Titre : Le Petit Havre : organe républicain, démocratique, socialiste ["puis" organe républicain démocratique "puis" bulletin d'informations locales]
Éditeur : [s.n.] (Havre)
Date d'édition : 1914-07-22
Contributeur : Fénoux, Hippolyte (1842-1913). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32836500g
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 juillet 1914 22 juillet 1914
Description : 1914/07/22 (A34,N12036). 1914/07/22 (A34,N12036).
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k1722035
Source : Bibliothèque municipale du Havre, PJ5
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/12/2020
htm — y <2,051 (O Fages) 8 CesKsH» — EfHTlOfl PU MATIN — S Cestimes (€3 Pages) Hercrpdi îî Juillet PH
Adminiilratcur • Délégaê- Gérant
O. RANDOLET
UaiilstratiSB. Iipressions it Anaoneas. TEL. 10.41
25, Rue Fontenelle, 85
Adresse Télégraphique : EANDOLET navre
Le Petit Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN DÉMOCRATIQUE
Le plus fort Tiragè dçs Journaux de la Région
RÉDACTEUR EN CHEF
tf.-J. CASPAR - JORDAN
Téléphone t 14.SQ
Secrétaire général : TH. VALLÉE
Rédaction, 35, rue Fontenelle - Tél. 7.60
AETV NONC E S
AU HAVRE BUREAU DO JOURNAL, 112, bout* de strasoourg.
( L’AGENCE HAVAS, 8, place de la Bourse, est
A PARIS..; ] seule chargée de recevoir les Annonces pour
( le Journal.
L$ PETIT HA VUE est désigné po»? les Annonces Judiciaires et légales
ABONNEMENTS TROIS Mois Six Mors UN An
: **°
Autres Départements.................... 8 Fr. 11 KO SS »
Union Postale AO » SO Fr. -40 »
On s'abonne également, SANS FHA/S, dans tous les Bureaux de Poste ds France
Questions Législatives
Le Privilège des
Bouilleurs de cru
Dans la séance du 26 juin dernier, une
proposition de loi a été déposée sur le bu-
reau de la Chambre par MM. Georges
Berry, Charles Leboucq, Jules Dansette,
Vandame et Auguste Bouge, relative à la
suppression du privilège des bouilleurs de
cru. Ce privilège est si manifestement l’une
des causes principales du progrès de l’al-
coolisme que la suppression s’en impose.
La part du privilège des bouilleurs dans
les ravages de l’alcoolisme a été si souvent
établie, ,— disent les auteurs de la propo-
sition de loi, — elle résulte avec une si
cruelle évidence des statistiques criminel-
les et médicales, que les défenseurs du «pri-
vilège n’opposent plus, depuis longtemps,
que l'intérêt politique à l’intérêt national,
^intérêt électoral à l’intérêt social.
Et les renseignements recueillis et rap-
pelés par MM. Georges Berry, Charles Le-
boucq et leurs collègues sont, sur ce point,
des plus significatifs.
Alors que, dans les campagnes du Plateau
central et des départements riverains de la
Loire et de la Garonne, la consommation
n’atteint pas deux litres d’eau-de-vie de com-
merce à 40 degrés, par tète d’habitant, elle
dépasse vingt-cinq litres et s’élève jusqu’à
trente-cinq et quarante dans les campa-
gnes normandes et bretonnes. Et c’est ici
que la relation de cause à effet s’accuse
avec une netteté singulière. Car c’est dans
les ressorts judiciaires de Caen, de Rennes
et de Rouen que le pourcentage de la cri-
minalité alcoolique est le plus élevé (de 57
à 63 0/0).
. Le contingent, de beaucoup le plus fort,
de la folie appartient, Paris excepté, à la
Normandie et à la Bretagne. La moyenne
générale des suicides qui est, dans l’ensem-
ble de la France, de 11 pour 100,000 habi-
tants, s’élève à 16 dans l’Eure. Enfin, le
taux de la morbidité tuberculeuse, qui varie
de 2 à 3 0/0 parmi les populations rurales
du Gard et du Gers, dépasse 4 0/0 dans ies
campagnes des départements de ï’Ouest,
pays d’élection vraiment des bouilleurs de
cru. Ajoutez quefcés régions difftord et du
Nord Ouest, qui fournissaient autrefois les
plus beaux soldats et les marins^ les plus
hardis, voient le nombre de conscrits réfor-
més pour tares alcooliques s’élever parfois
jusqu’à 25 et 35 0/0 !
Naguère, disent encore les auteurs de la
proposition de loi, les savants et les hygié-
nistes étaient seuls à s’alarmer du danger
de l’alcoolisme. Aujourd’hui tout le monde
a conscience du péril. Mais les pouvoirs
publics semblent rester indifférents et nul
programme ministériel n’a jamais envisagé
la latte contre l’alcoolisme.
Or si la suppression ou tout au moins la
limitation du privilège des bouilleurs de
cru ne peuvent manquer d’exciter certains
mécontentements, il faut se souvenir que
certains gouvernements : en Angleterre, en
Suisse, dans les pays Scandinaves, en Rus-
sie, aux Etats Unis, ont bravé bien d’au-
tres colères dans leurs luttes contre l’al-
coolisme fil faut se souvenir aussi que la
loi du 30 mars 1903, qui avait supprimé le
privilège, allait triompher des dernières
résistances quand elle fut abrogée par la
loi du 14 avril 1906.
Et puis, l’intérêt de nos finances est ici
d’accord avec l’intérêt de la santé publique
pt le souci de l’avenir de la race. Cet argu-
ment « financier » n’est pas à négliger par
le tëmps qui court. Si la loi ne devait com-
porter aucune exception à la règle que
« nul ne peut, sans déclaration, se livrer à
la fabrication des eaux-de-vie », si tous
les propriétaires d’alambics étaient soumis
à l’exercice et toutes les -eaux-de-vie au
droit de consommation, — de ce fait, le
Trésor bénéficierait d’une recette de 100
millions par an.
Ce qui est certain, c’est que la réglemen-
tation du privilège, telle qu’elle résultait
de la loi du 31 mars 1903, a assuré, pendant
son application, une perception supplé-
mentaire de 30 millions de francs qui
étaient bien loin de représenter la totalité
de la production qui aurait dû payer l’im-
pôt. Et pour ce qui est des allocations en
franchise — 20 litres d’alcool pur par récol-
tant et 50 litres, mais dispensés seulement
d’exercice, pour les petits bouilleurs, —
elles se sont appliquées au cours de la cam-
pagne 1904 1905, à plus de 101.000 hecto-
litres représentant, en chiffres ronds, 42
millions de francs.
Gomme la plupart de nos lois fiscales
comportent des dégrèvements à la base, et
comme il y aurait, d’autre part, une im-
possibilité matérielle à exercer les milliers
de petits bouilleurs qui consomment eux-
mêmes leurs produits et ne pratiquent pas
la fraude, MM. Georges Berry, Charles
Leboucq, Dansette, Vandame et Bouge ne
proposent pas la suppression radicale et
absolue du privilège. Ils demandent seule-
ment le' retour à la loi du 30 mars 1903,
abrogée en 1906 en fin de législature, loi
dont le texte est d’ailleurs analogue aux
lois des principaux pays étrangers sur les
distilleries de fruits et de vins.
Les plus sérieux, les plus solides argu-
ments militent en faveur de cette proposi-
tion de loi, aussi faut-il espérer que le
Parlement lui fera bon accueil à la rentrée.
TH. VALLÉE.
La Crise de TUlster
LS CONFÉRENCE ROYALE
A la Chambre des Commîmes
La crise actuelle compte parmi les pins
sérieuses de Tbistôire de l'Angleterre, et
dansé*» milieux politiques autorisé*, on ta
Considère comme un des pins graves évé-
nements contemporains.
Bien avant trois heures, moment où de-
vait s’onvrir, lundi, la séance de la Chambre
dès Communes, le public stationne sur les
trottoirs situés près du palais, afin de voir
arriver les ministres et les députés.
La Chambre est très animée et les bancs
sont tons occupés. M. Asquith dit qn’il a été
autorisé par ie roi à annoncer qu’en raison
de la gravité de la situation, le souverain a
cru devoir provoquer une conférence de re-
présentants de tons les partis, anglais et ir-
landais, afin de diseuter les questions qui
n’ont pu être réglées en ce qui concerne l’Ir-
lande.
L’invitation a été acceptée par les répré-
sentants de i’oppositioD, del’Ulster, des par-
tis nationalistes et dn gouvernement. Selon
la décision du roi, le speaker de ia Chambre
des communes présidera cette conférence.
A la Chambre des Lords
Lord Courtney a soulevé à la Chambre des
Lords, à propos de la conférence du Palais
de Buckingham, une question de droit cons-
titutionnel. li demande ce que deviennent la
responsabilité ministérielle et l'amorité du
Parlement.
Lord Crewe répond que la conférence dn
Palais de Buckingham ne porte pas atteinte à
la pratique constitutionnelle, étant données
les circonstances actuelles et l’importance su-
prême dçs questions en jeu. Il n’est pas et il
ne saurait être nullement question de sup-
planter l’autorité du Parlement et la confé-
rence n’aura pas ce résultat.
Le Président de la Répsliiips
EN REMIE
U, Poincaré à Saint-Pétersbourg
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
Aujourd’hui, c’est la journée de la capitale
russe..Elle s'est mise en frais pour faire au
chef de 1 Etat ami et allié i’accueil le plus
brillant et le plus chaleureux. Bien avant
l’heure de l’arrivée de M. Poincaré, du mi-
nistre Viviani et des autres hôtes français, le
quai Anglais où , ils doivent débarquer est
couvert d’une fonte épaisse, une de ces fou-
ies russes, d’une inlassable patience, d’une
gaieté douce, presque immobile, jusqu'au
moment où se montre le personnage at-
tendu.
Alors sa température monte brusquement
d’un nombre considérable de degrés : c'est
la plus joyeuse exultation.
Le yacht impérial Alexandria a quitté Pe-
terhof à il h. 15. Il accoste au majestueux
quai de granit qui est une des curiosités les
plus imposantes de la capitale, quelques mi-
nutes avant une heure.
Le comte Tolstoï, maire de Saint-Péters-
bourg, avec une délégation du Conseil com-
posée du président et de deux conseillers,
souhaite la bienvenue an président en lui
présentant, selon l’antique coutume russe,
ie paiu et le sel sur un plateau richement
orné de ciselares.
Après l'échange de compliments, le cortè-
ge présidentiel, escorté de cosaques du cor-
tège de l’empereur, en tuniques rouges — la
grande tenue — se r< n i par les quais, et en
traversant le pont Troîuki, dont la première
pierre fut posée par Félix Faure, à la forte-
resse Pierre-et-Panl dont les murs d’enceinte
baignent dans la Neva juste en face dn pa-
lais o’Hiver.
C’est dans l’église de la forteresse que sa
trouvent les tombeaux de la famille impé-
riale, tous uniformes, tous simples dans la
rigidité de leur revêtement de marbre gris.
Des couronnes, beaucoup de couronnes r
couvrent celui de l’empereur Alexandre III
et sont déposées tout à l’entour. Quelques-
unes ont des inscriptions françaises, il y a
ià les palmes envoyées par nos Chambres,
lors des funérailles du tsar défunt, et aussi
celles que les présidents Faure et Loubet ap-
portèrent avec eux.
M. Poincaré dépose à son tour nne magni-
fique palme eu argent sur la pierre funérai-
re an miliea d’un silence profond qni té-
moigne qu’un souvenir ému est adressé à
ce moment an premier des tsars qui ont
vonlu l’alliance, fidèlement maintenue de-
puis an quart de siècle, et proclamée hier à
nouveau.
Le tsar et H. Poincaré
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
L’empereur est venu, à dix heures et de-
mie, rendre visite au président de la Répu-
blique, avec lequel il est resté longtemps en
tête-à iête : tes aéùx cltels d’Etat ont repris"
la conversation prolongée qu’ils avaient eue
hier après-midi à bord du yacht Alexandra ;
ils ont examiné toutes les questions exté-
rieures intéressant ia France et la Russie, et
ils se sont mis d’accord pour établir nne
action concordante des deux pays dans la
politique générale européenne. — (Havas.)
M. Viviani et M. Sazonof
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
Dès les premières heures de la matinée,
M Viviani a reçu MM. Sazonof, ministre des
affaires étrangères de Russie, Isvolski, am-
bassadeur de Russie à Paris, le baron de
Schilling, directeur de la Chancellerie, avec
qui il a eu un long entretien, auquel assistait
M. de Margerie. — (Havas.)
M. Poincaré reçoit la Colonie française
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
M. Paléologue, ambassadeur de France,
en présentant à M. Poincaré les membres
de la colonie française, dit que dans aucune
province de notre vieille France, le prési-
dent de la République ne rencontrera de
meilleurs français que ceux qui sont devant
lui.
M. Poincaré répond qu’il sait que les Fran-
çais habitant ia Russie n’ont jamais cessé
d’y donner ie bel exemple de l'activité, de
l’intelligence et du patriotisme. Ils compren-
nent qu’ils ont assumé auprès delà grande
nation amie et alliée, une très haute, une
très noble mission : Ils sont chargés de re-
présenter à ses yeux notre génie national.
le Tamponnemcml
près de Toulouse
Sept NM or lu. — Trente Bleuté»
Un grave accident de chemin de fer s’est
produit à six kilomètres de Toulouse, à l’in-
tersection des ligues de Bayonne et d’Auch,
tout près du pont d'Empalot. L’express de
Bayonne a tamponné les dernières voitures
du train d'Anch qni était arrêté à la bifurca-
tion. Quatre wagons dn train tamponné ont
été brisés, et i’on a à déplorer la mort de
sept voyageurs. Il y aurait, d'après les der-
niers renseignements communiqués, une
trentaine de personnes blessées, dont plu-
sieurs fort grièvement.
Lus premiers secours n’ont pu être orga-
nisés qu’assez difficilement, en raison de
l’eioigoement du lieu de la catastrophe de
toute habitation. Cependant deux compa-
gnies du 14» de ligne et les pompiers de Tou-
louse ne tardèrent pas à arriver pour coopé-
rer au sauvetage Les blessés furent dirigés
soit sur l’hôpital de Toulouse, par un train
de secours, soit sur l’hospica des aliénés de
Braqueville, près du village de la Four-
è nette.
On a retiré des décombres les cadavres de
quatre hommes, dont deux soldats dn
14» d’infanterie, de deux femmes et d’une
fillette.
L’çnquête aurait établi que le mécanicien
de l’express de Bayonne, ayant cru voir les
disques ouverts, les franchit sans s'aperce-
voir qu’un peu plus loin ie sémaphore était
ferme. Il ne put bloquer ses freins à temps
et éviter la catastrophe.
Le train de Bayonne était conduit par le
mécanicien Jean Bart âgé de 47.ans, demeu-
rant à Toulouse. M. Jean Bart a déclaré :
« J’étais couvert par ie disque, aucun signal
ne me disant de m’arrêter. Je continuai ma
rpnte quand, au détour de la voie, j’ai aperça
an train arrêté devant moi. J’ai renversé ia
vapeur^ j’ai bloqué les freins : trop tard, ie
mal était fait. »
M. Jean Bart, ni son chauffeur, n’ont en de
mai.
M. Yiguié, mécanicien dn train d’Anch,
dit :
«. J'étais arrêté, car les signaux, placés de-
vant moi, entre tes deux ponts, me prescri-
vaient de ne pas aller plus lo|n ; tout d’un
coup le train de Bayonne est arrivé et nous
a tamponnés sans que je puisse m’expliquer
la chose. Je n’ai pas quitté la machine. Nons
avons reçu un choc terrible mais je n’ai pas
été renversé et n’ai pas de mal. »
La Compagnie dn Midi communique au
sujet dé c-ït accident la note suivante :
Le train 510, allant de Bayonne & Toulou-
se, a tamponné, à la bifurcation d’Ëuipaiot,
à 6 kilomètres de Toulouse, le train 456, ve-
nant d’Auch.
Sept voyageurs orit été itfés et vingt-nuit
environ blessés.
La circulation est actuellement rétablie,
■a»
Ulivi est retrouvé
Sa fuite prend maintenant les proportions
d’un événement national. Les plus grands
savants italiens ont été consultés an sujet
des expériences qui devaint révolutionner
l’art de la guerre.
Ulivi et Maria Fornari, pendant qn’en Ita-
lie on discute leur découverte, voguent à
l’heure actuelle,sur les côes autrichiennes.
Ils se sont embarqués sur le Graf-Wurm-
brand, où un journaliste a pu les inter-
viewer.
— Mon départ de Florence^ a dit Ulivi, ne
doit pas être interprète contre mon inven-
tion, dans laquelle j’ai toujours pleine con-
fiance. Je suis parti parce que l’échec possi-
ble de mes expériences pouvait retarder
mon union.
— Est-il vrai que vous aviez introduit du
sodium dans vos bombes d’essai ?
— Jamais de la vie, proteste-t-il. Ces bom-
bes n'avaient rien de particulier. Elles ne
contenaient ni sodium, ni mouvement d’hor-
logerie, ni coton poudre. On le verra plus
tard ..
Mais qu’importe, ajoute-t-il, je quitte l’Ita-
lie, car je ne veux pas qu’Angela-Maria For-
uari, contre sa volonté, soit ravie à mon
amour.
L’AFFAIRE CALMETTE
P Caillii (M les Assises
DEUXIÈME AUDIENCE
Les témoignages des Employés et des Rédacteurs du “ Figaro ’V
Déposition de M. Paul Bourget. — M. Caillaux à la barre.
L’audience est levée au milieu du tumulte.
IMPRESSIONS D’AUDIENCE
Paris, 21 juillet.
La seconde journée dn drame qni se
déroule actuellement an Palais de Justice
n’a pas attiré nn nombreux public. Lé Tout-
Paris est au bord de la mer où à la monta-
gne. D’ailleurs le premier jour n’a rien ap-
pris que l’on ne sut depuis longtemps. Le
point mystérieux est de préciser ce qu’à pu
être l’entrevue de Çaston Calmette et de
Mme Caillanx. A-t-elle tiré sur lui ex-abrupto
ont ils eu d’abord nne conversation qne
Mme Caillanx ne veut pas dire ?
Le système de défense de l’accusée est de
nier la préméditation. Elle le tait avec nne
énergioet nne lucidité que ne laisseraient
pas soupçonner son alinre placide, sa phy-
sionomie résignée et presque insignifiante.
À l’entendre répondre d’an ton sec, près- 1
que autoritaire, il me souvient de certaine .
après-midi officielle, où, assis près d’elle, je
pensais bénévolement que cette femme du
plus trépidant et du plus nerveux des hom-
mes d’Etat, faisait avec son époux le con-
traste ie plus complet. Bourgeoise, elle l’était
selon son propre aveu, mais bourgeoise ti-
mide et presque effarouchée, sans an mot,
sans an geste, comme écrasée dn rôle qu’el-
le jouait de par la situation de son mari.
On ne pouvait se douter de la tempête qui
liouleversait ce cerveau. Mais avec les fem-
mes tout est surprise. Alphonse Daudet nous
a conté, dans son admirable Sapho, l’histoire
de cette petite amonrense qui, chaque jour,
disait placidement à son ami ;
. -ySi ta m’abandonne», je me jeterai par
la fenêtre.
Elle sé jeta par la fenêtre.
Mme Caillanx nous parait être de cette
race. A son mari qni pariait de représailles
violentes, elle répondait : Ce sera moi.
Cependant, les témoins viennent raconter
l’histoire qne les joarnanx ont ressassée cent
lois. Mme Caillanx les écoute dédaigneuse-
ment. Elle a remis le col blanc qne son dé-
fensear loi avait fait enlever hier. Il v&ât
mieux indisposer les jarës par trop d’élé-
gance que leur déplaire par trop.de laisser-
aller. Décidément, Mme Caillaux est plus
psychologue que M« Labori.
Après le défilé sans intérêt des garçons de
bureau, M. Paul Bourget dépose à son tour.
Il raconte comment, Gaston Calmette lai
montrant la carte ds visite de ia femme dn
ministre des finances, il eut un geste de sur-
prise :
— Vous n’allez pas le recevoir T deman-
da-t-il.
Le récit qn’il fait de cette minute précise
est angoissant. Il serre la main d’an ami, an
peu intrigué de ce que cette femme puisse
lai dire. Il ne devait pins le revoir. Il suffit
de peu de choses pour anéantir nn homme
jeune, robuste, exhubérant de santé.
La chaleur est étouffante à ce moment de
ia jonrnée. Le président Albanel s'éponge le
front arec gravité. Seule Mme Caillanx ne
semble pas souffrir de l’excessive tempéra-
ture. La psychologie de cette petite bour-
geoise commence à transparaître rien
que par sou altitude. Elle est ia femme
du chef du parti républicain de France, elle
l’a dit. Elle est tonjours Mme Caillaux mal-
gré la détention à Saint-Lazare et la Conr
d’Assises. Son mari a gouverné la France, il
la gouvernera encore.
Le défilé des rédactenrs du Figaro n’ap-
porte rien non pins an débat. Us racontent
simplement ce qu’ils ont vu. Mais à la re-
prise, nn mouvement se produit. Voici M.
Caillaux à la barre. 11 est très rouge, très
agité. Tout à l'heure il fumait cigarettes sur
cigarettes, se promenant au bras de M. Cec-
caldi. Maintenant il parie, il parle saccadé,
trépidant. Décidément, son nervosisme, son
émotion plaisent mieux dans les circonstaa.
ces tragiques qne le sang-froid imperturba-
ble de i’acensée. Mi Caillaux raconte, Int
aussi, sa rie intime, ses angoisses, comment
il écrivit les lettres publiées par le Figaro.
Lorsque M. Caillanx parle de son affection
ponr sa femme, dn bonheur dans lequel ils
ont réen et de l’intimité fature à laquelle il
rêve, Mme Caillaux éclate en sanglots. L’as-
sistance éprouve an certain malaise.
M. Caillanx, pen à peu, sarnionte son
émotion. Sa voix nn pen enrouée mai!
nette martèle les phrases. Il défend mainte-
nant et sa vie privée et sa vie politique,
comme si an interpellateur l’avait amené à
la tribune de ia Chambre. Il prend tout le
reste de i’andience et parait un pen long,
emporté par son sujet. A plusieurs reprises
l’auditoire donne des signes de fatigne.
De vifs incidents ont fait passer la somno-
lence du public lorsque M. Caillaux s’est
explique arec M. Latzarus sur les documents
sécrets qne Calmette avait en, sa possession.
Ils ont secoué l’auditoire et causé nne alter-
cation entre l’ancien président du Conseil,
M. Latzirus et les deux avocats, M8S Chenu
et Labori. Le public a manifesté pour et con-
tre et l’audience a été levée an miliea d’ans
animation considérable.
; ■ \ T. H.
Les assistants sont pins nombreux qu%#
n’étaient la veille. Lès dames sont moins ra-
res. Dans l’auditoire, on voit poindre des
plumes ronges et blanches.
Aujourd'hui, on entend tes témoins du
drame.
LES TÉMOIGNAGES
Le Garçon de Recettes Sirac
M. Adrien Sirac, garçon de recettes an Fi-
garo, introduisit Mme Caillaux dans le cabi-
net de M. Gaston Calmette et allnma, en ap-
puyant sur un bouton électrique, les lampes
ae la cheminée.
Ce fut lui qui accourut le premier. Quand
on entendît les coups de fen, Mme Caillanx
était debout. M. Gaston Calmette s’était
baissé derrière son bnrean.
Répondant à des questions qui sont posées
par Mes Chenu, Seligman et Labori, ie témoin
affirme que la pièce où se produisit le drame
n’était pas dans nne 'emi-obscurité. M. Gas-
ton Calmette avait, dit-il, allumé lui-même
les deux lampes de sou bureau.
Dernière Heure
PARIS, TROIS HEURES MATIN
5 DEPECHES COMMERCIALES
> - -
METAUX
f LONDRES, SI Juillet. Dépêche de 4 h. 30
TON COURS HAUSSE BAISSE
| Cil VUE
'Comptant.. SQ t £60 10/- -/- 10/-
:3 mois;.... *60 17/6 -/- 11/3
, ETAIN
Comptant 1 143 8/- -/- 60/-
8 mois J ,rr6Su1’ 1 144 10/- -/- 60/-
FER
Comptant.. ealme 61/3 -/- * d
8 mois 81/7 y% 1 d -/-
Prix comparés avec ceux de la deuxième Bourse
du 20 juillet 1*14.
NEW-YORK, 21 JUILLET
Cotonn t juillet, inchangé; août, in-
changé ; octobre, baisse 1 point ; janvier,
baisse 3 points. — Soutenu.
(ialéa t hausse 7 à 11 points.
NEW-YORK, 21 JUILLET
. n nn t. ritcnir
Cuivre Standard disp. 13 37 13 25
— septembre.... 13 37 13 40
Ainalyauiat. lop... 69 5 8 69 »
Fer 14 75 14 75
CHICAGO. 21 JUILLET
C. DD JOUR • C. P R F,CEI)
Blé sur Septembre 79 7/8 79 »/»
’ — Décembre 82 3 4 82 »/»
Mais snr Septembre 67 7/8 67 3/8
— Décembre 66 7/8 66 3 8
Stindoui sur. Septembre 1015 1012
. - Octobre.. 1815 10 26
LE VOYAGE
fin Président de la République
EN RUSSIE
Une promenade dans Saint-Pétersbourg
SAINT PÉTERSBOURG. — A 4 heures, le prési-
dent de la République fait en voiture une
promenade à travers les rues principales de
Saint-Pétersbourg.
De la perspective Newsky à la Morskaya,
une foufe compacte pousse de retentissantes
acclamations en agitant des mouchoirs.
M. Poincaré gagne le Paiais d’Hiver dont
les honneurs lui sont faits par les hauts
fonctionnaires attachés au Palais.
Dans un des salons, M. Poincaré reçoit in-
dividuellement les membres du corps diplo-
matique accrédités à Saint-Pétersbourg, puis
est introduite une délégation de la noblesse
de Saint Pétersbourg.
Le maréchal Somof dit qne la noblesse
considère que l’alliance est solide parce
qu’elle est fondée snr la sympathie des deux
peuples et que toutes les classes de la Société
y sont sincèrement attachées.
M. Poincaré répond en remerciant la no-
blesse des sentiments qu’elle manifeste en-
vers la France.
Le président reçoit ensuite nne délégation
de la Douma municipale.
La maire de Saint-Pétersbourg prononce
quelques paroles et M. Poincaré lui répond
en disant qu’il emportera de son voyage an
souvenir ineffaçable.
Des délégations de Zemtvos remettent à
M. Poincaré des adresses contenues dans de
riches' reliures avec de magnifiques incrus-
tations.
A 6 heures, le président va visiter l’hôpital
français.
La population ouvrière fait, dans les rues,
uu chaleureux accueil à M. Poincaré.
Le Dîner à l’Ambassade de France
SAINT PÉTERSBOURG.— Le président rentre
à l’ambassade de France où il donne un
dîner de 86 couverts eu i’honnenr des mi-
nistres russes, des hauts personnages de ia
Cour et des présidents des sociétés françaises
de bienfaisance de Saint-Pétersbourg.
M. Poincaré a fait remettre an maire de
Saint-Pétersbourg, nne somme de cinquante
mille francs pour être distribuée aux pau-
vres de la capitale.
Banquet en l’honneur de l’Amiral Lebrïs
A l'Hôtel de Ville a eu lieu à 8 heures nn
banquet de denx cents couverts donné en
l’honneur de l’amiral Lebris et des officiera
de l’escadre.
Des toasts cordiaux ont été échangés.
Vers 10 h. 40, le président de la Républi-
que est venu à l’Hôtel de Ville. Une foule
énorme, massée aux abords, lui a fait de
chaudes ovations.
M. Poincaré, après avoir assisté à nn con-
cert de musique russe, a quitté l’Hôtel de
Ville, toujours très acclamé, et à il h. 1/2 il
s'est embarqué sur le yacht Alexandra pour
rentrer à PeterhoL
MORT TRAGIQUE DE
MADAME DE CASTELLA
BRUXELLES. — Un terrible accident s'est
proauit hier à six heures au meeting d’avia-
tion de Stoeckel.
Mme Cayat de Castella avait été enlevée
sous le biplan de l'aviateur français Cham-
pel ponr renouveler l’expérience de para-
chute qu’elle avait déjà réussie, on s’en sou-
vient, à plusieurs reprises.
A 600 mètres de hauteur, le parachute fut
lâché, mais il ne se déploya pas et la mal
henreuse jeune femme vint s’écraser snr le
sol.
La mort a été instantanée..
LMÂfRE_CÂLMEÎTS
Fin de la déposition de M. Caillaux
A 4 h. 50, l’audience est reprise.
M. Caillaux aborde l'historiqne de ia cam-
pagne du Figaro.
On visait, dit-il, l’homme qui voulait l’im-
pôt sur Je revenu et ponr atteindre l’homme
que l'on voulait abattre, tous les moyeus ont
été bons.
La campagne commença par l’affaire Prieu
qui est un conte à dormir debout.
M. CaDlaux passe en revue toutes les at-
taques dirigées contre lui.
On m’a, d-t-il, accasé de forfaiture dans
i’affaire Rochette et de trahison dans le traité
franco allemand. Eh bien t nons sommes de
simples bourgeois; nous n’avons pas de bla-
son, mais nous défendons notre honneur,
notre honorabilité.
« C’est toute cette boue qui lui a troublé
l’esprit, s'écrie M. Caillaux en se tournant
vers sa femme t »
Celle-ci, ie visage caché dans son mouchoir,
fait des signes d’assentiment.
M. Caillanx estime que la remise de l’af-
faire Rochette était une mesure utile dont il
n'hésiterait pas à prendre encore la respon-
sabilité. A aucun moment, la publication du
rapport Fabre n’inqnieta ni lui,ni sa iemme.
M. Caillaux dit qu'il offre à la Cour et aux
jures, tous les éléments propres à leur mon-
t> er qu’il ne reste nen de toutes les attaques
dont il fut l’objet.
Parlant des négociations franco-alleman-
des, M. Caillaux dit :
« Dans ces négociations, j’ai mis nn dou-
ble souci : lé souci que la France mit défi-
nitivement sa marque sur le grand empire
marocain ; le second souci est que tout au
long de ma vie poli ique, je voulais ia paix,
la paix dans la démocratie.
» Qu’on discuta mon oeuvre au point de
vue politique, rien de pins naturel, mais
qu’on vienne jeter ia bone contre moi, c’est
contre cet* que je me lève avec la fiornicre
. énergie.
» J’ai sn qu’on avait voulu au Figaro pu-
blier certaines pièces diplomatiques.
» J’aurai peut-être a en parier toat à
l’heure. Si on m’obligeait à le taire, j’appor-
terais ici tes précisions nécessaires, mais je
supplierais ceux qui le feraient de bien ré-
fléchir anx conséquences que cela pourrait
entraîner.
» Quel que soit.le mal qu’on a pn me faire,
continue M. Caillanx, si je pouvais rendre la
vie à M. Calmette en l’autorisant à me cou-
vrir de boue, je le ferais de tout coeur. »
Le Réquisitoire de M. Caillaux
contre le “ Figaro ”
Après cette phrase prononcée d’ane voix
vibrante, M. Caillaux s’occupa de la politi-
que financière du Figaro.
Il dit qu’en 1901, lorsque M. Calmette prit
la direction du Figaro, on trouve des grou-
pes financiers allemands.
« Le bulletin financ er dn Figaro ajoute-t-
il, est passé à une Société qni avait nne ma-
jorité d’actionnaires allemands.
M. Caillaux poursuit d'une voix mordante
son réquistoire contre le Figaro. Puis, par- ,
tant des conseils d’administration financiers
qu’on lui reprochait d'avoir présides, il de-
mande aux jurés de l’écouter en bons ci-
toyens et en bons républicains.
De violents murmures s'élèvent dans le
fond de la salle, M. Caillaux se tourbe légè-
rement vers le public et attend que le calme
se rétablisse.
Puis il dît que si des avocats, anciens mi-
nistres ont pu établir nne fortune en plaidant,
ce qui est permis aux membres du barreau
ne saurait être interdit anx financiers.
M. Caillaux s’élève véhémentement contre
une campagne dirigée contre sa femme.
La latte politique, dit-il, a pris pour devi-
se, ia devise « oeil pour oeil, dent pour dent »,
mais au moins que ce soit homme contre
hommq I
M. Caillaux demandmt à être confronté
avec M. Latzarus, rédacteur au Figaro, qui
a parlé de pièces diplomatiques, M. Latzarus
s’étonne qu’après avoir dit combien grave
ponrrait être leur divulgation, on iui deman-
de d’en parier. ...
Et M. Laiwrus parle dq son patron qu'il
aimait et qne, dit-il, M. Caillanx a fait assas-
siner.
Ces paroles provoqnent de violentes pro-
testations an fond de la salle.
Le président a beaucoup de peine à obte-
nir le silence.
M« Chenu déclare que la partie civile n’a
ni les moyens, ni le droit de faire nsage des
denx documents remis an président de la
République, concernant l’affaire franco-ma-
rocaine.
M« Labori dit alors qn’il n’accepte pas qua
la moindre équivoque subsiste.
Il demande au procureur général de dire,
au nom du gouvernement, ou que ces do-
cuments n’ont pas le caractère d'authenti-
cité on qn’ils n’entachent ni le patriotisme,
ni l'honneur de M. Caillaux.
Le procureur général répond en citant la
déclaration de M. Poiacarê faite le 15 mars
1913 à la Chambre, affirmant que tous les
hommes qui ont travaillé à la solation de
l’affaire marocaine ont rempli leur devoir.
M® Labori maintient que l’équivoque per-
siste et il ajoute qu’il ne plaidera pas si ls
procureur général n’apporte pas la déclara-
tion qn’il sollicite.
Des bravos éclatent dans .le fond de la
salle.
Ces documents, dit le procureur général,
étaient des copies.
Le président fait observer qu’il est préfé-
rable de renvoyer à demain la suite de es
grave débat. . .
L’audience est levée à 6 heures 10 au mi«
lieu d’un tumulte inexprimable.
UNE BAGARRE A LISBONNE
LISBONNE. — A l’issue d'une réunion, uns
bagarre s’est produite entre partisans et ad-
versaires de M. Alionso Costa. Des coups dq
feu ont été échangés.
Il y a eu plusieurs blessés.
LA SITUATION EN ALBANIE
DURAZZO. - On annonce que les tronpsi
restées fidèles au gouvernement auraient
chassé les rebelles de Berat ; elles auraient
eu il tués et 36 blessés.
Adminiilratcur • Délégaê- Gérant
O. RANDOLET
UaiilstratiSB. Iipressions it Anaoneas. TEL. 10.41
25, Rue Fontenelle, 85
Adresse Télégraphique : EANDOLET navre
Le Petit Havre
ORGANE RÉPUBLICAIN DÉMOCRATIQUE
Le plus fort Tiragè dçs Journaux de la Région
RÉDACTEUR EN CHEF
tf.-J. CASPAR - JORDAN
Téléphone t 14.SQ
Secrétaire général : TH. VALLÉE
Rédaction, 35, rue Fontenelle - Tél. 7.60
AETV NONC E S
AU HAVRE BUREAU DO JOURNAL, 112, bout* de strasoourg.
( L’AGENCE HAVAS, 8, place de la Bourse, est
A PARIS..; ] seule chargée de recevoir les Annonces pour
( le Journal.
L$ PETIT HA VUE est désigné po»? les Annonces Judiciaires et légales
ABONNEMENTS TROIS Mois Six Mors UN An
: **°
Autres Départements.................... 8 Fr. 11 KO SS »
Union Postale AO » SO Fr. -40 »
On s'abonne également, SANS FHA/S, dans tous les Bureaux de Poste ds France
Questions Législatives
Le Privilège des
Bouilleurs de cru
Dans la séance du 26 juin dernier, une
proposition de loi a été déposée sur le bu-
reau de la Chambre par MM. Georges
Berry, Charles Leboucq, Jules Dansette,
Vandame et Auguste Bouge, relative à la
suppression du privilège des bouilleurs de
cru. Ce privilège est si manifestement l’une
des causes principales du progrès de l’al-
coolisme que la suppression s’en impose.
La part du privilège des bouilleurs dans
les ravages de l’alcoolisme a été si souvent
établie, ,— disent les auteurs de la propo-
sition de loi, — elle résulte avec une si
cruelle évidence des statistiques criminel-
les et médicales, que les défenseurs du «pri-
vilège n’opposent plus, depuis longtemps,
que l'intérêt politique à l’intérêt national,
^intérêt électoral à l’intérêt social.
Et les renseignements recueillis et rap-
pelés par MM. Georges Berry, Charles Le-
boucq et leurs collègues sont, sur ce point,
des plus significatifs.
Alors que, dans les campagnes du Plateau
central et des départements riverains de la
Loire et de la Garonne, la consommation
n’atteint pas deux litres d’eau-de-vie de com-
merce à 40 degrés, par tète d’habitant, elle
dépasse vingt-cinq litres et s’élève jusqu’à
trente-cinq et quarante dans les campa-
gnes normandes et bretonnes. Et c’est ici
que la relation de cause à effet s’accuse
avec une netteté singulière. Car c’est dans
les ressorts judiciaires de Caen, de Rennes
et de Rouen que le pourcentage de la cri-
minalité alcoolique est le plus élevé (de 57
à 63 0/0).
. Le contingent, de beaucoup le plus fort,
de la folie appartient, Paris excepté, à la
Normandie et à la Bretagne. La moyenne
générale des suicides qui est, dans l’ensem-
ble de la France, de 11 pour 100,000 habi-
tants, s’élève à 16 dans l’Eure. Enfin, le
taux de la morbidité tuberculeuse, qui varie
de 2 à 3 0/0 parmi les populations rurales
du Gard et du Gers, dépasse 4 0/0 dans ies
campagnes des départements de ï’Ouest,
pays d’élection vraiment des bouilleurs de
cru. Ajoutez quefcés régions difftord et du
Nord Ouest, qui fournissaient autrefois les
plus beaux soldats et les marins^ les plus
hardis, voient le nombre de conscrits réfor-
més pour tares alcooliques s’élever parfois
jusqu’à 25 et 35 0/0 !
Naguère, disent encore les auteurs de la
proposition de loi, les savants et les hygié-
nistes étaient seuls à s’alarmer du danger
de l’alcoolisme. Aujourd’hui tout le monde
a conscience du péril. Mais les pouvoirs
publics semblent rester indifférents et nul
programme ministériel n’a jamais envisagé
la latte contre l’alcoolisme.
Or si la suppression ou tout au moins la
limitation du privilège des bouilleurs de
cru ne peuvent manquer d’exciter certains
mécontentements, il faut se souvenir que
certains gouvernements : en Angleterre, en
Suisse, dans les pays Scandinaves, en Rus-
sie, aux Etats Unis, ont bravé bien d’au-
tres colères dans leurs luttes contre l’al-
coolisme fil faut se souvenir aussi que la
loi du 30 mars 1903, qui avait supprimé le
privilège, allait triompher des dernières
résistances quand elle fut abrogée par la
loi du 14 avril 1906.
Et puis, l’intérêt de nos finances est ici
d’accord avec l’intérêt de la santé publique
pt le souci de l’avenir de la race. Cet argu-
ment « financier » n’est pas à négliger par
le tëmps qui court. Si la loi ne devait com-
porter aucune exception à la règle que
« nul ne peut, sans déclaration, se livrer à
la fabrication des eaux-de-vie », si tous
les propriétaires d’alambics étaient soumis
à l’exercice et toutes les -eaux-de-vie au
droit de consommation, — de ce fait, le
Trésor bénéficierait d’une recette de 100
millions par an.
Ce qui est certain, c’est que la réglemen-
tation du privilège, telle qu’elle résultait
de la loi du 31 mars 1903, a assuré, pendant
son application, une perception supplé-
mentaire de 30 millions de francs qui
étaient bien loin de représenter la totalité
de la production qui aurait dû payer l’im-
pôt. Et pour ce qui est des allocations en
franchise — 20 litres d’alcool pur par récol-
tant et 50 litres, mais dispensés seulement
d’exercice, pour les petits bouilleurs, —
elles se sont appliquées au cours de la cam-
pagne 1904 1905, à plus de 101.000 hecto-
litres représentant, en chiffres ronds, 42
millions de francs.
Gomme la plupart de nos lois fiscales
comportent des dégrèvements à la base, et
comme il y aurait, d’autre part, une im-
possibilité matérielle à exercer les milliers
de petits bouilleurs qui consomment eux-
mêmes leurs produits et ne pratiquent pas
la fraude, MM. Georges Berry, Charles
Leboucq, Dansette, Vandame et Bouge ne
proposent pas la suppression radicale et
absolue du privilège. Ils demandent seule-
ment le' retour à la loi du 30 mars 1903,
abrogée en 1906 en fin de législature, loi
dont le texte est d’ailleurs analogue aux
lois des principaux pays étrangers sur les
distilleries de fruits et de vins.
Les plus sérieux, les plus solides argu-
ments militent en faveur de cette proposi-
tion de loi, aussi faut-il espérer que le
Parlement lui fera bon accueil à la rentrée.
TH. VALLÉE.
La Crise de TUlster
LS CONFÉRENCE ROYALE
A la Chambre des Commîmes
La crise actuelle compte parmi les pins
sérieuses de Tbistôire de l'Angleterre, et
dansé*» milieux politiques autorisé*, on ta
Considère comme un des pins graves évé-
nements contemporains.
Bien avant trois heures, moment où de-
vait s’onvrir, lundi, la séance de la Chambre
dès Communes, le public stationne sur les
trottoirs situés près du palais, afin de voir
arriver les ministres et les députés.
La Chambre est très animée et les bancs
sont tons occupés. M. Asquith dit qn’il a été
autorisé par ie roi à annoncer qu’en raison
de la gravité de la situation, le souverain a
cru devoir provoquer une conférence de re-
présentants de tons les partis, anglais et ir-
landais, afin de diseuter les questions qui
n’ont pu être réglées en ce qui concerne l’Ir-
lande.
L’invitation a été acceptée par les répré-
sentants de i’oppositioD, del’Ulster, des par-
tis nationalistes et dn gouvernement. Selon
la décision du roi, le speaker de ia Chambre
des communes présidera cette conférence.
A la Chambre des Lords
Lord Courtney a soulevé à la Chambre des
Lords, à propos de la conférence du Palais
de Buckingham, une question de droit cons-
titutionnel. li demande ce que deviennent la
responsabilité ministérielle et l'amorité du
Parlement.
Lord Crewe répond que la conférence dn
Palais de Buckingham ne porte pas atteinte à
la pratique constitutionnelle, étant données
les circonstances actuelles et l’importance su-
prême dçs questions en jeu. Il n’est pas et il
ne saurait être nullement question de sup-
planter l’autorité du Parlement et la confé-
rence n’aura pas ce résultat.
Le Président de la Répsliiips
EN REMIE
U, Poincaré à Saint-Pétersbourg
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
Aujourd’hui, c’est la journée de la capitale
russe..Elle s'est mise en frais pour faire au
chef de 1 Etat ami et allié i’accueil le plus
brillant et le plus chaleureux. Bien avant
l’heure de l’arrivée de M. Poincaré, du mi-
nistre Viviani et des autres hôtes français, le
quai Anglais où , ils doivent débarquer est
couvert d’une fonte épaisse, une de ces fou-
ies russes, d’une inlassable patience, d’une
gaieté douce, presque immobile, jusqu'au
moment où se montre le personnage at-
tendu.
Alors sa température monte brusquement
d’un nombre considérable de degrés : c'est
la plus joyeuse exultation.
Le yacht impérial Alexandria a quitté Pe-
terhof à il h. 15. Il accoste au majestueux
quai de granit qui est une des curiosités les
plus imposantes de la capitale, quelques mi-
nutes avant une heure.
Le comte Tolstoï, maire de Saint-Péters-
bourg, avec une délégation du Conseil com-
posée du président et de deux conseillers,
souhaite la bienvenue an président en lui
présentant, selon l’antique coutume russe,
ie paiu et le sel sur un plateau richement
orné de ciselares.
Après l'échange de compliments, le cortè-
ge présidentiel, escorté de cosaques du cor-
tège de l’empereur, en tuniques rouges — la
grande tenue — se r< n i par les quais, et en
traversant le pont Troîuki, dont la première
pierre fut posée par Félix Faure, à la forte-
resse Pierre-et-Panl dont les murs d’enceinte
baignent dans la Neva juste en face dn pa-
lais o’Hiver.
C’est dans l’église de la forteresse que sa
trouvent les tombeaux de la famille impé-
riale, tous uniformes, tous simples dans la
rigidité de leur revêtement de marbre gris.
Des couronnes, beaucoup de couronnes r
couvrent celui de l’empereur Alexandre III
et sont déposées tout à l’entour. Quelques-
unes ont des inscriptions françaises, il y a
ià les palmes envoyées par nos Chambres,
lors des funérailles du tsar défunt, et aussi
celles que les présidents Faure et Loubet ap-
portèrent avec eux.
M. Poincaré dépose à son tour nne magni-
fique palme eu argent sur la pierre funérai-
re an miliea d’un silence profond qni té-
moigne qu’un souvenir ému est adressé à
ce moment an premier des tsars qui ont
vonlu l’alliance, fidèlement maintenue de-
puis an quart de siècle, et proclamée hier à
nouveau.
Le tsar et H. Poincaré
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
L’empereur est venu, à dix heures et de-
mie, rendre visite au président de la Répu-
blique, avec lequel il est resté longtemps en
tête-à iête : tes aéùx cltels d’Etat ont repris"
la conversation prolongée qu’ils avaient eue
hier après-midi à bord du yacht Alexandra ;
ils ont examiné toutes les questions exté-
rieures intéressant ia France et la Russie, et
ils se sont mis d’accord pour établir nne
action concordante des deux pays dans la
politique générale européenne. — (Havas.)
M. Viviani et M. Sazonof
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
Dès les premières heures de la matinée,
M Viviani a reçu MM. Sazonof, ministre des
affaires étrangères de Russie, Isvolski, am-
bassadeur de Russie à Paris, le baron de
Schilling, directeur de la Chancellerie, avec
qui il a eu un long entretien, auquel assistait
M. de Margerie. — (Havas.)
M. Poincaré reçoit la Colonie française
Saint-Pétersbourg, 21 juillet.
M. Paléologue, ambassadeur de France,
en présentant à M. Poincaré les membres
de la colonie française, dit que dans aucune
province de notre vieille France, le prési-
dent de la République ne rencontrera de
meilleurs français que ceux qui sont devant
lui.
M. Poincaré répond qu’il sait que les Fran-
çais habitant ia Russie n’ont jamais cessé
d’y donner ie bel exemple de l'activité, de
l’intelligence et du patriotisme. Ils compren-
nent qu’ils ont assumé auprès delà grande
nation amie et alliée, une très haute, une
très noble mission : Ils sont chargés de re-
présenter à ses yeux notre génie national.
le Tamponnemcml
près de Toulouse
Sept NM or lu. — Trente Bleuté»
Un grave accident de chemin de fer s’est
produit à six kilomètres de Toulouse, à l’in-
tersection des ligues de Bayonne et d’Auch,
tout près du pont d'Empalot. L’express de
Bayonne a tamponné les dernières voitures
du train d'Anch qni était arrêté à la bifurca-
tion. Quatre wagons dn train tamponné ont
été brisés, et i’on a à déplorer la mort de
sept voyageurs. Il y aurait, d'après les der-
niers renseignements communiqués, une
trentaine de personnes blessées, dont plu-
sieurs fort grièvement.
Lus premiers secours n’ont pu être orga-
nisés qu’assez difficilement, en raison de
l’eioigoement du lieu de la catastrophe de
toute habitation. Cependant deux compa-
gnies du 14» de ligne et les pompiers de Tou-
louse ne tardèrent pas à arriver pour coopé-
rer au sauvetage Les blessés furent dirigés
soit sur l’hôpital de Toulouse, par un train
de secours, soit sur l’hospica des aliénés de
Braqueville, près du village de la Four-
è nette.
On a retiré des décombres les cadavres de
quatre hommes, dont deux soldats dn
14» d’infanterie, de deux femmes et d’une
fillette.
L’çnquête aurait établi que le mécanicien
de l’express de Bayonne, ayant cru voir les
disques ouverts, les franchit sans s'aperce-
voir qu’un peu plus loin ie sémaphore était
ferme. Il ne put bloquer ses freins à temps
et éviter la catastrophe.
Le train de Bayonne était conduit par le
mécanicien Jean Bart âgé de 47.ans, demeu-
rant à Toulouse. M. Jean Bart a déclaré :
« J’étais couvert par ie disque, aucun signal
ne me disant de m’arrêter. Je continuai ma
rpnte quand, au détour de la voie, j’ai aperça
an train arrêté devant moi. J’ai renversé ia
vapeur^ j’ai bloqué les freins : trop tard, ie
mal était fait. »
M. Jean Bart, ni son chauffeur, n’ont en de
mai.
M. Yiguié, mécanicien dn train d’Anch,
dit :
«. J'étais arrêté, car les signaux, placés de-
vant moi, entre tes deux ponts, me prescri-
vaient de ne pas aller plus lo|n ; tout d’un
coup le train de Bayonne est arrivé et nous
a tamponnés sans que je puisse m’expliquer
la chose. Je n’ai pas quitté la machine. Nons
avons reçu un choc terrible mais je n’ai pas
été renversé et n’ai pas de mal. »
La Compagnie dn Midi communique au
sujet dé c-ït accident la note suivante :
Le train 510, allant de Bayonne & Toulou-
se, a tamponné, à la bifurcation d’Ëuipaiot,
à 6 kilomètres de Toulouse, le train 456, ve-
nant d’Auch.
Sept voyageurs orit été itfés et vingt-nuit
environ blessés.
La circulation est actuellement rétablie,
■a»
Ulivi est retrouvé
Sa fuite prend maintenant les proportions
d’un événement national. Les plus grands
savants italiens ont été consultés an sujet
des expériences qui devaint révolutionner
l’art de la guerre.
Ulivi et Maria Fornari, pendant qn’en Ita-
lie on discute leur découverte, voguent à
l’heure actuelle,sur les côes autrichiennes.
Ils se sont embarqués sur le Graf-Wurm-
brand, où un journaliste a pu les inter-
viewer.
— Mon départ de Florence^ a dit Ulivi, ne
doit pas être interprète contre mon inven-
tion, dans laquelle j’ai toujours pleine con-
fiance. Je suis parti parce que l’échec possi-
ble de mes expériences pouvait retarder
mon union.
— Est-il vrai que vous aviez introduit du
sodium dans vos bombes d’essai ?
— Jamais de la vie, proteste-t-il. Ces bom-
bes n'avaient rien de particulier. Elles ne
contenaient ni sodium, ni mouvement d’hor-
logerie, ni coton poudre. On le verra plus
tard ..
Mais qu’importe, ajoute-t-il, je quitte l’Ita-
lie, car je ne veux pas qu’Angela-Maria For-
uari, contre sa volonté, soit ravie à mon
amour.
L’AFFAIRE CALMETTE
P Caillii (M les Assises
DEUXIÈME AUDIENCE
Les témoignages des Employés et des Rédacteurs du “ Figaro ’V
Déposition de M. Paul Bourget. — M. Caillaux à la barre.
L’audience est levée au milieu du tumulte.
IMPRESSIONS D’AUDIENCE
Paris, 21 juillet.
La seconde journée dn drame qni se
déroule actuellement an Palais de Justice
n’a pas attiré nn nombreux public. Lé Tout-
Paris est au bord de la mer où à la monta-
gne. D’ailleurs le premier jour n’a rien ap-
pris que l’on ne sut depuis longtemps. Le
point mystérieux est de préciser ce qu’à pu
être l’entrevue de Çaston Calmette et de
Mme Caillanx. A-t-elle tiré sur lui ex-abrupto
ont ils eu d’abord nne conversation qne
Mme Caillanx ne veut pas dire ?
Le système de défense de l’accusée est de
nier la préméditation. Elle le tait avec nne
énergioet nne lucidité que ne laisseraient
pas soupçonner son alinre placide, sa phy-
sionomie résignée et presque insignifiante.
À l’entendre répondre d’an ton sec, près- 1
que autoritaire, il me souvient de certaine .
après-midi officielle, où, assis près d’elle, je
pensais bénévolement que cette femme du
plus trépidant et du plus nerveux des hom-
mes d’Etat, faisait avec son époux le con-
traste ie plus complet. Bourgeoise, elle l’était
selon son propre aveu, mais bourgeoise ti-
mide et presque effarouchée, sans an mot,
sans an geste, comme écrasée dn rôle qu’el-
le jouait de par la situation de son mari.
On ne pouvait se douter de la tempête qui
liouleversait ce cerveau. Mais avec les fem-
mes tout est surprise. Alphonse Daudet nous
a conté, dans son admirable Sapho, l’histoire
de cette petite amonrense qui, chaque jour,
disait placidement à son ami ;
. -ySi ta m’abandonne», je me jeterai par
la fenêtre.
Elle sé jeta par la fenêtre.
Mme Caillanx nous parait être de cette
race. A son mari qni pariait de représailles
violentes, elle répondait : Ce sera moi.
Cependant, les témoins viennent raconter
l’histoire qne les joarnanx ont ressassée cent
lois. Mme Caillanx les écoute dédaigneuse-
ment. Elle a remis le col blanc qne son dé-
fensear loi avait fait enlever hier. Il v&ât
mieux indisposer les jarës par trop d’élé-
gance que leur déplaire par trop.de laisser-
aller. Décidément, Mme Caillaux est plus
psychologue que M« Labori.
Après le défilé sans intérêt des garçons de
bureau, M. Paul Bourget dépose à son tour.
Il raconte comment, Gaston Calmette lai
montrant la carte ds visite de ia femme dn
ministre des finances, il eut un geste de sur-
prise :
— Vous n’allez pas le recevoir T deman-
da-t-il.
Le récit qn’il fait de cette minute précise
est angoissant. Il serre la main d’an ami, an
peu intrigué de ce que cette femme puisse
lai dire. Il ne devait pins le revoir. Il suffit
de peu de choses pour anéantir nn homme
jeune, robuste, exhubérant de santé.
La chaleur est étouffante à ce moment de
ia jonrnée. Le président Albanel s'éponge le
front arec gravité. Seule Mme Caillanx ne
semble pas souffrir de l’excessive tempéra-
ture. La psychologie de cette petite bour-
geoise commence à transparaître rien
que par sou altitude. Elle est ia femme
du chef du parti républicain de France, elle
l’a dit. Elle est tonjours Mme Caillaux mal-
gré la détention à Saint-Lazare et la Conr
d’Assises. Son mari a gouverné la France, il
la gouvernera encore.
Le défilé des rédactenrs du Figaro n’ap-
porte rien non pins an débat. Us racontent
simplement ce qu’ils ont vu. Mais à la re-
prise, nn mouvement se produit. Voici M.
Caillaux à la barre. 11 est très rouge, très
agité. Tout à l'heure il fumait cigarettes sur
cigarettes, se promenant au bras de M. Cec-
caldi. Maintenant il parie, il parle saccadé,
trépidant. Décidément, son nervosisme, son
émotion plaisent mieux dans les circonstaa.
ces tragiques qne le sang-froid imperturba-
ble de i’acensée. Mi Caillaux raconte, Int
aussi, sa rie intime, ses angoisses, comment
il écrivit les lettres publiées par le Figaro.
Lorsque M. Caillanx parle de son affection
ponr sa femme, dn bonheur dans lequel ils
ont réen et de l’intimité fature à laquelle il
rêve, Mme Caillaux éclate en sanglots. L’as-
sistance éprouve an certain malaise.
M. Caillanx, pen à peu, sarnionte son
émotion. Sa voix nn pen enrouée mai!
nette martèle les phrases. Il défend mainte-
nant et sa vie privée et sa vie politique,
comme si an interpellateur l’avait amené à
la tribune de ia Chambre. Il prend tout le
reste de i’andience et parait un pen long,
emporté par son sujet. A plusieurs reprises
l’auditoire donne des signes de fatigne.
De vifs incidents ont fait passer la somno-
lence du public lorsque M. Caillaux s’est
explique arec M. Latzarus sur les documents
sécrets qne Calmette avait en, sa possession.
Ils ont secoué l’auditoire et causé nne alter-
cation entre l’ancien président du Conseil,
M. Latzirus et les deux avocats, M8S Chenu
et Labori. Le public a manifesté pour et con-
tre et l’audience a été levée an miliea d’ans
animation considérable.
; ■ \ T. H.
Les assistants sont pins nombreux qu%#
n’étaient la veille. Lès dames sont moins ra-
res. Dans l’auditoire, on voit poindre des
plumes ronges et blanches.
Aujourd'hui, on entend tes témoins du
drame.
LES TÉMOIGNAGES
Le Garçon de Recettes Sirac
M. Adrien Sirac, garçon de recettes an Fi-
garo, introduisit Mme Caillaux dans le cabi-
net de M. Gaston Calmette et allnma, en ap-
puyant sur un bouton électrique, les lampes
ae la cheminée.
Ce fut lui qui accourut le premier. Quand
on entendît les coups de fen, Mme Caillanx
était debout. M. Gaston Calmette s’était
baissé derrière son bnrean.
Répondant à des questions qui sont posées
par Mes Chenu, Seligman et Labori, ie témoin
affirme que la pièce où se produisit le drame
n’était pas dans nne 'emi-obscurité. M. Gas-
ton Calmette avait, dit-il, allumé lui-même
les deux lampes de sou bureau.
Dernière Heure
PARIS, TROIS HEURES MATIN
5 DEPECHES COMMERCIALES
> - -
METAUX
f LONDRES, SI Juillet. Dépêche de 4 h. 30
TON COURS HAUSSE BAISSE
| Cil VUE
'Comptant.. SQ t £60 10/- -/- 10/-
:3 mois;.... *60 17/6 -/- 11/3
, ETAIN
Comptant 1 143 8/- -/- 60/-
8 mois J ,rr6Su1’ 1 144 10/- -/- 60/-
FER
Comptant.. ealme 61/3 -/- * d
8 mois 81/7 y% 1 d -/-
Prix comparés avec ceux de la deuxième Bourse
du 20 juillet 1*14.
NEW-YORK, 21 JUILLET
Cotonn t juillet, inchangé; août, in-
changé ; octobre, baisse 1 point ; janvier,
baisse 3 points. — Soutenu.
(ialéa t hausse 7 à 11 points.
NEW-YORK, 21 JUILLET
. n nn t. ritcnir
Cuivre Standard disp. 13 37 13 25
— septembre.... 13 37 13 40
Ainalyauiat. lop... 69 5 8 69 »
Fer 14 75 14 75
CHICAGO. 21 JUILLET
C. DD JOUR • C. P R F,CEI)
Blé sur Septembre 79 7/8 79 »/»
’ — Décembre 82 3 4 82 »/»
Mais snr Septembre 67 7/8 67 3/8
— Décembre 66 7/8 66 3 8
Stindoui sur. Septembre 1015 1012
. - Octobre.. 1815 10 26
LE VOYAGE
fin Président de la République
EN RUSSIE
Une promenade dans Saint-Pétersbourg
SAINT PÉTERSBOURG. — A 4 heures, le prési-
dent de la République fait en voiture une
promenade à travers les rues principales de
Saint-Pétersbourg.
De la perspective Newsky à la Morskaya,
une foufe compacte pousse de retentissantes
acclamations en agitant des mouchoirs.
M. Poincaré gagne le Paiais d’Hiver dont
les honneurs lui sont faits par les hauts
fonctionnaires attachés au Palais.
Dans un des salons, M. Poincaré reçoit in-
dividuellement les membres du corps diplo-
matique accrédités à Saint-Pétersbourg, puis
est introduite une délégation de la noblesse
de Saint Pétersbourg.
Le maréchal Somof dit qne la noblesse
considère que l’alliance est solide parce
qu’elle est fondée snr la sympathie des deux
peuples et que toutes les classes de la Société
y sont sincèrement attachées.
M. Poincaré répond en remerciant la no-
blesse des sentiments qu’elle manifeste en-
vers la France.
Le président reçoit ensuite nne délégation
de la Douma municipale.
La maire de Saint-Pétersbourg prononce
quelques paroles et M. Poincaré lui répond
en disant qu’il emportera de son voyage an
souvenir ineffaçable.
Des délégations de Zemtvos remettent à
M. Poincaré des adresses contenues dans de
riches' reliures avec de magnifiques incrus-
tations.
A 6 heures, le président va visiter l’hôpital
français.
La population ouvrière fait, dans les rues,
uu chaleureux accueil à M. Poincaré.
Le Dîner à l’Ambassade de France
SAINT PÉTERSBOURG.— Le président rentre
à l’ambassade de France où il donne un
dîner de 86 couverts eu i’honnenr des mi-
nistres russes, des hauts personnages de ia
Cour et des présidents des sociétés françaises
de bienfaisance de Saint-Pétersbourg.
M. Poincaré a fait remettre an maire de
Saint-Pétersbourg, nne somme de cinquante
mille francs pour être distribuée aux pau-
vres de la capitale.
Banquet en l’honneur de l’Amiral Lebrïs
A l'Hôtel de Ville a eu lieu à 8 heures nn
banquet de denx cents couverts donné en
l’honneur de l’amiral Lebris et des officiera
de l’escadre.
Des toasts cordiaux ont été échangés.
Vers 10 h. 40, le président de la Républi-
que est venu à l’Hôtel de Ville. Une foule
énorme, massée aux abords, lui a fait de
chaudes ovations.
M. Poincaré, après avoir assisté à nn con-
cert de musique russe, a quitté l’Hôtel de
Ville, toujours très acclamé, et à il h. 1/2 il
s'est embarqué sur le yacht Alexandra pour
rentrer à PeterhoL
MORT TRAGIQUE DE
MADAME DE CASTELLA
BRUXELLES. — Un terrible accident s'est
proauit hier à six heures au meeting d’avia-
tion de Stoeckel.
Mme Cayat de Castella avait été enlevée
sous le biplan de l'aviateur français Cham-
pel ponr renouveler l’expérience de para-
chute qu’elle avait déjà réussie, on s’en sou-
vient, à plusieurs reprises.
A 600 mètres de hauteur, le parachute fut
lâché, mais il ne se déploya pas et la mal
henreuse jeune femme vint s’écraser snr le
sol.
La mort a été instantanée..
LMÂfRE_CÂLMEÎTS
Fin de la déposition de M. Caillaux
A 4 h. 50, l’audience est reprise.
M. Caillaux aborde l'historiqne de ia cam-
pagne du Figaro.
On visait, dit-il, l’homme qui voulait l’im-
pôt sur Je revenu et ponr atteindre l’homme
que l'on voulait abattre, tous les moyeus ont
été bons.
La campagne commença par l’affaire Prieu
qui est un conte à dormir debout.
M. CaDlaux passe en revue toutes les at-
taques dirigées contre lui.
On m’a, d-t-il, accasé de forfaiture dans
i’affaire Rochette et de trahison dans le traité
franco allemand. Eh bien t nons sommes de
simples bourgeois; nous n’avons pas de bla-
son, mais nous défendons notre honneur,
notre honorabilité.
« C’est toute cette boue qui lui a troublé
l’esprit, s'écrie M. Caillaux en se tournant
vers sa femme t »
Celle-ci, ie visage caché dans son mouchoir,
fait des signes d’assentiment.
M. Caillanx estime que la remise de l’af-
faire Rochette était une mesure utile dont il
n'hésiterait pas à prendre encore la respon-
sabilité. A aucun moment, la publication du
rapport Fabre n’inqnieta ni lui,ni sa iemme.
M. Caillaux dit qu'il offre à la Cour et aux
jures, tous les éléments propres à leur mon-
t> er qu’il ne reste nen de toutes les attaques
dont il fut l’objet.
Parlant des négociations franco-alleman-
des, M. Caillaux dit :
« Dans ces négociations, j’ai mis nn dou-
ble souci : lé souci que la France mit défi-
nitivement sa marque sur le grand empire
marocain ; le second souci est que tout au
long de ma vie poli ique, je voulais ia paix,
la paix dans la démocratie.
» Qu’on discuta mon oeuvre au point de
vue politique, rien de pins naturel, mais
qu’on vienne jeter ia bone contre moi, c’est
contre cet* que je me lève avec la fiornicre
. énergie.
» J’ai sn qu’on avait voulu au Figaro pu-
blier certaines pièces diplomatiques.
» J’aurai peut-être a en parier toat à
l’heure. Si on m’obligeait à le taire, j’appor-
terais ici tes précisions nécessaires, mais je
supplierais ceux qui le feraient de bien ré-
fléchir anx conséquences que cela pourrait
entraîner.
» Quel que soit.le mal qu’on a pn me faire,
continue M. Caillanx, si je pouvais rendre la
vie à M. Calmette en l’autorisant à me cou-
vrir de boue, je le ferais de tout coeur. »
Le Réquisitoire de M. Caillaux
contre le “ Figaro ”
Après cette phrase prononcée d’ane voix
vibrante, M. Caillaux s’occupa de la politi-
que financière du Figaro.
Il dit qu’en 1901, lorsque M. Calmette prit
la direction du Figaro, on trouve des grou-
pes financiers allemands.
« Le bulletin financ er dn Figaro ajoute-t-
il, est passé à une Société qni avait nne ma-
jorité d’actionnaires allemands.
M. Caillaux poursuit d'une voix mordante
son réquistoire contre le Figaro. Puis, par- ,
tant des conseils d’administration financiers
qu’on lui reprochait d'avoir présides, il de-
mande aux jurés de l’écouter en bons ci-
toyens et en bons républicains.
De violents murmures s'élèvent dans le
fond de la salle, M. Caillaux se tourbe légè-
rement vers le public et attend que le calme
se rétablisse.
Puis il dît que si des avocats, anciens mi-
nistres ont pu établir nne fortune en plaidant,
ce qui est permis aux membres du barreau
ne saurait être interdit anx financiers.
M. Caillaux s’élève véhémentement contre
une campagne dirigée contre sa femme.
La latte politique, dit-il, a pris pour devi-
se, ia devise « oeil pour oeil, dent pour dent »,
mais au moins que ce soit homme contre
hommq I
M. Caillaux demandmt à être confronté
avec M. Latzarus, rédacteur au Figaro, qui
a parlé de pièces diplomatiques, M. Latzarus
s’étonne qu’après avoir dit combien grave
ponrrait être leur divulgation, on iui deman-
de d’en parier. ...
Et M. Laiwrus parle dq son patron qu'il
aimait et qne, dit-il, M. Caillanx a fait assas-
siner.
Ces paroles provoqnent de violentes pro-
testations an fond de la salle.
Le président a beaucoup de peine à obte-
nir le silence.
M« Chenu déclare que la partie civile n’a
ni les moyens, ni le droit de faire nsage des
denx documents remis an président de la
République, concernant l’affaire franco-ma-
rocaine.
M« Labori dit alors qn’il n’accepte pas qua
la moindre équivoque subsiste.
Il demande au procureur général de dire,
au nom du gouvernement, ou que ces do-
cuments n’ont pas le caractère d'authenti-
cité on qn’ils n’entachent ni le patriotisme,
ni l'honneur de M. Caillaux.
Le procureur général répond en citant la
déclaration de M. Poiacarê faite le 15 mars
1913 à la Chambre, affirmant que tous les
hommes qui ont travaillé à la solation de
l’affaire marocaine ont rempli leur devoir.
M® Labori maintient que l’équivoque per-
siste et il ajoute qu’il ne plaidera pas si ls
procureur général n’apporte pas la déclara-
tion qn’il sollicite.
Des bravos éclatent dans .le fond de la
salle.
Ces documents, dit le procureur général,
étaient des copies.
Le président fait observer qu’il est préfé-
rable de renvoyer à demain la suite de es
grave débat. . .
L’audience est levée à 6 heures 10 au mi«
lieu d’un tumulte inexprimable.
UNE BAGARRE A LISBONNE
LISBONNE. — A l’issue d'une réunion, uns
bagarre s’est produite entre partisans et ad-
versaires de M. Alionso Costa. Des coups dq
feu ont été échangés.
Il y a eu plusieurs blessés.
LA SITUATION EN ALBANIE
DURAZZO. - On annonce que les tronpsi
restées fidèles au gouvernement auraient
chassé les rebelles de Berat ; elles auraient
eu il tués et 36 blessés.
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.57%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.57%.
- Auteurs similaires Fénoux Hippolyte Fénoux Hippolyte /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Fénoux Hippolyte" or dc.contributor adj "Fénoux Hippolyte")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/6
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k1722035/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k1722035/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k1722035/f1.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k1722035
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://nutrisco-patrimoine.lehavre.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k1722035
Facebook
Twitter