Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1901-01-12
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 janvier 1901 12 janvier 1901
Description : 1901/01/12 (N246). 1901/01/12 (N246).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263445m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/05/2019
G" Année — Pi” 246.
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
Samedi 12 Janvier 1901.
Réveil
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
15, RUE GASIMIR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction. ... Alfred HENRI
L’Imprimeur-Gérant E. EE ROY
Prix des Insertions :
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50
NOS^ LOIS
La patrie du grand fabuliste La
fontaine, dont le bon sens naturel
devait semer dans les esprits, dès le
dix-septième siècle, les principes
d’équité et de justice qui ont lait la
Révolution de 1789, la ville de Châ
teau-Thierry, dis-je, mérite de fixer
notre attention. Serait-elle la mo
derne Athènes? C’est, qu’en effet,
de nos jours, renouvelant l’histoire,
avec les jugements célèbres du pré
sident Magnaud, plus soucieux d’ap
porter dans nos lois, le sens de
l’humanité que ies préoccupations
de l’avancement, la localité dont il
s’agit est en train de jeter la hache
dans les pratiques routinières de
dame Thémis. Un magistrat qui
fasse son devoir, qui considère sa
charge comme une profession ou un
apostolat, qui s’efforce de trouver
dans le labyrinthe de notre législa
ture, le droit chemin, la solution
juste, avec une touchante sollici
tude pour les miséreux, — au lieu de
les exposer aux rigueurs imméritées
dont font souvent preuve les juges
qui n’apprécient leur métier que
comme une source de salaires et
d’honneurs, — ce n’ést pas d’un
exemple banal.
J’assistais, jeudi, à la représenta
tion au Grand-Théâtre, de la Robe
Rouge, pièce judiciaire de M. Brieux,
et j’étais effrayé des vérités qu’elle
renferme, de cette peinture exacte,
qu’elle présente, bien qu’elle se main
tienne encore dans le cadre del’action
scénique, c’est-à-dire qu’elle sacrifie
à l’intérêt du spectacle, les vastes
idées générales et qu’elle n’aborde
qu’un point de la grande réforme
judiciaire qu’il nous faudra accom
plir.
Car, si je parais jeter la pierre à
de nombreux magistrats ou pro
céduriers, je dois reconnaître que
le tort — je ne dirai pas le crime,
bien que ce mot puisse être parfois
vrai _ le tort qu’ils commettent ne
leur appartient pas seulement. La
faute incombe également à nos légis
lateurs qui nous ont encombré d’un
stock considérable de lois fâcheuses,
se contredisant les unes et les au
tres, de ces lois qui ne se sont ja
mais imprégnées des principes
essentiels de la vie et de la société,
La faute incombe, aussi, dans
une démocratie, à l’électeur scep
tique et irréfléchi, qui sacrifie les
besoins légitimes de l’humanité à
son intérêt personnel, à l’entraîne
ment do la camaraderie, à quelques
petits verres,et, souvent,à son igno
rance par la paresse de son intelli
gence, quand il dépose son bulletin
de vote dans l’urne.
La faute incombe encore à cer
taine presse de mensonge, à ces
nombreux journalistes qui ne voient
dans leur carrière que le profit per
sonnel, la douce joie de se laisser
vivre sans efforts, sans danger.
sans risques. Pour cela, il leur suffit
de ne pas déplaire à l’administra
teur, ni aux actionnaires, ni à la
coterie. Mais leur conscience ?...
Ah ! ils s’en soucient bien de leur
conscience ! Ils n’en ont pas ! Au
jourd’hui commandez-leur un ar
ticle en faveur du protectionnisme
pour, préparer plus tard l’élection
du député X..., ils le tailleront sur
mesure. Demain : changement ;
c’est de M. Z... qu’il faut soutenir
l’élection. Il est, par hasard et heu
reusement, libre-échangiste, alors,
la même plume que précédemment
abolira les barrière de douane. Voilà
leur conscience.
Or, cependant, une morale nou
velle s’infiltre petit à petit dans la so
ciété. Ah,cette morale de justice et de
droiture, que nous la voudrions voir
enfin briller !... Mais elle marche à
pas si lents !... C’est à cette grande
œuvre d’éducation qu’il faut nous
attacher, car les esprits ne sont pas
préparés pour recevoir la bonne
semence qui fera germer le bon
grain. Nous avons à réformer tous
nos codes, depuis le code Napoléon,
c’est le code civil, c’est le code pénal,
c’est la procédure surtout qu’il faut
abroger et les procéduriers qu’il faut
diminuer. Suivant l’expression de
Tun de nos amis, nous avons là de
nouvelles Bastilles à renverser. La
justice gratuite et entièrement gra
tuite, telle est la première formule
à exiger, dans son application pré
cise.
Quant aux codes, la difficulté est
plus grande. Ou trouver la vitalité
puissante pour les amender? Le
Conseil d’Etat, seul, en serait capa
ble, me disait un jurisconsulte dis
tingué de notre ville. Y rencontre
rait-on les idées larges, supérieures
et généreuses qui doivent nous gui
der? Trop de cerveaux sont encore
trop surchargés des préjugés du
catholicisme et de la théologie pour
comprendre dans leur intégralité les
nécessités nouvelles. C’est dans le
culte de la Raison, par un besoin
d’émulation vers le mieux, c’est
dans Tassagissement de la démo
cratie, par son éducation, que nous
trouverons le remède.
Alf. HENRI.
Les Communes et la Loi de 18S7
Voici, d’après un relevé fait au
ministère des finances, la situation
actuelle des communes à octroi vis-à-
vis de la loi de 1897 qui a prescrit le
dégrèvement des boissons hygiéni
ques.
1,240 communes percevaient des
droits, d’octroi, plus ou moins élevés,
sur les boissons hygiéniques lors de
la promulgation de la loi du 29 dé
cembre 1897.
Sur ce. nombre, 180 communes
(Paris compris) ont, à l’heure actuel
le, supprimé totalement ces droits;
1,050 les ont réduits aux maximas
prévus par la loi de 1897 ; 10, enfin,
ont obtenu un sursis de trois ou de
six mois pour l’application de la loi.
mm m i miMi
L’arbitrage obligatoire. — Devant
une assemblée de patrons. —
Justification du projet.
Le citoyen Millerand, ministre du
commerce et de l’industrie, a présidé
hier soir, au palais d’Orsay, le ban
quet organisé par la chambre syndi
cale de la papeterie, pour fêter la dé
coration de M. Putois, son président,
nommé officier de la Légion d’hon
neur.
Le ministre a saisi cette occasion
pour justifier et défendre devant une
assemblée de patrons les récents pro
jets de loi déposés par lui et si vio
lemment attaqués par la fraction des
industriels qui marchent à la remor
que de M. Méline.
Discours de Millerand
La Révolution française a proclamé
l’égalité juridique des citoyens. La
seconde République a réalisé, par le
suffrage universel, leur égalité po
litique. Ce sera la grandeur de la
troisième République que de tenter
de diminuer leur inégalité sociale.
Elle peut se glorifier en ce sens de
deux efforts considérables qui s’appel
lent : les lois sur renseignement et 1a
loi sur les syndicats.
Jules Ferry, RenéGoblet ont atta
ché leur nom aux unes, M. Waldeck-
Bousseau à l’autre.
Le président du conseil poursuit
son œuvre, et c’est une grande fierté,
pour celui qui vous parle, que d’être
dans cette tâche son fidèle et modeste
collaborateur, en demandant à la
Chambre, par les deux projets dont
il l’a saisie, d’augmenter la capacité
des syndicats; de rendre plus aisé et
plus sûr le règlement amiable des dif
férends relatifs aux conditions du
travail.
Ces deux projets ont été déjà très
critiqués ; nous n’eu sommes ni sur
pris ni effrayés.
Les travailleurs qui out trouvé dans
la loi de 1884 un si souple et si puis
sant instrument lui ont opposé au
premier abord une résistance achar
née. Ils sont revenus de leurs préven
tions comme en reviendront ceux
d’entre eux qui, mal informés, com
battent aujourd’hui les deux projets
par nous déposés. Mais, puisque j’ai
la bonne fortune de me trouver ce
soir dans une assemblée de patrons,
ils me permettront de leur dire deux
mots sur le plus intéressant de ces
deux projets : celui qu’ou appelle
avec une égale inexactitude, tantôt le
projet sur l’arbitrage obligatoire, tan
tôt le projet sur la grève obligatoire.
Le projet de loi sur l’arbitrage
obligatoire
On pourrait s’étonner de la vio
lence de certaines attaques dirigées
contre ce projet par quelques groupe
ments à l’ordinaire plus modérés et
plus justes, si l’on ne se souvenait
que cette campagne s’est ouverte à
l’appel d’un homme politique qui affi
che son bostolité systématique au gou
vernement.
Quant à nous, non-seulement nous
ne repoussons pas, mais nous sollici
tons les critiques que citoyens ou as
sociations de tout ordre peuvent avoir
à adresser au projet ; nous souhai
tons seulement, dans l’intérêt même
de la discussion, que ces critiques
soient dégagées, autant que pos
sible, de tout calcul politique. Et,
sans vouloir suspecter la sincérité de
personne, nous nous défions un peu
des indignations qu’on suggère et des
protestations qu’on copie; nous nous
méfions surtout des grands mots et des
phrases ronflantes ; le plus petit argu
ment ferait bien mieux notre affaire.
Mauvaises querelles
Nous ne perdrons pas notre temps
et le vôtre à démontrer à ses adver
saires de droite que le projet n’a pas
été calculé pour « ruiner l’industrie
nationale» ni pour «préparer le
triomphe du collectivisme», ou à ses
adversaires de gauche que ses auteurs
ne se sont point proposés, en le pré
parant, de se rouler « aux pieds du
patronat ». Il nous suffira de soumet
tre aux gens de sang-froid et de
bonne foi tels que ceux qui nous
écoutent ces simples observations :
La grève, c’est-à-dire, l’explosion
du conflit entre l’employeur et ses
employés est un phénomène économi
que dont la fréquence et l’intensité
sont indépendantes et des personna
lités qui sont au pouvoir et même de
la force du gouvernement.
Ce que dit le projet
D’abord, la grève ne peut être dé
clarée qu’après que les. ouvriers ont,
par écrit, formulé leurs demandes.
Ensuite, entre la rédaction de ces
demandes et le vote éventuel de la
grève, un délai est prévu, obliga
toire.
La grève, enfin, ne peut en aucun
cas être prononcée que si la majorité
des ouvriers votant au scrutin secret
en décident ainsi.
Que l’on critique les procédés par
nous choisis ; que l’on débatte l'éten
due du délai : que ceux-ci le jugent
excessif, ceux-là insuffisant, rien de
pins naturel, de plus légitime, et nous
sommes prêts à discuter. Mais que
l’on se borne à opposer à un projet de
ce genre de pures déclamations, sans
rien proposer à la place qui soit de
nature à modifier la situation pré
sente, une telle méthode juge l’oppo
sition, réduite à s’en contenter.
Pour nous, convaincus de l’ur
gence de porter remède aux périls
d’une législation qui a reconnu avec
raison la légitimité de la grève, sans
rien prévoir pour en régler les péri
péties, en atténuer les risques ou en
bâter la fin, nous n’avons pas hésité
à prendre l’initiative et la responsa
bilité que commandait à un gouver
nement, digne de ce nom, le senti
ment de son devoir.
Aux patrons comme aux ouvriers,
d’accomplir maintenant le leur, en
nous aidant à améliorer un projet
qu’il est nécessaire, mais qui n’est pas
intangible.
Je lève mon verre à l’industrie
française et en particulier à l’indus
trie du papier, à la chambre syndi*
cale, au président de la classe 92, à
M. Putois.
CES BONS PERES
La Chambre des appels correction
nels de Paris a confirmé le jugement
qui condamnait à cinq ans de prison
le speudo-cardinal américain Joffreny
dit Lorentz. ■<
Ce pseudo-cardinal exerçait sur
tout son métier d’escroc dans les éta
blissements religieux. Il se présentait
comme cardinal-évêque de Washing
ton et implorait des secours pour les
petits Indiens du « Nouveau Mexi
que ».
Chez des Pères de la Trappe, il fit
plusieurs conférences aux cours des
quelles il raconta dans quelles circons
tances il avait été « scalpé « par les
Indiens des Montagnes Rocheuses.
Son ignorance de la géographie le
perdit. Ces bons Pères ne purent ad
mettre qu’il eût été prêcher l’Evan
gile aux Esquimaux dans les Mon
tagnes Rocheuses. Ils le firent arrêter
et la justice le condamna.
Reste à savoir ce que dirait main
tenant Thémis si on soumettait à son
appréciation le métier que font ces
bons Pères en débitant chaque jour à
leurs ouailles des récits aussi grotes
ques que fantaisistes et dans lesquels
on pourrait relever plus d’une erreur
de logique et de géographie.
La religion n’est qu’une exploita
tion de la bêtise. À ce titre, celle du
pseudo-cardinal américain valait la
leur. Ils n’avaient qu’à pas s’y lais
ser prendre.
LE RUBÂti ROUGE
M. Màthùrïn Nogre, adjudant principal
de la marine, à Toulon, médaillé pour sa
belle conduite au Tonkin, se reposait
tranquillement au milieu des siens, lors
que quelqu’un entra, le visage radieux. De
quelle bonne nouvelle l’arrivant était-il
le messager ? D’une surprise que le brave
sous-officier osait à peine entrevoir, les
jours où la vie était pour lui le plus riche
d’espérances. L’adjudant Nogre était
nommé dhevalier de la Légion d’honneur.
Ce fut une explosion de joie dans la
famille. Mme Nogre se sentit encore plus
Hère d’être la compagne de ce courageux
serviteur du pays ; l’enfant comprenait
qu’un grand bonheur entrait dans le mai*
son ; quant au nouveau légionnaire, son
émotion fut telle qu’il put à peine articu
ler un mot : « Merci ! » Puis on le vit
s’affaisser, le regard- fixé sur sa femme et
sur son enfant, et il resta immobile,
comme foudroyé. En vain des secours lui
furent-ils prodigués : il était mort !
Ce n’était pas le bonheur qui était entré
avec le messager de bonne nouvelle, mais
le malheur irréparable, le deuil éternel.
Ainsi donc, ce soldat sans peur, qui
avait maintes fois bravé la mort, dans les
rizières du Tonkin, sans qu’un frisson
diminuât son courage, qui avait connu les
émotions d’une guerre terrible, ce soldat
que les balles avaient épargné, est mort
de la joie de recevoir une récompense am«
plement méritée. Tant est grand le prix
accordé à ces distinctions par ceux qui
les obtiennent.
Certes le ruban rouge, comme tous les
autres rubans, se trompe parfois d’adresse.
Il orne la boutonnière de cabotins qui,
n’ayant rien fait pour le mériter, n’en:
sont que plus prompts à l’étaler comme à
en tirer honneur... et profit. Trop sou-<
vent il récompense des services électoraux
ou bien rémunère des concours... désin*
téressés. Il en fut ainsi de tout temps
pour les récompenses décernées par les
pouvoirs politiques. Mais, enfin, il ne
faut point partir de là pour déprécier une
distinction, dont s’honore à juste titre la,
plupart des titulaires. La mort de l’adju-
dant Nogre prouve le crédit dont elle
jouit dans le monde militaire, où elle est
toujours la récompense d’actes d’héroïsme
ou de longs services rendus à la Patrie.
Et, dans le monde civil, en est-il autre
ment ? Evidemment, il est des gens dont
la décoration surprend à bon droit ceux
CINQ CENTIMES LE NUMÉRO
Samedi 12 Janvier 1901.
Réveil
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
15, RUE GASIMIR-PÉRIER, 15
Secrétaire de la Rédaction. ... Alfred HENRI
L’Imprimeur-Gérant E. EE ROY
Prix des Insertions :
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50
NOS^ LOIS
La patrie du grand fabuliste La
fontaine, dont le bon sens naturel
devait semer dans les esprits, dès le
dix-septième siècle, les principes
d’équité et de justice qui ont lait la
Révolution de 1789, la ville de Châ
teau-Thierry, dis-je, mérite de fixer
notre attention. Serait-elle la mo
derne Athènes? C’est, qu’en effet,
de nos jours, renouvelant l’histoire,
avec les jugements célèbres du pré
sident Magnaud, plus soucieux d’ap
porter dans nos lois, le sens de
l’humanité que ies préoccupations
de l’avancement, la localité dont il
s’agit est en train de jeter la hache
dans les pratiques routinières de
dame Thémis. Un magistrat qui
fasse son devoir, qui considère sa
charge comme une profession ou un
apostolat, qui s’efforce de trouver
dans le labyrinthe de notre législa
ture, le droit chemin, la solution
juste, avec une touchante sollici
tude pour les miséreux, — au lieu de
les exposer aux rigueurs imméritées
dont font souvent preuve les juges
qui n’apprécient leur métier que
comme une source de salaires et
d’honneurs, — ce n’ést pas d’un
exemple banal.
J’assistais, jeudi, à la représenta
tion au Grand-Théâtre, de la Robe
Rouge, pièce judiciaire de M. Brieux,
et j’étais effrayé des vérités qu’elle
renferme, de cette peinture exacte,
qu’elle présente, bien qu’elle se main
tienne encore dans le cadre del’action
scénique, c’est-à-dire qu’elle sacrifie
à l’intérêt du spectacle, les vastes
idées générales et qu’elle n’aborde
qu’un point de la grande réforme
judiciaire qu’il nous faudra accom
plir.
Car, si je parais jeter la pierre à
de nombreux magistrats ou pro
céduriers, je dois reconnaître que
le tort — je ne dirai pas le crime,
bien que ce mot puisse être parfois
vrai _ le tort qu’ils commettent ne
leur appartient pas seulement. La
faute incombe également à nos légis
lateurs qui nous ont encombré d’un
stock considérable de lois fâcheuses,
se contredisant les unes et les au
tres, de ces lois qui ne se sont ja
mais imprégnées des principes
essentiels de la vie et de la société,
La faute incombe, aussi, dans
une démocratie, à l’électeur scep
tique et irréfléchi, qui sacrifie les
besoins légitimes de l’humanité à
son intérêt personnel, à l’entraîne
ment do la camaraderie, à quelques
petits verres,et, souvent,à son igno
rance par la paresse de son intelli
gence, quand il dépose son bulletin
de vote dans l’urne.
La faute incombe encore à cer
taine presse de mensonge, à ces
nombreux journalistes qui ne voient
dans leur carrière que le profit per
sonnel, la douce joie de se laisser
vivre sans efforts, sans danger.
sans risques. Pour cela, il leur suffit
de ne pas déplaire à l’administra
teur, ni aux actionnaires, ni à la
coterie. Mais leur conscience ?...
Ah ! ils s’en soucient bien de leur
conscience ! Ils n’en ont pas ! Au
jourd’hui commandez-leur un ar
ticle en faveur du protectionnisme
pour, préparer plus tard l’élection
du député X..., ils le tailleront sur
mesure. Demain : changement ;
c’est de M. Z... qu’il faut soutenir
l’élection. Il est, par hasard et heu
reusement, libre-échangiste, alors,
la même plume que précédemment
abolira les barrière de douane. Voilà
leur conscience.
Or, cependant, une morale nou
velle s’infiltre petit à petit dans la so
ciété. Ah,cette morale de justice et de
droiture, que nous la voudrions voir
enfin briller !... Mais elle marche à
pas si lents !... C’est à cette grande
œuvre d’éducation qu’il faut nous
attacher, car les esprits ne sont pas
préparés pour recevoir la bonne
semence qui fera germer le bon
grain. Nous avons à réformer tous
nos codes, depuis le code Napoléon,
c’est le code civil, c’est le code pénal,
c’est la procédure surtout qu’il faut
abroger et les procéduriers qu’il faut
diminuer. Suivant l’expression de
Tun de nos amis, nous avons là de
nouvelles Bastilles à renverser. La
justice gratuite et entièrement gra
tuite, telle est la première formule
à exiger, dans son application pré
cise.
Quant aux codes, la difficulté est
plus grande. Ou trouver la vitalité
puissante pour les amender? Le
Conseil d’Etat, seul, en serait capa
ble, me disait un jurisconsulte dis
tingué de notre ville. Y rencontre
rait-on les idées larges, supérieures
et généreuses qui doivent nous gui
der? Trop de cerveaux sont encore
trop surchargés des préjugés du
catholicisme et de la théologie pour
comprendre dans leur intégralité les
nécessités nouvelles. C’est dans le
culte de la Raison, par un besoin
d’émulation vers le mieux, c’est
dans Tassagissement de la démo
cratie, par son éducation, que nous
trouverons le remède.
Alf. HENRI.
Les Communes et la Loi de 18S7
Voici, d’après un relevé fait au
ministère des finances, la situation
actuelle des communes à octroi vis-à-
vis de la loi de 1897 qui a prescrit le
dégrèvement des boissons hygiéni
ques.
1,240 communes percevaient des
droits, d’octroi, plus ou moins élevés,
sur les boissons hygiéniques lors de
la promulgation de la loi du 29 dé
cembre 1897.
Sur ce. nombre, 180 communes
(Paris compris) ont, à l’heure actuel
le, supprimé totalement ces droits;
1,050 les ont réduits aux maximas
prévus par la loi de 1897 ; 10, enfin,
ont obtenu un sursis de trois ou de
six mois pour l’application de la loi.
mm m i miMi
L’arbitrage obligatoire. — Devant
une assemblée de patrons. —
Justification du projet.
Le citoyen Millerand, ministre du
commerce et de l’industrie, a présidé
hier soir, au palais d’Orsay, le ban
quet organisé par la chambre syndi
cale de la papeterie, pour fêter la dé
coration de M. Putois, son président,
nommé officier de la Légion d’hon
neur.
Le ministre a saisi cette occasion
pour justifier et défendre devant une
assemblée de patrons les récents pro
jets de loi déposés par lui et si vio
lemment attaqués par la fraction des
industriels qui marchent à la remor
que de M. Méline.
Discours de Millerand
La Révolution française a proclamé
l’égalité juridique des citoyens. La
seconde République a réalisé, par le
suffrage universel, leur égalité po
litique. Ce sera la grandeur de la
troisième République que de tenter
de diminuer leur inégalité sociale.
Elle peut se glorifier en ce sens de
deux efforts considérables qui s’appel
lent : les lois sur renseignement et 1a
loi sur les syndicats.
Jules Ferry, RenéGoblet ont atta
ché leur nom aux unes, M. Waldeck-
Bousseau à l’autre.
Le président du conseil poursuit
son œuvre, et c’est une grande fierté,
pour celui qui vous parle, que d’être
dans cette tâche son fidèle et modeste
collaborateur, en demandant à la
Chambre, par les deux projets dont
il l’a saisie, d’augmenter la capacité
des syndicats; de rendre plus aisé et
plus sûr le règlement amiable des dif
férends relatifs aux conditions du
travail.
Ces deux projets ont été déjà très
critiqués ; nous n’eu sommes ni sur
pris ni effrayés.
Les travailleurs qui out trouvé dans
la loi de 1884 un si souple et si puis
sant instrument lui ont opposé au
premier abord une résistance achar
née. Ils sont revenus de leurs préven
tions comme en reviendront ceux
d’entre eux qui, mal informés, com
battent aujourd’hui les deux projets
par nous déposés. Mais, puisque j’ai
la bonne fortune de me trouver ce
soir dans une assemblée de patrons,
ils me permettront de leur dire deux
mots sur le plus intéressant de ces
deux projets : celui qu’ou appelle
avec une égale inexactitude, tantôt le
projet sur l’arbitrage obligatoire, tan
tôt le projet sur la grève obligatoire.
Le projet de loi sur l’arbitrage
obligatoire
On pourrait s’étonner de la vio
lence de certaines attaques dirigées
contre ce projet par quelques groupe
ments à l’ordinaire plus modérés et
plus justes, si l’on ne se souvenait
que cette campagne s’est ouverte à
l’appel d’un homme politique qui affi
che son bostolité systématique au gou
vernement.
Quant à nous, non-seulement nous
ne repoussons pas, mais nous sollici
tons les critiques que citoyens ou as
sociations de tout ordre peuvent avoir
à adresser au projet ; nous souhai
tons seulement, dans l’intérêt même
de la discussion, que ces critiques
soient dégagées, autant que pos
sible, de tout calcul politique. Et,
sans vouloir suspecter la sincérité de
personne, nous nous défions un peu
des indignations qu’on suggère et des
protestations qu’on copie; nous nous
méfions surtout des grands mots et des
phrases ronflantes ; le plus petit argu
ment ferait bien mieux notre affaire.
Mauvaises querelles
Nous ne perdrons pas notre temps
et le vôtre à démontrer à ses adver
saires de droite que le projet n’a pas
été calculé pour « ruiner l’industrie
nationale» ni pour «préparer le
triomphe du collectivisme», ou à ses
adversaires de gauche que ses auteurs
ne se sont point proposés, en le pré
parant, de se rouler « aux pieds du
patronat ». Il nous suffira de soumet
tre aux gens de sang-froid et de
bonne foi tels que ceux qui nous
écoutent ces simples observations :
La grève, c’est-à-dire, l’explosion
du conflit entre l’employeur et ses
employés est un phénomène économi
que dont la fréquence et l’intensité
sont indépendantes et des personna
lités qui sont au pouvoir et même de
la force du gouvernement.
Ce que dit le projet
D’abord, la grève ne peut être dé
clarée qu’après que les. ouvriers ont,
par écrit, formulé leurs demandes.
Ensuite, entre la rédaction de ces
demandes et le vote éventuel de la
grève, un délai est prévu, obliga
toire.
La grève, enfin, ne peut en aucun
cas être prononcée que si la majorité
des ouvriers votant au scrutin secret
en décident ainsi.
Que l’on critique les procédés par
nous choisis ; que l’on débatte l'éten
due du délai : que ceux-ci le jugent
excessif, ceux-là insuffisant, rien de
pins naturel, de plus légitime, et nous
sommes prêts à discuter. Mais que
l’on se borne à opposer à un projet de
ce genre de pures déclamations, sans
rien proposer à la place qui soit de
nature à modifier la situation pré
sente, une telle méthode juge l’oppo
sition, réduite à s’en contenter.
Pour nous, convaincus de l’ur
gence de porter remède aux périls
d’une législation qui a reconnu avec
raison la légitimité de la grève, sans
rien prévoir pour en régler les péri
péties, en atténuer les risques ou en
bâter la fin, nous n’avons pas hésité
à prendre l’initiative et la responsa
bilité que commandait à un gouver
nement, digne de ce nom, le senti
ment de son devoir.
Aux patrons comme aux ouvriers,
d’accomplir maintenant le leur, en
nous aidant à améliorer un projet
qu’il est nécessaire, mais qui n’est pas
intangible.
Je lève mon verre à l’industrie
française et en particulier à l’indus
trie du papier, à la chambre syndi*
cale, au président de la classe 92, à
M. Putois.
CES BONS PERES
La Chambre des appels correction
nels de Paris a confirmé le jugement
qui condamnait à cinq ans de prison
le speudo-cardinal américain Joffreny
dit Lorentz. ■<
Ce pseudo-cardinal exerçait sur
tout son métier d’escroc dans les éta
blissements religieux. Il se présentait
comme cardinal-évêque de Washing
ton et implorait des secours pour les
petits Indiens du « Nouveau Mexi
que ».
Chez des Pères de la Trappe, il fit
plusieurs conférences aux cours des
quelles il raconta dans quelles circons
tances il avait été « scalpé « par les
Indiens des Montagnes Rocheuses.
Son ignorance de la géographie le
perdit. Ces bons Pères ne purent ad
mettre qu’il eût été prêcher l’Evan
gile aux Esquimaux dans les Mon
tagnes Rocheuses. Ils le firent arrêter
et la justice le condamna.
Reste à savoir ce que dirait main
tenant Thémis si on soumettait à son
appréciation le métier que font ces
bons Pères en débitant chaque jour à
leurs ouailles des récits aussi grotes
ques que fantaisistes et dans lesquels
on pourrait relever plus d’une erreur
de logique et de géographie.
La religion n’est qu’une exploita
tion de la bêtise. À ce titre, celle du
pseudo-cardinal américain valait la
leur. Ils n’avaient qu’à pas s’y lais
ser prendre.
LE RUBÂti ROUGE
M. Màthùrïn Nogre, adjudant principal
de la marine, à Toulon, médaillé pour sa
belle conduite au Tonkin, se reposait
tranquillement au milieu des siens, lors
que quelqu’un entra, le visage radieux. De
quelle bonne nouvelle l’arrivant était-il
le messager ? D’une surprise que le brave
sous-officier osait à peine entrevoir, les
jours où la vie était pour lui le plus riche
d’espérances. L’adjudant Nogre était
nommé dhevalier de la Légion d’honneur.
Ce fut une explosion de joie dans la
famille. Mme Nogre se sentit encore plus
Hère d’être la compagne de ce courageux
serviteur du pays ; l’enfant comprenait
qu’un grand bonheur entrait dans le mai*
son ; quant au nouveau légionnaire, son
émotion fut telle qu’il put à peine articu
ler un mot : « Merci ! » Puis on le vit
s’affaisser, le regard- fixé sur sa femme et
sur son enfant, et il resta immobile,
comme foudroyé. En vain des secours lui
furent-ils prodigués : il était mort !
Ce n’était pas le bonheur qui était entré
avec le messager de bonne nouvelle, mais
le malheur irréparable, le deuil éternel.
Ainsi donc, ce soldat sans peur, qui
avait maintes fois bravé la mort, dans les
rizières du Tonkin, sans qu’un frisson
diminuât son courage, qui avait connu les
émotions d’une guerre terrible, ce soldat
que les balles avaient épargné, est mort
de la joie de recevoir une récompense am«
plement méritée. Tant est grand le prix
accordé à ces distinctions par ceux qui
les obtiennent.
Certes le ruban rouge, comme tous les
autres rubans, se trompe parfois d’adresse.
Il orne la boutonnière de cabotins qui,
n’ayant rien fait pour le mériter, n’en:
sont que plus prompts à l’étaler comme à
en tirer honneur... et profit. Trop sou-<
vent il récompense des services électoraux
ou bien rémunère des concours... désin*
téressés. Il en fut ainsi de tout temps
pour les récompenses décernées par les
pouvoirs politiques. Mais, enfin, il ne
faut point partir de là pour déprécier une
distinction, dont s’honore à juste titre la,
plupart des titulaires. La mort de l’adju-
dant Nogre prouve le crédit dont elle
jouit dans le monde militaire, où elle est
toujours la récompense d’actes d’héroïsme
ou de longs services rendus à la Patrie.
Et, dans le monde civil, en est-il autre
ment ? Evidemment, il est des gens dont
la décoration surprend à bon droit ceux
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