Titre : L'Universel : l'Évangile c'est la liberté ! / direction H. Huchet
Auteur : Mouvement pacifique chrétien de langue française. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1931-04-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32885496v
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 avril 1931 01 avril 1931
Description : 1931/04/01-1931/06/30. 1931/04/01-1931/06/30.
Description : Collection numérique : Fonds régional :... Collection numérique : Fonds régional : Haute-Normandie
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k45653163
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-45090
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 12/09/2017
33 e ANNÉE
TRIMESTRIEL
2 e TRIMESTRE
l UNIVERSEL
Fondé en 1898, supprimé par la censure militaire pendant la Guerre mondiale
Mouoement Pacifique Chrétien
« l’internationale de l’amour »
Directeur-Fondateur : Henri HUCHET.
Président d 1 Honneur : Rév. Docteur M. J. ELLIOTT
CONSEIL :
M me Henriette DUMESNIL-HUCHET, Secrétaire du Journal et du M. P. G.
P r Frédéric BONHOMME, Henri NADEL, P^ Hermann KUTTER
P r Joël THÉZARD, Louis GUÉTANT, Albert CASTIAUX, Dr Henry MARIAVE.
Miss P. H. PECKOVER, Claire GÉNIAUX, Mme MARFURT-TORFS,
Mme MEYNARD-WIEDMER, A. STILMANT-üFFERS, G. LUYTEN-BLOCK.
Les articles n’engagent que la responsabilité des rédacteurs.
ADMINISTRATION :
Abonnement
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Chèques postaux :
Un an. „
5 francs.
Docteur Marius DUMESNIL
Le numéro...
O fr. 50
PARIS n* 217.31
Souscriptions :
Membre adhérent 1 O francs.
Membre actif....... 20 francs.
Membre militant.,.... 50 francs
38 , Avenue Marceau, COURBEVOIE (Seine). Réceptions de 2 h. à 5 h. : Mardi, Jeudi, Samedi.
Le Péché d’Obéissance
« La discipline étant la force principale
des armées... »
Ce titre est pour le scandale des âmes
pieuses, des familles « bien pensantes », des
gouvernants et des puissants de ce monde
qui estiment et proclament que l'obéissance
(l’obéissance des autres à leur égard) est la
première des vertus.
Despotes d’Orient, tyrans de Sparte, ba- }
rons féodaux, rois et empereurs, prêtres et
papes, maîtres d'école et patrons, depuis des
siècles et des siècles réclament des multi
tudes l’obéissance et l’imposent par lacrainte,
par la violence, par les supplices.
Les « Droits de l’Homme et du Citoyen »
qui ont été une charte de la conscience hu
maine s’arrachant à la tyrannie par un effort
gigantesque sont en pratique contournés et
annihilés par les subtilités de la Loi, par
les ruses et la force de l’appareil policier et
judiciaire, par la puissance de l’argent et
l’Etat apporte aux individus principalement
des défenses, des obligations, de la coercition.
Nous avons vu disparaître de l’Europe les
derniers monarques absolus et le peuple croit
être libre parce qu’il a démoli la Bastille,
brûlé des palais et mis à mort des souve
rains. La tyrannie subsiste pourtant et con
tinue depuis des siècles à s’épanouir dans la
chose militaire.
C’est la tyrannie qui parque les humains
sur un territoire limité, comme des bestiaux
au pâturage qu’entourent les barbelés. Vous
voulez passer de l’autre côté ? Un gabelou,
un policier, un soldat vous arrêtent. Derniè
rement j’étais à Strasbourg et par le matin
du dimanche, voulant revoir le « Vater Rhein»
je fus au pont de Kehl. Je m’avançai jusqu’à
la rive mais un policier surgit de sa boîte :
« Défense de mettre le pied sur le pont sans
passeport ! » Quel symbole ! On appelle cet
état : la paix ! Défense de communiquer avec
les pelés, les galeux de l’autre côté si vous
n’avez préalablement l’estampille de l’Etat
et son contrôle en ce qu’il a de plus abject :
la police.
Sur le livret que possède tout Français dit
« libre » qui a eu « l’honneur de servir son
pays » figure une « nomenclature alpha
bétique des crimes et délits militaires et
peines y attachées ». La prison y est douceur,
les travaux forcés sanction naturelle et le
mot «mort» n’y revient pas moins de33fois.
Depuis Clovis ou Pierre le Grand le progrès
n'y paraît pas sensible.
A l’homme qui est incorporé dans « la
grande Muette » l’Etat, dont l’autorité s’étage
en cascades par les galons des chefs, com
mande : Obéis, marche, tue, sans savoir pour
quoi. Tue ceux d'en face qui parlent une
autre langue, tue ceux-ci qui manifestent
dans la rue, tue ces grévistes qui réclament
un meilleur salaire, tue ces indigènes qui
prétendent garder leur sol et leurs richesses,
tue quia sic regiplacuit , « car tel est notre bon
plaisir ».
Drapeaux, clairons et fanfares, que d’hor
reurs vous cachez ! Mensonges cyniques par
lesquels on entraîne à la guerre les « libres
citoyens ». Relisons mes amis les livres sa
lutaires des Demartial, des Dupin, etc., et le
tout récent du P r Barnes pour nous désin
toxiquer du mensonge officiel que nous res
pirons depuis des années et aujourd’hui
encore. Avec le mensonge la bêtise : chacun
sait la stupidité et l’inutilité des règlements
à la caserne, mais pendant la guerre que n’a-
t-on vu en fait d’ordres contradictoires, tels
ceux qui prescrivaient un jour à nos pa
trouilleurs de canonner les côtes du Maroc
et la semaine suivante d’amadouer les indi
gènes, ces marches et contremarches, ces
coups de main inutiles, ces attaques sans pré
paration qui se traduisaient toujours, hélas,
par des morts d’hommes. Mais où la stupi-
pité cédait le pas à l’horreur, c’était dans ce
« nettoyage de tranchées » dans ces condam
nations sans discussion prononcées par les
conseils de guerre, et dans ces «décimations»
où, pour « faire un exemple » ou prenait au j
Non possumus !
(Actes des^Apôtres 4,20)
hasard un homme sur dix dans un régiment
et on les fusillait. Lisez à ce sujet le récent
petit livre d’Henri Barbusse: Ce qui fut sera
pour y retrouver « l’atmosphère » de ces hor
reurs sans nom.
Ce qui dépasse ma compréhension c’est
qu’il se soit trouvé partout des hommes pour
décimer leurs camarades, pour fusiller sans
aucune raison leurs voisins de souffrance
qu’ils savaientinnocents. Criminels parobéis-
sance, tous ces soldats, c’est par peur et par
l’effet du dressage atavique qu’ils exécu
taient les ordres des grands chefs. Rayons le
mot « obéissance » et remplaçons le par celui
plus adéquat de « lâcheté ».
Obéissance grégaire, servilité, avilissement
cela justifie l’aphorisme de Barbusse « le
péché originel d’obéissance ».
Lâche abdication où s’éteignent la cons
cience, la raison, le sens moral ! « Quand
sortirons-nous des âges où les couleurs des uni
formes déteignent sur la peau des hommes»
(Barbusse op. cit. p. 158).
Mais le Christianisme, dont nous nous ré
clamons, n’enseigne-t-il pas l’obéissance ?
Une certaine obéissance sans doute, mais
pas celle que prônent les Eglises adultères
inféodées à l’Etat et les prêtres guerriers qui
bénissent les armées.
Jésus a désobéi aux prescriptions phari-
saïques, il a violé le sabbat. Et les apôtres,
aux magistrats qui voulaient interdire leur
propagande, ont fait cette fière réponse « Nous
ne pouvons ne pas parler » (actes 4 20 ) don
nant pour toujours aux objecteurs de cons
cience leur formule de principe : « On doit
obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (actes
5 2 9).
Les martyrs ont désobéi aux empereurs,
les Réformateurs ont bravé le bras séculier.
Tous ceux qui furent au cours des âges les
servants de l'idéal et les défenseurs des faibles
ont contrevenu, souvent au péril de leur vie
aux ordres des puissants. François d’Assise se
dépouillant de ses habits et les renvoyant à
son père pour suivre la voix intérieure nous
donne l’exemple de la liberté, et le mot d’ordre
de ‘l’énergie a été écrit sur la pierre par l’hé
roïne de la Tour de Constance « Résister 1 »
C'est pourquoi les « Résistants à la guerre»
les « conscientious objectors » sont dans la
vraie tradition chrétienne non souillée par
les collusions d’intérêts, en même temps qu’ils
nous doivent apparaître comme les prémices
de l’humanité future libre et régénérée. Plu
sieurs d’entreeux, dont nous parlâmes en ce
journal, sont encore dans les geôles de la Ré
publique ; et présentement en Hollande, terre
jadis accueillante aux persécutés, mille quatre
cent jeunes gens sont en prison pour avoir
refusé le service militaire. Honneur à eux, ils
rédiment le monde et révèlent à nos yeux
l’idée de l’homme si bas tombée dans l’ab
jection de la guerre !
Quand comprendra-t-on que, si la violence
destructive ne mène à rien, si la révolte
pour exalter les petits côtés de sa personna
lité est stérile, plus vaine encore et par dessus
tout avilissante est l’obéissance passive irrai
sonnée, « perinde ac cadaver». Monstrueuse
déformation au service des cupidités, elle dé
truit en l’homme le principe pensant et anes
thésie la conscience.
De cette obéissance perverse découlent les
horreurs collectives : spoliations, emprison
nements, massacres, inquisitions, guerres.
Il est sans doute une discipline indispen
sable, sans laquelle ne peut exister aucune
vie sociale, il la faut pour harmoniser le fonc
tionnement de tout organisme collectif aussi
bien que pour dompter l’égoïsme et favoriser
le progrès individuel. Mais cette discipline
vraie repose sur une obéissance intelligente,
volontaire et consciente du but qu’elle pour
suit.
La vraie obéissance est fière et libre. Jamais
elle ne ressemble à une abdication devant la
force, l’opinion, la routine, la sottise- Seules
les grandes âmes savent réellement obéir.
Obéir c’est soumettre à son moi supérieur
les instincts élémentaires, les réactions bru
tales, les multiples et protéiformes manifes
tations de l’égoïsme, c’est prendre conscience
de sa solidarité avec tous les autres hommes,
c’est renoncer à certaines satisfactions ou
aises personnelles, pour l’intérêt collectif,
c’est volontairement limiter son moi dans
l’extension superficielle pour, par l’approfon
dissement obscur et l’enrichissement silen
cieux des renoncements inconnus, aviver au
plus profond de soi la flamme d’amour qui
est l’inspiration, le ressort, la divine énergie
du SERVICE HUMAIN.
Croupissant dans la fange sanglante des
servilités ignobles, le monde ne sera sauvé
que par les consciences libres qui feront la
véritable révolution non pour des intérêts
individuels, non pour le profit d’une classe,
mais, après s’être dépouillés de leur égoïsme
et de toute peur, pour faire surgir la cons
cience des ténèbres, pour exalter la justice,
pour renverser les barrières factices de la
sottise, de la haine, de la cupidité, libérer
chaque individu de l’oppression et unifier le
genre humain.
Alors le péché d’obéissance passive et lâche
se transmuera en la sublime vertu de l’obéis
sance spirituelle, la conscience de la Loi
suprême et fidélité à y conformer sa vie,
l’obéissance supérieure par laquelle « celui
qui se perd se trouve » et joyeuse soumission
au Christ — j’entends le Christ intérieur —
auquel, spirituellement parlant, « obéir c'est
régner. »
D r M. DUMESNIL
mm
Vision sereine
Je porte en moi le culte de la vie de ceux
qui sont, de ceux qui seront ! Comme une
mère travaille au berceau de son nouveau-né,
ainsi je travaille pour la paix dans laquelle
grandiront les petits enfants que mes enfants
appellent dans leurs jeux. J’espère, pour tous
ceux qui viendront, avec d’autant plus de
ferveur que je vois nos contemporains préoc
cupés de jour en jour davantage de l'exis
tence des tout petits. Des sociétés s’emploient
à sauver les enfants de la misère et de la ma
ladie ; des efforts constants se poursuivent
dans notre \ieille Europe, des rivages
océaniques jusqu’aux confins de l’Oural, pour
dispenser à tous l’air et le soleil régénéra
teurs. Le droit de chaque enfant au bien-être
ne se discute plus.
Pourtant qui eût trouvé naturel à la fin du
xix e siècle de voir les enfants des concierges,
des domestiques et des ouvriers, prendre leurs
ébats à la mer ou à la campagne, comme les
enfants de la bourgeoisie ? Combien de
femmes, d’humble condition, qui n'osèrent
pas, en ce passé si pioche, payer, même au
prix de leur propre labeur, un séjour privi
légié à leurs enfants délicats, dans la crainte
de s’attirer les reproches des patrons indignés
par cette fantaisie hors-classe ? Réjouissons-
nous! ce bon vieux temps est bien trépassé;
non seulement les droits de l’enfant à la vie,
sans distinction de classe, de pays ou de race,
ont été proclamés par la déclaration de Genève,
mais ils commencent à être partout reconnus
et respectés. En France même, où l’intérêt
officiel porté à l’enfant ne représente que
les 6 0/0 du budget, le public instruit ou
ignorant est gagné à la cause et se passionne
pour toutes les activités qui travaillent à amé
liorer le sort de l’enfant.
En communion de pensée et d’action avec
tous ceux qui cherchent ainsi à diminuer
l’héritage de souffrances des générations à
venir, la mission des amis de la paix est de
travailler à la santé intellectuelle des enfants
destinés, nous le croyons fermement, à réa
liser l’ère de coopération des peuples qui se
dessine malgré la lenteur, les délais et les an
tagonismes des Etats représentés à Genève.
L’infatigable labeur, l’acharnement lucide,
l’opiniâtre ferveur de M. Briand, se heurtent
chaque jour aux montagnes d’obstacles dres
sées par des peuples que la faim, et non la
fraternité, guide vers la paix, par des généra
tions qui ont été entraînées à servir l’armée et
non l’humanité, et dont on a toujours excité
l’esprit de compétition au lieu de susciter
celui d'entr’aide. Mais la faim réunit aujour
d’hui à la même table les hommes que demain
un commun esprit animera et si ce ne sont
eux tous leurs enfants que nous allons en
traîner à servir la paix.
Les Romains formèrent des citoyens pour
conquérir et exploiter les autres peuples. Ba
sée sur la force et l’orgueil, cette civilisation,
trop longtemps admirée et prise pour mo
dèle, n'a plus pour nous qu’un intérêt histo
rique. Ceux qui ont essayé de la remettre en
honneur se voient obligés de prendre, avec
les autres, le chemin de l'entr’aide pacifique.
Les hommes d’Etat, dont le souci principal
reste l’opportunité, s'essaient à penser et à
agir en Européens et même en citoyens du
monde. Les intérêts des nations se chevauchent
et leur indissoluble union commande à cha
cune de songer à ses voisines autant qu’à soi-
même. Voilà le champ de courses sur lequel
nos enfants vont courir, voilà le monde au
quel le bon sens commande de les préparer
et pour lequel il est nécessaire mais non suf
fisant d’être sain et fort. La civilisation nou
velle, dont l’heure est venue de naître, ne va
pas s’enfanter sans périls et douleur ; pour
croître et durer, il lui faut l’aide pratique et
fraternelle de la jeunesse du monde. La coo
pération des peuples, la Paix, la Fraternité,
ces chimères dédaignées, voilà qu’on s’aperçoit
qu’elles sont les bons outils dont on attend
le meilleur travail. C’est à leur maniement
qu’il nous faut tout de suite préparer les pre
mières générations qui verront les Etats-Unis
d’Europe et la fin des armements.
Que sur la terre entière grandisse, voué au
service de la paix, le peuple unique des en
fants du monde !
Henriette DUMESNIL-HUCHET.
Q1HIHBI1BIII1IIIIIII
A EUROPOLICE
Je réponds à votre désir , et j’espère que je ne
serai pas le seul. Dans le M. P. C. il y a place
pour toutes les opinions susceptibles de grouper
en un faisceau de bonnes volontés tous les vrais
pacifiques.
Votre projet de désarmement est intéressant, je
me garderai bien de le critiquer , mais j’avoue
ma préférence pour une armée de volontaires
comme celle de nos amis anglo-saxons et de nos
camarades austro-allemands.
Ou encore une milice internationale genre
suisse, composée d’un pourcentage national
selon le chiffre de la population à défendre.
Cette organisation militaire de citoyens soldats
devrait être démocratique, sans officiers de car
rière à l’exception des Instructeurs. et bien en
tendu sans Légion d’Honneur, Médaille Mili
taire et Croix de Guerre qui sont des hochets
de vanité militariste. Cette force pourrait être
placée sous le contrôle de la S. D. N. et à la
disposition du Tribunal d’Arbitrage.
Les budgets devraient être limités pour ne pas
gaspiller an argent qui serait mieux employé à
des œuvres sociales, et non comme à présent où
nous voyons des dépenses de mort, atteindre
pour le Japon 33 0/0, la France 31 0/0,
l'Italie 3 o 0/0, U Angleterre 29 0/0, la Suisse
2 o 0/0, la Belgique 16 0/0, la Hollande 15 0/0
et le Danemark lù 0/0.
Les objecteurs de conscience devraient aussi
être respectés, en les affectant à des services civils
et humanitaires, comme la gendarmerie, la police,
les pompiers, les sauveteurs , les infirmiers, etc...
Ces hommes pourraient ainsi accomplir leur
devoir de solidarité en offrant selon la parole
biblique : leur corps en vivant sacrifice agréable
à Dieu.
J. CHATEAUTÉBAUD.
TRIMESTRIEL
2 e TRIMESTRE
l UNIVERSEL
Fondé en 1898, supprimé par la censure militaire pendant la Guerre mondiale
Mouoement Pacifique Chrétien
« l’internationale de l’amour »
Directeur-Fondateur : Henri HUCHET.
Président d 1 Honneur : Rév. Docteur M. J. ELLIOTT
CONSEIL :
M me Henriette DUMESNIL-HUCHET, Secrétaire du Journal et du M. P. G.
P r Frédéric BONHOMME, Henri NADEL, P^ Hermann KUTTER
P r Joël THÉZARD, Louis GUÉTANT, Albert CASTIAUX, Dr Henry MARIAVE.
Miss P. H. PECKOVER, Claire GÉNIAUX, Mme MARFURT-TORFS,
Mme MEYNARD-WIEDMER, A. STILMANT-üFFERS, G. LUYTEN-BLOCK.
Les articles n’engagent que la responsabilité des rédacteurs.
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Docteur Marius DUMESNIL
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O fr. 50
PARIS n* 217.31
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Membre adhérent 1 O francs.
Membre actif....... 20 francs.
Membre militant.,.... 50 francs
38 , Avenue Marceau, COURBEVOIE (Seine). Réceptions de 2 h. à 5 h. : Mardi, Jeudi, Samedi.
Le Péché d’Obéissance
« La discipline étant la force principale
des armées... »
Ce titre est pour le scandale des âmes
pieuses, des familles « bien pensantes », des
gouvernants et des puissants de ce monde
qui estiment et proclament que l'obéissance
(l’obéissance des autres à leur égard) est la
première des vertus.
Despotes d’Orient, tyrans de Sparte, ba- }
rons féodaux, rois et empereurs, prêtres et
papes, maîtres d'école et patrons, depuis des
siècles et des siècles réclament des multi
tudes l’obéissance et l’imposent par lacrainte,
par la violence, par les supplices.
Les « Droits de l’Homme et du Citoyen »
qui ont été une charte de la conscience hu
maine s’arrachant à la tyrannie par un effort
gigantesque sont en pratique contournés et
annihilés par les subtilités de la Loi, par
les ruses et la force de l’appareil policier et
judiciaire, par la puissance de l’argent et
l’Etat apporte aux individus principalement
des défenses, des obligations, de la coercition.
Nous avons vu disparaître de l’Europe les
derniers monarques absolus et le peuple croit
être libre parce qu’il a démoli la Bastille,
brûlé des palais et mis à mort des souve
rains. La tyrannie subsiste pourtant et con
tinue depuis des siècles à s’épanouir dans la
chose militaire.
C’est la tyrannie qui parque les humains
sur un territoire limité, comme des bestiaux
au pâturage qu’entourent les barbelés. Vous
voulez passer de l’autre côté ? Un gabelou,
un policier, un soldat vous arrêtent. Derniè
rement j’étais à Strasbourg et par le matin
du dimanche, voulant revoir le « Vater Rhein»
je fus au pont de Kehl. Je m’avançai jusqu’à
la rive mais un policier surgit de sa boîte :
« Défense de mettre le pied sur le pont sans
passeport ! » Quel symbole ! On appelle cet
état : la paix ! Défense de communiquer avec
les pelés, les galeux de l’autre côté si vous
n’avez préalablement l’estampille de l’Etat
et son contrôle en ce qu’il a de plus abject :
la police.
Sur le livret que possède tout Français dit
« libre » qui a eu « l’honneur de servir son
pays » figure une « nomenclature alpha
bétique des crimes et délits militaires et
peines y attachées ». La prison y est douceur,
les travaux forcés sanction naturelle et le
mot «mort» n’y revient pas moins de33fois.
Depuis Clovis ou Pierre le Grand le progrès
n'y paraît pas sensible.
A l’homme qui est incorporé dans « la
grande Muette » l’Etat, dont l’autorité s’étage
en cascades par les galons des chefs, com
mande : Obéis, marche, tue, sans savoir pour
quoi. Tue ceux d'en face qui parlent une
autre langue, tue ceux-ci qui manifestent
dans la rue, tue ces grévistes qui réclament
un meilleur salaire, tue ces indigènes qui
prétendent garder leur sol et leurs richesses,
tue quia sic regiplacuit , « car tel est notre bon
plaisir ».
Drapeaux, clairons et fanfares, que d’hor
reurs vous cachez ! Mensonges cyniques par
lesquels on entraîne à la guerre les « libres
citoyens ». Relisons mes amis les livres sa
lutaires des Demartial, des Dupin, etc., et le
tout récent du P r Barnes pour nous désin
toxiquer du mensonge officiel que nous res
pirons depuis des années et aujourd’hui
encore. Avec le mensonge la bêtise : chacun
sait la stupidité et l’inutilité des règlements
à la caserne, mais pendant la guerre que n’a-
t-on vu en fait d’ordres contradictoires, tels
ceux qui prescrivaient un jour à nos pa
trouilleurs de canonner les côtes du Maroc
et la semaine suivante d’amadouer les indi
gènes, ces marches et contremarches, ces
coups de main inutiles, ces attaques sans pré
paration qui se traduisaient toujours, hélas,
par des morts d’hommes. Mais où la stupi-
pité cédait le pas à l’horreur, c’était dans ce
« nettoyage de tranchées » dans ces condam
nations sans discussion prononcées par les
conseils de guerre, et dans ces «décimations»
où, pour « faire un exemple » ou prenait au j
Non possumus !
(Actes des^Apôtres 4,20)
hasard un homme sur dix dans un régiment
et on les fusillait. Lisez à ce sujet le récent
petit livre d’Henri Barbusse: Ce qui fut sera
pour y retrouver « l’atmosphère » de ces hor
reurs sans nom.
Ce qui dépasse ma compréhension c’est
qu’il se soit trouvé partout des hommes pour
décimer leurs camarades, pour fusiller sans
aucune raison leurs voisins de souffrance
qu’ils savaientinnocents. Criminels parobéis-
sance, tous ces soldats, c’est par peur et par
l’effet du dressage atavique qu’ils exécu
taient les ordres des grands chefs. Rayons le
mot « obéissance » et remplaçons le par celui
plus adéquat de « lâcheté ».
Obéissance grégaire, servilité, avilissement
cela justifie l’aphorisme de Barbusse « le
péché originel d’obéissance ».
Lâche abdication où s’éteignent la cons
cience, la raison, le sens moral ! « Quand
sortirons-nous des âges où les couleurs des uni
formes déteignent sur la peau des hommes»
(Barbusse op. cit. p. 158).
Mais le Christianisme, dont nous nous ré
clamons, n’enseigne-t-il pas l’obéissance ?
Une certaine obéissance sans doute, mais
pas celle que prônent les Eglises adultères
inféodées à l’Etat et les prêtres guerriers qui
bénissent les armées.
Jésus a désobéi aux prescriptions phari-
saïques, il a violé le sabbat. Et les apôtres,
aux magistrats qui voulaient interdire leur
propagande, ont fait cette fière réponse « Nous
ne pouvons ne pas parler » (actes 4 20 ) don
nant pour toujours aux objecteurs de cons
cience leur formule de principe : « On doit
obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (actes
5 2 9).
Les martyrs ont désobéi aux empereurs,
les Réformateurs ont bravé le bras séculier.
Tous ceux qui furent au cours des âges les
servants de l'idéal et les défenseurs des faibles
ont contrevenu, souvent au péril de leur vie
aux ordres des puissants. François d’Assise se
dépouillant de ses habits et les renvoyant à
son père pour suivre la voix intérieure nous
donne l’exemple de la liberté, et le mot d’ordre
de ‘l’énergie a été écrit sur la pierre par l’hé
roïne de la Tour de Constance « Résister 1 »
C'est pourquoi les « Résistants à la guerre»
les « conscientious objectors » sont dans la
vraie tradition chrétienne non souillée par
les collusions d’intérêts, en même temps qu’ils
nous doivent apparaître comme les prémices
de l’humanité future libre et régénérée. Plu
sieurs d’entreeux, dont nous parlâmes en ce
journal, sont encore dans les geôles de la Ré
publique ; et présentement en Hollande, terre
jadis accueillante aux persécutés, mille quatre
cent jeunes gens sont en prison pour avoir
refusé le service militaire. Honneur à eux, ils
rédiment le monde et révèlent à nos yeux
l’idée de l’homme si bas tombée dans l’ab
jection de la guerre !
Quand comprendra-t-on que, si la violence
destructive ne mène à rien, si la révolte
pour exalter les petits côtés de sa personna
lité est stérile, plus vaine encore et par dessus
tout avilissante est l’obéissance passive irrai
sonnée, « perinde ac cadaver». Monstrueuse
déformation au service des cupidités, elle dé
truit en l’homme le principe pensant et anes
thésie la conscience.
De cette obéissance perverse découlent les
horreurs collectives : spoliations, emprison
nements, massacres, inquisitions, guerres.
Il est sans doute une discipline indispen
sable, sans laquelle ne peut exister aucune
vie sociale, il la faut pour harmoniser le fonc
tionnement de tout organisme collectif aussi
bien que pour dompter l’égoïsme et favoriser
le progrès individuel. Mais cette discipline
vraie repose sur une obéissance intelligente,
volontaire et consciente du but qu’elle pour
suit.
La vraie obéissance est fière et libre. Jamais
elle ne ressemble à une abdication devant la
force, l’opinion, la routine, la sottise- Seules
les grandes âmes savent réellement obéir.
Obéir c’est soumettre à son moi supérieur
les instincts élémentaires, les réactions bru
tales, les multiples et protéiformes manifes
tations de l’égoïsme, c’est prendre conscience
de sa solidarité avec tous les autres hommes,
c’est renoncer à certaines satisfactions ou
aises personnelles, pour l’intérêt collectif,
c’est volontairement limiter son moi dans
l’extension superficielle pour, par l’approfon
dissement obscur et l’enrichissement silen
cieux des renoncements inconnus, aviver au
plus profond de soi la flamme d’amour qui
est l’inspiration, le ressort, la divine énergie
du SERVICE HUMAIN.
Croupissant dans la fange sanglante des
servilités ignobles, le monde ne sera sauvé
que par les consciences libres qui feront la
véritable révolution non pour des intérêts
individuels, non pour le profit d’une classe,
mais, après s’être dépouillés de leur égoïsme
et de toute peur, pour faire surgir la cons
cience des ténèbres, pour exalter la justice,
pour renverser les barrières factices de la
sottise, de la haine, de la cupidité, libérer
chaque individu de l’oppression et unifier le
genre humain.
Alors le péché d’obéissance passive et lâche
se transmuera en la sublime vertu de l’obéis
sance spirituelle, la conscience de la Loi
suprême et fidélité à y conformer sa vie,
l’obéissance supérieure par laquelle « celui
qui se perd se trouve » et joyeuse soumission
au Christ — j’entends le Christ intérieur —
auquel, spirituellement parlant, « obéir c'est
régner. »
D r M. DUMESNIL
mm
Vision sereine
Je porte en moi le culte de la vie de ceux
qui sont, de ceux qui seront ! Comme une
mère travaille au berceau de son nouveau-né,
ainsi je travaille pour la paix dans laquelle
grandiront les petits enfants que mes enfants
appellent dans leurs jeux. J’espère, pour tous
ceux qui viendront, avec d’autant plus de
ferveur que je vois nos contemporains préoc
cupés de jour en jour davantage de l'exis
tence des tout petits. Des sociétés s’emploient
à sauver les enfants de la misère et de la ma
ladie ; des efforts constants se poursuivent
dans notre \ieille Europe, des rivages
océaniques jusqu’aux confins de l’Oural, pour
dispenser à tous l’air et le soleil régénéra
teurs. Le droit de chaque enfant au bien-être
ne se discute plus.
Pourtant qui eût trouvé naturel à la fin du
xix e siècle de voir les enfants des concierges,
des domestiques et des ouvriers, prendre leurs
ébats à la mer ou à la campagne, comme les
enfants de la bourgeoisie ? Combien de
femmes, d’humble condition, qui n'osèrent
pas, en ce passé si pioche, payer, même au
prix de leur propre labeur, un séjour privi
légié à leurs enfants délicats, dans la crainte
de s’attirer les reproches des patrons indignés
par cette fantaisie hors-classe ? Réjouissons-
nous! ce bon vieux temps est bien trépassé;
non seulement les droits de l’enfant à la vie,
sans distinction de classe, de pays ou de race,
ont été proclamés par la déclaration de Genève,
mais ils commencent à être partout reconnus
et respectés. En France même, où l’intérêt
officiel porté à l’enfant ne représente que
les 6 0/0 du budget, le public instruit ou
ignorant est gagné à la cause et se passionne
pour toutes les activités qui travaillent à amé
liorer le sort de l’enfant.
En communion de pensée et d’action avec
tous ceux qui cherchent ainsi à diminuer
l’héritage de souffrances des générations à
venir, la mission des amis de la paix est de
travailler à la santé intellectuelle des enfants
destinés, nous le croyons fermement, à réa
liser l’ère de coopération des peuples qui se
dessine malgré la lenteur, les délais et les an
tagonismes des Etats représentés à Genève.
L’infatigable labeur, l’acharnement lucide,
l’opiniâtre ferveur de M. Briand, se heurtent
chaque jour aux montagnes d’obstacles dres
sées par des peuples que la faim, et non la
fraternité, guide vers la paix, par des généra
tions qui ont été entraînées à servir l’armée et
non l’humanité, et dont on a toujours excité
l’esprit de compétition au lieu de susciter
celui d'entr’aide. Mais la faim réunit aujour
d’hui à la même table les hommes que demain
un commun esprit animera et si ce ne sont
eux tous leurs enfants que nous allons en
traîner à servir la paix.
Les Romains formèrent des citoyens pour
conquérir et exploiter les autres peuples. Ba
sée sur la force et l’orgueil, cette civilisation,
trop longtemps admirée et prise pour mo
dèle, n'a plus pour nous qu’un intérêt histo
rique. Ceux qui ont essayé de la remettre en
honneur se voient obligés de prendre, avec
les autres, le chemin de l'entr’aide pacifique.
Les hommes d’Etat, dont le souci principal
reste l’opportunité, s'essaient à penser et à
agir en Européens et même en citoyens du
monde. Les intérêts des nations se chevauchent
et leur indissoluble union commande à cha
cune de songer à ses voisines autant qu’à soi-
même. Voilà le champ de courses sur lequel
nos enfants vont courir, voilà le monde au
quel le bon sens commande de les préparer
et pour lequel il est nécessaire mais non suf
fisant d’être sain et fort. La civilisation nou
velle, dont l’heure est venue de naître, ne va
pas s’enfanter sans périls et douleur ; pour
croître et durer, il lui faut l’aide pratique et
fraternelle de la jeunesse du monde. La coo
pération des peuples, la Paix, la Fraternité,
ces chimères dédaignées, voilà qu’on s’aperçoit
qu’elles sont les bons outils dont on attend
le meilleur travail. C’est à leur maniement
qu’il nous faut tout de suite préparer les pre
mières générations qui verront les Etats-Unis
d’Europe et la fin des armements.
Que sur la terre entière grandisse, voué au
service de la paix, le peuple unique des en
fants du monde !
Henriette DUMESNIL-HUCHET.
Q1HIHBI1BIII1IIIIIII
A EUROPOLICE
Je réponds à votre désir , et j’espère que je ne
serai pas le seul. Dans le M. P. C. il y a place
pour toutes les opinions susceptibles de grouper
en un faisceau de bonnes volontés tous les vrais
pacifiques.
Votre projet de désarmement est intéressant, je
me garderai bien de le critiquer , mais j’avoue
ma préférence pour une armée de volontaires
comme celle de nos amis anglo-saxons et de nos
camarades austro-allemands.
Ou encore une milice internationale genre
suisse, composée d’un pourcentage national
selon le chiffre de la population à défendre.
Cette organisation militaire de citoyens soldats
devrait être démocratique, sans officiers de car
rière à l’exception des Instructeurs. et bien en
tendu sans Légion d’Honneur, Médaille Mili
taire et Croix de Guerre qui sont des hochets
de vanité militariste. Cette force pourrait être
placée sous le contrôle de la S. D. N. et à la
disposition du Tribunal d’Arbitrage.
Les budgets devraient être limités pour ne pas
gaspiller an argent qui serait mieux employé à
des œuvres sociales, et non comme à présent où
nous voyons des dépenses de mort, atteindre
pour le Japon 33 0/0, la France 31 0/0,
l'Italie 3 o 0/0, U Angleterre 29 0/0, la Suisse
2 o 0/0, la Belgique 16 0/0, la Hollande 15 0/0
et le Danemark lù 0/0.
Les objecteurs de conscience devraient aussi
être respectés, en les affectant à des services civils
et humanitaires, comme la gendarmerie, la police,
les pompiers, les sauveteurs , les infirmiers, etc...
Ces hommes pourraient ainsi accomplir leur
devoir de solidarité en offrant selon la parole
biblique : leur corps en vivant sacrifice agréable
à Dieu.
J. CHATEAUTÉBAUD.
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