bles, souvent faits pour nous quand le fermier prévoyait chez lui des travaux de longue durée. Plus tard, en ville, j'ai par- tagé quelquefois, avec les commères de Saint-François, le café au lait, offert de si grand coeur qu'il aurait été offensant de le refuser.
C'est avec complaisance et avec plaisir que je me reporte a ce temps où j'ai pu connaître et apprécier les braves gens avec lesquels je vivais.
Sans guère plus de culture que la plupart d'entre eux, je les écoutais avec le respect que m'inspiraient leur âge et leur carac- tère. J'ai compris depuis combien ces pauvres gens si résignés, ces pères de famille à qui manquait le nécessaire, avaient au coeur de noble et d'indépendante fierté.
MON GRAND-PÈRE
Mes grands-parents, après avoir exploité une ferme isolée sur le chemin du Fontenay, furent ensuite aubergistes à Rolle- ville, en face de l'église.
En même temps, mon grand-père était maître-maçon, et, à la fin de sa vie, il n'exerçait plus que cette seule profession ; du reste, elle avait toujours été la sienne et celle des quatre géné- rations qui l'avaient précédé, — les aînés portant comme lui le prénom d'Ambroise. Mais il n'occupait plus qu'un ouvrier qui, le plus souvent, travaillait chez mon père.
Mon grand-père nous racontait que ses parents, avec une partie des habitants de Saint-Martin-du-Bec, étaient jadis fré- quemment requis pour battre, à l'aide de grandes gaules, l'eau de l'étang qui entoure le château. Ils faisaient taire ainsi les grenouilles qui troublaient par leurs coassements le sommeil des seigneurs. Mais ils s'acquittaient de cette tâche en rechi- gnant, car ils auraient mieux aimé dormir eux-mêmes et répé- taient à chaque battement :
— Paix, p..., que Madam' dorme!
Il était bien un peu original, mon grand-père. Un premier janvier que je lui souhaitais une bonne année, il me répondit :
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