Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1902-04-12
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 avril 1902 12 avril 1902
Description : 1902/04/12 (N311). 1902/04/12 (N311).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263510r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
r m.
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
s:
N°
— SI J »1
Année
Samedi 12 Avril 1902.
Réveil
Havre
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET REDACTION
15 , rue CASIMIR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction.... Alfred Henri
L’Imprimeur-Gérant v. LE ROY
Prix des Insertions :
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50 »
Candidats
Allez par les sentiers et par les
chemins, pauvres pèlerins de la po
litique, que conduit l’ambition ou le
devoir; allez de bourg en bourg, de
hameau en hameau, de porte en
porte, voir l’électeur qui tient dans
ses mains votre destinée.
Vous vous demandez parfois avec
inquiétude quel sera son arrêt et lui,
qui a le sentiment de sa puissance
du moment, a souvent des malices;
il se plaît à inquiéter le candidat qui
sollicite son suffrage — ou bien en
core il opine du bonnet, il trinque
volontiers, il a même des paroles
avenantes, ce qui ne l’empêche pas
au jour décisif de voter selon son
opinion depuis longtemps arrêtée.
Car il ne faut point se figurer que
l’électeur se retourne aussi facile
ment que cela. Même lors des grands
courants d’opinion qui ont boule
versé la France, les conséquences
de ces mouvements n’ont eu guère
d’influence sur l’état général de
l’opinion.
Voyez le Seize-Mai, voyez le Bou
langisme, voyez l’affaire Dreyfus :
il en est résulté un peu d’efferves
cence, une modification dans le clas
sement des partis, mais l’évolution
politique a continué de se pour
suivre dans le même sens.
Peut-être même, de ces efforts
pour s’opposer à une loi qui paraît
fatale, est-il né des élans qui ont
accentué la marche vers les buts
extrêmes.
Cette constatation doit faire ré
fléchir ceux qui prétendent que leurs
moyens de persuasion arriyeront à
détourner, en quelques jours, le
corps électoral du chemin oh il est
engagé.
Quelques paroles convaincues ou
habiles peuvent déterminer une ap
probation immédiate, mais que la
réflexion détruit en général presque
aussitôt, si l’esprit n’a pas été d’abord
préparé.
De cruelles déceptions attendent
donc les candidats qui se figurent
qu’il suffit de tournées bruyantes,
de nombreux discours chargés de
réformes, pour empaumer les élec
teurs et les retourner comme un
gant.
Par bonheur, l’esprit public n’est
pas aussi mobile.
Chacun a son opinion réfléchie,
résultant sinon de raisonnements
très savants, du moins d’observa
tions personnelles qui ont leur prix.
- La politique a, en effet, son action
immédiate sur la vie, puisque, en
dernier ressort, elle a pour but de
nous rendre l’existence meilleure.
Cette unique considération suffit
dès lors à faire l’opinion de la grande
majorité des gens, qui n’ont d’autre
préoccupation que de savoir quelle
est la doctrine la plus avantageuse
pour leurs intérêts.
Le suffrage universel est ainsi
arrivé à donner son orientation ac
tuelle à la politique ; et cela pas tout
d’un coup, comme nous le disions
en commençant, mais par une pro
gression constante, dont la marche
a été à peu près régulière depuis
trente ans.
Pour croire que quelques semaines
suffisent à modifier une opinion aussi
lentement formée, il faut ne pas se
douter de la sincérité des convic
tions dans le peuple et avoir une
confiance exagérée dans ses propres
forces.
Tous ceux qui ont pratiqué la po
litique savent que ce n’est qu’avec
des années et des années que l’on
peut espérer orienter différemment
les idées de ceux qui vous entourent.
Il est nécessaire de se répéter bien
des fois pour arriver a les cou-
vaincre, car le temps n’est plus oh
les électeurs acceptaient sans dis
cussion les opinions toutes faites.
Voyez le temps qu’il a fallu pour
conquérir certaines circonscriptions
à la République ; plusieurs ne l’ont
même pas encore acceptée.
Il n’y a d’exception que là oh des
événements particuliers ont rendu
l’opinion plus impresssionnable et
plus mobile. Mais ce ne sont que
des minorités peu nombreuses ; P en-
avoir longtemps pratiqués. Il faut
s’être pénétré non seulement de leurs
besoins, mais encore de leurs tradi
tions et de leur esprit, pour qu’ils
se donnent à vous.
C’est pourquoi l’on a tort de rire
de la vieille formule qui se retrouve
encore dans les professions de foi :
« Né et élevé parmi vous... >
Elle n’est point si ridicule que cela.
Elle dit : « Je suis des vôtres, vous
me connaissez depuis mon enfance,
vous savez donc sans qu’il soit be
soin de tant de paroles, si je suis
digne de vous représenter ».
C’est peut-être un peu simple, un
peu familier, à la bonne franquette
— mais c’est sûr, amical et confiant,
et chacun sait d’avance à quoi s’en
tenir.
Il n’est pas pour un candidat de
meilleure recommandation qu’une
vie passée au milieu de ceux dont
il sollicite les suffrages, il n’est point
pour les électeurs de meilleures ga
ranties.
François Dépassé.
LA LUTTE
contre le Nationalisme
M. Barthou, ancien ministre du cabinet
Méline, rendant compte de son mandat à
Oloron, devant ses électeurs, a prononcé
un discours-programme dont nous déta
chons le passage suivant :
Adversaire irréductible du natio-
. . nalisme, qui est le masque nouveau
semble des circonscriptions electo- ff e l’éternelle entreprise cléricale, j’ai
raies échappe à ce danger de sur- approuvé les mesures de combat prises
prises possibles.
Nous employons à dessein le mot
dangers, car les votes d’emballe
ment sont des manifestations irré
contre lui, et notamment les disposi
tions relatives aux congrégations re
ligieuses qui, rigoureusement appli
quées, enlèveront au cléricalisme son
meilleur instrument et son arme de
fléchies qui ne valent rien jamais, guerre favorite.
En matière d’élections comme en
toutes choses, le premier devoir est
de se rendre bien compte de ce que
l’on fait, de connaître, non pas su
perficiellement mais à fond, les can
didats qui sollicitent vos suffrages.
Vous voulez notre confiance, mon
bonmonsieur; je ne dis pas que vous
ne la méritiez point, mais combien
valent mieux que tous les discours
et toutes les présentations, des rela
tions suivies qui ont permis de s’ap
précier et de se comprendre, qui
sont la meilleure garantie d’un par
fait accord.
Voilà pourquoi les candidats du
pays, familiers des électeurs, con
naissant d’intuition leurs besoins et
sachant les prévenir, parlant leur
langue, au courant des moindres
nuances de l’opinion, seront toujours
et avec raison les mieux accueillis.
En votant pour eux, on se borne
à leur témoigner sa confiance ; on
s’en remet à eux pour le reste, sa
chant qu’ils s’en acquitteront au
mieux. Il y a identification aussi
complète que possible entre l’élec
teur et l'élu.
La confiance des électeurs ne se
gagne pas en un . jour. Il faut les
La lutte n’est pas finie. Ce n’est
pas aux républicains qu’il convient
de prêcher une trêve contre laquelle
se déclarent et s’exercent partout,
sous une forme ou sous une autre, les
passions déchaînées du nationalisme.
De Paris, qu’il a conquis par surprise,
il prétend gagner la province. Mais
les départements opposeront au nou
veau boulangisme la résistance répu
blicaine qui vainquit son aîné.
Comment donc le pays pourrait-il
se laisser égarer par cette monstrueuse
équivoque qui associe, pour le sur
prendre, les réductions et les menaces ?
Le nationalisme n’est pas un parti
avec une doctrine, une méthode, un
programme. C’est une coalition in
forme de déceptions et de rancunes
d’ambitionsetd’appétits. Son triomphe
serait le signal même de la défaite
Tel apôtre véhément de l’impôt pro
gressif y coudoie les partisans arrié-
riés de la conservation sociale. Des
francs-maçons égarés y sourient aux
congrégations rebelles. Tel ancien
membre de la Commune s’y rencontre
avec d’anciens ministres de la guerre.
Les juifs non convertis y font pro
fession d’antisémitisme. L’Académie
française descond dans la rue et frotte
ses palmes vertes aux blouses blanches
des camelots. Des ministres congédiés
du 16 Mai se réconcilient avec la réac
tion qui les chassa du pouvoir. Le
boulangisme lui-même ne nous offrit
pas un aussi étrange assemblage, Au
fond, c’est toujours contre la Répu
blique, la même coalition sous un
nom différent, et le masque d’emprunt
sous lequel il se cache ne réussit pas
à dissimuler cette suprême tentative
du cléricalisme militant. Toute com
plicité avec le nationalisme est ainsi
un crime contre la République. Le
dédain n’est pas une attitude, et le
silence risque de passer pour une
complicité. Je tiens, pour ma part, à
répudier toute équivoque et à mériter,
par mes déclarations, des attaques et
des injures qui sont, pour un républi
cain, une garantie et un honneur.
AFPE AUX ÉLECTEURS
Manifeste de TEnian Républicaine
et de la Gauche Démocra
tique du Sénat
Les groupes de l’Union républicaine
et de la Gauche démocratique, qui
constituent la majorité du Sénat (180
membres) et comptent beaucoup des
fondateurs de la République et amis
de Gambetta, ont donné mission à
leur bureaux de rédiger et d'adresser
un appel aux électeurs républicains.
En, conséquence, les deux bureaux,
après s’être concertés, ont arrêté le
texte de l’adresse suivante :
Chers concitoyens,
La République va subir un nouvel as
saut de la part de ses adversaires coalisés.
Bien peu d’entre eux auront le courage
d’arborer leur drapeau, la franchise de
dévoiler leurs visées, leur véritable pro
gramme, ce ne sera qu’un parti sans nom
retranché derrière les obscurités et les
perfidies de l’équivoque.
Pour troubler le pays, ils prodiguent
l’argent; ils se vantent de remporter la
victoire, bien que dans toutes leurs entre
prises depuis le renversement de l’Em
pire ils se soient constamment brisés
contre le bon sens avisé, l’honnêteté in
corruptible des électeurs français, leur
attachement profond et réfléchi aux insti
tutions républicaines.
Vainqueurs, ils se .déchireront entre
eux, impuissants à rien fonder. Il importe
néanmoins de signaler des manœuvres
contre lesquelles tous les républicains
sincères ont le devoir de s’unir dans un
mouvement irrésistible de solidarité dé
mocratique.
Agiter des fantômes, prévoir des catas
trophes, dénaturer les faits, se servir des
idées les plus hautes et les plus chères à
ja nation pour les réduire à leur propre
taille, les ravaler jusqu’à en faire des
instruments de discorde ; mépriser le suf
frage universel au point de chercher à le
corrompre ; accumuler les mensonges de
telle façon qu'il devienne difficile de dis
cerner la vérité ; représenter la France
couverte de ruines, courant à la banque
route et en proie à la trahison, tels sont
les principaux moyens employés couram
ment par les ennemis de la République.
Par l’exagération et la mauvaise foi de
ces attaques, ils permettent à tous les
esprits judicieux de les reconnaître aisé
ment sous le masque, bien qu’ils se ré
pandent en protestation de respect pour
la forme du gouvernement. .
Non, il n’est pas vrai que la France soit
actuellement la nation qu’ils nous dé
peignent; il est certain au contraire que,
cessant d’étre condamnée à l’isolement et
au silence, elle s’est relevée par la Répu
blique, du triste état où l’avaient amenée
les fautes du pouvoir personnel. Elle a
conclu et consolidé une alliance qui est
un précieux gage de la paix, et repris son
On traite à forfait
rôle et son influence dans les conseils du
monde.
Il n’est pas vrai que l’amour de la Pa
trie soit le privilège de quelques-uns ; il
est certain au contraire que l’intolérable
prétention de monopoliser le patriotisme,
de mettre des Français hors du patrimoine
commun, héritage des souffrances et des
gloires de nos pères, est une cause de
désunion et de haine entre les citoyens,
et, par suite, d’affaiblissement de la Pa
trie.
Il n’est pas vrai que l’armée ne soit pas
respectée dans son honneur et dans ses
intérêts qui se confondent avec l’honneur
et l’intérêt de la Nation, qu’elle soit affai
blie et désorganisée; il est certain au con
traire que l’armée nationale est l’objet de
la sollicitude et de l’affection du Parle
ment et du pays ; il est certain que l’ordre
est rétabli à tous les degrés, là où s’etaient
révélés de dangereux symptômes d'indis
cipline et d’insubordination.
Il n’est pas vrai que la France soit ap
pauvrie et ruinée ; il est certain au con
traire que, mutilée, rançonnée, ruinée à
la suite de la guerre de 1870, elle a refait
tout son outillage, développé le réseau
des voies ferrées, creusé des canaux, ap
profondi des ports, et dépensé des som
mes énormes pour l’enseignement public,
l’armée, la marine, et aussi pour consti
tuer son domaine colonial.
Les deux tiers de notre dette sont à la
charge du régime du Deux-Décembre ;
sous ce régime, elle s’est augmentée de 8
milliards ; les conséquences directes de la
guerre ont coûté en outre à notre pays,
d’après les calculs de l’honorable M. Léon
Say, 11 milliards 500 millions. C’est donc
un total de près de 20 milliards qui cons
titue le passif du pouvoir personnel. Ce
sont encore les conséquences de la guerre
de 1870 qui nous obligent à porter chaque
année, à notre budget, 1 milliard pour la
défense nationale.
Il est certain, cependant, qu’actuelle-
ment le crédit de notre pays inspire la
plus grande .confiance, parce que, mieux
que les autres, il a supporté les résultats
d’une crise universelle qui, nous pouvons
l’espérer, touche à sa fin.
Il n’est pas vrai que dans notre pays,
fermement attaché à la propriété indivi
duelle et à la liberté, le souci de la soli
darité, la recherche du progrès social se
confondent avec le collectivisme qui rêve
en vain de supprimer la propriété indivi
duelle et la liberté, mais la démocratie
poursuit avec persévérance l’améloration
du sort des travailleurs, le relèvement
des petits et des humbles, une évolution
continue vers un idéal de justice et de
pacification sociale.
Il n’est pas vrai que la liberté de cons
cience et la liberté des cultes ne soient
plus assurées et que les catholiques soient
en butte à la persécution. Mais il était
nécessaire de soumettre les ordres reli
gieux à l’application de la loi ainsi que
l’exigeait la défense de la société laïque,
telle qu’elle est issue de la Révolution
française.
Il est certain que la lutte actuelle est
plus violente et plus âpre à raison des
rancunes et des ambitions du parti cléri
cal qui ne défend pas la liberté, mais
poursuit la domination et pour qui la
revanche des congrégations est l’enjeu
même des élections législatives.
Les électeurs républicains ne failliront
pas à leur devoir, ils relèveront comme
ils le méritent les audacieux défis de la
réaction cléricale et du catholicisme et en
feront définitif ement justice.
Vive la France! Vive la République!
Pour l’Union républicaine et la Gauche
démocratique du Sénat :
(Suivent les signatures).
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
s:
N°
— SI J »1
Année
Samedi 12 Avril 1902.
Réveil
Havre
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET REDACTION
15 , rue CASIMIR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction.... Alfred Henri
L’Imprimeur-Gérant v. LE ROY
Prix des Insertions :
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50 »
Candidats
Allez par les sentiers et par les
chemins, pauvres pèlerins de la po
litique, que conduit l’ambition ou le
devoir; allez de bourg en bourg, de
hameau en hameau, de porte en
porte, voir l’électeur qui tient dans
ses mains votre destinée.
Vous vous demandez parfois avec
inquiétude quel sera son arrêt et lui,
qui a le sentiment de sa puissance
du moment, a souvent des malices;
il se plaît à inquiéter le candidat qui
sollicite son suffrage — ou bien en
core il opine du bonnet, il trinque
volontiers, il a même des paroles
avenantes, ce qui ne l’empêche pas
au jour décisif de voter selon son
opinion depuis longtemps arrêtée.
Car il ne faut point se figurer que
l’électeur se retourne aussi facile
ment que cela. Même lors des grands
courants d’opinion qui ont boule
versé la France, les conséquences
de ces mouvements n’ont eu guère
d’influence sur l’état général de
l’opinion.
Voyez le Seize-Mai, voyez le Bou
langisme, voyez l’affaire Dreyfus :
il en est résulté un peu d’efferves
cence, une modification dans le clas
sement des partis, mais l’évolution
politique a continué de se pour
suivre dans le même sens.
Peut-être même, de ces efforts
pour s’opposer à une loi qui paraît
fatale, est-il né des élans qui ont
accentué la marche vers les buts
extrêmes.
Cette constatation doit faire ré
fléchir ceux qui prétendent que leurs
moyens de persuasion arriyeront à
détourner, en quelques jours, le
corps électoral du chemin oh il est
engagé.
Quelques paroles convaincues ou
habiles peuvent déterminer une ap
probation immédiate, mais que la
réflexion détruit en général presque
aussitôt, si l’esprit n’a pas été d’abord
préparé.
De cruelles déceptions attendent
donc les candidats qui se figurent
qu’il suffit de tournées bruyantes,
de nombreux discours chargés de
réformes, pour empaumer les élec
teurs et les retourner comme un
gant.
Par bonheur, l’esprit public n’est
pas aussi mobile.
Chacun a son opinion réfléchie,
résultant sinon de raisonnements
très savants, du moins d’observa
tions personnelles qui ont leur prix.
- La politique a, en effet, son action
immédiate sur la vie, puisque, en
dernier ressort, elle a pour but de
nous rendre l’existence meilleure.
Cette unique considération suffit
dès lors à faire l’opinion de la grande
majorité des gens, qui n’ont d’autre
préoccupation que de savoir quelle
est la doctrine la plus avantageuse
pour leurs intérêts.
Le suffrage universel est ainsi
arrivé à donner son orientation ac
tuelle à la politique ; et cela pas tout
d’un coup, comme nous le disions
en commençant, mais par une pro
gression constante, dont la marche
a été à peu près régulière depuis
trente ans.
Pour croire que quelques semaines
suffisent à modifier une opinion aussi
lentement formée, il faut ne pas se
douter de la sincérité des convic
tions dans le peuple et avoir une
confiance exagérée dans ses propres
forces.
Tous ceux qui ont pratiqué la po
litique savent que ce n’est qu’avec
des années et des années que l’on
peut espérer orienter différemment
les idées de ceux qui vous entourent.
Il est nécessaire de se répéter bien
des fois pour arriver a les cou-
vaincre, car le temps n’est plus oh
les électeurs acceptaient sans dis
cussion les opinions toutes faites.
Voyez le temps qu’il a fallu pour
conquérir certaines circonscriptions
à la République ; plusieurs ne l’ont
même pas encore acceptée.
Il n’y a d’exception que là oh des
événements particuliers ont rendu
l’opinion plus impresssionnable et
plus mobile. Mais ce ne sont que
des minorités peu nombreuses ; P en-
avoir longtemps pratiqués. Il faut
s’être pénétré non seulement de leurs
besoins, mais encore de leurs tradi
tions et de leur esprit, pour qu’ils
se donnent à vous.
C’est pourquoi l’on a tort de rire
de la vieille formule qui se retrouve
encore dans les professions de foi :
« Né et élevé parmi vous... >
Elle n’est point si ridicule que cela.
Elle dit : « Je suis des vôtres, vous
me connaissez depuis mon enfance,
vous savez donc sans qu’il soit be
soin de tant de paroles, si je suis
digne de vous représenter ».
C’est peut-être un peu simple, un
peu familier, à la bonne franquette
— mais c’est sûr, amical et confiant,
et chacun sait d’avance à quoi s’en
tenir.
Il n’est pas pour un candidat de
meilleure recommandation qu’une
vie passée au milieu de ceux dont
il sollicite les suffrages, il n’est point
pour les électeurs de meilleures ga
ranties.
François Dépassé.
LA LUTTE
contre le Nationalisme
M. Barthou, ancien ministre du cabinet
Méline, rendant compte de son mandat à
Oloron, devant ses électeurs, a prononcé
un discours-programme dont nous déta
chons le passage suivant :
Adversaire irréductible du natio-
. . nalisme, qui est le masque nouveau
semble des circonscriptions electo- ff e l’éternelle entreprise cléricale, j’ai
raies échappe à ce danger de sur- approuvé les mesures de combat prises
prises possibles.
Nous employons à dessein le mot
dangers, car les votes d’emballe
ment sont des manifestations irré
contre lui, et notamment les disposi
tions relatives aux congrégations re
ligieuses qui, rigoureusement appli
quées, enlèveront au cléricalisme son
meilleur instrument et son arme de
fléchies qui ne valent rien jamais, guerre favorite.
En matière d’élections comme en
toutes choses, le premier devoir est
de se rendre bien compte de ce que
l’on fait, de connaître, non pas su
perficiellement mais à fond, les can
didats qui sollicitent vos suffrages.
Vous voulez notre confiance, mon
bonmonsieur; je ne dis pas que vous
ne la méritiez point, mais combien
valent mieux que tous les discours
et toutes les présentations, des rela
tions suivies qui ont permis de s’ap
précier et de se comprendre, qui
sont la meilleure garantie d’un par
fait accord.
Voilà pourquoi les candidats du
pays, familiers des électeurs, con
naissant d’intuition leurs besoins et
sachant les prévenir, parlant leur
langue, au courant des moindres
nuances de l’opinion, seront toujours
et avec raison les mieux accueillis.
En votant pour eux, on se borne
à leur témoigner sa confiance ; on
s’en remet à eux pour le reste, sa
chant qu’ils s’en acquitteront au
mieux. Il y a identification aussi
complète que possible entre l’élec
teur et l'élu.
La confiance des électeurs ne se
gagne pas en un . jour. Il faut les
La lutte n’est pas finie. Ce n’est
pas aux républicains qu’il convient
de prêcher une trêve contre laquelle
se déclarent et s’exercent partout,
sous une forme ou sous une autre, les
passions déchaînées du nationalisme.
De Paris, qu’il a conquis par surprise,
il prétend gagner la province. Mais
les départements opposeront au nou
veau boulangisme la résistance répu
blicaine qui vainquit son aîné.
Comment donc le pays pourrait-il
se laisser égarer par cette monstrueuse
équivoque qui associe, pour le sur
prendre, les réductions et les menaces ?
Le nationalisme n’est pas un parti
avec une doctrine, une méthode, un
programme. C’est une coalition in
forme de déceptions et de rancunes
d’ambitionsetd’appétits. Son triomphe
serait le signal même de la défaite
Tel apôtre véhément de l’impôt pro
gressif y coudoie les partisans arrié-
riés de la conservation sociale. Des
francs-maçons égarés y sourient aux
congrégations rebelles. Tel ancien
membre de la Commune s’y rencontre
avec d’anciens ministres de la guerre.
Les juifs non convertis y font pro
fession d’antisémitisme. L’Académie
française descond dans la rue et frotte
ses palmes vertes aux blouses blanches
des camelots. Des ministres congédiés
du 16 Mai se réconcilient avec la réac
tion qui les chassa du pouvoir. Le
boulangisme lui-même ne nous offrit
pas un aussi étrange assemblage, Au
fond, c’est toujours contre la Répu
blique, la même coalition sous un
nom différent, et le masque d’emprunt
sous lequel il se cache ne réussit pas
à dissimuler cette suprême tentative
du cléricalisme militant. Toute com
plicité avec le nationalisme est ainsi
un crime contre la République. Le
dédain n’est pas une attitude, et le
silence risque de passer pour une
complicité. Je tiens, pour ma part, à
répudier toute équivoque et à mériter,
par mes déclarations, des attaques et
des injures qui sont, pour un républi
cain, une garantie et un honneur.
AFPE AUX ÉLECTEURS
Manifeste de TEnian Républicaine
et de la Gauche Démocra
tique du Sénat
Les groupes de l’Union républicaine
et de la Gauche démocratique, qui
constituent la majorité du Sénat (180
membres) et comptent beaucoup des
fondateurs de la République et amis
de Gambetta, ont donné mission à
leur bureaux de rédiger et d'adresser
un appel aux électeurs républicains.
En, conséquence, les deux bureaux,
après s’être concertés, ont arrêté le
texte de l’adresse suivante :
Chers concitoyens,
La République va subir un nouvel as
saut de la part de ses adversaires coalisés.
Bien peu d’entre eux auront le courage
d’arborer leur drapeau, la franchise de
dévoiler leurs visées, leur véritable pro
gramme, ce ne sera qu’un parti sans nom
retranché derrière les obscurités et les
perfidies de l’équivoque.
Pour troubler le pays, ils prodiguent
l’argent; ils se vantent de remporter la
victoire, bien que dans toutes leurs entre
prises depuis le renversement de l’Em
pire ils se soient constamment brisés
contre le bon sens avisé, l’honnêteté in
corruptible des électeurs français, leur
attachement profond et réfléchi aux insti
tutions républicaines.
Vainqueurs, ils se .déchireront entre
eux, impuissants à rien fonder. Il importe
néanmoins de signaler des manœuvres
contre lesquelles tous les républicains
sincères ont le devoir de s’unir dans un
mouvement irrésistible de solidarité dé
mocratique.
Agiter des fantômes, prévoir des catas
trophes, dénaturer les faits, se servir des
idées les plus hautes et les plus chères à
ja nation pour les réduire à leur propre
taille, les ravaler jusqu’à en faire des
instruments de discorde ; mépriser le suf
frage universel au point de chercher à le
corrompre ; accumuler les mensonges de
telle façon qu'il devienne difficile de dis
cerner la vérité ; représenter la France
couverte de ruines, courant à la banque
route et en proie à la trahison, tels sont
les principaux moyens employés couram
ment par les ennemis de la République.
Par l’exagération et la mauvaise foi de
ces attaques, ils permettent à tous les
esprits judicieux de les reconnaître aisé
ment sous le masque, bien qu’ils se ré
pandent en protestation de respect pour
la forme du gouvernement. .
Non, il n’est pas vrai que la France soit
actuellement la nation qu’ils nous dé
peignent; il est certain au contraire que,
cessant d’étre condamnée à l’isolement et
au silence, elle s’est relevée par la Répu
blique, du triste état où l’avaient amenée
les fautes du pouvoir personnel. Elle a
conclu et consolidé une alliance qui est
un précieux gage de la paix, et repris son
On traite à forfait
rôle et son influence dans les conseils du
monde.
Il n’est pas vrai que l’amour de la Pa
trie soit le privilège de quelques-uns ; il
est certain au contraire que l’intolérable
prétention de monopoliser le patriotisme,
de mettre des Français hors du patrimoine
commun, héritage des souffrances et des
gloires de nos pères, est une cause de
désunion et de haine entre les citoyens,
et, par suite, d’affaiblissement de la Pa
trie.
Il n’est pas vrai que l’armée ne soit pas
respectée dans son honneur et dans ses
intérêts qui se confondent avec l’honneur
et l’intérêt de la Nation, qu’elle soit affai
blie et désorganisée; il est certain au con
traire que l’armée nationale est l’objet de
la sollicitude et de l’affection du Parle
ment et du pays ; il est certain que l’ordre
est rétabli à tous les degrés, là où s’etaient
révélés de dangereux symptômes d'indis
cipline et d’insubordination.
Il n’est pas vrai que la France soit ap
pauvrie et ruinée ; il est certain au con
traire que, mutilée, rançonnée, ruinée à
la suite de la guerre de 1870, elle a refait
tout son outillage, développé le réseau
des voies ferrées, creusé des canaux, ap
profondi des ports, et dépensé des som
mes énormes pour l’enseignement public,
l’armée, la marine, et aussi pour consti
tuer son domaine colonial.
Les deux tiers de notre dette sont à la
charge du régime du Deux-Décembre ;
sous ce régime, elle s’est augmentée de 8
milliards ; les conséquences directes de la
guerre ont coûté en outre à notre pays,
d’après les calculs de l’honorable M. Léon
Say, 11 milliards 500 millions. C’est donc
un total de près de 20 milliards qui cons
titue le passif du pouvoir personnel. Ce
sont encore les conséquences de la guerre
de 1870 qui nous obligent à porter chaque
année, à notre budget, 1 milliard pour la
défense nationale.
Il est certain, cependant, qu’actuelle-
ment le crédit de notre pays inspire la
plus grande .confiance, parce que, mieux
que les autres, il a supporté les résultats
d’une crise universelle qui, nous pouvons
l’espérer, touche à sa fin.
Il n’est pas vrai que dans notre pays,
fermement attaché à la propriété indivi
duelle et à la liberté, le souci de la soli
darité, la recherche du progrès social se
confondent avec le collectivisme qui rêve
en vain de supprimer la propriété indivi
duelle et la liberté, mais la démocratie
poursuit avec persévérance l’améloration
du sort des travailleurs, le relèvement
des petits et des humbles, une évolution
continue vers un idéal de justice et de
pacification sociale.
Il n’est pas vrai que la liberté de cons
cience et la liberté des cultes ne soient
plus assurées et que les catholiques soient
en butte à la persécution. Mais il était
nécessaire de soumettre les ordres reli
gieux à l’application de la loi ainsi que
l’exigeait la défense de la société laïque,
telle qu’elle est issue de la Révolution
française.
Il est certain que la lutte actuelle est
plus violente et plus âpre à raison des
rancunes et des ambitions du parti cléri
cal qui ne défend pas la liberté, mais
poursuit la domination et pour qui la
revanche des congrégations est l’enjeu
même des élections législatives.
Les électeurs républicains ne failliront
pas à leur devoir, ils relèveront comme
ils le méritent les audacieux défis de la
réaction cléricale et du catholicisme et en
feront définitif ement justice.
Vive la France! Vive la République!
Pour l’Union républicaine et la Gauche
démocratique du Sénat :
(Suivent les signatures).
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