Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1892-12-03
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 03 décembre 1892 03 décembre 1892
Description : 1892/12/03 (N58). 1892/12/03 (N58).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263258j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/04/2019
2 e Année— N° 58 — Samedi 3 Décembre 1892.
DIX CENTIMES LE NUMERO
— 12 Frimaire An 101 — N° «18.
Réveil
ORGANE RÉPUBLICAIN
mx DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉ VE IL DU HA VRE paraît le Samedi
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces 25 ceat. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
Messieurs les Abonnés qui, à l’expiration
de leur abonnement, n’auront pas donné
avis de le suspendre seront considérés
comme réabonnés pour le même laps de
temps. Le prix de l’abonnement annuel
est de cinq francs pour un an et de trois
francs pour six mois.
LA CRISE
Le cabinet Loubet, qui avait ordonné cou
rageusement les poursuites contre les admi
nistrateurs de Panama/ est tombé à la suite
d'un conflit avec la commission d’enquête.
Par suite des scrupules juridiques, peut-être
exagérés, de M.Ricard, la Chambre s’est pro
noncée contre le Ministère.
Il y a ceci de particulier dans ce vote de
défiance, qu’il émane en grande partie de
députés qui avaient envisagé les poursuites
avec crainte ou les avaient considérées comme
inopportunes, et qui n’ont pas été fâchés de
punir le cabinet Loubet de son attitude.
Il ne faut pas oublier, en outre, que M.
Ricard, par l’énergie de son action dans les
questions religieuses, avait accumulé depuis
plusieurs mois sur sa tête toutes les haines
cléricales. Nul plus que lui n’a encouru les
injures et les outrages de la réaction, ce qui
est un honneur pour un ministre républicain.
Ces diverses raisons, ajoutées à une cer
taine fatigue qu’il avait déjà manifestée dans
l’exercice dû pouvoir, on t'empêché M. Loubet
de profiter de l’occasion qui lui était offerte
parM. Maujan, de sauver le Ministère. Aussi,
a-t-on pu dire avec justesse que le cabinet
s’était suicidé.
M. Henri Brisson, un des vétérans de la
démocratie, dont le caractère et les capacités
politiques sont également appréciés, a été
chargé de constituer un nouveau Ministère.
.Nous sommes persuadés que cet austère
républicain, dont les conservateurs et certains
modérés raillent sottement la gravité, —
comme si le rôle d’un homme d’Etat consistait
à faire le pantin et à amuser ses contempo
rains ! — saura s’inspirer des intérêts si gra
ves qui lui sont actuellement confiés.
Quoi qu’en disent certains pessimistes,
rarement l'occasion a été plus belle pour le
parti des réformateurs et des progressistes, de
ceux qui ne considèrent pas les programmes
politiques comme un boniment sans valeur et
sans conséquence, pour le parti radical en un
mot.
L'opinion publique, si défiante en France,
qu’elle prête volontiers crédit à la calomnie,
et croit plutôt le mal que le bien, veut être
éclairée sur cette déplorable affaire de Panama.
Elle tient à savoir non seulement quelles ont
été les fautes commises par les administrateurs
de cette vaste entreprise, mais encore les pots-
de-vin qui ont pu être touchés par une cer
taine presse et par certains hommes politiques.
Il faut donc que le travail d’investigation
soit mené jusqu’au bout, qu’il se poursuive
devant la Cour de Paris contre les adminis
trateurs, et devant la commission d’enquête
contre l’ensemble des coupables.
La divulgation de l’existence des 26 chè
ques du baron de Reinach, est un premier pas
dans la voie de la vérité. Elle doit vraisem
blablement conduire à des révélations plus
importantes et plus précises dans lesquelles
on serrera de plus près les preuves de culpa
bilité.
On peut, dès à présent, constater dans toute
cette affaire, le rôle de la haute banque, se
faisant, à son ordinaire, l’entremetteuse de
ces négociations louches qui conduisent à
l’achat des consciences, de la presse et peut-
être des votes.
En constituant un ministère franchement
radical, absolument homogène, qui proii-
torait de l’occasion des scandales de Panama
pour entier au pouvoir avec un programme
nettement réformateur, j et disons-le, malgré
les interprétations diverses que ce mot
comporte, socialiste ; en se déclarant prêt à
porter le fer rouge dans cette plaie de notre
civilisation moderne qu’on appelle la féodalité
financière ; en proclamant hautement ses
sympathies pour la classe des travailleurs
qui défendent la République, alors que ceux
qui ont émargé au budget de Panama la
combattent ou la compromettent ; et en mani
festant sa volonté de mener à bien, à bref
délai, les lois ouvrières, M. Henri Brisson
rendrait; au pays un service signalé et dont
il lui serait tenu compte par ceux qui mettent
au premier rang des qualités nécessaires à
un homme d’Etat, la rectitude, la volonté
persévérante et la compréhension des cir
constances.
Que si, se présentant devant les Chambres
avec cette attitude, le Ministère se heurtait
à une résistance des modérés, il lui serait
facile, même en le supposant renversé dans
15 jours, d’éclairer le pays et de fixer le ter
rain électoral de 1893. On aurait rejeté dans
le même parti et rangé sous la même bannière
les ennemis de la liberté et ceux de la lumière,
les réactionnaires et les tripoteurs.
L’on ne verrait pas, comme naguère en
1889, les débris de toutes les réactions, unis
aux Numa Gilly et aux Delahaye, se ruer à
l’assaut de la République. Ceux qui auraient
renversé un ministère prêt à châtier les.cou
pables et à protéger les faibles, ne pourraient
plus se targuer devant le pays de cet amour
du peuple qui court les rues en temps d’élec
tions.
La situation politique, que tout le monde
a plus ou moins embrouillée depuis des années
y gagnerait en franchise. Et personne ne
s’en plaindrait, si ce n’est les tripoteurs et
pêcheurs en eau trouble, qui ne veulent pas
entendre parler des comptes de Panama, ou
les privilégiés de tout ordre que le seul mot
de réformes a le don d’exaspérer.
DENIS GUILLOT.
C’est M. Brisson qui est chargé de reconstituer
le cabinet.
Au moment de mettre sous presse, nous ne
connaissons encore aucune solution à la crise
ministérielle.
Cette situation laisse en suspend tons les
travaux parlementaires j le budget, notamment,
dont la discussion va se trouver considérablement
retardée.
*
* *
Le cardinal Lavigerie est mort dans la nuit du
25 au 26' novembre. Il était né à Bayonne, en
1825. Eu 1863, il fut nommé évêque de Nancy ;
quatre ans plus tard, il devint archevêque
d’Alger.
Le 8 février 1871, dans les Basses-Pyrénées,
et en juillet 1871, dans les Landes, il échoua
comme candidat à l’Assemblée.
En 1874, il fonda la mission du Sahara et du
Soudan et, après, plusieurs missions dans l’inté
rieur de l’Afrique, ainsi qu’en Tripolitaine et en
Tunisie.
Il fut nommé cardinal le 28 mars 1882.
SEMAINE POLITISA
FRANCE
Le ministère Loubet, à peine sorti des épreuves
qu’il a eu à subir à propos de la loi sur la presse
et de l’interpellation Delahaye sur les affaires de
Panama, s'est trouvé, sans .que l’on s’y attende,
tout'à coup emporté à la suite d’une question de
M. de La Ferronnays, transformée en interpel
lation par M. Millevoye, sur les circonstances qui
ont entouré la mort du baron Joseph de Reinach.
On sait que ce dernier, décédé subitement, au
moment où la justice se disposait à jeter un coup
d’œil dans ses papiers et ses affaires, a été enterré
assez précipitamment.
L’opinion s’est émue de ces faits ; de son côté,
la Commission d’enquête, nommée par la Chambre
pour faire la lumière sur les allégations portées
à la tribune à l’occasion du Panama, avait émis
le vœu suivant, quelle avait fait connaître au
Gouvernement :
« La Commission d’enquête exprime le désir
« que le Gouvernement prescrive les mesures
* médico-légales qu’il convient à l’effet d’établir
« si M. le baron de Reinach est mort ou non de
« mort violente, et que le Gouvernement prenne
« telles mesures qu’il appartiendra concernant les
« papiers de M. le baron de Reinach. »
Or, l’autopsie n’a pas été faite, et M. Ricard
soutient que la justice ne peut faire procéder à
l’exhumation du baron, parce qu’il n’y a ni crime,
ni présomption de crime, et qu’en son âme et
conscience il ne croit pas qu’il y ait crime ; de
plus, les scellés n’ont pas été mis chez M. de
Reinach. .
Tout cela n’a pas été du goût de la Chambre,
qui a pensé que la justice aurait pu agir plus
efficacement ; elle a pris fait et cause pour la
Commission d’enquête qu’elle avait nommée et
dont le président a dit aux ministres : « Vous
avez promis la lumière ; vous avez les moyens de
la faire : faites-là ! »
Le ministère a hésité, a tergiversé ; la Chambre,
en réponse, l’a renversé.
ÉLECTIONS AD CONSEIL DÉPARTEMENTAL
de l’Enseignement primaire
Nous recevons communication de la circulaire
ci-après que vient d’envoyer, à ses collègues,
M. Ledan, directeur de l’école de la rue de
Fleuras, à l’occasion des élections au Conseil
départemental qui doivent avoir lieu jeudi pro
chain, 8 décembre.
LE HAVRE, le i er Décembre 1892.
Monsieur et cher Collègue,
J’ai lTionneur do vous informer que je
pose ma candidature aux élections du
Conseil départemental de l’Enseignement
primaire. Je ne m’appuie pour cela sur
aucun groupe, afin de pouvoir conserver,
en cas de succès, ma pleine liberté d’action
et d’allure.
Je ne vous ferai pas une longue profession
de foi. Ceux qui m’ont connu autrefois
savent que, jusqu’à dix-huit ans, j’ai exercé
une profession manuelle et que, sans passer
par aucune école, j’ai obtenu successivement
mon brevet élémentaire et mon brevet
complet.
En 1883, j’obtenais, avec le numéro 1, le
certificat d’aptitude pédagogique, considéré
alors comme l’agrégation de l’enseignement
primaire.
Si j’ai été appelé ensuite à diriger, au
Havre, l’école de la rue de Fleurus, je puis
le dire bien haut, c’est avec le seul appui de
mes chefs hiérarchiques et après quatorze
ans d’exercice, dont trois comme insti
tuteur adjoint, cinq comme instituteur
titulaire à St-Riquier-ès-Plains, quatre au
même titre à Lanquetot, et enfin deux à
Darnétal.
Dans, le cas où vous me feriez le très
grand honneur de m’envoyer siéger au Con
seil départemental, vous pouvez compter,
mon cher Collègue, sur tout mon dévoue
ment à la cause de l’enseignement popu
laire qui nous est chère à tous. Vous pouvez
compter également sur mon impartialité la
plus absolue lorsqu’il s’agira de donner mon
avis sur les questions soumises aux délibé
rations de cette Assemblée. Enfin, soyez
persuadé que je veillerai avec soin à ce que
nos lois scolaires, qui sont des lois essentiel
lement démocratiques et l’une des gloires
de la République, soient, en toute circons
tance,, fidèlement observées.
VIVE LA RÉPUBLIQUE !
Veuillez agréer, Monsieur et cher Collè
gue, l’expression de mes sentiments debonne
confraternité.
C. LEDAN.
moderne, affirmer ses sentiments républicains.
Cette franchise nous console de certaines défail
lances du personnel enseignant que nous avons eu
à signaler ici même.
M. Ledan est, d’ailleurs, suffisamment connu
de notre population pour qu’il soit inutile de
faire son éloge. Ajoutons aux titres de M. Ledan r
qu’il est titulaire de la Mention honorable ;
distinction qui n’est qu’exceptionnellement ac
cordée aux directeurs d’écoles.
*
* ¥
Nous recevons, d’autre part, la communication
suivante :
« Les instituteurs de Rouen se sont réunis
hier jeudi* 1 er décembre, en vue de désigner deux
candidats à nommer au Conseil départemental.
« Les noms de M. LeGrix, directeur d’école au
Havre, et celui de M. Martel, directeur de l’école
primaire supérieure d’Elbeuf, ont obtenu, dans
cette réunion préparatoire, la majorité absolue
des suffrages.
« Etant donnés les mérités personnels et les
idées libérales des deux candidats, ainsi que les
services rendus par eux à la vraie République
et à l’instruction laïque, nous ne doutons pas que
les instituteurs du département sauront faire
triompher les noms de MM. Le Grix, du Havre,
et Martel, d’Elbeuf, aux élections du 8 courant.
« Nous sommes persuadés que les instituteurs-
électeurs du Havre s’empresseront d’accepter
cette marque de bonne confraternité, émanant de
leur collègues rouennais et ratifieront les choix
faits par eux. »
Nous constatons avec plaisir que l’on fait aux
instituteurs de notre région la part qui leur est
dans le Conseil départemental. Quel que soit le
résultat de l’élection,, il ne peut manquer d’être
favorable à la cause du département et de la
République, MM. Le Grix et Ledan étant égale
ment estimés de leurs collègues et des familles.
Nous ne pouvons que faire des vœux pour la
réussite d’uue candidature si nettement et si
dignement posée?
Nous sommes particulièrement heureux de voir
un de ceux qui ont mission d’enseigner aux
enfants de la démocratie les éléments de la science
LA RESPONSABILITÉ
DES ÉLECTEURS HAVRAIS
m point de vue économique
(Voir le numéro du 12 mars 1892 et suivants)
Ce problème, que nous n’avons fait que
contourner, mérite l’attention de tous ceux qui se
sentent véritablement des hommes. 11 exige, pour
sa résolution, le concours du grand nombre ; or,
l’éducation du grand nombre ne peut se faire que
par une action collective. Les masses ont mainte
nant le droit de se concerter, de s’associer ;
comme elles avaient déjà le droit de parler, de
voter. Quelles s’en servent donc, non pour faire
du bruit mais de la besogne.
Il est vrai que l’on a mis la charrue devant les
bœufs, une fois de plus. Le droit d’associa
tion — ce qu’à notre sens on pourrait appeler
le devoir d’éducation collective, de régé
nération sociale — aurait dû précéder de beaucoup
le droit de suffrage, qu’il aurait peut-être
rendu inutile. Le suffrage universel, manié par
des mains inconscientes, n’est trop de fois que
la mise en action du proverbe « donner des
verges pour se faire fouetter. »
Que d’utiles et féconds progrès ne réaliseraifc-
on pas par l’association systématiquement pour
suivie ! Combien l’on faciliterait l’avènement
pacifique et rapide de cet avenir, qui doit donner
aux hommes une part de bonheur et de dignité
de plus en plus grande, si, parallèlement, de
grandes associations de travailleurs se formaient
partout, sous le bénéfice de la loi de 1884, et si les
fabricants, les commerçants, englobés dans de
grands syndicats, se transformaient en grandes
sociétés de vente, de fabrication, etc. Cette
simplification des rouages économiques d’une part,
et, de l’autre, l’accès de l’économie sociale ouvert
aux masses laborieuses, d'une manière formant
un intense et fécond entraînement civique,
auraient des conséquences éminemment bienfai
santes, dont les lois civiles et fiscales se ressen
tiraient bientôt avantageusement. La plus grande
partie des difficultés de détail disparaîtrait, en
même temps que la production et la consom
mation s’élèveraient partout rapidement. L’abon
dance est la fille d’un travail intelligent.
Il faudrait, enfin, se décider à comprendre,
dans les masses populaires, que l’économie sociale
est essentiellement la morale pratique univer
selle dans ses applications collectives, et qu’elle
marque le point de contact du domaine politique
et du domaine économique.
DIX CENTIMES LE NUMERO
— 12 Frimaire An 101 — N° «18.
Réveil
ORGANE RÉPUBLICAIN
mx DES ABONNEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre 5 fr. 3 fr.
Départements 6 fr. 3 50
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15, RUE CASIMIR-PÉRIER, 15
LE RÉ VE IL DU HA VRE paraît le Samedi
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de leur abonnement, n’auront pas donné
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comme réabonnés pour le même laps de
temps. Le prix de l’abonnement annuel
est de cinq francs pour un an et de trois
francs pour six mois.
LA CRISE
Le cabinet Loubet, qui avait ordonné cou
rageusement les poursuites contre les admi
nistrateurs de Panama/ est tombé à la suite
d'un conflit avec la commission d’enquête.
Par suite des scrupules juridiques, peut-être
exagérés, de M.Ricard, la Chambre s’est pro
noncée contre le Ministère.
Il y a ceci de particulier dans ce vote de
défiance, qu’il émane en grande partie de
députés qui avaient envisagé les poursuites
avec crainte ou les avaient considérées comme
inopportunes, et qui n’ont pas été fâchés de
punir le cabinet Loubet de son attitude.
Il ne faut pas oublier, en outre, que M.
Ricard, par l’énergie de son action dans les
questions religieuses, avait accumulé depuis
plusieurs mois sur sa tête toutes les haines
cléricales. Nul plus que lui n’a encouru les
injures et les outrages de la réaction, ce qui
est un honneur pour un ministre républicain.
Ces diverses raisons, ajoutées à une cer
taine fatigue qu’il avait déjà manifestée dans
l’exercice dû pouvoir, on t'empêché M. Loubet
de profiter de l’occasion qui lui était offerte
parM. Maujan, de sauver le Ministère. Aussi,
a-t-on pu dire avec justesse que le cabinet
s’était suicidé.
M. Henri Brisson, un des vétérans de la
démocratie, dont le caractère et les capacités
politiques sont également appréciés, a été
chargé de constituer un nouveau Ministère.
.Nous sommes persuadés que cet austère
républicain, dont les conservateurs et certains
modérés raillent sottement la gravité, —
comme si le rôle d’un homme d’Etat consistait
à faire le pantin et à amuser ses contempo
rains ! — saura s’inspirer des intérêts si gra
ves qui lui sont actuellement confiés.
Quoi qu’en disent certains pessimistes,
rarement l'occasion a été plus belle pour le
parti des réformateurs et des progressistes, de
ceux qui ne considèrent pas les programmes
politiques comme un boniment sans valeur et
sans conséquence, pour le parti radical en un
mot.
L'opinion publique, si défiante en France,
qu’elle prête volontiers crédit à la calomnie,
et croit plutôt le mal que le bien, veut être
éclairée sur cette déplorable affaire de Panama.
Elle tient à savoir non seulement quelles ont
été les fautes commises par les administrateurs
de cette vaste entreprise, mais encore les pots-
de-vin qui ont pu être touchés par une cer
taine presse et par certains hommes politiques.
Il faut donc que le travail d’investigation
soit mené jusqu’au bout, qu’il se poursuive
devant la Cour de Paris contre les adminis
trateurs, et devant la commission d’enquête
contre l’ensemble des coupables.
La divulgation de l’existence des 26 chè
ques du baron de Reinach, est un premier pas
dans la voie de la vérité. Elle doit vraisem
blablement conduire à des révélations plus
importantes et plus précises dans lesquelles
on serrera de plus près les preuves de culpa
bilité.
On peut, dès à présent, constater dans toute
cette affaire, le rôle de la haute banque, se
faisant, à son ordinaire, l’entremetteuse de
ces négociations louches qui conduisent à
l’achat des consciences, de la presse et peut-
être des votes.
En constituant un ministère franchement
radical, absolument homogène, qui proii-
torait de l’occasion des scandales de Panama
pour entier au pouvoir avec un programme
nettement réformateur, j et disons-le, malgré
les interprétations diverses que ce mot
comporte, socialiste ; en se déclarant prêt à
porter le fer rouge dans cette plaie de notre
civilisation moderne qu’on appelle la féodalité
financière ; en proclamant hautement ses
sympathies pour la classe des travailleurs
qui défendent la République, alors que ceux
qui ont émargé au budget de Panama la
combattent ou la compromettent ; et en mani
festant sa volonté de mener à bien, à bref
délai, les lois ouvrières, M. Henri Brisson
rendrait; au pays un service signalé et dont
il lui serait tenu compte par ceux qui mettent
au premier rang des qualités nécessaires à
un homme d’Etat, la rectitude, la volonté
persévérante et la compréhension des cir
constances.
Que si, se présentant devant les Chambres
avec cette attitude, le Ministère se heurtait
à une résistance des modérés, il lui serait
facile, même en le supposant renversé dans
15 jours, d’éclairer le pays et de fixer le ter
rain électoral de 1893. On aurait rejeté dans
le même parti et rangé sous la même bannière
les ennemis de la liberté et ceux de la lumière,
les réactionnaires et les tripoteurs.
L’on ne verrait pas, comme naguère en
1889, les débris de toutes les réactions, unis
aux Numa Gilly et aux Delahaye, se ruer à
l’assaut de la République. Ceux qui auraient
renversé un ministère prêt à châtier les.cou
pables et à protéger les faibles, ne pourraient
plus se targuer devant le pays de cet amour
du peuple qui court les rues en temps d’élec
tions.
La situation politique, que tout le monde
a plus ou moins embrouillée depuis des années
y gagnerait en franchise. Et personne ne
s’en plaindrait, si ce n’est les tripoteurs et
pêcheurs en eau trouble, qui ne veulent pas
entendre parler des comptes de Panama, ou
les privilégiés de tout ordre que le seul mot
de réformes a le don d’exaspérer.
DENIS GUILLOT.
C’est M. Brisson qui est chargé de reconstituer
le cabinet.
Au moment de mettre sous presse, nous ne
connaissons encore aucune solution à la crise
ministérielle.
Cette situation laisse en suspend tons les
travaux parlementaires j le budget, notamment,
dont la discussion va se trouver considérablement
retardée.
*
* *
Le cardinal Lavigerie est mort dans la nuit du
25 au 26' novembre. Il était né à Bayonne, en
1825. Eu 1863, il fut nommé évêque de Nancy ;
quatre ans plus tard, il devint archevêque
d’Alger.
Le 8 février 1871, dans les Basses-Pyrénées,
et en juillet 1871, dans les Landes, il échoua
comme candidat à l’Assemblée.
En 1874, il fonda la mission du Sahara et du
Soudan et, après, plusieurs missions dans l’inté
rieur de l’Afrique, ainsi qu’en Tripolitaine et en
Tunisie.
Il fut nommé cardinal le 28 mars 1882.
SEMAINE POLITISA
FRANCE
Le ministère Loubet, à peine sorti des épreuves
qu’il a eu à subir à propos de la loi sur la presse
et de l’interpellation Delahaye sur les affaires de
Panama, s'est trouvé, sans .que l’on s’y attende,
tout'à coup emporté à la suite d’une question de
M. de La Ferronnays, transformée en interpel
lation par M. Millevoye, sur les circonstances qui
ont entouré la mort du baron Joseph de Reinach.
On sait que ce dernier, décédé subitement, au
moment où la justice se disposait à jeter un coup
d’œil dans ses papiers et ses affaires, a été enterré
assez précipitamment.
L’opinion s’est émue de ces faits ; de son côté,
la Commission d’enquête, nommée par la Chambre
pour faire la lumière sur les allégations portées
à la tribune à l’occasion du Panama, avait émis
le vœu suivant, quelle avait fait connaître au
Gouvernement :
« La Commission d’enquête exprime le désir
« que le Gouvernement prescrive les mesures
* médico-légales qu’il convient à l’effet d’établir
« si M. le baron de Reinach est mort ou non de
« mort violente, et que le Gouvernement prenne
« telles mesures qu’il appartiendra concernant les
« papiers de M. le baron de Reinach. »
Or, l’autopsie n’a pas été faite, et M. Ricard
soutient que la justice ne peut faire procéder à
l’exhumation du baron, parce qu’il n’y a ni crime,
ni présomption de crime, et qu’en son âme et
conscience il ne croit pas qu’il y ait crime ; de
plus, les scellés n’ont pas été mis chez M. de
Reinach. .
Tout cela n’a pas été du goût de la Chambre,
qui a pensé que la justice aurait pu agir plus
efficacement ; elle a pris fait et cause pour la
Commission d’enquête qu’elle avait nommée et
dont le président a dit aux ministres : « Vous
avez promis la lumière ; vous avez les moyens de
la faire : faites-là ! »
Le ministère a hésité, a tergiversé ; la Chambre,
en réponse, l’a renversé.
ÉLECTIONS AD CONSEIL DÉPARTEMENTAL
de l’Enseignement primaire
Nous recevons communication de la circulaire
ci-après que vient d’envoyer, à ses collègues,
M. Ledan, directeur de l’école de la rue de
Fleuras, à l’occasion des élections au Conseil
départemental qui doivent avoir lieu jeudi pro
chain, 8 décembre.
LE HAVRE, le i er Décembre 1892.
Monsieur et cher Collègue,
J’ai lTionneur do vous informer que je
pose ma candidature aux élections du
Conseil départemental de l’Enseignement
primaire. Je ne m’appuie pour cela sur
aucun groupe, afin de pouvoir conserver,
en cas de succès, ma pleine liberté d’action
et d’allure.
Je ne vous ferai pas une longue profession
de foi. Ceux qui m’ont connu autrefois
savent que, jusqu’à dix-huit ans, j’ai exercé
une profession manuelle et que, sans passer
par aucune école, j’ai obtenu successivement
mon brevet élémentaire et mon brevet
complet.
En 1883, j’obtenais, avec le numéro 1, le
certificat d’aptitude pédagogique, considéré
alors comme l’agrégation de l’enseignement
primaire.
Si j’ai été appelé ensuite à diriger, au
Havre, l’école de la rue de Fleurus, je puis
le dire bien haut, c’est avec le seul appui de
mes chefs hiérarchiques et après quatorze
ans d’exercice, dont trois comme insti
tuteur adjoint, cinq comme instituteur
titulaire à St-Riquier-ès-Plains, quatre au
même titre à Lanquetot, et enfin deux à
Darnétal.
Dans, le cas où vous me feriez le très
grand honneur de m’envoyer siéger au Con
seil départemental, vous pouvez compter,
mon cher Collègue, sur tout mon dévoue
ment à la cause de l’enseignement popu
laire qui nous est chère à tous. Vous pouvez
compter également sur mon impartialité la
plus absolue lorsqu’il s’agira de donner mon
avis sur les questions soumises aux délibé
rations de cette Assemblée. Enfin, soyez
persuadé que je veillerai avec soin à ce que
nos lois scolaires, qui sont des lois essentiel
lement démocratiques et l’une des gloires
de la République, soient, en toute circons
tance,, fidèlement observées.
VIVE LA RÉPUBLIQUE !
Veuillez agréer, Monsieur et cher Collè
gue, l’expression de mes sentiments debonne
confraternité.
C. LEDAN.
moderne, affirmer ses sentiments républicains.
Cette franchise nous console de certaines défail
lances du personnel enseignant que nous avons eu
à signaler ici même.
M. Ledan est, d’ailleurs, suffisamment connu
de notre population pour qu’il soit inutile de
faire son éloge. Ajoutons aux titres de M. Ledan r
qu’il est titulaire de la Mention honorable ;
distinction qui n’est qu’exceptionnellement ac
cordée aux directeurs d’écoles.
*
* ¥
Nous recevons, d’autre part, la communication
suivante :
« Les instituteurs de Rouen se sont réunis
hier jeudi* 1 er décembre, en vue de désigner deux
candidats à nommer au Conseil départemental.
« Les noms de M. LeGrix, directeur d’école au
Havre, et celui de M. Martel, directeur de l’école
primaire supérieure d’Elbeuf, ont obtenu, dans
cette réunion préparatoire, la majorité absolue
des suffrages.
« Etant donnés les mérités personnels et les
idées libérales des deux candidats, ainsi que les
services rendus par eux à la vraie République
et à l’instruction laïque, nous ne doutons pas que
les instituteurs du département sauront faire
triompher les noms de MM. Le Grix, du Havre,
et Martel, d’Elbeuf, aux élections du 8 courant.
« Nous sommes persuadés que les instituteurs-
électeurs du Havre s’empresseront d’accepter
cette marque de bonne confraternité, émanant de
leur collègues rouennais et ratifieront les choix
faits par eux. »
Nous constatons avec plaisir que l’on fait aux
instituteurs de notre région la part qui leur est
dans le Conseil départemental. Quel que soit le
résultat de l’élection,, il ne peut manquer d’être
favorable à la cause du département et de la
République, MM. Le Grix et Ledan étant égale
ment estimés de leurs collègues et des familles.
Nous ne pouvons que faire des vœux pour la
réussite d’uue candidature si nettement et si
dignement posée?
Nous sommes particulièrement heureux de voir
un de ceux qui ont mission d’enseigner aux
enfants de la démocratie les éléments de la science
LA RESPONSABILITÉ
DES ÉLECTEURS HAVRAIS
m point de vue économique
(Voir le numéro du 12 mars 1892 et suivants)
Ce problème, que nous n’avons fait que
contourner, mérite l’attention de tous ceux qui se
sentent véritablement des hommes. 11 exige, pour
sa résolution, le concours du grand nombre ; or,
l’éducation du grand nombre ne peut se faire que
par une action collective. Les masses ont mainte
nant le droit de se concerter, de s’associer ;
comme elles avaient déjà le droit de parler, de
voter. Quelles s’en servent donc, non pour faire
du bruit mais de la besogne.
Il est vrai que l’on a mis la charrue devant les
bœufs, une fois de plus. Le droit d’associa
tion — ce qu’à notre sens on pourrait appeler
le devoir d’éducation collective, de régé
nération sociale — aurait dû précéder de beaucoup
le droit de suffrage, qu’il aurait peut-être
rendu inutile. Le suffrage universel, manié par
des mains inconscientes, n’est trop de fois que
la mise en action du proverbe « donner des
verges pour se faire fouetter. »
Que d’utiles et féconds progrès ne réaliseraifc-
on pas par l’association systématiquement pour
suivie ! Combien l’on faciliterait l’avènement
pacifique et rapide de cet avenir, qui doit donner
aux hommes une part de bonheur et de dignité
de plus en plus grande, si, parallèlement, de
grandes associations de travailleurs se formaient
partout, sous le bénéfice de la loi de 1884, et si les
fabricants, les commerçants, englobés dans de
grands syndicats, se transformaient en grandes
sociétés de vente, de fabrication, etc. Cette
simplification des rouages économiques d’une part,
et, de l’autre, l’accès de l’économie sociale ouvert
aux masses laborieuses, d'une manière formant
un intense et fécond entraînement civique,
auraient des conséquences éminemment bienfai
santes, dont les lois civiles et fiscales se ressen
tiraient bientôt avantageusement. La plus grande
partie des difficultés de détail disparaîtrait, en
même temps que la production et la consom
mation s’élèveraient partout rapidement. L’abon
dance est la fille d’un travail intelligent.
Il faudrait, enfin, se décider à comprendre,
dans les masses populaires, que l’économie sociale
est essentiellement la morale pratique univer
selle dans ses applications collectives, et qu’elle
marque le point de contact du domaine politique
et du domaine économique.
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