* Westminster à lui seul rachète tout cela : allons à West- minster !
Ce n'est plus là un temple dans le goût moderne, un échan- tillon de ce style bâtard plus ou moins imité de la Grèce et de Rome, une de ces constructions peu en harmonie avec la sévé- rité du culte chrétien ou avec la rudesse de nos climats du Nord, froids et brumeux. J'avais devant moi une église du Moyen-Age, noircie par les années et par les brouillards, rem- plie de tristes et glorieux souvenirs, environnée de pierres fu- néraires, pavée de centaines de tombes qui renferment les cendres les plus illustres de l'Angleterre, ennoblie parle sacre et la sépulture des rois, leur premier trône et leur dernière de- meure. Et cette vieille abbatiale m'apparaissait non loin de la Tamise (le Parlement seul l'en sépare), et elle m'apparaissait toute enveloppée de son antique majesté, avec ses porches en tiers-point, ses portails délicatement travaillés, ses hautes fe- nêtres étroites, ses solides contreforts servant d'appuis à de fiers arcs-boutants, ses clochetons élancés, ses pinacles, ses tourelles, je ne parle pas de ses tours détruites par la foudre.
On les a rebâties, ou plutôt remaçonnées en un style hideux qui a la prétention d'être à la fois grec et ogival et qui n'est ni l'un ni l'autre, triste couronnement d'une si belle œuvre !
Ce n'est pas le seul défaut de la vieille église : elle manque d'unité. On peut retrouver dans ses différentes parties des modèles de presque toutes les phases de l'architecture anglaise pendant le Moyen-Age, depuis les lourds piliers normands érigés sous les successeurs immédiats du Conquérant jusqu'aux élégantes colonnettes du XIIe et du xiv° siècle, jusqu'aux ner- vures prismatiques et aux ornements si finement taillés, découpés, déchiquetés, enroulés, chargés de fleurs et de devises, à la mode sous Henri VII et Elizabeth. En un mot, on retrouve dans Westminster l'art chrétien tout entier, comme chez nous dans la cathédrale de Bayeux.
Ces merveilles architecturales ne sont pas tout ce qui reste de cette célèbre abbaye, dont l'abbé était un des plus riches commandataires du royaume. A son ombre s'élèvent encore
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