Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1901-09-28
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 28 septembre 1901 28 septembre 1901
Description : 1901/09/28 (N283). 1901/09/28 (N283).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263482w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
15 ,
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
RUE GASIMIR-PÉRXER,
Secrétaire de la Rédaction.... Alfred HENRI
LTMPRIMEUR-GÉRANT F. LE ROY
1 5
Annonces
Réclames.
Prix des Insertions :
25 centimes la ligne
50 »
On traite à forfait
LE TSAR INTIME
La vie de Nicolas II. — Véritable
physionomie du tsar. — Son
idéal et ses goûts. —
Une anecdote.
On peut bien dire qu’en ce mo
ment encore, tout ce qui n’est pas
relatif aux voyage, en France, de
Nicolas II n’intéresse guère. Aussi,
tout journal qui a quelque souci de
l’actualité a, multiplié depuis quinze
jours, les détails les plus précis, les
informations les plus minutieuses
sur les préparatifs dans les villes
sur l’arrivée des souverains, sur les
péripéties de leur séjour.
Mais, chose assez étrange, on a
peu parlé du tsar lui-même, de sa
personne, de ses goûts, de ses habi
tudes, de sa vie. Est-ce parce que
les renseignements sûrs manquaient
à nos confrères ? Peut-être.
Nous avons'pu néanmoins, inter
roger au château de Compiègne un
haut personnage de sa suite qui a
bien voulu nous documenter de ren
seignements et d’anecdotes qui vont
nous permettre de faire mieux con
naître à nos lecteurs le « tsar de
toutes les Russies ».
S’il fuit ainsi les curieux et évite
les indiscrets, ce n’est, de sa part,
ni sauvagerie, ni fierté. Nicolas II
est simple d’attitudes, simple de vie.
Il déteste et fuit le bruit. La fièvre,
des fêtes l’indispose. Tout, en lui est
modestie, simplicité, timidité. Il
parle bas, d’une voix douce, un peu
hésitante, monotone et ennuyée. Il
n’a rien de l’orateur, rien du re-
mueur de fouies, ni l’organe, ni la
diction, ni le geste.
Sa puissance lui pèse bien plus
qu’elle ne l’enchante.
« Je suis sincèrement envieux,
écrivait-il récemment, de toute per
sonne qui n’a pas à sa charge les
soucis d’un immense empire et qui
n’a pas à compatir aux souffrances
d’un peuple. »
La vie d’un monarque n’a rien
d’idéal et ses jours ne sont pas faits
de soleil et de joies. L’oisiveté et les
plaisirs ne tiennent guère de place
dans l’existence du tsar. Il sera facile
de s’en convaincre par les quelques
détails qui vont suivre :
En hiver comme en été, l’empe
reur se lève à huit heures et demie,
il s’habille tout seul tout en prenant
une tasse de thé, puis, dès neuf
heures, il passe dans son cabinet où,
pendant une heure, il discute avec
ses ministres les affaires de l’Etat,
entre dix et onze heures, il prend
un léger déjeuner, puis continue son
audience, signe les décrets ou autres
pièces,— plus de 300 par jour—
examine les propositions de loi et les
rapports des gouverneurs et hauts
fonctionnaires qu’il annote person
nellement en marge. Pendant ce
travail, le tsar boit constamment
du thé et mange parfois un sand-
wiche au caviar.
A une heure, il va rejoindre l’im
pératrice, et, jusqu’à quatre heures,
il reste auprès d’elle et de ses trois
enfants, les grandes-duchesses Olga,
Titiana et Maria. Parfois, il fait
avec elles une promenade à pied ou
en voiture dans le parc, ou bien,
quand le temps est mauvais, il joue
avec les fillettes.
C’est également pendant ce repos
qu’un de ses secrétaires lui donne
connaissance des articles de jour
naux russes ou étrangers qui sont
de nature à l’intéresser.
A quatre heures, il se remet au
travail qui dure jusqu’à sept heures.
Alors, c’est le dîner, le grand repas
de la journée, pris en famille ou
avec de rares invités et qui se pro
longe jusqu’à dix heures. A ce mo
ment, le tsar reçoit le chef de la
police et le ministre des affaires
étrangères, puis, resté seul, il rédige
sa correspondance personnelle ou
examine les affaires qu’il devra
traiter le lendemain avec ses mi
nistres, A minuit, coucher.
C’est la journée de huit heures,
mais quelles heures !
Veut-on, à présent, quelques ren
seignements sur l’homme? Ils inté
resseront, sans doute, les gens qui,
aimant tout connaître, n’ont pas eu
la bonne fortune de voir Nicolas IL
Le tsar est de taille moyenne,
plutôt petit et maigre ; il ne pèse
que 55 kilos. Sa santé médiocre lui
donne l’aspect souffreteux et un peu
triste. De fait, il sourit rarement,
mais la physionomie est douce ce
pendant.
Ses goût : il fume la cigarette,
mais fort peu, n’aime point les bijoux
et ne porte qu’une montre merveil
leuse qui a coûté 4.000 roubles, ne
se parfume pas, mais se poudre à la
peau d’Espagne, affectionne peu la
musique et ne lit jamais de romans.
Ignore tout de la littérature qui,
dit-il, ne l’intéresse pas.
En cuisine, aime les plats com
pliqués et très assaissonnés dont son
estomac souffre grandement d’ail
leurs, car il digère fort mal. Un
détail qui enchantera les méridio
naux : l’Empereur adore la brandade
de morue, mais point l’ail. Il joue
volontiers au windt , jeu assez ana
logue au boston ; c’est même, pa
raît-il un très mauvais joueur. En
fin, il monte à bicyclette, pratique
l’automobilismo et est un chasseur
passionné. Il chasse de préférence
dans la forêt de Moscou où se trou
vent, en quantité, des cerfs, des
élans, des sangliers et des buffles.
Voilà l'instantané fidèle de notre
grand ami et allié. Nous finirons
par une anecdote qui montre sa
simplicité, la dominante de son ca
ractère.
Un lieutenant du régiment de
Préobrajensky dont le tsar est colo
nel, avait traversé Saint-Péters
bourg en tramway. Ses camarades
qualifièrent, manque de tenue, ce
qui n’était probablement qu’un man
que d’argent et décrétèrent qu’un
homme capable de traîner son uni
forme sur les banquettes d’une voi
ture publique était indigne de faire
partie du corps des officiers. On le
somma donc de démissionner.
Mais l’incident qu’on croyait clos
vint aux oreilles du tsar qui jugea
l’occasion venue de donner une leçon
aux officiers dont il déplorait depuis
longtemps les habitudes dépen
sières. *
Un matin, il monta dans un
tramway et n’en descendit qu’aux
portes de la caserne. Et comme les
officiers supérieurs accouraient à sa
rencontre : « Messieurs, dit-il, vous
prétendez qu’il n’est pas convenable
qu’un officier monte dans le tram
way. Or, je suis votre colonel et je
viens du palais jusqu’ici en voiture
publique. Allez vous exiger ma dé
mission? »
Le personnage qui nous contait
cette anecdocte, ajoutait que la leçon
porta ses fruits et qu’il est de bon
ton, à présent, parmi les officiers du
régiment, de prendre le tramway
pour se rendre en ville.
Marcel FRANCE
Les Nationalistes interpelleront
On annonce qu’une demande d’in
terpellation sera déposée dès la rentrée
sur le bureau de la Chambre, à propos
du remplacement du général Davout,
comme grand chancelier de la Légion
d honneur.
Cette interpellation émanerait soit
de M. Charles Bernard, soit de M.
Millevoye.
Elle viserait M. Monis qui, en sa
qualité de garde des sceaux, a pré
senté et contresigné le décret nommant
le général Florentin ; mais en réalité
elle s’adresserait à la plupart des
membres du gouvernement.
Les interpellateurs soutiendront que
si le général Davout a été remplacé,
c’est pour avoir refusé de donner un
avis favorable à certaines nominations
ou promotions proposées par tel ou tel
ministre.
Ils attaqueront plus particulière
ment MM. Monis, Millerand, Decrais,
et rappelleront le bruit qui s’est fait
à propos de quelques décorations, celle
de Paquin, notamment et celle du
capitaine Meck qui a fait l’objet d’une
demande d’interpellation de M. Charles
Bernard et qui est encore inscrite à
l'ordre du jour.
Si la Chambre accepte d’ouvrir
immédiatement un pareil débat, on
peut s’attendre à un joli tapage : mais
il est probable qu’elle renverra cette
interpellation nouvelle à la suite de
toutes celles qui attendent leur tour.
H.
—- — 1 - -
LE
Grand Chancelier delà Légion d’Honneur
Qu’il était cher aux nationalistes,
le général Davout, qui vient d'être
remplacé dans les hautes fonctions
de grand chancelier de la Légion
d’honneur !
Certaines feuilles de la « Patrie
française » se refusent à croire qu’il
se soit trouvé un général pour accep
ter la succession du général Davout.
Elles déclarent que le général Flo
rentin ne peut pas accepter, n’accep
tera pas le poste que lui offre le gou
vernement.
Et, une fois de plus, les informa
tions de ces feuilles sont tellement
sûres que le Journal officiel publie, ce
matin même, le décret nommant le
généralElorentin, grand chancelier de
la Légion d’honneur, en remplacement
du général Davout, duc d’Auerstædt.
Les colères de la presse nationaliste
sont restées vaines, et ses insinua
tions sans effet.
Dans les hautes fonctions dont il
vient d’être investi, le nouveau grand
chancelier de la Légion d’honneur ne
se laissera émouvoir ni par les injures
des nationalistes ni par leurs éloges
plus injurieux encore que leurs insul
tes.
NOTES SOCIALES
Le Travail
Dans l’apothéose pacifique des ar
mées, il ne sera pas inutile de rappe
ler que la première place du monde
appartient au Travail.
On l’oublie parce qu’il n’a pas de
dorure sur ses habits, de panache à
son chapeau. Il est sous la terre ou
courbé sur la glèbe ; il se tient dans
les endroits écartés et malsains, il est
pauvre, il a les mains sales : il n’a
pas le temps de caracoler dans la
lumière du soleil, au bruit flatteur de
milliers de bravos. L’armée coûte trop
cher, et les cultes et les grands servi
ces publics, pour qu’il puisse se re
poser un instant. Travaille donc, ô
Travail, car tout dépend de toi.
C’est au Travail qu’appartient le
premier prix de la reconnaissance pu
blique, lui qui nous fait tout ce que
nous sommes, nous habille, nous
chauffe, nous éclaire, nous nourrit, et
procure aux soldats tout ce dont ils
ont besoin dans la paix et dans la
guerre.
Sans lui que ferions-nous de tant de
régiments et d’escadrons, de fusils et
de canons, etcomment entretiendrions-
nous cet immense attirail?
C’est le nombre des travailleurs
qui assure aux soldats et aux géné
raux, dégagés de» soucis de la vie
quotidienne, le loisir de parfaire leur
instruction professionnelle; ainsi le
travail des pères et des mères permet
aux enfants de rester le plus long
temps possible à l’école.
C’est le Travail qui fait la force et
le soutien des Etats, la gloire de l’hu
manité sur la planète Terre. Vive
donc le Travail qui est tout et sans
lequel tout le reste est incapable de
vivre î
Si la France républicaine estgrande,
c'est parce qu’elle possède des facultés
de travail incomparables. La Russie
n’a pas une force en rapport avec sa
taille, parce que le travail lui man
que, n’est pas assez libre, est trop
serf encore pour déployer tous ses
moyens.
Les Anglais ont été longtemps les
plus libres et les plus travailleurs des
hommes ; mais ils sont en voie de per
dre, par une mauvaise guerre, plu
sieurs de leurs libertés les plus pré
cieuses.
A ce propos, on remarque l’erreur
de certaines personnes qui, brouillant
tout, mêlant tout dans l’anarchie con
fuse de leur esprit, demandent l’ar
bitrage de la Cour de la Haye et invi
tent le tsar à jeter son épée dans la
balance. C’est cette même confusion
d’idées par laquelle elles voulaient, en
d’autres circonstances récentes, faire
siéger la justice sous le sabre.
Le tsar a voulu faire une cour
d’arbitrage, noble dessein ; la Cour
est constituée, autonome et souve
raine dans le cercle de ses attributions.
Il lui appartient de remplir sa magis
trature en liberté, le monde respec
tera ses jugements.
Le Travail, première et principale
question du présent et de l’immense
avenir, rejette tout le reste à l’arrière-
plan. Il multiplie les communications
entre les peuples, il transforme toutes
les conditions des sociétés. Il faudrait
de plus en plus lui donner de l’air et
de la lumière, car il produit, il crée,
il invente, il combine dans la mesure
où il est libre. Les despotes ne peu
vent pas avoir chez eux de travail
vraiment fécond. Ils deviennent inca
pables d’habiller et de nourrir leurs
armées.
Hector Dépassé.
ÉCHO FUNÈBRE
Nous pensions que la mort de M.
Faisant ne réveillerait pas les échos
de sa vie, et que le bulletin nécrolo
gique ordinaire ne prendrait point
une allure fastidieuse et provocatrice.
Nous n’avions pas lu, alors, le dis
cours de M. Auguste Godefroy, au
teur cependant connu pour ses orai
sons funèbres distinguées, tantôt
tristes, souvent larmoyantes, toujours
sentimentales, sans cesse théâtrales
et partant, malgré la gravité de la
circonstance, toujours ridicules et
plaisantes. En effet, le directeur de
la Cloche vient d'accoucher d’un nou
veau morceau de littérature qui ne le
cède en rien aux précédents, placé
d’ailleurs qu’il était sous l’égide de
l’éminentissime M. Rispal, auquel on
avait emprunté une brillante citation.
Et puisque nous avons cité ce der
nier nom, nous, aussi, lui emboîterons
le pas, pour une fois, quand il dit,
sans le faire exprès : « Rassurez vous,
« je suis de ceux qui pensent que, si
« l’on doit la vérité aux vivants, on
« la doit plus encore à ceux qui ne
« sont plus ». Eh bien, le saut dans
la tombe n’excuse ni ne diminue les
fautes passées et, toute sentimentalité
mise de côté, c’est l’heure des respon
sabilités devant la conscience univer
selle, c’est l’heure d'un examen qui
devrait être impartial, à l’égard du
disparu, parce que l’être a cessé de
souffrir et que la vérité même, par-»
fois si dure dans l’existence, n’a plus
de prise dans la mort. Oui, au lieu
des fleurs de rhétorique pompeuses et»
mensongères, la vérité devrait éclore
au tombeau pour être un guide aux
générations présentes et à venir.
Examinons un peu ce que nous
lisons dans le passage suivant de l’al
locution de M. Auguste Godefroy :
« Les dernières apnées de son exis
tence (il s’agit de M..Faisant) furent
bien sombres et bien tristes. » Cela
est vrai, mais ce ne fut pas la faute
de ses vrais amis, qui tous se groupè
rent autour de lui, tâchant de lui
faire oublier ses souffrances, lui ca
chant la gravité de son mal.
« Mais d’autres alors, ceux-là même
qui n’avaient pas osé attaquer en face
l’homme solide et bien portant, se
»
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
15 ,
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
RUE GASIMIR-PÉRXER,
Secrétaire de la Rédaction.... Alfred HENRI
LTMPRIMEUR-GÉRANT F. LE ROY
1 5
Annonces
Réclames.
Prix des Insertions :
25 centimes la ligne
50 »
On traite à forfait
LE TSAR INTIME
La vie de Nicolas II. — Véritable
physionomie du tsar. — Son
idéal et ses goûts. —
Une anecdote.
On peut bien dire qu’en ce mo
ment encore, tout ce qui n’est pas
relatif aux voyage, en France, de
Nicolas II n’intéresse guère. Aussi,
tout journal qui a quelque souci de
l’actualité a, multiplié depuis quinze
jours, les détails les plus précis, les
informations les plus minutieuses
sur les préparatifs dans les villes
sur l’arrivée des souverains, sur les
péripéties de leur séjour.
Mais, chose assez étrange, on a
peu parlé du tsar lui-même, de sa
personne, de ses goûts, de ses habi
tudes, de sa vie. Est-ce parce que
les renseignements sûrs manquaient
à nos confrères ? Peut-être.
Nous avons'pu néanmoins, inter
roger au château de Compiègne un
haut personnage de sa suite qui a
bien voulu nous documenter de ren
seignements et d’anecdotes qui vont
nous permettre de faire mieux con
naître à nos lecteurs le « tsar de
toutes les Russies ».
S’il fuit ainsi les curieux et évite
les indiscrets, ce n’est, de sa part,
ni sauvagerie, ni fierté. Nicolas II
est simple d’attitudes, simple de vie.
Il déteste et fuit le bruit. La fièvre,
des fêtes l’indispose. Tout, en lui est
modestie, simplicité, timidité. Il
parle bas, d’une voix douce, un peu
hésitante, monotone et ennuyée. Il
n’a rien de l’orateur, rien du re-
mueur de fouies, ni l’organe, ni la
diction, ni le geste.
Sa puissance lui pèse bien plus
qu’elle ne l’enchante.
« Je suis sincèrement envieux,
écrivait-il récemment, de toute per
sonne qui n’a pas à sa charge les
soucis d’un immense empire et qui
n’a pas à compatir aux souffrances
d’un peuple. »
La vie d’un monarque n’a rien
d’idéal et ses jours ne sont pas faits
de soleil et de joies. L’oisiveté et les
plaisirs ne tiennent guère de place
dans l’existence du tsar. Il sera facile
de s’en convaincre par les quelques
détails qui vont suivre :
En hiver comme en été, l’empe
reur se lève à huit heures et demie,
il s’habille tout seul tout en prenant
une tasse de thé, puis, dès neuf
heures, il passe dans son cabinet où,
pendant une heure, il discute avec
ses ministres les affaires de l’Etat,
entre dix et onze heures, il prend
un léger déjeuner, puis continue son
audience, signe les décrets ou autres
pièces,— plus de 300 par jour—
examine les propositions de loi et les
rapports des gouverneurs et hauts
fonctionnaires qu’il annote person
nellement en marge. Pendant ce
travail, le tsar boit constamment
du thé et mange parfois un sand-
wiche au caviar.
A une heure, il va rejoindre l’im
pératrice, et, jusqu’à quatre heures,
il reste auprès d’elle et de ses trois
enfants, les grandes-duchesses Olga,
Titiana et Maria. Parfois, il fait
avec elles une promenade à pied ou
en voiture dans le parc, ou bien,
quand le temps est mauvais, il joue
avec les fillettes.
C’est également pendant ce repos
qu’un de ses secrétaires lui donne
connaissance des articles de jour
naux russes ou étrangers qui sont
de nature à l’intéresser.
A quatre heures, il se remet au
travail qui dure jusqu’à sept heures.
Alors, c’est le dîner, le grand repas
de la journée, pris en famille ou
avec de rares invités et qui se pro
longe jusqu’à dix heures. A ce mo
ment, le tsar reçoit le chef de la
police et le ministre des affaires
étrangères, puis, resté seul, il rédige
sa correspondance personnelle ou
examine les affaires qu’il devra
traiter le lendemain avec ses mi
nistres, A minuit, coucher.
C’est la journée de huit heures,
mais quelles heures !
Veut-on, à présent, quelques ren
seignements sur l’homme? Ils inté
resseront, sans doute, les gens qui,
aimant tout connaître, n’ont pas eu
la bonne fortune de voir Nicolas IL
Le tsar est de taille moyenne,
plutôt petit et maigre ; il ne pèse
que 55 kilos. Sa santé médiocre lui
donne l’aspect souffreteux et un peu
triste. De fait, il sourit rarement,
mais la physionomie est douce ce
pendant.
Ses goût : il fume la cigarette,
mais fort peu, n’aime point les bijoux
et ne porte qu’une montre merveil
leuse qui a coûté 4.000 roubles, ne
se parfume pas, mais se poudre à la
peau d’Espagne, affectionne peu la
musique et ne lit jamais de romans.
Ignore tout de la littérature qui,
dit-il, ne l’intéresse pas.
En cuisine, aime les plats com
pliqués et très assaissonnés dont son
estomac souffre grandement d’ail
leurs, car il digère fort mal. Un
détail qui enchantera les méridio
naux : l’Empereur adore la brandade
de morue, mais point l’ail. Il joue
volontiers au windt , jeu assez ana
logue au boston ; c’est même, pa
raît-il un très mauvais joueur. En
fin, il monte à bicyclette, pratique
l’automobilismo et est un chasseur
passionné. Il chasse de préférence
dans la forêt de Moscou où se trou
vent, en quantité, des cerfs, des
élans, des sangliers et des buffles.
Voilà l'instantané fidèle de notre
grand ami et allié. Nous finirons
par une anecdote qui montre sa
simplicité, la dominante de son ca
ractère.
Un lieutenant du régiment de
Préobrajensky dont le tsar est colo
nel, avait traversé Saint-Péters
bourg en tramway. Ses camarades
qualifièrent, manque de tenue, ce
qui n’était probablement qu’un man
que d’argent et décrétèrent qu’un
homme capable de traîner son uni
forme sur les banquettes d’une voi
ture publique était indigne de faire
partie du corps des officiers. On le
somma donc de démissionner.
Mais l’incident qu’on croyait clos
vint aux oreilles du tsar qui jugea
l’occasion venue de donner une leçon
aux officiers dont il déplorait depuis
longtemps les habitudes dépen
sières. *
Un matin, il monta dans un
tramway et n’en descendit qu’aux
portes de la caserne. Et comme les
officiers supérieurs accouraient à sa
rencontre : « Messieurs, dit-il, vous
prétendez qu’il n’est pas convenable
qu’un officier monte dans le tram
way. Or, je suis votre colonel et je
viens du palais jusqu’ici en voiture
publique. Allez vous exiger ma dé
mission? »
Le personnage qui nous contait
cette anecdocte, ajoutait que la leçon
porta ses fruits et qu’il est de bon
ton, à présent, parmi les officiers du
régiment, de prendre le tramway
pour se rendre en ville.
Marcel FRANCE
Les Nationalistes interpelleront
On annonce qu’une demande d’in
terpellation sera déposée dès la rentrée
sur le bureau de la Chambre, à propos
du remplacement du général Davout,
comme grand chancelier de la Légion
d honneur.
Cette interpellation émanerait soit
de M. Charles Bernard, soit de M.
Millevoye.
Elle viserait M. Monis qui, en sa
qualité de garde des sceaux, a pré
senté et contresigné le décret nommant
le général Florentin ; mais en réalité
elle s’adresserait à la plupart des
membres du gouvernement.
Les interpellateurs soutiendront que
si le général Davout a été remplacé,
c’est pour avoir refusé de donner un
avis favorable à certaines nominations
ou promotions proposées par tel ou tel
ministre.
Ils attaqueront plus particulière
ment MM. Monis, Millerand, Decrais,
et rappelleront le bruit qui s’est fait
à propos de quelques décorations, celle
de Paquin, notamment et celle du
capitaine Meck qui a fait l’objet d’une
demande d’interpellation de M. Charles
Bernard et qui est encore inscrite à
l'ordre du jour.
Si la Chambre accepte d’ouvrir
immédiatement un pareil débat, on
peut s’attendre à un joli tapage : mais
il est probable qu’elle renverra cette
interpellation nouvelle à la suite de
toutes celles qui attendent leur tour.
H.
—- — 1 - -
LE
Grand Chancelier delà Légion d’Honneur
Qu’il était cher aux nationalistes,
le général Davout, qui vient d'être
remplacé dans les hautes fonctions
de grand chancelier de la Légion
d’honneur !
Certaines feuilles de la « Patrie
française » se refusent à croire qu’il
se soit trouvé un général pour accep
ter la succession du général Davout.
Elles déclarent que le général Flo
rentin ne peut pas accepter, n’accep
tera pas le poste que lui offre le gou
vernement.
Et, une fois de plus, les informa
tions de ces feuilles sont tellement
sûres que le Journal officiel publie, ce
matin même, le décret nommant le
généralElorentin, grand chancelier de
la Légion d’honneur, en remplacement
du général Davout, duc d’Auerstædt.
Les colères de la presse nationaliste
sont restées vaines, et ses insinua
tions sans effet.
Dans les hautes fonctions dont il
vient d’être investi, le nouveau grand
chancelier de la Légion d’honneur ne
se laissera émouvoir ni par les injures
des nationalistes ni par leurs éloges
plus injurieux encore que leurs insul
tes.
NOTES SOCIALES
Le Travail
Dans l’apothéose pacifique des ar
mées, il ne sera pas inutile de rappe
ler que la première place du monde
appartient au Travail.
On l’oublie parce qu’il n’a pas de
dorure sur ses habits, de panache à
son chapeau. Il est sous la terre ou
courbé sur la glèbe ; il se tient dans
les endroits écartés et malsains, il est
pauvre, il a les mains sales : il n’a
pas le temps de caracoler dans la
lumière du soleil, au bruit flatteur de
milliers de bravos. L’armée coûte trop
cher, et les cultes et les grands servi
ces publics, pour qu’il puisse se re
poser un instant. Travaille donc, ô
Travail, car tout dépend de toi.
C’est au Travail qu’appartient le
premier prix de la reconnaissance pu
blique, lui qui nous fait tout ce que
nous sommes, nous habille, nous
chauffe, nous éclaire, nous nourrit, et
procure aux soldats tout ce dont ils
ont besoin dans la paix et dans la
guerre.
Sans lui que ferions-nous de tant de
régiments et d’escadrons, de fusils et
de canons, etcomment entretiendrions-
nous cet immense attirail?
C’est le nombre des travailleurs
qui assure aux soldats et aux géné
raux, dégagés de» soucis de la vie
quotidienne, le loisir de parfaire leur
instruction professionnelle; ainsi le
travail des pères et des mères permet
aux enfants de rester le plus long
temps possible à l’école.
C’est le Travail qui fait la force et
le soutien des Etats, la gloire de l’hu
manité sur la planète Terre. Vive
donc le Travail qui est tout et sans
lequel tout le reste est incapable de
vivre î
Si la France républicaine estgrande,
c'est parce qu’elle possède des facultés
de travail incomparables. La Russie
n’a pas une force en rapport avec sa
taille, parce que le travail lui man
que, n’est pas assez libre, est trop
serf encore pour déployer tous ses
moyens.
Les Anglais ont été longtemps les
plus libres et les plus travailleurs des
hommes ; mais ils sont en voie de per
dre, par une mauvaise guerre, plu
sieurs de leurs libertés les plus pré
cieuses.
A ce propos, on remarque l’erreur
de certaines personnes qui, brouillant
tout, mêlant tout dans l’anarchie con
fuse de leur esprit, demandent l’ar
bitrage de la Cour de la Haye et invi
tent le tsar à jeter son épée dans la
balance. C’est cette même confusion
d’idées par laquelle elles voulaient, en
d’autres circonstances récentes, faire
siéger la justice sous le sabre.
Le tsar a voulu faire une cour
d’arbitrage, noble dessein ; la Cour
est constituée, autonome et souve
raine dans le cercle de ses attributions.
Il lui appartient de remplir sa magis
trature en liberté, le monde respec
tera ses jugements.
Le Travail, première et principale
question du présent et de l’immense
avenir, rejette tout le reste à l’arrière-
plan. Il multiplie les communications
entre les peuples, il transforme toutes
les conditions des sociétés. Il faudrait
de plus en plus lui donner de l’air et
de la lumière, car il produit, il crée,
il invente, il combine dans la mesure
où il est libre. Les despotes ne peu
vent pas avoir chez eux de travail
vraiment fécond. Ils deviennent inca
pables d’habiller et de nourrir leurs
armées.
Hector Dépassé.
ÉCHO FUNÈBRE
Nous pensions que la mort de M.
Faisant ne réveillerait pas les échos
de sa vie, et que le bulletin nécrolo
gique ordinaire ne prendrait point
une allure fastidieuse et provocatrice.
Nous n’avions pas lu, alors, le dis
cours de M. Auguste Godefroy, au
teur cependant connu pour ses orai
sons funèbres distinguées, tantôt
tristes, souvent larmoyantes, toujours
sentimentales, sans cesse théâtrales
et partant, malgré la gravité de la
circonstance, toujours ridicules et
plaisantes. En effet, le directeur de
la Cloche vient d'accoucher d’un nou
veau morceau de littérature qui ne le
cède en rien aux précédents, placé
d’ailleurs qu’il était sous l’égide de
l’éminentissime M. Rispal, auquel on
avait emprunté une brillante citation.
Et puisque nous avons cité ce der
nier nom, nous, aussi, lui emboîterons
le pas, pour une fois, quand il dit,
sans le faire exprès : « Rassurez vous,
« je suis de ceux qui pensent que, si
« l’on doit la vérité aux vivants, on
« la doit plus encore à ceux qui ne
« sont plus ». Eh bien, le saut dans
la tombe n’excuse ni ne diminue les
fautes passées et, toute sentimentalité
mise de côté, c’est l’heure des respon
sabilités devant la conscience univer
selle, c’est l’heure d'un examen qui
devrait être impartial, à l’égard du
disparu, parce que l’être a cessé de
souffrir et que la vérité même, par-»
fois si dure dans l’existence, n’a plus
de prise dans la mort. Oui, au lieu
des fleurs de rhétorique pompeuses et»
mensongères, la vérité devrait éclore
au tombeau pour être un guide aux
générations présentes et à venir.
Examinons un peu ce que nous
lisons dans le passage suivant de l’al
locution de M. Auguste Godefroy :
« Les dernières apnées de son exis
tence (il s’agit de M..Faisant) furent
bien sombres et bien tristes. » Cela
est vrai, mais ce ne fut pas la faute
de ses vrais amis, qui tous se groupè
rent autour de lui, tâchant de lui
faire oublier ses souffrances, lui ca
chant la gravité de son mal.
« Mais d’autres alors, ceux-là même
qui n’avaient pas osé attaquer en face
l’homme solide et bien portant, se
»
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