Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1899-11-25
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 25 novembre 1899 25 novembre 1899
Description : 1899/11/25 (N187). 1899/11/25 (N187).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32633866
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/05/2019
t Année - N° 187. CINQ CENTIMES LE NUMÉRO Samedi 25 Novembre 1899.
Organe du Parti Républicain Démocraiicjue
PRIX DES 4B0NNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an
Départements »
3 fr.
4 fr.
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
RUE GASIMIR-PÉKIER,
Secrétaire de la Rédaction E. THOMMIERET
L’Luprimeur-Gérant F. LE ROY
Prix des Insertions :
1 5
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50 »
On traite à forfait
PRIME
du RÉVEIL DU HAVRE
Le RÉVEIL DU HAVREdésireux
d’être agréable à ses abonnés, leur
offre gratuitement, comme prime
exceptionnelle : Les Dialogues anti
cléricaux, de Boissier, un volume du
prix de 2 francs.
Prière de le réclamer, 15, rue
Casimir-Périer.
Les nouveaux abonnés bénéficie
ront de ce cadeau.
Le triomphe
de la République
Paris, dans un admirable mouve
ment de civisme et de pur patrio
tisme, qui se passe des déclamations
rococo des chauvins, Paris a gran
dement fêté la République. Par ce
défilé imposant de plus de 250,000
citoyens, composé de délégations et
de représentants de tous les corps
de métier, le peuple a exprimé son
ardent dévouement aux principes
qui nous sont chers ; il a affirmé sa
foi profonde - dans les destinées d’un
régime qui n’a peut-être pas donné,
à son adolescence, tout le fruit qu’on
en attendait, devant les préoccupa
tions delà défense de chaque jour.
Mais l’âge mûr viendra et c’est ce
que l’on comprend.
On est en droit d’attendre de
l’éducation nouvelle, réformée à sa
hase par le concours de la Répu
blique, des hommes meilleurs, déta
chés des fictions théologiques et
plus conscients de leurs devoirs
envers la famille et la société. Je
sais bien que l’on cherche la route
en tâtonnant dans l’aube matinale
qui surprend les paupières closes ;
cependant l’éveil des mentalités est
un terme heureux et fatal. Car
l’homme a, plus encore que les
institutions, le besoin d’être réformé
et régénéré par des aspirations
nouvelles.
On est en droit d’attendre, aussi,
des lois économiques plus équitables
que seul nous assurera un gouver
nement vraiment démocratique, un
avenir fécond. Quand le peuple, tout
entier, aura compris qu’il y va de
l’intérêt de chacun de s’occuper de
la chose publique, non pour la dé
sorganiser ou pour décrier les ten
tatives sincères si timides mais
pour en faire le berceau et comme
la couveuse des idées productrices,
un grand pas aura été accompli.
Représentants du peuple ainsi que
ministres, au lieu de se livrer, par
fois, à la réclame électorale ou au
dérèglement de leurs appétits, de
leur fantaisie, envisageront leur
tâ.çhe avec hauteur d’âme.
On est en droit d’attendre égale-*
nient quelques bons résultats des
lois sur les associations religieuses,
sur les syndicats professionnels, sur
la réforme du Code militaire, etc.,
dont le ministère Waldeck-Rous-
seau prend l’initiative courageuse
ment.
Aussi, lés critiques vont leur train.
MM. Louis Brindeau et H. Fénoux
attaquent le ministère sournoise
ment, en essayant de le saisir par
derrière.
On s’en prend à sa constitution,
on déblatère contre la manifestation
républicaine de dimanche dernier,
trouvant une diversion facile, sinon
équivoque contre le drapeau rouge.
Eh ! que nous importe une toile
teinte de quelque façon, verte ou
bleue. Nous savons que le signe
n’est rien, mais que l’idée est tout.
C’est l’idée que nous cultivons, sans
nous occuper de la forme inoffensive
que l’imagination lui donne. Le dra
peau rouge n’est un danger que par
la signification que les réacteurs lui
assignent avec intention; que par les
querelles qu’ils engendrent. Ce sont
des mots, non des faits.
Alors que Paris a célébré magni
fiquement le triomphe de la Répu
blique, comme un éveil des idées
nouvelles et comme un germe puis
sant, capable d’enfanter une huma
nité régénérée ; alors que Rouen et
d’autres villes se proposent de mar
quer cette étape, après la victoire
remportée sur les factions d’ombre,
de mystère et de mensonges ; allons-
nous, nous, Havrais, rester en ar
rière et nous séparer par J’esprit et
parla pensée du reste de la France.
Au Havre, plus que partout ail
leurs, ou le cerveau vivace, cepen
dant, est vicié par des feuilles mau
vaises, nous avons besoin de faire
une démonstration républicaine avec
le concours de.s corps de métiers, des
sociétés et associations, pour faire
reculer les ardeurs impudentes de
quelques journaux, ainsi que l’in
fluence exécrable de nos députés,
Rispal et Brindeau, cramponnés à
leur siège. Une occasion pourrait se
présenter à bref délai, la Ligue des
Droits de l’Homme, croyons-nous,
n’a pas dit son drrnier mot. La ma
nifestation, pour être pacifique, n’en
serait pas moins efficace. C’est une
nécessité qui s’impose.
Arrière la réaction !
Gloire à la République !
Alf. HENRI.
•
LA SEMAINE
La Chambre
Les vaincus du 16 novembre ont essayé
de prendre une revanche. L’intervention
de M. Georges Berry pouvant être com
promettante, M. Alicot a été lancé à la
tribune. C’est un excellent homme de
mœurs douces et d’opinions paisibles ;
il a manifesté pour le drapeau rouge une
aversion qu’il partage, d’ailleurs, avec
l’immense majorité de nos concitoyens et,
sur ce point, il ne rencontrera pas, dans
les rangs républicains, heaucoup de con
tradicteurs. Cette profession de foi était
donc pafaitement inutile. Ce qu’il voulait
savoir, c’était si le gouvernement avait
toléré le déploiement de drapeaux rouges.
Mais ce qui le préoccupait surtout, c’était
de permettre aux vaincus de battre en
brèche le gouvernement.
La tactique était puérile et le piège
grossier, et M. le président du Conseil
n’a pas eu de peine à répondre qu’il avait
pris des mesures en vertu da l’ordon
nance de 1894, autorisant seulement le
déploiement du drapeau français et des
drapeaux étrangers. Il ne pouvait rien
contre les bannières rouges revêtues d’ins
criptions, et s’il blâme tout ce qui peut
rappeler les discordes passées, il n’hésite
pas à reconnaître que quelques faits isolés
ne sauraient affaiblir la portée immense
de la manifestation de dimanche.
Ces paroles si loyales, si nettes, si
franches, de M. Waldeck-Rousseau, ont
été saluées par les applaudissements de
la majorité républicaine.
Il faudra que les coalisés cherchent
d’autres moyens pour entamer la majorité
républicaine.
Les passions vont sans doute être
apaisées par la discussion du budget qui
s'est ouverte lundi. Nous avons entendu
les doléances déjà connues sur l’accrois
sement des dépenses, sur l’inégale répar
tition des charges, sur les progrès du
fonctionnarisme ; et ces sortes de confé
rences dans lesquelles on émet les idées
les plus justes et les plaintes les plus jus
tifiées, n’ont guère qu’un intérêt acadé
mique, puisqu’elles n’ont pas de sanction.
Cependant, il faut reconnaître que,
depuis longtemps, on n’avait entendu un
discours plus nourri, plus lumineux, plus
méthodique que celui de M. le ministre
des finances.
M. Caillaux a tracé ensuite un pro
gramme réformateur ; il faut espérer qu’il
pourra l’accomplir, car il a de la volonté,
de l’initiative. Eu attendant, il importe
que la Chambre vote rapidement le bud
get et donne au pays l’impression que ses
finances sont gérées et réglées en temps
utile.
★
* *
Les Grévistes
C’est évidemment une fâcheuse idée
qu’ont eue les grévistes du Doubs d’ac
complir l’exode projeté par les grévistes
du Creusot, et le gouvernement a fort bien
fait d’interrompre à Belfort cette prome
nade.
Vous imaginez-vous les grévistes de
toutes les contrées s’abattant sur Paris ?
Et ceux qui conseillent ces petits voyages
ne savent sans doute pss à quelles
épreuves et à quelles misères ils exposent
les malheureux qui sont tentés de les
suivre ; et puis, croit-on que les ouvriers
qui se livreront à ces démonstrations ob
tiendront plus facilement ce qu’ils dési
rent ? C’est là une grosse erreur. Ils ris
queront de s’aliéner des sympathies et de
rencontrer des résistances parmi ceux
qui seraient disposés à les servir.
Ils ont bien d’autres moyens pour faire
valoir leurs revendications, et ces tour
nées sont déplaisantes et ont un caractère
révolutionnaire qu’on a eu raison de ne
pas tolérer.
★
* *
La guerre Sud-Africaine
Les dépêches continuent à nous annon
cer de petits engagements autour d’Est-
court, et toutes prétendent invariable
ment que les Boers ont été repoussés. Il
n’en est pas moins certain, d’après les
positions qu’ils occupent, que le général
Hidyard est maintenant investi dans cette
ville presque aussi complètement que le
général White à Ladysmith. Les Boers
occupent en effet Weethen à l’est, Frère
au nord, Gourton et Ulundi à l’ouest, et
Willow-Orange et Highlands au sud, ces
deux derniers points sur la ligne du che
min de fer.
Au sud de l’Etat Libre, les Boers conti
nuent leurs opérations d’annexion sans
paraître se soucier des préparatifs du gé
néral Buller.
A Kimberley et à Mafeking les choses
restent en l’état.
Le général Buller a disposé ainsi ses
trois divisions. La première marchera
sur Kimberley,sous les ordres du générol
Methuen et sous son contrôle i mméd iat, car
il a établi son quartier général à De Aar ;
la seconde, commandée par le général
Getacre, se concentrera à Queenstown
pour opérer contre les Boers de l’Etat
Libre ; la troisième, enfin, sous les ordres
du général Cléry, aura pour mission de
reconquérir la Natalie.
On ne sait pas encore quand ces trois
armées pourront commencer leurs opéra
tions effectives. Les renforts actuellement
débarqués dépassent certainement trente
mille hommes, et avec ce qu’il y avait de
troupes diverses au Cap et à Natal, les
forces anglaises doivent atteindre un total
de 45 à 50,000 hommes. Cela commence
à bien faire ; mais les Anglais n’ont pas
à compter seulement avec les Boers ; ils
ont contre eux l’hostilité latente tout au
moins [des populations parmi lesquelles
ils vont marcher, et surtout des obstacles
matériels considérables à surmonter. On
comprend, dans ces conditions, qu’ils
prennent leur temps.
CONTRE L’AMNISTIE
Le gouvernement se prépare dit-on,
à prendre à son compte la proposition
d’amnistie du député Codet, visant les
faits connexes à l’affaire Dreyfus. Le
projet, d’où qu’il vienne, est franche
ment détestable.
Autantnous comprendrionsune telle
mesure après une condamnation et un
commencement d’expiation, autant
notre esprit est fermé à l’idée de sous
traire un coupable à la justice ou de
frustrer un innocent du verdict libé
rateur. Amnistier un condamné est uni
acte d’humanité où passe d’aventure
un reflet de justice réparatrice ; am
nistier un accusé avant l’arrêt de jus
tice est un exemple d’immoralité qui
ruine l’idée de justice et ravale l’ac
cusé lui-même. On nous demande de
décider qu’un ancien ministre de la
guerre, accusé de forfaiture, ne sera
pas appelé à rendre des comptes ! On
veut qu’un colonel en réforme, inculpé
de faux, soit privé des moyens de
confondre les accusateurs qui l’ont
chassé de l’armée et tenu une année en
prison préventive! Amnistier Mercier,
amnistier Picquart, c’est les déclarer
coupables sans les entendre, c’est
proclamer qu’ils avaient mérité un
châtiment dont on leur fait grâce. Si
M. Mercier a des amis qui le méprisent
au point de lui infliger l’aumône de
l’impunité, il a des ennemis [qui res
pectent en lui la dignité de l’accusé et
le titre qu’il a porté de ministre delà
guerre. Quand on revient de Rennes
en accusateur, on peut être accusé à
son tour, mais non gracié sans juge
ment, et quand on a eu l’honneur
d’être chef de l’armée, on n’a pas le
droit de finir dans l’oubli d’une am
nistie anonyme. Qui voudrait faire à
Picquart l’aumône d’une amnistie ? Il
vaut mieux pour lui qu'il soit con
damné, comme Dreyfus, qu'amnistié
avec Mercier. Lui ôter ses juges, c’est
lui voler son honneur. Mercier, Pic-
quart, Esterhazy, Zola, la justice ne
connaît ni héros ni bandits : elle ap
pelle les accusés, pèse les charges,
établit les responsabilités. Elle est le
niveau qui passe sur toutes les têtes et
les courbe indistinctement.
Ainsi l’a toujours conçue ce peuple
de France. Quel plaisir prenez-vous à
le démoraliser ! Une des causes de sa
résistance à la révision, c’était l’idée
soigneusement entretenue par les na
tionalistes, que l’argent juif était dé
tracteur de justice, trafiquant de con
science et fabricateur de sentences
complaisantes. Dreyfus, juif et riche
pouvait, pensait-il, acheter, même
coupable, un brevet d’innocence. Et
pour le guérir de ses préventions, vous
aller chercher le remède dans le spec
tacle des plus scandaleux marchan
dages ! Dreyfus, flétri à demi par un
verdict bâtard. Mercier avouant son
crime quand il se croit sûr de l’impu
nité, Picquart et Zola réservés pour la
rançon de Mercier, quel étrange con
cept de justice et quelle déviation de
droit sens !
Et dans quel intérêt le gouverne
ment va-t-il jouer cette conédie avi
lissante? On craint de prolonger le
trouble de la conscience publique !
Pitoyable argument. La conscience
publique a été troublée tant qu’elle n’a
pas vu face à face la vérité, tant
qu’elle a épronvé l’affolement de l’in
connu et le pressentiment des infamies
mystérieuses. Aujourd’hui elle suit,
elle voit, elle juge. Le crime est avéré,
le criminel connu, le châtiment néces
saire. La conscience publique est assez
forte pour l’atteindre et pour l’exiger.
Vous lui criez : Amnistie ! Elle vous
répond : Justice!
Oui, laissez passer la j ustice. Sur ses
traces, plus tard, à son heure, la clé
mence s’avancera.
L. Laferre,
Député de l’Hérault.
De la fédération radicale socialiste.
- 4 »
L'AMNISTIE
ET
La Ligue des Droits de rflomme
La Ligue française pour la défense
des Droits de l’Homme et du Citoyen,
nous communique le manifeste sui
vant :
Le comité de la Ligue française pour
la défense des Droits de l’Homme et du
Citoyen, n’a pas qualité pour s’expliquer
sur les côtés politiques de l’amnistie,
contre laquelle tout son passé proteste,
mais il a le devoir, au point de vue
spécial des principes dont il s’est consti
tué le gardien, de se prononcer sur les
conséquences que pourrait avoir cette
amnistie, si on l’étendait à certains faits.
Il ne lui paraît pas notamment admis
sible qu’on puisse comprendre les faux
témoignages qui peuvent avoir été com
mis au cours du procès de Rennes, car, le
jour où ils viendraient à être établis, ils
seraient un motif formel de révision aux
termes du Code d’instruction criminelle.
La puissance gouvernementale elle-même
ne peut se permettre d’enlever à un con
damné les moyens que lui a expressément
réservés la loi pour prouver l’erreur de
ses juges.
S’arroger cette faculté serait une vio
lation du droit individuel, violation à la
quelle le gouvernement républicain a plus
que tout autre le devoir de répugner.
Le comité de la Ligue exprime respec
tueusement, mais hautement, le vœu que
les pouvoirs publics sachent, dans un
aussi grave sujet, ne pas s’écarter des
Organe du Parti Républicain Démocraiicjue
PRIX DES 4B0NNEMENTS
Le Havre et la Seine-Inférieure par an
Départements »
3 fr.
4 fr.
ADMINISTRATION ET RÉDACTION
RUE GASIMIR-PÉKIER,
Secrétaire de la Rédaction E. THOMMIERET
L’Luprimeur-Gérant F. LE ROY
Prix des Insertions :
1 5
Annonces 25 centimes la ligne
Réclames 50 »
On traite à forfait
PRIME
du RÉVEIL DU HAVRE
Le RÉVEIL DU HAVREdésireux
d’être agréable à ses abonnés, leur
offre gratuitement, comme prime
exceptionnelle : Les Dialogues anti
cléricaux, de Boissier, un volume du
prix de 2 francs.
Prière de le réclamer, 15, rue
Casimir-Périer.
Les nouveaux abonnés bénéficie
ront de ce cadeau.
Le triomphe
de la République
Paris, dans un admirable mouve
ment de civisme et de pur patrio
tisme, qui se passe des déclamations
rococo des chauvins, Paris a gran
dement fêté la République. Par ce
défilé imposant de plus de 250,000
citoyens, composé de délégations et
de représentants de tous les corps
de métier, le peuple a exprimé son
ardent dévouement aux principes
qui nous sont chers ; il a affirmé sa
foi profonde - dans les destinées d’un
régime qui n’a peut-être pas donné,
à son adolescence, tout le fruit qu’on
en attendait, devant les préoccupa
tions delà défense de chaque jour.
Mais l’âge mûr viendra et c’est ce
que l’on comprend.
On est en droit d’attendre de
l’éducation nouvelle, réformée à sa
hase par le concours de la Répu
blique, des hommes meilleurs, déta
chés des fictions théologiques et
plus conscients de leurs devoirs
envers la famille et la société. Je
sais bien que l’on cherche la route
en tâtonnant dans l’aube matinale
qui surprend les paupières closes ;
cependant l’éveil des mentalités est
un terme heureux et fatal. Car
l’homme a, plus encore que les
institutions, le besoin d’être réformé
et régénéré par des aspirations
nouvelles.
On est en droit d’attendre, aussi,
des lois économiques plus équitables
que seul nous assurera un gouver
nement vraiment démocratique, un
avenir fécond. Quand le peuple, tout
entier, aura compris qu’il y va de
l’intérêt de chacun de s’occuper de
la chose publique, non pour la dé
sorganiser ou pour décrier les ten
tatives sincères si timides mais
pour en faire le berceau et comme
la couveuse des idées productrices,
un grand pas aura été accompli.
Représentants du peuple ainsi que
ministres, au lieu de se livrer, par
fois, à la réclame électorale ou au
dérèglement de leurs appétits, de
leur fantaisie, envisageront leur
tâ.çhe avec hauteur d’âme.
On est en droit d’attendre égale-*
nient quelques bons résultats des
lois sur les associations religieuses,
sur les syndicats professionnels, sur
la réforme du Code militaire, etc.,
dont le ministère Waldeck-Rous-
seau prend l’initiative courageuse
ment.
Aussi, lés critiques vont leur train.
MM. Louis Brindeau et H. Fénoux
attaquent le ministère sournoise
ment, en essayant de le saisir par
derrière.
On s’en prend à sa constitution,
on déblatère contre la manifestation
républicaine de dimanche dernier,
trouvant une diversion facile, sinon
équivoque contre le drapeau rouge.
Eh ! que nous importe une toile
teinte de quelque façon, verte ou
bleue. Nous savons que le signe
n’est rien, mais que l’idée est tout.
C’est l’idée que nous cultivons, sans
nous occuper de la forme inoffensive
que l’imagination lui donne. Le dra
peau rouge n’est un danger que par
la signification que les réacteurs lui
assignent avec intention; que par les
querelles qu’ils engendrent. Ce sont
des mots, non des faits.
Alors que Paris a célébré magni
fiquement le triomphe de la Répu
blique, comme un éveil des idées
nouvelles et comme un germe puis
sant, capable d’enfanter une huma
nité régénérée ; alors que Rouen et
d’autres villes se proposent de mar
quer cette étape, après la victoire
remportée sur les factions d’ombre,
de mystère et de mensonges ; allons-
nous, nous, Havrais, rester en ar
rière et nous séparer par J’esprit et
parla pensée du reste de la France.
Au Havre, plus que partout ail
leurs, ou le cerveau vivace, cepen
dant, est vicié par des feuilles mau
vaises, nous avons besoin de faire
une démonstration républicaine avec
le concours de.s corps de métiers, des
sociétés et associations, pour faire
reculer les ardeurs impudentes de
quelques journaux, ainsi que l’in
fluence exécrable de nos députés,
Rispal et Brindeau, cramponnés à
leur siège. Une occasion pourrait se
présenter à bref délai, la Ligue des
Droits de l’Homme, croyons-nous,
n’a pas dit son drrnier mot. La ma
nifestation, pour être pacifique, n’en
serait pas moins efficace. C’est une
nécessité qui s’impose.
Arrière la réaction !
Gloire à la République !
Alf. HENRI.
•
LA SEMAINE
La Chambre
Les vaincus du 16 novembre ont essayé
de prendre une revanche. L’intervention
de M. Georges Berry pouvant être com
promettante, M. Alicot a été lancé à la
tribune. C’est un excellent homme de
mœurs douces et d’opinions paisibles ;
il a manifesté pour le drapeau rouge une
aversion qu’il partage, d’ailleurs, avec
l’immense majorité de nos concitoyens et,
sur ce point, il ne rencontrera pas, dans
les rangs républicains, heaucoup de con
tradicteurs. Cette profession de foi était
donc pafaitement inutile. Ce qu’il voulait
savoir, c’était si le gouvernement avait
toléré le déploiement de drapeaux rouges.
Mais ce qui le préoccupait surtout, c’était
de permettre aux vaincus de battre en
brèche le gouvernement.
La tactique était puérile et le piège
grossier, et M. le président du Conseil
n’a pas eu de peine à répondre qu’il avait
pris des mesures en vertu da l’ordon
nance de 1894, autorisant seulement le
déploiement du drapeau français et des
drapeaux étrangers. Il ne pouvait rien
contre les bannières rouges revêtues d’ins
criptions, et s’il blâme tout ce qui peut
rappeler les discordes passées, il n’hésite
pas à reconnaître que quelques faits isolés
ne sauraient affaiblir la portée immense
de la manifestation de dimanche.
Ces paroles si loyales, si nettes, si
franches, de M. Waldeck-Rousseau, ont
été saluées par les applaudissements de
la majorité républicaine.
Il faudra que les coalisés cherchent
d’autres moyens pour entamer la majorité
républicaine.
Les passions vont sans doute être
apaisées par la discussion du budget qui
s'est ouverte lundi. Nous avons entendu
les doléances déjà connues sur l’accrois
sement des dépenses, sur l’inégale répar
tition des charges, sur les progrès du
fonctionnarisme ; et ces sortes de confé
rences dans lesquelles on émet les idées
les plus justes et les plaintes les plus jus
tifiées, n’ont guère qu’un intérêt acadé
mique, puisqu’elles n’ont pas de sanction.
Cependant, il faut reconnaître que,
depuis longtemps, on n’avait entendu un
discours plus nourri, plus lumineux, plus
méthodique que celui de M. le ministre
des finances.
M. Caillaux a tracé ensuite un pro
gramme réformateur ; il faut espérer qu’il
pourra l’accomplir, car il a de la volonté,
de l’initiative. Eu attendant, il importe
que la Chambre vote rapidement le bud
get et donne au pays l’impression que ses
finances sont gérées et réglées en temps
utile.
★
* *
Les Grévistes
C’est évidemment une fâcheuse idée
qu’ont eue les grévistes du Doubs d’ac
complir l’exode projeté par les grévistes
du Creusot, et le gouvernement a fort bien
fait d’interrompre à Belfort cette prome
nade.
Vous imaginez-vous les grévistes de
toutes les contrées s’abattant sur Paris ?
Et ceux qui conseillent ces petits voyages
ne savent sans doute pss à quelles
épreuves et à quelles misères ils exposent
les malheureux qui sont tentés de les
suivre ; et puis, croit-on que les ouvriers
qui se livreront à ces démonstrations ob
tiendront plus facilement ce qu’ils dési
rent ? C’est là une grosse erreur. Ils ris
queront de s’aliéner des sympathies et de
rencontrer des résistances parmi ceux
qui seraient disposés à les servir.
Ils ont bien d’autres moyens pour faire
valoir leurs revendications, et ces tour
nées sont déplaisantes et ont un caractère
révolutionnaire qu’on a eu raison de ne
pas tolérer.
★
* *
La guerre Sud-Africaine
Les dépêches continuent à nous annon
cer de petits engagements autour d’Est-
court, et toutes prétendent invariable
ment que les Boers ont été repoussés. Il
n’en est pas moins certain, d’après les
positions qu’ils occupent, que le général
Hidyard est maintenant investi dans cette
ville presque aussi complètement que le
général White à Ladysmith. Les Boers
occupent en effet Weethen à l’est, Frère
au nord, Gourton et Ulundi à l’ouest, et
Willow-Orange et Highlands au sud, ces
deux derniers points sur la ligne du che
min de fer.
Au sud de l’Etat Libre, les Boers conti
nuent leurs opérations d’annexion sans
paraître se soucier des préparatifs du gé
néral Buller.
A Kimberley et à Mafeking les choses
restent en l’état.
Le général Buller a disposé ainsi ses
trois divisions. La première marchera
sur Kimberley,sous les ordres du générol
Methuen et sous son contrôle i mméd iat, car
il a établi son quartier général à De Aar ;
la seconde, commandée par le général
Getacre, se concentrera à Queenstown
pour opérer contre les Boers de l’Etat
Libre ; la troisième, enfin, sous les ordres
du général Cléry, aura pour mission de
reconquérir la Natalie.
On ne sait pas encore quand ces trois
armées pourront commencer leurs opéra
tions effectives. Les renforts actuellement
débarqués dépassent certainement trente
mille hommes, et avec ce qu’il y avait de
troupes diverses au Cap et à Natal, les
forces anglaises doivent atteindre un total
de 45 à 50,000 hommes. Cela commence
à bien faire ; mais les Anglais n’ont pas
à compter seulement avec les Boers ; ils
ont contre eux l’hostilité latente tout au
moins [des populations parmi lesquelles
ils vont marcher, et surtout des obstacles
matériels considérables à surmonter. On
comprend, dans ces conditions, qu’ils
prennent leur temps.
CONTRE L’AMNISTIE
Le gouvernement se prépare dit-on,
à prendre à son compte la proposition
d’amnistie du député Codet, visant les
faits connexes à l’affaire Dreyfus. Le
projet, d’où qu’il vienne, est franche
ment détestable.
Autantnous comprendrionsune telle
mesure après une condamnation et un
commencement d’expiation, autant
notre esprit est fermé à l’idée de sous
traire un coupable à la justice ou de
frustrer un innocent du verdict libé
rateur. Amnistier un condamné est uni
acte d’humanité où passe d’aventure
un reflet de justice réparatrice ; am
nistier un accusé avant l’arrêt de jus
tice est un exemple d’immoralité qui
ruine l’idée de justice et ravale l’ac
cusé lui-même. On nous demande de
décider qu’un ancien ministre de la
guerre, accusé de forfaiture, ne sera
pas appelé à rendre des comptes ! On
veut qu’un colonel en réforme, inculpé
de faux, soit privé des moyens de
confondre les accusateurs qui l’ont
chassé de l’armée et tenu une année en
prison préventive! Amnistier Mercier,
amnistier Picquart, c’est les déclarer
coupables sans les entendre, c’est
proclamer qu’ils avaient mérité un
châtiment dont on leur fait grâce. Si
M. Mercier a des amis qui le méprisent
au point de lui infliger l’aumône de
l’impunité, il a des ennemis [qui res
pectent en lui la dignité de l’accusé et
le titre qu’il a porté de ministre delà
guerre. Quand on revient de Rennes
en accusateur, on peut être accusé à
son tour, mais non gracié sans juge
ment, et quand on a eu l’honneur
d’être chef de l’armée, on n’a pas le
droit de finir dans l’oubli d’une am
nistie anonyme. Qui voudrait faire à
Picquart l’aumône d’une amnistie ? Il
vaut mieux pour lui qu'il soit con
damné, comme Dreyfus, qu'amnistié
avec Mercier. Lui ôter ses juges, c’est
lui voler son honneur. Mercier, Pic-
quart, Esterhazy, Zola, la justice ne
connaît ni héros ni bandits : elle ap
pelle les accusés, pèse les charges,
établit les responsabilités. Elle est le
niveau qui passe sur toutes les têtes et
les courbe indistinctement.
Ainsi l’a toujours conçue ce peuple
de France. Quel plaisir prenez-vous à
le démoraliser ! Une des causes de sa
résistance à la révision, c’était l’idée
soigneusement entretenue par les na
tionalistes, que l’argent juif était dé
tracteur de justice, trafiquant de con
science et fabricateur de sentences
complaisantes. Dreyfus, juif et riche
pouvait, pensait-il, acheter, même
coupable, un brevet d’innocence. Et
pour le guérir de ses préventions, vous
aller chercher le remède dans le spec
tacle des plus scandaleux marchan
dages ! Dreyfus, flétri à demi par un
verdict bâtard. Mercier avouant son
crime quand il se croit sûr de l’impu
nité, Picquart et Zola réservés pour la
rançon de Mercier, quel étrange con
cept de justice et quelle déviation de
droit sens !
Et dans quel intérêt le gouverne
ment va-t-il jouer cette conédie avi
lissante? On craint de prolonger le
trouble de la conscience publique !
Pitoyable argument. La conscience
publique a été troublée tant qu’elle n’a
pas vu face à face la vérité, tant
qu’elle a épronvé l’affolement de l’in
connu et le pressentiment des infamies
mystérieuses. Aujourd’hui elle suit,
elle voit, elle juge. Le crime est avéré,
le criminel connu, le châtiment néces
saire. La conscience publique est assez
forte pour l’atteindre et pour l’exiger.
Vous lui criez : Amnistie ! Elle vous
répond : Justice!
Oui, laissez passer la j ustice. Sur ses
traces, plus tard, à son heure, la clé
mence s’avancera.
L. Laferre,
Député de l’Hérault.
De la fédération radicale socialiste.
- 4 »
L'AMNISTIE
ET
La Ligue des Droits de rflomme
La Ligue française pour la défense
des Droits de l’Homme et du Citoyen,
nous communique le manifeste sui
vant :
Le comité de la Ligue française pour
la défense des Droits de l’Homme et du
Citoyen, n’a pas qualité pour s’expliquer
sur les côtés politiques de l’amnistie,
contre laquelle tout son passé proteste,
mais il a le devoir, au point de vue
spécial des principes dont il s’est consti
tué le gardien, de se prononcer sur les
conséquences que pourrait avoir cette
amnistie, si on l’étendait à certains faits.
Il ne lui paraît pas notamment admis
sible qu’on puisse comprendre les faux
témoignages qui peuvent avoir été com
mis au cours du procès de Rennes, car, le
jour où ils viendraient à être établis, ils
seraient un motif formel de révision aux
termes du Code d’instruction criminelle.
La puissance gouvernementale elle-même
ne peut se permettre d’enlever à un con
damné les moyens que lui a expressément
réservés la loi pour prouver l’erreur de
ses juges.
S’arroger cette faculté serait une vio
lation du droit individuel, violation à la
quelle le gouvernement républicain a plus
que tout autre le devoir de répugner.
Le comité de la Ligue exprime respec
tueusement, mais hautement, le vœu que
les pouvoirs publics sachent, dans un
aussi grave sujet, ne pas s’écarter des
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