de M. Roget n’y suffirait pas.
Nous attendons donc paisiblement
la suite du procès. Tout ce qui sera
tenté par les faussaires tournera à
leur propre confusion.
11 est vrai qu’ils ne risquent plus
rien, depuis si longtemps, qu’ils ont
descendu tous les degrés qui condui
sent à la honte suprême. T
LE PAPE & L’AFFAIRE DREYFUS
Ce n’est pas sans une certaine
crainte que Sa Sainteté Léon XIII
voit se dérouler, en France, les évé
nements de l’affaire Dreyfus. A la
suite d’une conférence avec le P.
Martin, supérieur général des Jé
suites, une circulaire a été envoyée
aux évêques afin qu’ils conseillent au
clergé français d’adopter une attitude
modérée et de s’abstenir de toute pa
role violente contre Dreyfus et ses
partisans. De son côté, le P. Martin a
donné aux supérieurs des Jésuites,
des ordres dans le même sens.
Le vieux chef de l’Eglise catholique
est un homme d’une haute intelli
gence qui, voyant les congrégations
religieuses fortement menacées, cher
che, par son influence, à concilier les
partis. C’est, du reste, toujours de
cette manière que la religion catho
lique a triomphé des difficultés ; c’est
la victoire de la ruse sur la franchise.
Quels que soient les efforts du pré
lat romain et de ses acolytes, il ne
parviendra jamais à ralentir le mou
vement antireligieux qui prend, cha
que jour, une importance des plus
grandes. Il nous faut, à tout prix,
débarrasser de ces hôtes dangereux,
qui n’ont absolument rien à faire
parmi nous.
Nous ne devons donc, à aucun prix,
prêter attention aux encycliques pa
pales ; ce sont des paroles de paix qui
contiennent le noir venin soigneuse
ment caché pour nous empoisonner.
LA HAUTE-COUR
Si la Haute-Cour est convoquée
dans quelques semaines, comme on
en répand le bruit, elle se réunira
juste un demi-siècle après la Haute-
Cour de la deuxième République,
laquelle siégea à Versailles dans les
premiers jours d’octobre 1849.
Les principaux accusés de ce procès
— Ledru-Rollin, Etienne Àrago,
Victor Considérant, Martin Bernard
— étaient en fuite.
Les inculpés étaient au nombre de
trente et un. Onze furent acquittés,
trois condamnés à cinq ans de déten
tion, dix-sept à la déportation.
Il n’est pas sans intérêt de rappeler
comment cette Haute-Cour était com
posée de par la Constitution de 1848.
Elle comportait cinq juges et trente-
six jurés, ces derniers tirés au sort
parmi les conseillers généraux des
départements.
M. de Freycinet, partisan de l’acquittement
De M. Gabiiel Monod, dans le
Figaro :
J’ai eu la bonne fortune de rencon
trer M. de Freycinet avec son secré
taire, à la gare du Mans, mardi soir,
comme il regagnait les solitudes alpes
tres. Nous avons échangé ces brèves
paroles :
— Permettez-moi, monsieur de
Freycinet, de vous dire avec quel
plaisir j’ai entendu ce matin votre
charmant discours. Vous lavez que,,
dans mes polémiques, je n’ai jamais
dit un mot, un seul, contre Parafée ;
jamais même attaqué violemment
l’état-major. J’ai été touché de votre
appel à la conciliation. Il y manquait
un seul mot : l’affirmation de l’inno
cence de Dreyfus ou du moins l’affir
mation que l’arrêt de la Cour de cas
sation est aujourd’hui la vérité légale
et que le conseil de guerre doit en
faire la vérité définitive et univer
selle.
— Je ne le pouvais ni ne le devais,
me dit l’ancien ministre. Je n’avais
pas à dicter aux juges leur verdict.
— D’autres, repris-je, ne s’en font,
pas faute. Mais vous savez bien que
l’acquittement seul peut donner
l’apaisement. Quelqu’un me disait
l’autre jour : « Si j’étais un ennemi
de la France, je ne désirerais qu’une
chose : la condamnation de Dreyfus, y>
— Votre interlocuteur a bien rai
son, répond M. de Freycinet. La con
damnation, c’est la perpétuité de nos
discordes. Tout le monde doit désirer
l’acquittement.
— Permettez-moi, M. de Freycinet,
de vous dire combien je suis heureux
d’avoir vu la légende du Syndicat
définitivement enterrée par vous.
— Oh ! oui, c’est absurde, ditM. de
Freycinet, c’est absurde !
Et ici, la voix délicate du délicieux
vieillard prit un accent d’énergie que
je ne lui avais jamais connu.
SiM. de Freycinet croit que l’acquit-
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