Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1900-07-21
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 21 juillet 1900 21 juillet 1900
Description : 1900/07/21 (N221). 1900/07/21 (N221).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k3263420s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/05/2019
5 e Année — N® 22)
CINQ CENTIMES LE NUMERO
Samedi 21 Juillet 1900.
N°
Ann
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
1
ADMINISTRATION ET
RÉDACTION
Prix
des Insertions :
J
15,
RUE CASIMIR
-PÉRIER,
1 B
1
Annonces .
1
j§
Réclames..
g
Secrétaire de la Rédaction....
Alfs’cd HENRI
B
i
L’Imprimeur-Gérant
F. LE ROY
n
On
traite à forfait
k NOS LECTEURS
Dans le but de rendre la lecture de
notre journal plus attrayante, nous
informons nos lecteurs que nous venons
de traiter avec la Société des Gens de
Lettres, pour nous assurer le concours
de nos meilleurs auteurs. Nous publie
rons chaque semaine, sous forme de
nouvelle littéraire, une Variété de bon
goût.
Notre numéro d’aujourd'hui publie
Une mort ténébreuse, de HIX, que nous
recommandons à nos lecteurs et lec
trices.
Venant après la revue passée à
Longchamps au 14 Juillet, le voyage
du Président de la République à
Cherbourg aura, dans tout le pays,
une haute portée morale.
En présence de la campagne na
tionaliste menée par la tourbe césa
rienne, cléricale et réactionnaire,
il était salutaire de montrer à tous
que le gouvernement de la Répu
blique ne se désintéresse point de la
défense des frontières. Il était bon
de réaliser une imposante manifes
tation pour les esprits encore égarés
qui confondent le chauvinisme et le
patriotisme, comme, d’autre part,
ils prennent argent comptant la
révolte prétorienne ouverte contre
le régime démocratique pour la
fidélité à la loi et à la nation.
Les journaux nationalistes font,
en ce moment, grise mise et mau
vaise contenance, c’est qu’ils com
prennent qu’il y a quelque chose.de
changé, un conflit virtuellement
tranché en France à leur détriment.
Les discours successivement pro
noncés, en cours de route, par M.
Emile Loubet, à Lisieux notamment,
et à Caen, donnent à son déplacement
une signification politique qu’»l se
rait puéril de nier.
Le président de la République n’a
pas craint de parler haut et net. Il
a flagellé les entreprises des fac
tieux au profit d’un régime innommé
et sans consistance possible, ni
durable. Il a assuré les populations
républicaines qu’il saurait, coûte
que coûte, accomplir son devoir. A
Cherbourg, il a tenu cette phrase
énergique et consciente :
« Nos soldats, pénétrés de la
« gravité de leur mission, disci-
« plinés et vaillants, obéissants à
« leurs chefs, comme leurs chefs le
« font au gouvernement de la
« Hépublique. »
Le pouvoir militaire soumis à
l’autorité civile, voilà ce qu’il faut
lire entre ces lignes, voilà ce que
veut le gouvernement, voilà l’évé
nement de ces dernières journées.
Si la réalisation de ces espéran
ces n’est pas encore complète, du
moins, nous nous acheminerons
vers elle.
Partout, depuis le haut des ver
gues des navires de guerre ou
étaient alignés nos marins, jus
qu’aux champs ou les paysans re
dressaient le dos courbé sur le tra
vail, ça a été une immense accla
mation de la République, dans une
foi puissante, au passage du cortège
présidentiel.
Oui, il y a quelque chose de changé,
l’armée redevenant républicaine et
obéissante à la volonté du pays.
L’équivoque soigneusement entre
tenue par de faux patriotes et de
mauvais citoyens se dissipant de plus
en plus.
L’œuvre de Longchamp et de
Cherbourg est bonne. Je sais que
tout n’est pas encore fini et qu’il faut
épargner de nouvelles angoisses au
pays en prévenant le retour des pro-
nunciamento cléricaux et militaris
tes, mais la tâche utile de. morali
sation militaire et nationale est com
mencée.
A la sagessse de la démocratie de
la continuer équitablement.
Alf. HENRI.
LES PRÉSIDENTS EN VOYAGE
Le voyage que M. Loubet, prési
dent delà République, vient d’accom
plir à Cherbourg, comptera, selon
ses propres expressions, parmi les plus
beaux, les plus inoubliables de son
existence.
Tous les journaux en ont rendu
compte, et tout ce que nous pourrions
dire n’ajouterait rien à la connaissance
de nos lecteurs.
A ce sujet, toutefois, nous croyons
intéressant de leur rappeler ce que
furent les voyages de ses prédéces
seurs :
M. Thiers
Le « libérateur du territoire » avait
les yeux accoutumés aux formes et
aux représentations monarchiques.
M. Thiers aimait faire acte d’auto
rité pour le seul prestige de son nom.
Mais l’apparât lui semblait inutile
pour encadrer sa personnalité.
Il voyageait simplement, n’ayant
avec lui qu'un secrétaire et un valet
de chambre.
Toutefois, s’il n’exigeait pas l’orga
nisation d’un train spécial et prési
dentiel, il lui fallait, à chacun de ses
déplacements, un wagon- salon et son
lit de fer qu’on montait et qu’on dé
montait en un instant.
Quand il n’avait pas ce meuble
indispensable, il ne pouvait dormir
qu’assis dans un fauteuil.
M. Thiers était surtout un politi
que de cabinet, auquel le contact des
foules et les ovations de la rue déplai
saient souverainement. Devenu Pré
sident, il ne profita pas de la facilité
qui lui était offerte de se déplacer
selon son désir. Il fut cependant un
été à Trouville où, entouré de géné
raux, il présida sur la place à des
expériences d’artillerie.
Le nfaréchal de Mac-Mahon
Le maréchal n’aimait pas plus que
M. Thiers les^déplacements présiden
tiels. Il aimait la foule. Sa livrée
blanche, ses chevaux, ses voitures,
sont restés célèbres. En route, parlant
peu, se soumettant avec peine aux
exigences delà situation qu’il occupait,
il aimait mieux être appelé Monsieur
le Maréchal que Monsieur le Prési
dent. Les lenteurs des présentations
officielles et leur monotonie avaient
le don de l’exaspérer, si bien que,
dans les grandes circonstances, il
n’hésitait pas à s’enfermer dans son
wagon-lit, où il proférait de ces phra
ses lapidaires demeurées légendaires.
Ses voyages furent de véritables
galas, au cours desquels le vainqueur
de Magenta fut chaleureusement
acclamé.
Détail assez pittoresque et qui mon
tre combien le maréchal connaissait
la puissance du panache sur la foule :
il ne voyageait que revêtu de son
grand uniforme, alors qu’il restait en
redingote à l’Elysée.
M. Grévy
Devenu homme d’intérieur, depuis
ses succès dans la politique, M. Grévy
avait fait, de l’Elysée, une agréable
maison.
Quand il lui fallait quitter, pour
une cérémonie officielle, cette demeure
tranquille, il en avait de l’ennui,
devenait morose, montrait les incon
vénients du voyage, les frais occasion
nés de la sorte à l’Etat. Il chipotait
et, en fin de compte, refusait toutes
les invitations que lui envoyaient les
villes de province.
M. Grévy ne fit qu’un voyage pré
sidentiel. Ce fut tout justement à
Cherbourg, avec Gambetta, pour
assister à une revue des forces navales
de la Fiance.
M. Carnot
Succédant à M. Grévy, demeuré
invisible, M. Carnot se fit voir le plus
possible. Grâce à lui la mode des
voyages présidentiels devint une tra
dition. Il se prodiguait, recevait le
compliment des fillettes et l’accolade
des parents. Jamais il ne se plaignait
de la fatigue.
Toujours sanglé dans son habit et
chaussé de ces bottines à bouts carrés
auxquelles il a donné son nom, on le
rencontrait sur les terrains de ma
nœuvres, aux portes des villes pavoi-
sées, la bouche gravement plissée de
son même sourire.
Le regretté M. Carnot partait en
voyage avec deux chapeaux et trois
habits.
M. Casimir Périer
Dès son arrivée à l’Elysée, M. Ca
simir Périer fut sollicité à des dépla
cements en province.
Son premier voyage eut pour but
Pont-sur-Seine. Après, ce fut la revue
de Châteaudun; puis, M. Casimir
Périer rentra à l’Elysée pour en sortir,
quelque temps après, simple particu
lier.
Il n’eut donc pas le temps d’adop
ter une méthode de voyage.
Depuis, il fait de la bicyclette.
M. Félix Faure
M. Félix Faure voyageait beau
coup.
Retracer ses habitudes de voyageur
serait bien inutile, puisque la photo
graphie, complice indistrète des re
porters, nous l’a montré tour à tour
fumant sa pipe sur un pont de navire,
à mulet sur la frontière italienne ou
à cheval devant les armées.
La présidence de M. Félix Faure
est encore trop récente pour qu’il soit
nécessaire d’en rappeler les particu
larités.
Nous apprenons, en dernière
heure, que la grève des terrassiers
est terminée en conformité des dé
cisions arbitrales de MM. Baudin et
Marais. Nous félicitons les ouvriers
de leur détermination.
L’Etat, te Public
ET LES
Retraites Ouvrières
On s’est beaucoup ému, en ces
dernières années, de la situation
précaire des ouvriers qui, trop
faibles et trop vieux pour travailler,
tombent inévitablement dans la mi
sère la plus profonde.
De nombreux économistes ont
cherché le remède. Tout d’abord,
ils décidèrent de donner à l’ouvrier
un salaire plus élevé : Se trouvant
dans un état d’abondance relative
pensaient-ils, le travailleur écono
misera le superflu et amassera un
petit pécule pour ses vieux jours.
Déçus dans leurs espérances, ces
innovateurs philanthropes reconnu
rent la nécessité d’être prévoyants
aux lieu et place de l’ouvrier. De là
l’idée des retraites ouvrières dont
l’épanouissement a pour dernière
phase le projet do M. Guiyesse.
En janvier dernier, ce député pré
sentait à la Commission d’assistance
et de prévoyance sociale, un projet
pour lequel, usant de l’expérience
que lui ont donnée ses travaux pré
cédents et les études similaires de
ses collègues, il a fondu et réuni en
un tout, l’ensemble des mesures
pratiques proposées par ceux-ci.
La Commission a adopté les deux
principes suivants :
I. — Tout ouvrier ou employé de l’industrie,
du commerce et de l’agriculture a droit, s’il
est de nationalité française à :
i° Une retraite de vieillesse à 65 ans ;
2° Une assurance en cas de décès au profit de
son conjoint s’il est marié ;
3° Une assurance en cas de décès, distinct de
la précédente, au profit de ses enfants légi
times ou naturels reconnus et âgés de moins
de 16 ans.
II. — Les primes d’assurance seront payées,
partie par l’ouvrier, sur les salaires duquel
une retenue sera opérée; partie par le pa
tron qui devra sa cotisation par le fait
même que l’employé aura payé la sienne;
partie par l’État, qui, chargé de l’adminis
tration des fonds ainsi recueillis durant
toute la vie du travailleur, devra, au moment
où cette pension sera exigible, et si cette
pension n’est pas suffisante pour assurer le
pain quotidien, y ajouter un apport afin de
l’élever à un taux qui reste à déterminer.
Mon intention n’est pas ici de dis
cuter les conditions d’application de
ces deux principes, mais de m’atta
quer à l’idée qui a présidé à leur
élucubration; car à mon point de
vue, cette pensée directrice, ne tend
rien moins qu’à une injustice so
ciale.
Recherchons en effet quels seront,
en dernière analyse, les citoyens qui
supporteront la charge de l’assu
rance ouvrière. Nous avons vu que
les primes étaient payées par l’ou
vrier, le patron et l’État.
L’ouvrier, prévoyant l’époque, où
sans force et sans énergie, il sera
voué aux pires misères, prélèvera
sur sa paie quotidienne une somme
qu’il versera à une caisse centrali
satrice.
Le premier versement l’obligera,
âour l’avenir, à fairç chaque jour la
même retenue, et ce contrat de
Société d’assurances mutuelles, qu’il
a ainsi signé de son premier apport,
semble très équitable, puisqu’il s’est
engagé, de son plein gré, à mettre
de côté ce qu’il aurait eu le droit de
dépenser au jour le jour. Mais ce sa
crifice a pour effet de faire baisser
son salaire d’une somme égale au
montant de la prime payée ; or le
taux du salaire est compris entre
deux limites, généralement très
rapprochées à l’époque difficile que
nous traversons : un minimum, né
cessaire à l’ouvrier pour ses besoins
de chaque jour, et un maximum au-
delà duquel le capital n’est plus ré
tribué et passe à un emploi plus
rémunérateur; le taux du salaire
ne peut baisser, puisque cette baisse
aurait pour résultat la gêne de
l’ouvrier. Pour que celui-ci écono
mise, on sera donc contraint de lui
consentir une augmentation de sa
laire équivalente à la prime d’assu
rance par lui payée ; mais alors, le
patron, forcé de supporter cette
augmentation de dépenses, qui le
ruine, n’aura d’autre ressource que
d’élever le prix de la marchandise
fabriquée. Alors, qui paiera la pri
me d’assurance de l’ouvrier? Le
consommateur, c’est-à-dire le pu
blic.
Il n’est pas besoin de longues dé
monstrations pour prouver que la
quote-part de l’Etat sera prise, d’une
façon bien plus directe et par l’in
termédiaire de l’impôt, dans la po
che du contribuable.
Mais direz-vous, la solidarité so
ciale nous commande de venir
en aide à nos frères malheu
reux ! Oui, mais il ne faut pas que
cette idée de solidarité, de droit à la
charité, fausse le courage et l’ini
tiative individuelle ; à quoi bon tra
vailler, épargner, si l’ivrogne et le
débauché sont certains, comme le
laborieux et l’économe, de recueil
lir dans leur vieillesse une pension
les mettant à l’abri du besoin ?
Au lieu d’exalter la solidarité
sociale, il eût été préférable de faire
naître chez le travailleur le désir de
parvenir seul et par ses propres
forces, de développer son couittge,
quitte à lui porter secours, sans
bruit, s’il se trouvait dans le besoin.
Enfin, si l’on considère comme
une nécessité pour l’ouvrier de
vivre tranquille par la perspective
des ressources qui lui sont réservées
dans l’avenir, au moins aurait-il
fallu le laisser seul juge de cette
nécessité ; si la retraite lui semble,
faire partie du programme de ses
revendications, qu’il l’y inscrive et
lutte pour l’obtenir, mais que l’Etat
ne vienne pas s’ingérer dans une
discussion où, seuls, les intérêts par
ticuliers sont en jeu. Ce n’est pas la
retraite ouvrière elle-même que je
blâme ici, mais l’obtention de cette
CINQ CENTIMES LE NUMERO
Samedi 21 Juillet 1900.
N°
Ann
Organe du Parti Républicain Démocratique
PRIX DES ABONNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an 3 fr.
Départements » 4 fr.
1
ADMINISTRATION ET
RÉDACTION
Prix
des Insertions :
J
15,
RUE CASIMIR
-PÉRIER,
1 B
1
Annonces .
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j§
Réclames..
g
Secrétaire de la Rédaction....
Alfs’cd HENRI
B
i
L’Imprimeur-Gérant
F. LE ROY
n
On
traite à forfait
k NOS LECTEURS
Dans le but de rendre la lecture de
notre journal plus attrayante, nous
informons nos lecteurs que nous venons
de traiter avec la Société des Gens de
Lettres, pour nous assurer le concours
de nos meilleurs auteurs. Nous publie
rons chaque semaine, sous forme de
nouvelle littéraire, une Variété de bon
goût.
Notre numéro d’aujourd'hui publie
Une mort ténébreuse, de HIX, que nous
recommandons à nos lecteurs et lec
trices.
Venant après la revue passée à
Longchamps au 14 Juillet, le voyage
du Président de la République à
Cherbourg aura, dans tout le pays,
une haute portée morale.
En présence de la campagne na
tionaliste menée par la tourbe césa
rienne, cléricale et réactionnaire,
il était salutaire de montrer à tous
que le gouvernement de la Répu
blique ne se désintéresse point de la
défense des frontières. Il était bon
de réaliser une imposante manifes
tation pour les esprits encore égarés
qui confondent le chauvinisme et le
patriotisme, comme, d’autre part,
ils prennent argent comptant la
révolte prétorienne ouverte contre
le régime démocratique pour la
fidélité à la loi et à la nation.
Les journaux nationalistes font,
en ce moment, grise mise et mau
vaise contenance, c’est qu’ils com
prennent qu’il y a quelque chose.de
changé, un conflit virtuellement
tranché en France à leur détriment.
Les discours successivement pro
noncés, en cours de route, par M.
Emile Loubet, à Lisieux notamment,
et à Caen, donnent à son déplacement
une signification politique qu’»l se
rait puéril de nier.
Le président de la République n’a
pas craint de parler haut et net. Il
a flagellé les entreprises des fac
tieux au profit d’un régime innommé
et sans consistance possible, ni
durable. Il a assuré les populations
républicaines qu’il saurait, coûte
que coûte, accomplir son devoir. A
Cherbourg, il a tenu cette phrase
énergique et consciente :
« Nos soldats, pénétrés de la
« gravité de leur mission, disci-
« plinés et vaillants, obéissants à
« leurs chefs, comme leurs chefs le
« font au gouvernement de la
« Hépublique. »
Le pouvoir militaire soumis à
l’autorité civile, voilà ce qu’il faut
lire entre ces lignes, voilà ce que
veut le gouvernement, voilà l’évé
nement de ces dernières journées.
Si la réalisation de ces espéran
ces n’est pas encore complète, du
moins, nous nous acheminerons
vers elle.
Partout, depuis le haut des ver
gues des navires de guerre ou
étaient alignés nos marins, jus
qu’aux champs ou les paysans re
dressaient le dos courbé sur le tra
vail, ça a été une immense accla
mation de la République, dans une
foi puissante, au passage du cortège
présidentiel.
Oui, il y a quelque chose de changé,
l’armée redevenant républicaine et
obéissante à la volonté du pays.
L’équivoque soigneusement entre
tenue par de faux patriotes et de
mauvais citoyens se dissipant de plus
en plus.
L’œuvre de Longchamp et de
Cherbourg est bonne. Je sais que
tout n’est pas encore fini et qu’il faut
épargner de nouvelles angoisses au
pays en prévenant le retour des pro-
nunciamento cléricaux et militaris
tes, mais la tâche utile de. morali
sation militaire et nationale est com
mencée.
A la sagessse de la démocratie de
la continuer équitablement.
Alf. HENRI.
LES PRÉSIDENTS EN VOYAGE
Le voyage que M. Loubet, prési
dent delà République, vient d’accom
plir à Cherbourg, comptera, selon
ses propres expressions, parmi les plus
beaux, les plus inoubliables de son
existence.
Tous les journaux en ont rendu
compte, et tout ce que nous pourrions
dire n’ajouterait rien à la connaissance
de nos lecteurs.
A ce sujet, toutefois, nous croyons
intéressant de leur rappeler ce que
furent les voyages de ses prédéces
seurs :
M. Thiers
Le « libérateur du territoire » avait
les yeux accoutumés aux formes et
aux représentations monarchiques.
M. Thiers aimait faire acte d’auto
rité pour le seul prestige de son nom.
Mais l’apparât lui semblait inutile
pour encadrer sa personnalité.
Il voyageait simplement, n’ayant
avec lui qu'un secrétaire et un valet
de chambre.
Toutefois, s’il n’exigeait pas l’orga
nisation d’un train spécial et prési
dentiel, il lui fallait, à chacun de ses
déplacements, un wagon- salon et son
lit de fer qu’on montait et qu’on dé
montait en un instant.
Quand il n’avait pas ce meuble
indispensable, il ne pouvait dormir
qu’assis dans un fauteuil.
M. Thiers était surtout un politi
que de cabinet, auquel le contact des
foules et les ovations de la rue déplai
saient souverainement. Devenu Pré
sident, il ne profita pas de la facilité
qui lui était offerte de se déplacer
selon son désir. Il fut cependant un
été à Trouville où, entouré de géné
raux, il présida sur la place à des
expériences d’artillerie.
Le nfaréchal de Mac-Mahon
Le maréchal n’aimait pas plus que
M. Thiers les^déplacements présiden
tiels. Il aimait la foule. Sa livrée
blanche, ses chevaux, ses voitures,
sont restés célèbres. En route, parlant
peu, se soumettant avec peine aux
exigences delà situation qu’il occupait,
il aimait mieux être appelé Monsieur
le Maréchal que Monsieur le Prési
dent. Les lenteurs des présentations
officielles et leur monotonie avaient
le don de l’exaspérer, si bien que,
dans les grandes circonstances, il
n’hésitait pas à s’enfermer dans son
wagon-lit, où il proférait de ces phra
ses lapidaires demeurées légendaires.
Ses voyages furent de véritables
galas, au cours desquels le vainqueur
de Magenta fut chaleureusement
acclamé.
Détail assez pittoresque et qui mon
tre combien le maréchal connaissait
la puissance du panache sur la foule :
il ne voyageait que revêtu de son
grand uniforme, alors qu’il restait en
redingote à l’Elysée.
M. Grévy
Devenu homme d’intérieur, depuis
ses succès dans la politique, M. Grévy
avait fait, de l’Elysée, une agréable
maison.
Quand il lui fallait quitter, pour
une cérémonie officielle, cette demeure
tranquille, il en avait de l’ennui,
devenait morose, montrait les incon
vénients du voyage, les frais occasion
nés de la sorte à l’Etat. Il chipotait
et, en fin de compte, refusait toutes
les invitations que lui envoyaient les
villes de province.
M. Grévy ne fit qu’un voyage pré
sidentiel. Ce fut tout justement à
Cherbourg, avec Gambetta, pour
assister à une revue des forces navales
de la Fiance.
M. Carnot
Succédant à M. Grévy, demeuré
invisible, M. Carnot se fit voir le plus
possible. Grâce à lui la mode des
voyages présidentiels devint une tra
dition. Il se prodiguait, recevait le
compliment des fillettes et l’accolade
des parents. Jamais il ne se plaignait
de la fatigue.
Toujours sanglé dans son habit et
chaussé de ces bottines à bouts carrés
auxquelles il a donné son nom, on le
rencontrait sur les terrains de ma
nœuvres, aux portes des villes pavoi-
sées, la bouche gravement plissée de
son même sourire.
Le regretté M. Carnot partait en
voyage avec deux chapeaux et trois
habits.
M. Casimir Périer
Dès son arrivée à l’Elysée, M. Ca
simir Périer fut sollicité à des dépla
cements en province.
Son premier voyage eut pour but
Pont-sur-Seine. Après, ce fut la revue
de Châteaudun; puis, M. Casimir
Périer rentra à l’Elysée pour en sortir,
quelque temps après, simple particu
lier.
Il n’eut donc pas le temps d’adop
ter une méthode de voyage.
Depuis, il fait de la bicyclette.
M. Félix Faure
M. Félix Faure voyageait beau
coup.
Retracer ses habitudes de voyageur
serait bien inutile, puisque la photo
graphie, complice indistrète des re
porters, nous l’a montré tour à tour
fumant sa pipe sur un pont de navire,
à mulet sur la frontière italienne ou
à cheval devant les armées.
La présidence de M. Félix Faure
est encore trop récente pour qu’il soit
nécessaire d’en rappeler les particu
larités.
Nous apprenons, en dernière
heure, que la grève des terrassiers
est terminée en conformité des dé
cisions arbitrales de MM. Baudin et
Marais. Nous félicitons les ouvriers
de leur détermination.
L’Etat, te Public
ET LES
Retraites Ouvrières
On s’est beaucoup ému, en ces
dernières années, de la situation
précaire des ouvriers qui, trop
faibles et trop vieux pour travailler,
tombent inévitablement dans la mi
sère la plus profonde.
De nombreux économistes ont
cherché le remède. Tout d’abord,
ils décidèrent de donner à l’ouvrier
un salaire plus élevé : Se trouvant
dans un état d’abondance relative
pensaient-ils, le travailleur écono
misera le superflu et amassera un
petit pécule pour ses vieux jours.
Déçus dans leurs espérances, ces
innovateurs philanthropes reconnu
rent la nécessité d’être prévoyants
aux lieu et place de l’ouvrier. De là
l’idée des retraites ouvrières dont
l’épanouissement a pour dernière
phase le projet do M. Guiyesse.
En janvier dernier, ce député pré
sentait à la Commission d’assistance
et de prévoyance sociale, un projet
pour lequel, usant de l’expérience
que lui ont donnée ses travaux pré
cédents et les études similaires de
ses collègues, il a fondu et réuni en
un tout, l’ensemble des mesures
pratiques proposées par ceux-ci.
La Commission a adopté les deux
principes suivants :
I. — Tout ouvrier ou employé de l’industrie,
du commerce et de l’agriculture a droit, s’il
est de nationalité française à :
i° Une retraite de vieillesse à 65 ans ;
2° Une assurance en cas de décès au profit de
son conjoint s’il est marié ;
3° Une assurance en cas de décès, distinct de
la précédente, au profit de ses enfants légi
times ou naturels reconnus et âgés de moins
de 16 ans.
II. — Les primes d’assurance seront payées,
partie par l’ouvrier, sur les salaires duquel
une retenue sera opérée; partie par le pa
tron qui devra sa cotisation par le fait
même que l’employé aura payé la sienne;
partie par l’État, qui, chargé de l’adminis
tration des fonds ainsi recueillis durant
toute la vie du travailleur, devra, au moment
où cette pension sera exigible, et si cette
pension n’est pas suffisante pour assurer le
pain quotidien, y ajouter un apport afin de
l’élever à un taux qui reste à déterminer.
Mon intention n’est pas ici de dis
cuter les conditions d’application de
ces deux principes, mais de m’atta
quer à l’idée qui a présidé à leur
élucubration; car à mon point de
vue, cette pensée directrice, ne tend
rien moins qu’à une injustice so
ciale.
Recherchons en effet quels seront,
en dernière analyse, les citoyens qui
supporteront la charge de l’assu
rance ouvrière. Nous avons vu que
les primes étaient payées par l’ou
vrier, le patron et l’État.
L’ouvrier, prévoyant l’époque, où
sans force et sans énergie, il sera
voué aux pires misères, prélèvera
sur sa paie quotidienne une somme
qu’il versera à une caisse centrali
satrice.
Le premier versement l’obligera,
âour l’avenir, à fairç chaque jour la
même retenue, et ce contrat de
Société d’assurances mutuelles, qu’il
a ainsi signé de son premier apport,
semble très équitable, puisqu’il s’est
engagé, de son plein gré, à mettre
de côté ce qu’il aurait eu le droit de
dépenser au jour le jour. Mais ce sa
crifice a pour effet de faire baisser
son salaire d’une somme égale au
montant de la prime payée ; or le
taux du salaire est compris entre
deux limites, généralement très
rapprochées à l’époque difficile que
nous traversons : un minimum, né
cessaire à l’ouvrier pour ses besoins
de chaque jour, et un maximum au-
delà duquel le capital n’est plus ré
tribué et passe à un emploi plus
rémunérateur; le taux du salaire
ne peut baisser, puisque cette baisse
aurait pour résultat la gêne de
l’ouvrier. Pour que celui-ci écono
mise, on sera donc contraint de lui
consentir une augmentation de sa
laire équivalente à la prime d’assu
rance par lui payée ; mais alors, le
patron, forcé de supporter cette
augmentation de dépenses, qui le
ruine, n’aura d’autre ressource que
d’élever le prix de la marchandise
fabriquée. Alors, qui paiera la pri
me d’assurance de l’ouvrier? Le
consommateur, c’est-à-dire le pu
blic.
Il n’est pas besoin de longues dé
monstrations pour prouver que la
quote-part de l’Etat sera prise, d’une
façon bien plus directe et par l’in
termédiaire de l’impôt, dans la po
che du contribuable.
Mais direz-vous, la solidarité so
ciale nous commande de venir
en aide à nos frères malheu
reux ! Oui, mais il ne faut pas que
cette idée de solidarité, de droit à la
charité, fausse le courage et l’ini
tiative individuelle ; à quoi bon tra
vailler, épargner, si l’ivrogne et le
débauché sont certains, comme le
laborieux et l’économe, de recueil
lir dans leur vieillesse une pension
les mettant à l’abri du besoin ?
Au lieu d’exalter la solidarité
sociale, il eût été préférable de faire
naître chez le travailleur le désir de
parvenir seul et par ses propres
forces, de développer son couittge,
quitte à lui porter secours, sans
bruit, s’il se trouvait dans le besoin.
Enfin, si l’on considère comme
une nécessité pour l’ouvrier de
vivre tranquille par la perspective
des ressources qui lui sont réservées
dans l’avenir, au moins aurait-il
fallu le laisser seul juge de cette
nécessité ; si la retraite lui semble,
faire partie du programme de ses
revendications, qu’il l’y inscrive et
lutte pour l’obtenir, mais que l’Etat
ne vienne pas s’ingérer dans une
discussion où, seuls, les intérêts par
ticuliers sont en jeu. Ce n’est pas la
retraite ouvrière elle-même que je
blâme ici, mais l’obtention de cette
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