Titre : Le Travailleur normand havrais : paraissant le dimanche
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Rouen)
Date d'édition : 1900-12-23
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32880313v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 23 décembre 1900 23 décembre 1900
Description : 1900/12/23 (A10,N514). 1900/12/23 (A10,N514).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG14 Collection numérique : BIPFPIG14
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Description : Collection numérique : Fonds régional :... Collection numérique : Fonds régional : Haute-Normandie
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Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k63930166
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-90656, JO-90677
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
Dixième Aonét K? 814 Ee Numéro t ClNt GintinM* Dimanche 33 Décembre 1900
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partoments limitrophes 4fr, »
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SIX MOIS
Seine-Itlférieurt-, Eure et
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Autres départements..,. 2 fr.75
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'avance et se font à partir du
lel!.et 10 de chaque mois.
,. u mmum Mmm
HAVBAIS
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PARAISSANT La RIIiARGKIl
ÎJiî-PTt^n^n
Annonces t-v. o -1
Aiie d'inh rtiHtldL - ir
clames. - 2 fr. »
JMIftction t Admaittratm s,
ROUEN
Quai de Paris, 23
BUREAUX AU BAva.
ii, Rue de Paris, il
Les abonnements se paient à
l'avance et se font à parlir du lnf ot
10 de chaque mois.
SEMAINE POLITIQUE
L'amnistie. Déroulède et les
ABsotaptionnistes* Le mi.
niatère Dreyfus. Le mi-
crobe nationaliste.
L'amnistie ne satisfait absolument per-
sonne, on la vote toutefois et l'on fait
bien.
En soi, comme elle est une mesure de
réconciliation et d'oubli, elle devrait être
plénière, afin que les frères enuemis pus-
sent s'embrasser ; mais elle est surtout
un acte politique et pour en déterminer
l'étendue on envisage moins ce qu'elle
devrait être que ce qu'elle devra pro-
duire. -
Fût-elle même complète, applicable à
tous, elle atténuerait les rancunes et r es
griefs respectifs sans les faire disparaî-
tre complètement.
Chaque parti considère que pour les
s;ena elle est une mesure de justice, une
réparation plutôt tardive et que pour les
adversaires elle constitue uae générosité,
une concession, presque un acte de fai-
blesse auquel on n'a pu se résoudre qu'à
re«rçt,
C'est pourquoi le parti Dreyfusard mi*
litant _, ne peut se consoler que Mercier,du
Paty et tutti quant soient désormais, à
l'abri des recherches de la justice.
Et par là même raison les anti Hreyfu
sards irrédustibles no peuvent pardon-
ner au gouvernement une mesure qui
éteint les procès contre Reinach ; le co-
lopel Picquart de son côté se plalnt de ne
plus pouvoir aussi facilement se JUAIi.
fier.
Mais si les combattadts sont ainsi de
part et d'autre' mécontenté, les neutres
nui sont la masse 4e la nation ne peuvent
que se féliciter du vote 4e l'amnistie-
Il faUait en finir définitivement avec
l'agitation et le meilleur moyen était de
-lui enterçr tout prétexte en -dtèlaraD\
inexistants, jfour ainsi dfre, au point de
yqe rênl, les actes dont Ue IQfAlL pu
11empnrelJ,
Certaines objections qui frappent les
pslitlolene, qui pourraient aussi inquiéter
les philosophes épris d'idéal ne touche-
ront fufepp les gens pratiques qui veulent
travailler en p*bç.
Oomment, disent les nationalistes et la
droite monarchiste ou méliuiste, vous
excluez de l'amnistie les condamnés de
la Haute-Cour et les congrégauistes non
autorisés, tandis que, par contre, vons y
comprenez les bandits anarchistes qui
, ont pillé Saint-Joseph,
pt s'empapant d'un mot attribué-au
Président du Conseil, qui aurait dit :
a L'amnistie n'est pas faite pour les en-
nemis de la République, » ils concluent
que les anarchistes sont les amis du
gouvernement, ou plutôt, car ils préfè-
rent cette formule, que le gouvernement
est l'ajpl des anarchistes.
A vrai dire, les gaillards qui avaient
pillé Saint-Joseph ne nous paraissent pas
du tQqt intéressants et nous n'avons
pour l'amendement Sembat, qui leur vaut
l'amnistie, qu'une admiration tout-à-fait
mince.
Il est certain que si des jésuites ou des
dominicains avaient, par eux-mêmes ou
par des bandes stipendiées, pillé ou fait
piller un temple protestant ou une syna-
gogue, tout le parti républicain se se-
rait refusé à les amnistier.
En quoi des anarchistes, poussés par
une intolérance sectaire et haineuse de
tout esprit religieux, sont-ils plus inté-
ressants ?
Toutefois, si au lieu d'envisager la
gravité morale de l'acte, on envisage ses
conséquences politiques, on peut com-
prendre les raisons qui ont déterminé la
Chambre.
On ne peut pas soutenir que les églises
soient sérieusement menacées par les
anarchistes ; sur trente mille monuments
consacrés en France au culte catholique,
il y en a un qui a été dévasté par une
bande d'énergumènes, c'est un fait isolé,
sans lendemain, et si la religion catholi-
que ne subissait pas d'autres attaques,
ses représentants s'estimearient trop heu-
reux.
Au contraire, le fait de Déroulède et de
ses complices qui voulaient recourir à
la force pour renverser la République,
aurait eu, s'il avpit réussi, des consé-
quences incalculables ; il noue ramenait,
par la courte transition, de Ut république
Ire, an régime impérial, c'est-
à-dire à la tyrannie intérieure et à la
guerre extérieure. Or, ils proclament
qu'ils recommenceront leur tentative.
Quant aux Congrégations non autori-
sées, la sitation est très simple.
D'abord les csndatnnations exceptées
de l'amnistie sont des peipes d'amende,
généralement mitigées par la loi Béren-
ger.
Au surplus, les congrégations sont plus
de 1500 ; sur ce nombre, une centaine à
peine se sont fait reconnaître comme
charitables, pour être dégrevées du
droit d'abonnement.
Or les 1400 congrégations non charita-
bles et dont les membres ne travaillent
pas s'enrichissent par l'accumulation des
dons et des legs.
Celte situation avait été formellement
abolie pour le passé et interdite pour l'a-
venir de la Révtfïtftion.
es congrégations, prohibées par les
lois, soot rentrées en Franc où l'on n'tn
voulait plus ; elles y sont rentrées sans
autorisaiion ; elles s'y sont développées
et enrichies en fraude des dispositions
légales qui leur interdisent de posséder.
Le culte catholique a été rétabli par le
Concordat ; le seul clergé qui y ait été
prévu est le clergé séculier qui n'est pas
propriétaire; les congrégations sont une
poncurrpnce souvent gênante, parfois
déloyale.
Que ceux qui les trouvent utiles ne
protestent pas, soit.
Mais que voyez-vous à répondre à ceux
qui les considèrent comme néfastes par-
ce qu'ils pensent qu'elles drainent sans
rendre a icun service, une part considé-
rable de la fortune du pays.
Leur existence et leurs richesses cou*
traireii à l'ordre publio sont précaires ;
une loi va règler leur situation ; ce n'é-
tait pas le cas de les amnistier.
L'amnistie dont le seul but est de nous
donner la trffnqtxillté* nous la donnera,
sans que Ion condamnés de la Haute-
Cour et sans 'que les assomptionnistes
en aient profité.
Il y a fort à parier que, au contraire,
elle n'atteindrait pas son but si les cam,
pagnes des ^ons Ql'es recommençaient
d ins les Croioo et si Déroulède pouvait
revenir tranquillement exhorter par la
parole et par le geste les généraux à
marcher sur l'Elysée.
lit maintenant, nous allons voir quel-
que chose d'intéressant ; ce ne sera que
curieux, mais pas dangereux.
Les journaux nationalistes et réaction-
naires qui sont fort bien informés, sa-
vaient, dès le mois de mai, que le gou-
.vernement jouait une comédie avec son
projet d'amnistie et qu'en réalité il se
préparait à reprendre a l'Affaire" dès la
fin de l'Exposition.
- - - -. -
L'opposition levait les bras vers le
ciel, car elle était profondément indignée.
Reprendre l'Affaire, mais c'était vouloir
la rpine du paysi ô ministère de mal-
heur et de trahison, ministère Dreyfus
Mais voioi que le gouvernement, loin
de jouer uie comédie, fait réellement
voter l'amnis ie annoncée.
Aussitôt les compères nationalistes et
droitiers votent contre, et ils jurent de ne
plus s'occuper que de l'Affaire jusqu'à ce
qu'ils aient fait la lumière et démontré
que les faussaires sont dans le camp des
révisionnistes; pour leur part, ils n'en
ont pas parmi eux, car Henry était un
héros, et ils ont souscrit pour son monu-
ment.
Ce qui est antipatriotique maintenant,
ce n'est plus de reprendre l'Affaire, m Lia
au contraire de ne pas chercher à dé-
montrer que le faussaire principal est le
ministre qui représente la France dans
ses relations avec l'étranger.
Allons, M. Waldeck-Rousseau a eu
bien raison de le dire : a l'affaire Drey-
fus est le milieu de culture où se déve-
loppait le nationalisme », le microbe na-
tionaliste ne veut pas mourir.
Givia.
LE FRET POUR L'ALGÉRIE
Les Compagnies. maritimes concession-
naires des services postaux dans la Médi-
terranée ̃ avaient denmndé Fautorisitlon
d'élever de'-rtmiO,le rlx", fret en raison
de la b.uO des ministre du
commerce s ttrforitR te gQre^rnvurigÂnéral
rte rAlirérbV^ns reflte igtgrettplon avait Clu
«ccordéé stflt l'ftwirve que
08fle ielu. S ,"rId r 1810 qw.ud
*eo,4, wm.
}e"":;i;" 116,.::
^SFTSRIIBIRI qaand ce U{ÛUN uBvftuu ne;van*
l' oR pIV» i|U 30 ff»
INCOHERENCES 1EMSLATMES
bepuis trente ans que dure la Républi-
que, un monceau de lois nouvelles s'est
abattu sur le pays. Eparses au Journal
officiel, rédigées à la hâte dans la fièvre
des discussions quotidiennes, votées sou-
vent, non point tant à cause de l'utilité
qu'elles présentent, mais pour soutenir
ou pour combattre nn ministère, elles
s'offrent à nous sous l'aspect du plus inex-
tricable chaos. Eu voulez-vous un exem-
ple ? Le Parlement, pris tout-à-coup de
tendresse pour Les petits commerçants,
songe au moyen de leur permettre d'em-
prunter sur la valeur de leur fonds de
commerce, tout enen conservant l'exploi-
tation.Ils pourront désormais donner leur
fonds en nantissement. Seulement, pour
qu'un nantissement soit valable,il impor-
te, aux termes de l'article 2076 du Code
civil, que les meubles qui en font l'objet
soient remis soit aux mains d'un tiers,
soit aux mains du créancier. Vous com-
prenez que si les marchandises du fonds
sont remises aux mains d'un tiers ou du
créancier, le commerce devient impoesi
ble au débiteur. Il ne peut, en eftQt, ré-
pondre au client qui viendra lui acheter
aoit un verre d'eau-de-vie, soit une dou-
zaine de boutons de culotte : « Attendez
que j'aille vous chercher ce qu'il vous
faut chez mon créancier. Le temps de
prendre le chemin de fer et je reviens. »
Les Chamhres déclarent donc que le nan-
tissement serait valable par une simple
inscription sur les registres du Tribunal
de Commerce. Et il fut bien entendu dans
la discussion que les formalités de l'art.
8070 ne seraient plus observées.
D'où, rédaction : « L'arl. 2075 du Code
Civil est ainsi complété : Tout nantisse-
ment d'un fonds de commerce devra, à
peine de nullité vis-à-vis des tiers être
iascrit sur lin registre public tenu au
greffe du Tribunal de Commerce dans le
ressort duquel le fonds est exploité. »
Un point, c'est tout. It les commer-
çants seront au comble de la joie.
Seulement, les Chambres oubliaient
l'art. 2076, qui suit immédiatement l'art.
3075, et le laissèrent subsister.
Or, l'art. 2076 est ainsi conçu : « Dans
tous les cas, Je privilège ne subsiste sur
le gage qu'autant que ce gage a été mis
et est resté en la possession du créancier
ou d'un tiers convenu entre les parties. »
D'où cette conséquence. Les Cours
d'appel disent : « C'est très bien ce qu'a
voulu faire le législateur. Mais il ne l'a
pas écrit dans la loi. Donc, commerçants,
le nouvel art. 2075 ne vous impose qu'une
formalité de plus. Tant pis pour vous.
Les Chambrés ont oublié le « dans tous
les cas » de l'art. 2076. « Nous autres,
nous n'avons pas le droit de le considé-
rer comme lettre morte. »
Voilà dono une loi qui ne peut être
appliquée;
Voulez-vous un autre exemple. La loi
de 1844 sur la contrefaçon, frappe de dé-
chéance le breveté qui aura introduit en
France des produits brevetés fabriqués
à l'étranger.
Or, une convention internationale s'est
réunie en 1883, Ladite convention, lon-
guement discutée au Parlement, va per-
mettre à l'étranger breveté en France,
d'y introduire ses produits, venant de
l'étranger. Mais elle oublie d'accorder la
même faveur au Français qui aurait une
usine de l'autre côté des frontières. De
sorte que l'étranger pourra inonder nos
marchés- de produits fabriqués par une
main d'œuvre moins coûteuse, et le Fran-
çais restera sans défense.
A quoi bon multiplier les exemples ?
N'est-ce point un axiome juridique que la
Cour de Cassation est obligée de refaire,
à coups d'arrêts, les lois inapplicables ?
Or, cela est monstrueux, La loi n'é-
mane plus de la nation, mais des-juges !
La caun du mal est facile à voir. Les
Chambres sont trop longtemps et trop
souvent en session. Elles ne devraient
être convoquées qu'à des époques déter-
minées, pour un temps bref, avec un pro-
gramme de législation nettement défi-
ni.
O me* bons députés l quel sort feriez-
vous à un ministère qui vous dirait celai
Eh quoi 1 GI1 vomirait voua empêcheras
gmrvenrerrEtat par vos interpellations 7
Un broafllfoti quelconque ne pourrait plus
puur une heure, ro croire le plue grand,
homme de gouvernement des temps pas-
sés, présents et futurs? Que devien-
draient alors des esprits supérieurs com-
me M. Lasies, ou M. Drumont, ou M.
Baudiy d'Asson ?
̃ M.. Milliard lui-même ne jetterait
plus aux quatre vents de la Presse natio-
nalisé cette parole mémorable qu'en-
vierait le grand M.Prud'homme: « Il n'y
a qu'une façon d'être habile, c'est de se
moner juste. »
0 mot profond oomme la mer, et digne
d'être gravé en lettres d'or 1 Vous enten-
dez bien qu'être juste, pour M. Milliard,
c'eût été de rappeler à Paris, Déroulède
et Guérin. Car c'est à M. Waldeck-Rous-
seau, à propos de la loi d'amnistie, que
NÎ. Milliard donne cette leçon.
Et cependant. cependant j'ai souve-
nance d'un certain discours Viviani et
d'un certain affichage. N'insistons
point. A coup sur, ce jour là, M. Milliard
fut juste. Il ne saurait ne pas l'être. Fut-
il habile ? Je suis sûr que si l'on interro-
geait à ce sujet M. Méltne, peut-être le
grand homme d'Etat aurait-il quelques
réticences. Il nous répondrait sans doute:
« Il n'y a pas de question Milliard. * Et
ce serait vraiment pour lui le meilleur
moyen de sortir d'embarras.
Spartacus.
A tort et à travers
UNE ŒUVRE INÉDITE DE FLAUBERT
La R"evue Blanche commence la publica-
tion d'un ouvrage inédit do Flaubert, les.
Mémoires d'un fou* Varito en 1838, c'est-
à-dire à une époque où l'auleur n'avait, pas
plus de dix-sopt ans, cotte œuvre no sem-
lait point destinéo à paraître jamais devant
le grand public. Lo manuscrit èlllll toujours
resté entre les mains de l'ami auquel Flau
berMavait dédié, do cet nmi, Alfred Lo-
ltt-e'i - dpnt Il pleura la mort dans une
lettre qui est la plufr belle ot la plus émou-
vante do sa correspondance. La famille do
l'écrivain on Ignorait l'existence jusqu'à ces
derniers temps et ce n'est point sans scru-
pule qu'ello a autorisé l'impression, a petit
nombro d'exemplaires, do cot essai de jeu
nosso que Flaubert assurément, dans son
souci do perfection littéraire, n etlt ja nais
consenti a livrer au public. , -. -
On Ut dans la (lédiCIlCC qui précédé l'on
vrage : « Ces pages renferment une luno
tout entière. Est ce la mienne ? Hst-cc celle
d'un autre ? J'avais d'abord voulu fairo un
roman intime oÙ le scepticisme serait poussé
jusqu'aux dornirres bornes du désespoir;
mais, pou à pou, on écrivant, l'impression
personnelle perça à travers la fable, l à me
remua la plume, J'ainio donc mieux
laisser cela dans to mystère des conjectures.
Pour toi, tu n'en feras pas, » Le lecteur
n'en fera pas davantage. Dans ce roman,
qui n'en est pas un, il ost facile de voir que
Flaubert n'a pas voulu écrire autre choso
que sa propre confession. Il l'aécrlte, comme
pouvait l'écrire en 1838, un enfant a t'ima-
gination ardente, frais émoulu du collec,
ignorant tout de la vie, prenant ses pre-
mières inquiétudes pour d'ôpouvanlablcs
tourmenls, les moindres traverses pour des
adversités, sa nature solitaire et floro pour
le signe d'une deslinéo maudite, et tradui-
sant tout cela dans le langage romantique
dont U élait nourri. Il semble que, dès 1Ht
Flaubert ail compris ce qu'il y avait dans
son œuvre d'artificiel et d'excessif. Il con.
cède d'avance à Alfred Lepoittcvin qu' « en
bien des endroits l'expression ost forcée et
le lableau assombri à plaisir ».. et, pour
s'excuser, il lui rappelle que. c'est un fou
qui écrit ces pages, et que si le mot paraît
souvent surpasser le sentiment) qu'il expri-
me, c'est que, d'ailleurs, Il a lléchi sous le
poids du cœur. »
- La Revue Blanche n'a encore publié que
la première partie des Mémoires d'un fou.
C'est à celle-là surtout que Flaubert devait
songer en écrivant ces lignes. Le lyrisme
du style, l'amertume de la PCllÓC, le déses-
poir qui éclate à chaque page, tout cela est
un peu hors de proportion avec le sujet qui
n'est autre que le récit de son enfance, de
son séjour au collège et des toutes premiè-
res années, nullement tragiques, eu somme,
de son adolescence.
« Je fus au collège dès l'âge de dix ans
et j'y contractai de bonne heure une pro-
fonde aversion pour les hommes. » Tel est
le Lon ordinaire de cette autobiographie de
potache ; le mot. comme le dit très bien
Flaubert, surpasse ici le sentiment. Et d'un
bout à l'autre du chapitre, ce ne sont ainsi
qu'imprécations et anathèmes contre la so-
ciété, passions fatales, faibles désespéran-
ces, effusions lyriques, souvenir de Wer-
ther, de René, de Hamlct et de Manfred.
on saisit pourtant au milieu de ce fatras
beaucoun de faits intéressants.
"- Rien n'est plus significatif, plus conforme
à ce que nous a appris la lecture de Sten-
dhal, quela notation dcsrêves qui hantaien ^,
au commencement dit siècle 1 imagination
des très jeunes gens, Gomme Fabrice, comme
Julien Sorel, Flaubert avait subi, dans son
enfanc, la fasclnatian de l'épopée impé-
enfance, il ambitionna la gloire guerrlerc
riale
avant de rêver l'amour sublime et la célé-
brité tic l'écrivain.
A là ftn du premier chapitre, Flaubert a
tracé ces mots ; « Après trois semaines d'ar-
rêt.. Je suis si lassé que j'ai un profond
dégoût à continuer, ayant relu ce qui pré-
oèile. Les œuvres d'un homme ennuyé peu-
vent-elles amuser le public ? Je vais cepen-
dant m'efforcer de divertir davantage l'un
ci l'acre. Ici commencent vraiment les
mémoires. » G1 est aussi à cet endroit que
commence le principal intérêt des Mémoi-
res d'un fou. D'après ce qui nous en a été
dit, l'ouvrage prend, dans cette seconde
p «rtie qui n'a point encore paru, la forme
et le ton d'une autobiographie moins ro-
mantique et beaucoup plus précise. Flau-
bert s'est attaché ki tpeindre cet amour
qui l'obséda pendant de longues années,
peut-être même toute sa vie, cet amour qui,
suivant son expression, le laissa « ra"agé,
amour purement platonique pour une fem-
me qu'il n'a point nommée, mais qu'il a
Immortalisée, dans l'Education sentimen-
tale, sous les traits de Mme Ardoud. dette
seconde partie nous fournira donc, en quel-
que sorte, la première ébauche d'un des
plus admirables portraits que Flaubert ait
tracés. Cela suffirait à justifier la publica-
tion des Mémoires d'un fou, si cette con.
fession n'avait pas, en outre, le grand mé-
rite de nous montrer, dans toute la naïve
exubérance de la jeunesse, le romantique
que Flaubert devait toujours rester.
M. Demaison.
TATOUAGE
C'était, 11 y a quelques années, la rHr Ide
parmi les élegants de Londres de se faire
tatouer sur les bras des ornements variés.
Cette mode a passé en Angleterre, commo
passent. toutes les modes ; mais elle a été
recueillie et perfectionnée par les dandvs
roumains.
Si nous en croyons un journal mondain
qui publié à Vienne, ne dédaigne pas ce-
pendant de renseigner ses lecteurs sur les
mœurs des pays voisins, ce qui est tout à
fait « smarc» en ce moment à Hucarel J
c'est de porter gravés sur ses bras, sur sa
poitrine ou, le cas échéant, sur son dos, les
portraits des êtres qui vous sont chers.
père, mère, enfants, femme ou maîtresse,
lais il ne s'agit plus ici du vulgaire et gros-
sier barriolage en honneur chez les races
primitives qui peuplent la Polynésie, l'A-
l'aucante, les carrières d'Amérique et les
boulevards extérieurs.
En pénétrant dans les cercles aristocrati-
ques, le tatouage s'est afliné et élevé: il
est sorti des bas fonds do l'empirisme pour
entrer dans Je domaine de la clencc. l/o-
pératioll est seulomoul un peu longue. 11
faut d'abord épiler avec soin la partie de
l'épidcrme sur laquelle on veut imprimer le
portrait ; il faut ensuite étendre sur cette
surface lisse uno couche très légère d'un
produit spécial, aussi sensible que 1e papier
des photographes. Ou obtient, grâce a cette
composition, une épreuve extrêmement
tletle, inaltérable et garantie.
Beaucoup do snobs roumains et même
quelques grandes dames se sont dl-jà sou-
mis, parait-il, à cette opération qui noduic
pas moins de quatre heures et dont le CIIÙI.
s'élève à environ HOOfr. Il est inutile d'In-
sister sur les avantages d'une mode qui
permet à chacun do porter toujours sur sol,
sans oncombacr ses poches, toute une gale-
rie de portraits do famille. On doit même
rogretfor que l'invention do ce tatouage
d'art ne soit pas plus ancienne : si olle eût
clé connue au temps do ltu3r Gomcz, la
grande scèno du troisième acte d'ffemanl,
jouée par un acteur aux largos pecloratfx.
aurait pu prendre un caractère tout à fait
saisissant.
Homme ou Singe
Nous avons signalé l'expédition dirigée
sur Java d'une part par le docteur 'Vall("l'.
d'autre part par riliuslrc Hmrlvants sont partis à la recherche du pithé-
canthrope. entendoz de J'lntermédiairc en-
tre l'homme et lo singe. Ou a Insinué que
le pithécanlhropo vivait encore, et noire
confrère M. Deinaison, a défini, avec la
plus brillante érudition juridique, la cun-
dullc que la doctrine, la Jurisprudence et la
morale nous prescrivaient de tenir à l'égard
do notre ancêtre.
Il est à craindre que cos pures joies de
famille ne nous soient Jamais données. El,
pour tout dire, si l'on trouve le, pithécan-
thrope, ce sera à l'état de débris l'ossille.
Cependant, on pouvait le voir, ,1 mhilel11 C'1I1
reconstitue, à l'Exposition, da.ns un coin
éloignée du pavillon des Indes néorlandai,
ses. 11 était là, peau cl poil. se morfon-
(Ire dalis la q
dre dans la solitude. TU. Mikbael Suroi
dans un article de la Nouvelle Jievne, nous
apprend sur quels documents cette, rccons-
litulion fuL élablie. En lHHI M. Dubois,
médecin de la marine hollandaise, déterra
à Java, dans du terliaire supérieur, un
crftne incomplet cl deux molnircs, Quinze
mètres plus loin, il trouva un fémur. Voilà
toul ce qui nous reste du pré-homme. En-
core est-il bien possible qu il n y ait pas de
pré-homme dans l'affaire. On 11e s'entendit
pas sur la nature des pièces. Les savants se
divisèrent en nations : les Anglais, les
Suisses et quelques Français déclarèrent
que les débris étaient tout simplement hu-
mains. A Bertill, on attribua le fémur à un
homme eL le crâne à un singe. Le fémur,
presque crlindriquc, n'est ni du Ivpe hu-
main, ni du type simiesque. Cependant uu
fémur semblable a été observé dans un
squelette parisien est certainement patho-
logique. Donc, etc.
Io C'est en prenant la moyenne de ces té-
moignages qu'on a reconstitué le pitécau-
thrnpe, au grand complet.. Inclinons-nous,
plus ému que jamais, devant les merveil-
les delà science. Deux os en mauvais étal,
dont les savants les plus convaincus ne sa-
vent s'ils sont d'homme ou de singe, lui
sufficnl. à reconstituer une race entière, à
reconstituer une race entière, à débrouiller
l'origine des espèces, à établir les Jois ce---
taines qui gouvernent le monde.
Quelle puissancedanslaséduction ! quelle
force dans l'imagination! Ce sont la les
vrais miracles de la foi.
L'AMNISTIE
Le projet de loi sur l'amnistie a été déposé
au Sénat et le gouvernement va demander
à l'Assemblée de le discuter - eL dale voter
le plus tôt possible.
Rappelons que le bénéfice delà loi sera
acqufs à toute personne poursuivie à raison
des faits se rattachant a l'affaire Dreyfus,
antérieurs L la promulgation de la loi et
qui n'ont pas donné liep à une décision do
justice définitive avant, cette promulgation.
Sont exceptées toutefois les infractions
prévues et réprtmées par les articles 2P"),
596, 297, 298, 302 et 301 du Code, pénal, lIu1
visent l afsasslnat* guet-a pans, etc.
L'action civile à raison des mêmes faits
ne pourra êtro; portée que devant la Juridic-
tion civile, alors toème qno 15 juridtçlton
répressive serait déjà saisie^
l$n raranefrat enoo»^ les'au leurs (id.
llts de&rfiss&JflrasttMlR. de i £ utl<*,W
rète
atnt-jfflfPtft. Us .auteurs tToatrftgesf aux'
magistrats ou offlclcrs de la force PUblTe,
les Insoumis militaires, etc.
Tm assompiionnistes sont exclus du bé-
néflee dQ l'amnistie,
A TRAVERS RUES
Cadeau d'étrennes Magasins et
étalages Vêtements
Etoffes Ameublements-
Lumire-Comestibles.
NoëUaguignctles.élreunes! m<>! > joyeux,
malgré le ciel morne et gris, vous tint"/
gainiont à cd l IUMUV à toutes les ')l.'eilk'.
oreilles de bambins el (.l'adolescent s,nreillrs
do o'ens murs et graves comme oreilles fie
vieillards 1
Aussi bien ces mots magiques ne sonl-
ils pas synonimes de cadeaux, cl lour ré-
sonnante ne fait-elle pas germer dans Imi-
tes les cervelles une moisson de rêves heu-
reux et de désirs soudains El c'est bien
cet état d'iune qui fait que nous éprouvons
tous lant de plaisir à YtlÏr.CIl fin de l'allnée,
les magasins parés, décorés, animés et bon-
dés de marchandises.
Il Ille souvient euenre du bonheur till'el)
nia prime jeunesse écoulée à la canipagii'-.
j'éprouvais lorsque mes parents, descen-
dant à la viile, uie conduisaient en cetlo
saison, voir les boutiques ci les étalages.
Je pourrais, parodiant une, dos pins jolies
romances qu'on ce temps-là chaulait i'oul-
tier, le célèbre ténor, né à Villequier. fre-
donner aussi à mon Iour :
Petit enfuit, jViimnîs (i'ua amour leiuiro,
les vitrines garnies de lumières, d'éluiT<»s
chatoyantes, de, jou-ds, et surtout de cho-
colats et de sucre de pomme.
Go passé est. ent'oiv tellement vi.va.ee eu
ma, mémoire qu'il m'a inspiré l'idée de re-
voir, en Hàncur el (l curieux, les rues aux
belles boutiquesquionl intéressé mon j.Muie
âge. et que l'on traverse, hélas: mainte-
lIéllll. fiévreux el. pressé, sans porter atten-
tion à leurs beaulés. absorbé nu « Ion est
par le souci des all'aires cl les bus '¡II de la
vie quotidienne !
O'esl dans cet étal d'esprit,amis Ieeiours,
que je me suis retrouvé l'un de ce ; snirs.au
milieude la. rue (.Wairl-l'mil, h. ilouen.ju--
Icmcnt devant les immenses magasins d 's
Nouvelles Galeries.
Quantum mutatusilloX connue disait
feu Virgile, combien changé, en ell'el, l'as-
pect de ce quartier, comparé avee celui
d'aul refois 1
1 >e hautes et larges baies s'ouvrent aux
regards charmés pour laisser voir des ainon-
eellnnoids de marchandises de toutes sortes,
plus séduisantes les unes que les nulivs et
disposées avec un art inlini : il y en a pour
tous les (lÙIs. pour tous les âges ci t out est.
d'ailleurs ollert à un bon marché fabuleux
cl. tentateur.
Les passants sonl arrêtes, les voduivs do
maître slntiouuuid.au bord dulrotluir, l'in-
térieur ost plein de monde, on suit la foule
et l'émerveillement devient plus grand au
lm. Hl à jnesuro qu'on parcourt les quatre,
vastes étages, en parlant Uu scrus set, où
sont alignés l't avec un ordre parlait
les produits si variés que vend la maison,
depuis les soieries el les bijoux, bous pour
les bourses opulentes, jusqu'aux, vulgaires
articles do cuisine chers aux inénaaéi'es,
sans négliger les jou joux, tantcouvuiU s des
enfants.
\je enfants, ah ! ils n'nnl pas élé pll',lil',:-:.
par les directeurs de l'établissement : uu
théâtre a élé Installé et fonctionne lllll: ex-
prés pour eux dans une des galeries du haut,
d tout acheteur, si minime que soli son
emplette, a droit à un billet fie ?p.-cinrle
gratuit, ('est un prestidigitateur nui op-, re
et. je vous assure qu'on ne s'cnuui" poinL
pendant la demi-heure qu'il li'av iiile
.Je. sors des ivoitvelles GaUrirs imif
ébloui, mais toujours à mon idé 1 lixe du
passé, je me mets à la recherche des plus
vieilles maisons de llouen, non p >ur l'aire,
une comparaison, mais simpieui. nl p uir
me rendre compte, de ce qu'elles sont d • ve-
nues el des progrés que je soupe' m ne lLlIOI!/::;
Ollt dit faire avec, le temps.
Après avoir suivi la sombre rue ik U m-
neliers, me voici soudain devant le 1J1:l-
sin de vêtements des Abeilles* rue d • la
liépublique.
Le hasard des circonstances m'avait jus-
lemenl mis l'autr * jour sous les eux un
vieux numéro d'une bonne petite feuille
d'autan, la Chronique, de. Rouen, aujour-
d'hui disparue: un y faisait, déjà un pom-
peux éloge de la maison des A^etlUs ei cela,
datait du "il décembre 1 s»*>;ï 1 que serail-ce
si le rédacteur de cette époque lointaine la
rovoA ait aujourd'hui f
Fondée en 1 Sot» par AL Purisof. créaieur
de la Helle Jardinière, à Paris, et le promo-
teur,- à ce moment-là, de la confeclii'a : cel-
le maison, sous une direction sericu- pros-
péra, puis vint la guerre, le directeur mou-
l'ul: el les années île décadence succédèrent
aux jours prospères: co lui seulement i-n
l.S*r que "M. Claudel, confectionneur eu gros
à Paris, acheta cet établissement, le trans-
forma de fond eu comble cl en lil en quel-
ques années, non seulement la première
comme importance de la ville, mais encore
de toute la région normande, ou el1'('1 iL eut
bientôt vile l'ail de créer non seulement
dans la Seine Inférieure mais aussi dans
l'Kure, le Calvados, l'Orne el la rfanche.des
succursales qui, prdiUuil de la rèpulalieu
jusiiliée et méritée, de la maison-mère, ar-
rivé renl toutes à la prospérité.
Des lô maisons créées, M. Claudel en eé«
da une partie à ses principaux employés
celles qu'il a encore, doviendroni pour la
comme récompenses de leurs services: et
plupart à leur Iour la propriété de ceux qui
les dirige.nl: cesl la un système d encoura«
gcnionL au travailleur qu'il con\ieui juste-
ment d'applaudir.
Faire, bien el bon marché, c'est du r^este-
la devise do la maison: elle y par\ienl pai?
sa fabrication économique, la réduction de
frais de toute nature cl la suppre^sn-u de
loul iiiicruiédiairo, aussi a-l-elL cuseiAo,
malgré les multiples all'aires du même ::ei;.
re créées part oui, s<>n ancien pi^slr/e nuis*
ce que sa renommée ne fait que grandir
partout àlîouen comme au lla\:v. depuis
noire dépatrement jusqu'à l'aulreexh émilé
do la Normandie.
Tout, eu faisant ces ré'lexlous. je ea :ue
la rue Sainl-Uoniain que je lr:i\> rse dans
toute sa longueur, saluant an pa>sce>a
bicoque vermoulue el j'atleiu ; la rue des
Germes. -
Lu face île moi ] .u oucm'o une maison rc*
lativeuujnl ancienne, ce soui i<". m:\-M:"-ins
du Sans-Pareil, t'ont le momie 1 > ( onnait.
à Rouen, jftepuP- t s grandes dame-'. Mui
trouvent le^'-csonples soies, les lainages o>r«
les jolis rubans, jusqu'aux pe-
'I.il'" qui viennent y cherelnT
ln'S° TÔurnAlurea.
t.a- maison, si je ne me trompe, compte
déjà une vingtaine d'années d'existence,
Abonnements ..,
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no-Jaférieir.-* "Jure et
partoments limitrophes 4fr, »
» très Départements. 5 fr. »
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l'avance et se font à parlir du lnf ot
10 de chaque mois.
SEMAINE POLITIQUE
L'amnistie. Déroulède et les
ABsotaptionnistes* Le mi.
niatère Dreyfus. Le mi-
crobe nationaliste.
L'amnistie ne satisfait absolument per-
sonne, on la vote toutefois et l'on fait
bien.
En soi, comme elle est une mesure de
réconciliation et d'oubli, elle devrait être
plénière, afin que les frères enuemis pus-
sent s'embrasser ; mais elle est surtout
un acte politique et pour en déterminer
l'étendue on envisage moins ce qu'elle
devrait être que ce qu'elle devra pro-
duire. -
Fût-elle même complète, applicable à
tous, elle atténuerait les rancunes et r es
griefs respectifs sans les faire disparaî-
tre complètement.
Chaque parti considère que pour les
s;ena elle est une mesure de justice, une
réparation plutôt tardive et que pour les
adversaires elle constitue uae générosité,
une concession, presque un acte de fai-
blesse auquel on n'a pu se résoudre qu'à
re«rçt,
C'est pourquoi le parti Dreyfusard mi*
litant _, ne peut se consoler que Mercier,du
Paty et tutti quant soient désormais, à
l'abri des recherches de la justice.
Et par là même raison les anti Hreyfu
sards irrédustibles no peuvent pardon-
ner au gouvernement une mesure qui
éteint les procès contre Reinach ; le co-
lopel Picquart de son côté se plalnt de ne
plus pouvoir aussi facilement se JUAIi.
fier.
Mais si les combattadts sont ainsi de
part et d'autre' mécontenté, les neutres
nui sont la masse 4e la nation ne peuvent
que se féliciter du vote 4e l'amnistie-
Il faUait en finir définitivement avec
l'agitation et le meilleur moyen était de
-lui enterçr tout prétexte en -dtèlaraD\
inexistants, jfour ainsi dfre, au point de
yqe rênl, les actes dont Ue IQfAlL pu
11empnrelJ,
Certaines objections qui frappent les
pslitlolene, qui pourraient aussi inquiéter
les philosophes épris d'idéal ne touche-
ront fufepp les gens pratiques qui veulent
travailler en p*bç.
Oomment, disent les nationalistes et la
droite monarchiste ou méliuiste, vous
excluez de l'amnistie les condamnés de
la Haute-Cour et les congrégauistes non
autorisés, tandis que, par contre, vons y
comprenez les bandits anarchistes qui
, ont pillé Saint-Joseph,
pt s'empapant d'un mot attribué-au
Président du Conseil, qui aurait dit :
a L'amnistie n'est pas faite pour les en-
nemis de la République, » ils concluent
que les anarchistes sont les amis du
gouvernement, ou plutôt, car ils préfè-
rent cette formule, que le gouvernement
est l'ajpl des anarchistes.
A vrai dire, les gaillards qui avaient
pillé Saint-Joseph ne nous paraissent pas
du tQqt intéressants et nous n'avons
pour l'amendement Sembat, qui leur vaut
l'amnistie, qu'une admiration tout-à-fait
mince.
Il est certain que si des jésuites ou des
dominicains avaient, par eux-mêmes ou
par des bandes stipendiées, pillé ou fait
piller un temple protestant ou une syna-
gogue, tout le parti républicain se se-
rait refusé à les amnistier.
En quoi des anarchistes, poussés par
une intolérance sectaire et haineuse de
tout esprit religieux, sont-ils plus inté-
ressants ?
Toutefois, si au lieu d'envisager la
gravité morale de l'acte, on envisage ses
conséquences politiques, on peut com-
prendre les raisons qui ont déterminé la
Chambre.
On ne peut pas soutenir que les églises
soient sérieusement menacées par les
anarchistes ; sur trente mille monuments
consacrés en France au culte catholique,
il y en a un qui a été dévasté par une
bande d'énergumènes, c'est un fait isolé,
sans lendemain, et si la religion catholi-
que ne subissait pas d'autres attaques,
ses représentants s'estimearient trop heu-
reux.
Au contraire, le fait de Déroulède et de
ses complices qui voulaient recourir à
la force pour renverser la République,
aurait eu, s'il avpit réussi, des consé-
quences incalculables ; il noue ramenait,
par la courte transition, de Ut république
Ire, an régime impérial, c'est-
à-dire à la tyrannie intérieure et à la
guerre extérieure. Or, ils proclament
qu'ils recommenceront leur tentative.
Quant aux Congrégations non autori-
sées, la sitation est très simple.
D'abord les csndatnnations exceptées
de l'amnistie sont des peipes d'amende,
généralement mitigées par la loi Béren-
ger.
Au surplus, les congrégations sont plus
de 1500 ; sur ce nombre, une centaine à
peine se sont fait reconnaître comme
charitables, pour être dégrevées du
droit d'abonnement.
Or les 1400 congrégations non charita-
bles et dont les membres ne travaillent
pas s'enrichissent par l'accumulation des
dons et des legs.
Celte situation avait été formellement
abolie pour le passé et interdite pour l'a-
venir de la Révtfïtftion.
es congrégations, prohibées par les
lois, soot rentrées en Franc où l'on n'tn
voulait plus ; elles y sont rentrées sans
autorisaiion ; elles s'y sont développées
et enrichies en fraude des dispositions
légales qui leur interdisent de posséder.
Le culte catholique a été rétabli par le
Concordat ; le seul clergé qui y ait été
prévu est le clergé séculier qui n'est pas
propriétaire; les congrégations sont une
poncurrpnce souvent gênante, parfois
déloyale.
Que ceux qui les trouvent utiles ne
protestent pas, soit.
Mais que voyez-vous à répondre à ceux
qui les considèrent comme néfastes par-
ce qu'ils pensent qu'elles drainent sans
rendre a icun service, une part considé-
rable de la fortune du pays.
Leur existence et leurs richesses cou*
traireii à l'ordre publio sont précaires ;
une loi va règler leur situation ; ce n'é-
tait pas le cas de les amnistier.
L'amnistie dont le seul but est de nous
donner la trffnqtxillté* nous la donnera,
sans que Ion condamnés de la Haute-
Cour et sans 'que les assomptionnistes
en aient profité.
Il y a fort à parier que, au contraire,
elle n'atteindrait pas son but si les cam,
pagnes des ^ons Ql'es recommençaient
d ins les Croioo et si Déroulède pouvait
revenir tranquillement exhorter par la
parole et par le geste les généraux à
marcher sur l'Elysée.
lit maintenant, nous allons voir quel-
que chose d'intéressant ; ce ne sera que
curieux, mais pas dangereux.
Les journaux nationalistes et réaction-
naires qui sont fort bien informés, sa-
vaient, dès le mois de mai, que le gou-
.vernement jouait une comédie avec son
projet d'amnistie et qu'en réalité il se
préparait à reprendre a l'Affaire" dès la
fin de l'Exposition.
- - - -. -
L'opposition levait les bras vers le
ciel, car elle était profondément indignée.
Reprendre l'Affaire, mais c'était vouloir
la rpine du paysi ô ministère de mal-
heur et de trahison, ministère Dreyfus
Mais voioi que le gouvernement, loin
de jouer uie comédie, fait réellement
voter l'amnis ie annoncée.
Aussitôt les compères nationalistes et
droitiers votent contre, et ils jurent de ne
plus s'occuper que de l'Affaire jusqu'à ce
qu'ils aient fait la lumière et démontré
que les faussaires sont dans le camp des
révisionnistes; pour leur part, ils n'en
ont pas parmi eux, car Henry était un
héros, et ils ont souscrit pour son monu-
ment.
Ce qui est antipatriotique maintenant,
ce n'est plus de reprendre l'Affaire, m Lia
au contraire de ne pas chercher à dé-
montrer que le faussaire principal est le
ministre qui représente la France dans
ses relations avec l'étranger.
Allons, M. Waldeck-Rousseau a eu
bien raison de le dire : a l'affaire Drey-
fus est le milieu de culture où se déve-
loppait le nationalisme », le microbe na-
tionaliste ne veut pas mourir.
Givia.
LE FRET POUR L'ALGÉRIE
Les Compagnies. maritimes concession-
naires des services postaux dans la Médi-
terranée ̃ avaient denmndé Fautorisitlon
d'élever de'-rtmiO,le rlx", fret en raison
de la b.uO des ministre du
commerce s ttrforitR te gQre^rnvurigÂnéral
rte rAlirérbV^ns reflte igtgrettplon avait Clu
«ccordéé stflt l'ftwirve que
08fle ielu. S ,"rId r 1810 qw.ud
*eo,4, wm.
}e"":;i;" 116,.::
^SFTSRIIBIRI qaand ce U{ÛUN uBvftuu ne;van*
l' oR pIV» i|U 30 ff»
INCOHERENCES 1EMSLATMES
bepuis trente ans que dure la Républi-
que, un monceau de lois nouvelles s'est
abattu sur le pays. Eparses au Journal
officiel, rédigées à la hâte dans la fièvre
des discussions quotidiennes, votées sou-
vent, non point tant à cause de l'utilité
qu'elles présentent, mais pour soutenir
ou pour combattre nn ministère, elles
s'offrent à nous sous l'aspect du plus inex-
tricable chaos. Eu voulez-vous un exem-
ple ? Le Parlement, pris tout-à-coup de
tendresse pour Les petits commerçants,
songe au moyen de leur permettre d'em-
prunter sur la valeur de leur fonds de
commerce, tout enen conservant l'exploi-
tation.Ils pourront désormais donner leur
fonds en nantissement. Seulement, pour
qu'un nantissement soit valable,il impor-
te, aux termes de l'article 2076 du Code
civil, que les meubles qui en font l'objet
soient remis soit aux mains d'un tiers,
soit aux mains du créancier. Vous com-
prenez que si les marchandises du fonds
sont remises aux mains d'un tiers ou du
créancier, le commerce devient impoesi
ble au débiteur. Il ne peut, en eftQt, ré-
pondre au client qui viendra lui acheter
aoit un verre d'eau-de-vie, soit une dou-
zaine de boutons de culotte : « Attendez
que j'aille vous chercher ce qu'il vous
faut chez mon créancier. Le temps de
prendre le chemin de fer et je reviens. »
Les Chamhres déclarent donc que le nan-
tissement serait valable par une simple
inscription sur les registres du Tribunal
de Commerce. Et il fut bien entendu dans
la discussion que les formalités de l'art.
8070 ne seraient plus observées.
D'où, rédaction : « L'arl. 2075 du Code
Civil est ainsi complété : Tout nantisse-
ment d'un fonds de commerce devra, à
peine de nullité vis-à-vis des tiers être
iascrit sur lin registre public tenu au
greffe du Tribunal de Commerce dans le
ressort duquel le fonds est exploité. »
Un point, c'est tout. It les commer-
çants seront au comble de la joie.
Seulement, les Chambres oubliaient
l'art. 2076, qui suit immédiatement l'art.
3075, et le laissèrent subsister.
Or, l'art. 2076 est ainsi conçu : « Dans
tous les cas, Je privilège ne subsiste sur
le gage qu'autant que ce gage a été mis
et est resté en la possession du créancier
ou d'un tiers convenu entre les parties. »
D'où cette conséquence. Les Cours
d'appel disent : « C'est très bien ce qu'a
voulu faire le législateur. Mais il ne l'a
pas écrit dans la loi. Donc, commerçants,
le nouvel art. 2075 ne vous impose qu'une
formalité de plus. Tant pis pour vous.
Les Chambrés ont oublié le « dans tous
les cas » de l'art. 2076. « Nous autres,
nous n'avons pas le droit de le considé-
rer comme lettre morte. »
Voilà dono une loi qui ne peut être
appliquée;
Voulez-vous un autre exemple. La loi
de 1844 sur la contrefaçon, frappe de dé-
chéance le breveté qui aura introduit en
France des produits brevetés fabriqués
à l'étranger.
Or, une convention internationale s'est
réunie en 1883, Ladite convention, lon-
guement discutée au Parlement, va per-
mettre à l'étranger breveté en France,
d'y introduire ses produits, venant de
l'étranger. Mais elle oublie d'accorder la
même faveur au Français qui aurait une
usine de l'autre côté des frontières. De
sorte que l'étranger pourra inonder nos
marchés- de produits fabriqués par une
main d'œuvre moins coûteuse, et le Fran-
çais restera sans défense.
A quoi bon multiplier les exemples ?
N'est-ce point un axiome juridique que la
Cour de Cassation est obligée de refaire,
à coups d'arrêts, les lois inapplicables ?
Or, cela est monstrueux, La loi n'é-
mane plus de la nation, mais des-juges !
La caun du mal est facile à voir. Les
Chambres sont trop longtemps et trop
souvent en session. Elles ne devraient
être convoquées qu'à des époques déter-
minées, pour un temps bref, avec un pro-
gramme de législation nettement défi-
ni.
O me* bons députés l quel sort feriez-
vous à un ministère qui vous dirait celai
Eh quoi 1 GI1 vomirait voua empêcheras
gmrvenrerrEtat par vos interpellations 7
Un broafllfoti quelconque ne pourrait plus
puur une heure, ro croire le plue grand,
homme de gouvernement des temps pas-
sés, présents et futurs? Que devien-
draient alors des esprits supérieurs com-
me M. Lasies, ou M. Drumont, ou M.
Baudiy d'Asson ?
̃ M.. Milliard lui-même ne jetterait
plus aux quatre vents de la Presse natio-
nalisé cette parole mémorable qu'en-
vierait le grand M.Prud'homme: « Il n'y
a qu'une façon d'être habile, c'est de se
moner juste. »
0 mot profond oomme la mer, et digne
d'être gravé en lettres d'or 1 Vous enten-
dez bien qu'être juste, pour M. Milliard,
c'eût été de rappeler à Paris, Déroulède
et Guérin. Car c'est à M. Waldeck-Rous-
seau, à propos de la loi d'amnistie, que
NÎ. Milliard donne cette leçon.
Et cependant. cependant j'ai souve-
nance d'un certain discours Viviani et
d'un certain affichage. N'insistons
point. A coup sur, ce jour là, M. Milliard
fut juste. Il ne saurait ne pas l'être. Fut-
il habile ? Je suis sûr que si l'on interro-
geait à ce sujet M. Méltne, peut-être le
grand homme d'Etat aurait-il quelques
réticences. Il nous répondrait sans doute:
« Il n'y a pas de question Milliard. * Et
ce serait vraiment pour lui le meilleur
moyen de sortir d'embarras.
Spartacus.
A tort et à travers
UNE ŒUVRE INÉDITE DE FLAUBERT
La R"evue Blanche commence la publica-
tion d'un ouvrage inédit do Flaubert, les.
Mémoires d'un fou* Varito en 1838, c'est-
à-dire à une époque où l'auleur n'avait, pas
plus de dix-sopt ans, cotte œuvre no sem-
lait point destinéo à paraître jamais devant
le grand public. Lo manuscrit èlllll toujours
resté entre les mains de l'ami auquel Flau
berMavait dédié, do cet nmi, Alfred Lo-
ltt-e'i - dpnt Il pleura la mort dans une
lettre qui est la plufr belle ot la plus émou-
vante do sa correspondance. La famille do
l'écrivain on Ignorait l'existence jusqu'à ces
derniers temps et ce n'est point sans scru-
pule qu'ello a autorisé l'impression, a petit
nombro d'exemplaires, do cot essai de jeu
nosso que Flaubert assurément, dans son
souci do perfection littéraire, n etlt ja nais
consenti a livrer au public. , -. -
On Ut dans la (lédiCIlCC qui précédé l'on
vrage : « Ces pages renferment une luno
tout entière. Est ce la mienne ? Hst-cc celle
d'un autre ? J'avais d'abord voulu fairo un
roman intime oÙ le scepticisme serait poussé
jusqu'aux dornirres bornes du désespoir;
mais, pou à pou, on écrivant, l'impression
personnelle perça à travers la fable, l à me
remua la plume, J'ainio donc mieux
laisser cela dans to mystère des conjectures.
Pour toi, tu n'en feras pas, » Le lecteur
n'en fera pas davantage. Dans ce roman,
qui n'en est pas un, il ost facile de voir que
Flaubert n'a pas voulu écrire autre choso
que sa propre confession. Il l'aécrlte, comme
pouvait l'écrire en 1838, un enfant a t'ima-
gination ardente, frais émoulu du collec,
ignorant tout de la vie, prenant ses pre-
mières inquiétudes pour d'ôpouvanlablcs
tourmenls, les moindres traverses pour des
adversités, sa nature solitaire et floro pour
le signe d'une deslinéo maudite, et tradui-
sant tout cela dans le langage romantique
dont U élait nourri. Il semble que, dès 1Ht
Flaubert ail compris ce qu'il y avait dans
son œuvre d'artificiel et d'excessif. Il con.
cède d'avance à Alfred Lepoittcvin qu' « en
bien des endroits l'expression ost forcée et
le lableau assombri à plaisir ».. et, pour
s'excuser, il lui rappelle que. c'est un fou
qui écrit ces pages, et que si le mot paraît
souvent surpasser le sentiment) qu'il expri-
me, c'est que, d'ailleurs, Il a lléchi sous le
poids du cœur. »
- La Revue Blanche n'a encore publié que
la première partie des Mémoires d'un fou.
C'est à celle-là surtout que Flaubert devait
songer en écrivant ces lignes. Le lyrisme
du style, l'amertume de la PCllÓC, le déses-
poir qui éclate à chaque page, tout cela est
un peu hors de proportion avec le sujet qui
n'est autre que le récit de son enfance, de
son séjour au collège et des toutes premiè-
res années, nullement tragiques, eu somme,
de son adolescence.
« Je fus au collège dès l'âge de dix ans
et j'y contractai de bonne heure une pro-
fonde aversion pour les hommes. » Tel est
le Lon ordinaire de cette autobiographie de
potache ; le mot. comme le dit très bien
Flaubert, surpasse ici le sentiment. Et d'un
bout à l'autre du chapitre, ce ne sont ainsi
qu'imprécations et anathèmes contre la so-
ciété, passions fatales, faibles désespéran-
ces, effusions lyriques, souvenir de Wer-
ther, de René, de Hamlct et de Manfred.
on saisit pourtant au milieu de ce fatras
beaucoun de faits intéressants.
"- Rien n'est plus significatif, plus conforme
à ce que nous a appris la lecture de Sten-
dhal, quela notation dcsrêves qui hantaien ^,
au commencement dit siècle 1 imagination
des très jeunes gens, Gomme Fabrice, comme
Julien Sorel, Flaubert avait subi, dans son
enfanc, la fasclnatian de l'épopée impé-
enfance, il ambitionna la gloire guerrlerc
riale
avant de rêver l'amour sublime et la célé-
brité tic l'écrivain.
A là ftn du premier chapitre, Flaubert a
tracé ces mots ; « Après trois semaines d'ar-
rêt.. Je suis si lassé que j'ai un profond
dégoût à continuer, ayant relu ce qui pré-
oèile. Les œuvres d'un homme ennuyé peu-
vent-elles amuser le public ? Je vais cepen-
dant m'efforcer de divertir davantage l'un
ci l'acre. Ici commencent vraiment les
mémoires. » G1 est aussi à cet endroit que
commence le principal intérêt des Mémoi-
res d'un fou. D'après ce qui nous en a été
dit, l'ouvrage prend, dans cette seconde
p «rtie qui n'a point encore paru, la forme
et le ton d'une autobiographie moins ro-
mantique et beaucoup plus précise. Flau-
bert s'est attaché ki tpeindre cet amour
qui l'obséda pendant de longues années,
peut-être même toute sa vie, cet amour qui,
suivant son expression, le laissa « ra"agé,
amour purement platonique pour une fem-
me qu'il n'a point nommée, mais qu'il a
Immortalisée, dans l'Education sentimen-
tale, sous les traits de Mme Ardoud. dette
seconde partie nous fournira donc, en quel-
que sorte, la première ébauche d'un des
plus admirables portraits que Flaubert ait
tracés. Cela suffirait à justifier la publica-
tion des Mémoires d'un fou, si cette con.
fession n'avait pas, en outre, le grand mé-
rite de nous montrer, dans toute la naïve
exubérance de la jeunesse, le romantique
que Flaubert devait toujours rester.
M. Demaison.
TATOUAGE
C'était, 11 y a quelques années, la rHr Ide
parmi les élegants de Londres de se faire
tatouer sur les bras des ornements variés.
Cette mode a passé en Angleterre, commo
passent. toutes les modes ; mais elle a été
recueillie et perfectionnée par les dandvs
roumains.
Si nous en croyons un journal mondain
qui publié à Vienne, ne dédaigne pas ce-
pendant de renseigner ses lecteurs sur les
mœurs des pays voisins, ce qui est tout à
fait « smarc» en ce moment à Hucarel J
c'est de porter gravés sur ses bras, sur sa
poitrine ou, le cas échéant, sur son dos, les
portraits des êtres qui vous sont chers.
père, mère, enfants, femme ou maîtresse,
lais il ne s'agit plus ici du vulgaire et gros-
sier barriolage en honneur chez les races
primitives qui peuplent la Polynésie, l'A-
l'aucante, les carrières d'Amérique et les
boulevards extérieurs.
En pénétrant dans les cercles aristocrati-
ques, le tatouage s'est afliné et élevé: il
est sorti des bas fonds do l'empirisme pour
entrer dans Je domaine de la clencc. l/o-
pératioll est seulomoul un peu longue. 11
faut d'abord épiler avec soin la partie de
l'épidcrme sur laquelle on veut imprimer le
portrait ; il faut ensuite étendre sur cette
surface lisse uno couche très légère d'un
produit spécial, aussi sensible que 1e papier
des photographes. Ou obtient, grâce a cette
composition, une épreuve extrêmement
tletle, inaltérable et garantie.
Beaucoup do snobs roumains et même
quelques grandes dames se sont dl-jà sou-
mis, parait-il, à cette opération qui noduic
pas moins de quatre heures et dont le CIIÙI.
s'élève à environ HOOfr. Il est inutile d'In-
sister sur les avantages d'une mode qui
permet à chacun do porter toujours sur sol,
sans oncombacr ses poches, toute une gale-
rie de portraits do famille. On doit même
rogretfor que l'invention do ce tatouage
d'art ne soit pas plus ancienne : si olle eût
clé connue au temps do ltu3r Gomcz, la
grande scèno du troisième acte d'ffemanl,
jouée par un acteur aux largos pecloratfx.
aurait pu prendre un caractère tout à fait
saisissant.
Homme ou Singe
Nous avons signalé l'expédition dirigée
sur Java d'une part par le docteur 'Vall("l'.
d'autre part par riliuslrc Hmrl
canthrope. entendoz de J'lntermédiairc en-
tre l'homme et lo singe. Ou a Insinué que
le pithécanlhropo vivait encore, et noire
confrère M. Deinaison, a défini, avec la
plus brillante érudition juridique, la cun-
dullc que la doctrine, la Jurisprudence et la
morale nous prescrivaient de tenir à l'égard
do notre ancêtre.
Il est à craindre que cos pures joies de
famille ne nous soient Jamais données. El,
pour tout dire, si l'on trouve le, pithécan-
thrope, ce sera à l'état de débris l'ossille.
Cependant, on pouvait le voir, ,1 mhilel11 C'1I1
reconstitue, à l'Exposition, da.ns un coin
éloignée du pavillon des Indes néorlandai,
ses. 11 était là, peau cl poil. se morfon-
(Ire dalis la q
dre dans la solitude. TU. Mikbael Suroi
dans un article de la Nouvelle Jievne, nous
apprend sur quels documents cette, rccons-
litulion fuL élablie. En lHHI M. Dubois,
médecin de la marine hollandaise, déterra
à Java, dans du terliaire supérieur, un
crftne incomplet cl deux molnircs, Quinze
mètres plus loin, il trouva un fémur. Voilà
toul ce qui nous reste du pré-homme. En-
core est-il bien possible qu il n y ait pas de
pré-homme dans l'affaire. On 11e s'entendit
pas sur la nature des pièces. Les savants se
divisèrent en nations : les Anglais, les
Suisses et quelques Français déclarèrent
que les débris étaient tout simplement hu-
mains. A Bertill, on attribua le fémur à un
homme eL le crâne à un singe. Le fémur,
presque crlindriquc, n'est ni du Ivpe hu-
main, ni du type simiesque. Cependant uu
fémur semblable a été observé dans un
squelette parisien est certainement patho-
logique. Donc, etc.
Io C'est en prenant la moyenne de ces té-
moignages qu'on a reconstitué le pitécau-
thrnpe, au grand complet.. Inclinons-nous,
plus ému que jamais, devant les merveil-
les delà science. Deux os en mauvais étal,
dont les savants les plus convaincus ne sa-
vent s'ils sont d'homme ou de singe, lui
sufficnl. à reconstituer une race entière, à
reconstituer une race entière, à débrouiller
l'origine des espèces, à établir les Jois ce---
taines qui gouvernent le monde.
Quelle puissancedanslaséduction ! quelle
force dans l'imagination! Ce sont la les
vrais miracles de la foi.
L'AMNISTIE
Le projet de loi sur l'amnistie a été déposé
au Sénat et le gouvernement va demander
à l'Assemblée de le discuter - eL dale voter
le plus tôt possible.
Rappelons que le bénéfice delà loi sera
acqufs à toute personne poursuivie à raison
des faits se rattachant a l'affaire Dreyfus,
antérieurs L la promulgation de la loi et
qui n'ont pas donné liep à une décision do
justice définitive avant, cette promulgation.
Sont exceptées toutefois les infractions
prévues et réprtmées par les articles 2P"),
596, 297, 298, 302 et 301 du Code, pénal, lIu1
visent l afsasslnat* guet-a pans, etc.
L'action civile à raison des mêmes faits
ne pourra êtro; portée que devant la Juridic-
tion civile, alors toème qno 15 juridtçlton
répressive serait déjà saisie^
l$n raranefrat enoo»^ les'au leurs (id.
llts de&rfiss&JflrasttMlR. de i £ utl<*,W
rète
atnt-jfflfPtft. Us .auteurs tToatrftgesf aux'
magistrats ou offlclcrs de la force PUblTe,
les Insoumis militaires, etc.
Tm assompiionnistes sont exclus du bé-
néflee dQ l'amnistie,
A TRAVERS RUES
Cadeau d'étrennes Magasins et
étalages Vêtements
Etoffes Ameublements-
Lumire-Comestibles.
NoëUaguignctles.élreunes! m<>! > joyeux,
malgré le ciel morne et gris, vous tint"/
gainiont à cd l IUMUV à toutes les ')l.'eilk'.
oreilles de bambins el (.l'adolescent s,nreillrs
do o'ens murs et graves comme oreilles fie
vieillards 1
Aussi bien ces mots magiques ne sonl-
ils pas synonimes de cadeaux, cl lour ré-
sonnante ne fait-elle pas germer dans Imi-
tes les cervelles une moisson de rêves heu-
reux et de désirs soudains El c'est bien
cet état d'iune qui fait que nous éprouvons
tous lant de plaisir à YtlÏr.CIl fin de l'allnée,
les magasins parés, décorés, animés et bon-
dés de marchandises.
Il Ille souvient euenre du bonheur till'el)
nia prime jeunesse écoulée à la canipagii'-.
j'éprouvais lorsque mes parents, descen-
dant à la viile, uie conduisaient en cetlo
saison, voir les boutiques ci les étalages.
Je pourrais, parodiant une, dos pins jolies
romances qu'on ce temps-là chaulait i'oul-
tier, le célèbre ténor, né à Villequier. fre-
donner aussi à mon Iour :
Petit enfuit, jViimnîs (i'ua amour leiuiro,
les vitrines garnies de lumières, d'éluiT<»s
chatoyantes, de, jou-ds, et surtout de cho-
colats et de sucre de pomme.
Go passé est. ent'oiv tellement vi.va.ee eu
ma, mémoire qu'il m'a inspiré l'idée de re-
voir, en Hàncur el (l curieux, les rues aux
belles boutiquesquionl intéressé mon j.Muie
âge. et que l'on traverse, hélas: mainte-
lIéllll. fiévreux el. pressé, sans porter atten-
tion à leurs beaulés. absorbé nu « Ion est
par le souci des all'aires cl les bus '¡II de la
vie quotidienne !
O'esl dans cet étal d'esprit,amis Ieeiours,
que je me suis retrouvé l'un de ce ; snirs.au
milieude la. rue (.Wairl-l'mil, h. ilouen.ju--
Icmcnt devant les immenses magasins d 's
Nouvelles Galeries.
Quantum mutatusilloX connue disait
feu Virgile, combien changé, en ell'el, l'as-
pect de ce quartier, comparé avee celui
d'aul refois 1
1 >e hautes et larges baies s'ouvrent aux
regards charmés pour laisser voir des ainon-
eellnnoids de marchandises de toutes sortes,
plus séduisantes les unes que les nulivs et
disposées avec un art inlini : il y en a pour
tous les (lÙIs. pour tous les âges ci t out est.
d'ailleurs ollert à un bon marché fabuleux
cl. tentateur.
Les passants sonl arrêtes, les voduivs do
maître slntiouuuid.au bord dulrotluir, l'in-
térieur ost plein de monde, on suit la foule
et l'émerveillement devient plus grand au
lm. Hl à jnesuro qu'on parcourt les quatre,
vastes étages, en parlant Uu scrus set, où
sont alignés l't avec un ordre parlait
les produits si variés que vend la maison,
depuis les soieries el les bijoux, bous pour
les bourses opulentes, jusqu'aux, vulgaires
articles do cuisine chers aux inénaaéi'es,
sans négliger les jou joux, tantcouvuiU s des
enfants.
\je enfants, ah ! ils n'nnl pas élé pll',lil',:-:.
par les directeurs de l'établissement : uu
théâtre a élé Installé et fonctionne lllll: ex-
prés pour eux dans une des galeries du haut,
d tout acheteur, si minime que soli son
emplette, a droit à un billet fie ?p.-cinrle
gratuit, ('est un prestidigitateur nui op-, re
et. je vous assure qu'on ne s'cnuui" poinL
pendant la demi-heure qu'il li'av iiile
.Je. sors des ivoitvelles GaUrirs imif
ébloui, mais toujours à mon idé 1 lixe du
passé, je me mets à la recherche des plus
vieilles maisons de llouen, non p >ur l'aire,
une comparaison, mais simpieui. nl p uir
me rendre compte, de ce qu'elles sont d • ve-
nues el des progrés que je soupe' m ne lLlIOI!/::;
Ollt dit faire avec, le temps.
Après avoir suivi la sombre rue ik U m-
neliers, me voici soudain devant le 1J1:l-
sin de vêtements des Abeilles* rue d • la
liépublique.
Le hasard des circonstances m'avait jus-
lemenl mis l'autr * jour sous les eux un
vieux numéro d'une bonne petite feuille
d'autan, la Chronique, de. Rouen, aujour-
d'hui disparue: un y faisait, déjà un pom-
peux éloge de la maison des A^etlUs ei cela,
datait du "il décembre 1 s»*>;ï 1 que serail-ce
si le rédacteur de cette époque lointaine la
rovoA ait aujourd'hui f
Fondée en 1 Sot» par AL Purisof. créaieur
de la Helle Jardinière, à Paris, et le promo-
teur,- à ce moment-là, de la confeclii'a : cel-
le maison, sous une direction sericu- pros-
péra, puis vint la guerre, le directeur mou-
l'ul: el les années île décadence succédèrent
aux jours prospères: co lui seulement i-n
l.S*r que "M. Claudel, confectionneur eu gros
à Paris, acheta cet établissement, le trans-
forma de fond eu comble cl en lil en quel-
ques années, non seulement la première
comme importance de la ville, mais encore
de toute la région normande, ou el1'('1 iL eut
bientôt vile l'ail de créer non seulement
dans la Seine Inférieure mais aussi dans
l'Kure, le Calvados, l'Orne el la rfanche.des
succursales qui, prdiUuil de la rèpulalieu
jusiiliée et méritée, de la maison-mère, ar-
rivé renl toutes à la prospérité.
Des lô maisons créées, M. Claudel en eé«
da une partie à ses principaux employés
celles qu'il a encore, doviendroni pour la
comme récompenses de leurs services: et
plupart à leur Iour la propriété de ceux qui
les dirige.nl: cesl la un système d encoura«
gcnionL au travailleur qu'il con\ieui juste-
ment d'applaudir.
Faire, bien el bon marché, c'est du r^este-
la devise do la maison: elle y par\ienl pai?
sa fabrication économique, la réduction de
frais de toute nature cl la suppre^sn-u de
loul iiiicruiédiairo, aussi a-l-elL cuseiAo,
malgré les multiples all'aires du même ::ei;.
re créées part oui, s<>n ancien pi^slr/e nuis*
ce que sa renommée ne fait que grandir
partout àlîouen comme au lla\:v. depuis
noire dépatrement jusqu'à l'aulreexh émilé
do la Normandie.
Tout, eu faisant ces ré'lexlous. je ea :ue
la rue Sainl-Uoniain que je lr:i\> rse dans
toute sa longueur, saluant an pa>sce>a
bicoque vermoulue el j'atleiu ; la rue des
Germes. -
Lu face île moi ] .u oucm'o une maison rc*
lativeuujnl ancienne, ce soui i<". m:\-M:"-ins
du Sans-Pareil, t'ont le momie 1 > ( onnait.
à Rouen, jftepuP- t s grandes dame-'. Mui
trouvent le^'-csonples soies, les lainages o>r«
les jolis rubans, jusqu'aux pe-
'I.il'" qui viennent y cherelnT
ln'S° TÔurnAlurea.
t.a- maison, si je ne me trompe, compte
déjà une vingtaine d'années d'existence,
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