Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1894-06-09
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 09 juin 1894 09 juin 1894
Description : 1894/06/09 (N148). 1894/06/09 (N148).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32633473
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
1 ° Année — S° 148 — Samedi 9 Juin 1894.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
Réveil
Hav
ORGANE RÉPUBLICAIN-SOCIALISTE INDEPENDANT
FfilX DES ABOIEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre...., 3 fr. 2 fr.
Départements....... 4 fr. 2 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRUR, 15
LE RÉVEIL DUIIA VRE •paraît tous les Samedis
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
Le Socialisme de l'Abbé GA
AVI S
Nous prions nos lecteurs dont l'abonnement
annuel est expiré, de bien vouloir retirer leur
quittance au Bureau du Journal, rue Casimir -
Périer, 15, le plus tôt possible. A défaut, les
quittances seront présentées à domieile, dans la
dernière quinzaine du mois, par les soins de la
Poste. — L’abonnement est de 3 fr. par an.
A ms LEC TEURS
Plus que jamais, nous avons le devoir
de tenir haut et ferme le drapeau de l’in
dépendance.
Sincèrement républicains et socialistes,
mus ne sommes inféodés à aucune coterie,
et nous ne recevons de mot d’ordre de qui
que ce soit.
Dès maintenant, nous nous efforcerons
déjuger sainement les actes du gouverne-
et ceux de nos élus, tant municipaux que
parlementaires.
Prenant pour devise : « A chacun selon
ses œuvres! nous reconnaîtrons volontiers
les actes louables de nos adversaires poli
tiques, de même que nous n’hésiterons
pas à critiquer ceux de nos amis, le cas
échéant.
LE SOCIALISME
DE
L’ABBÉ GARNIER
Depuis quelque temps, à grand renfort de
grosse caisse et de conférences, M. l’abbé
Garnier a fait beaucoup parler de lui.
Il était assez curieux de voir cet ensoutané
secouer le joug de Rome et aller prêchant la
fraternité aux riches et aux pauvres; aux
banquiers millionnaires et aux humbles tra
vailleurs.
Quoique le résultat qu’en attendait le nou
vel apôtre ne. laissât de nous paraître fort
problématique, nous ne pouvions nous empê
cher de professer une certaine estime, presque
de l’admiration, pour cet homme, d’un autre
âge, repoussant du pied toutes les ambitions,
tous les égoïsmes qui sont la loi de cette fin
de siècle, pour se consacrer entièrement à la
cause des faibles.
Au moins, s'il se trompait, peut-être, celui-là
était sincère, sublime! Jamais il n’avait rêvé
mitre et bas violets, chapeau de cardinal.
Non, son idéal était plus haut. Dans ses
songes il ne voyait que le bonheur du peuple;
pour lui, il n’y avait pas de question de bou
tique, pas de catholiques, pas de protestants,
pas de juifs, pas de libres-penseurs, mais des
hommes, des frères, en proie à la souffrance
et à la misère dont il voulait les tirer.
Le but était assez noble pour que, à quelque
parti que l’on appartînt, quelque opinion que
l’on professât, on s’inclinât respectueusement
devant le prêtre qui, mettant l’amour du pro
chain avant la doctrine, criait de toutes ses
forces : Aimez-vous, secourez-vous les uns les
autres, au nom de la Fraternité !
0 temporal 6 mores! ce que nous eussions
accepté sans réserve si nous avions Vv.cu quel
ques siècles plus tôt, nous ne pouvions le croirej
même en l’entendant crier sur tous les tons
aujourd’hui.
Comme Cicéron, nous savions en quel temps
nous vivons, et nous sommes payé pour ne pas
prendre pour paroles d’Evangile celles d’un
ministre de Jésus-Christ.
Nous avions raison de douter et d’attendre
avant de porter un jugement sur M. l’abbé
Garnier.
Cet estimable frocard ne nous a pas fait
trop attendre. Lundi dernier, au commence
ment de la conférence organisée à Alfortville
par les soins de ses confrères et amis, groupes
sous le nom fantaisiste d’« Union nationale »,
voici comment s’est exprimé le nouveau pro
phète :
« L’ordre du jour porte : Socialisme chré
tien et socialisme révolutionnaire. Si j’avais
été chargé de le rédiger, j’aurais mis chris
tianisme, car je ne suis pas plus socialiste chré
tien que révolutionnaire. »
M. Garnier n’est déjà plus socialiste !
Qu’est-il? Il ne le sait pas lui-même, ou
plutôt il le sait fort bien, et nous aussi.
Tant que la qualification de socialiste lui a
été nécessaire pour faire un peu de réclame et
lui amener des auditeurs qui n’eussent pas
manqué de faire faux-bond si on les eût
avertis qu’ils étaient convoqués à un sermon
au lieu d’une causerie sur la question sociale
faite par un prêtre catholique, le rusé compère
a caché son jeu. Maintenant qu’il croit avoir
conquis assez de popularité, il démasque ses
batteries, et nous retrouvons, devant nous, le
prédicant ordinaire avec les homélies toutes
faites que, depuis tantôt dix ans, nous débitent
ses émules séculiers et réguliers, jésuites,
dominicains, capucins ou curés.
Si les ouvriers chôment, si les salaires bais
sent au lieu d’augmenter, c’est parce que la
religion est abandonnée, parce que la masse
athée va augmentant chaque jour.
L’instruction primaire est trop répandue,
les fils de nos paysans savent lire et écrire;
ils rient quand leur pasteur les menace des
flammes de l’enfer; ils ont permis aux laïques
de remplacer les congréganistes dans les
écoles et les hôpitaux; ils vont, sans murmurer,
servir loyalement la Patrie ; voilà pourquoi il
y a tant de misère en France.
Ah ! autrefois, quand les évêques étaient de
grands seigneurs territoriaux, quand les abbés
étaient pourvus de bénéfices considérables,
quand l’homme de la glèbe, rivé à la chaîne
comme un chien, payait la dîme, lorsque le
manant ne possédait rien en propre, lorsque
l’église était un Etat dans l’Etat, tout était
pour le mieux dans le meilleur des mondes.
En ce temps-là, les monastères n’étaient pas
peuplés de moines gros et gras festoyant sans
cesse, ne travaillant jamais ; les serfs ne prê
taient leurs biens et leurs femmes aux dignes
religieux que par pure courtoisie, et sans y être
contraints le moins du monde.
La Saint-Barthélémy : une petite tuerie
sans importance, tout au plus une applica
tion anticipée de la doctrine de Malthus.
L’Inquisition : une innocente récréation,
bien permise en ces temps reculés.
Blagueur! va.
Le socialisme de M. Garnier s’appelle : la
réaction !
Cette fois, l’apôtre du socialisme chrétien
a vidé son sac.
Pour parler sa langue, nous dirons :
lioc erat in votis.
Pierre MÉRITEL.
RÉVOLUTI ON OU DICTATURE
Tout se groupe et s’enchaîne dans l’évolution
politique à laquelle assiste notre pays.
Après l’invasion allemande et la mutilation de
la Patrie, nous avons eu la réaction féroce qui s’est
enivrée du sang de la Commune, suprême résis
tance, et n’a pu aller plus loin que cette orgie.
Après le débordement des hordes teutonnes, est
venue l’infiltration délétère de la ploutocratie : la
haute pègre financière corruptive des consciences
républicaines a poussé ses ramifications jusqu’au
plus profond de notre organisme démocratique
pour l’étouffer, l’atrophier, le détruire.
Nous en avons vu les effets intimes dans cette
effrayante sarabande du « Panama », unique dans
l’histoire.
Mais il nous était réservé de contempler, sous
un jour encore plus funeste et plus horrible, les
fatales conséquences de ce que l’on peut appeler
« l'état d'âme de la Société ».
Corruption en haut, en bas, au milieu... partout!
Les principaux fauteurs et complices constituent
la majorité gouvernante.
Au dehors, nous avons, en ce moment même,
ces chancres : l’affaire Turpin et Gallifet, pour ne
citer que les plus récentes manifestations du mal
social.
Turpin !... Nous le voyons contraint d’ameuter
toute la presse, le Parlement et la Nation, pour
arriver à faire accepter des moyens de défense
nationale qui méritent au moins un examen sé
rieux de la part des culottes de peau polytechni
ciennes, fussent-elles douées d’un flair d'artilleur.
Ce phénomène extraordinaire d’un inventeur
français s’adressant à un général, ministre de la
guerre français , pour essayer de doter la France
de moyens militaires qu’il juge supérieurs à tous
les autres, et recevant, pour tout encouragement,
ce mot : « je ne veux pas me salir à votre contact »,
ce phénomène, à lui seul, dis-je, n’est-il pas un
indice de cette action délétère exercée sur notre
patrie jusqu’au point de faire perdre la notion du
bien et du mal, du fas et du nef as, à ceux-là même
qui doivent en avoir la plus haute idée ?...
Aussi, le pays ne comprend plus, — Il compren
dra. — L’incident Porceret-Gallifet arrive juste
pour dèssiler les yeux des plus aveugles et semble
un ultimatum qui pourrait décider d’une réaction
populaire contre le viel édifice social avant qu’il
ne s’écroule de lui-même.
Jusqu’ici, en effet, l’armée était restée pure de
toute compromission, les partis étaient unanimes
à écarter d’elle le soupçon qui ne devait pas
plus l’effleurer que la femme de César.
Tous, nous la considérions comme vraiment
nationale ; le fusillard Gallifet, l’homme de la
semaine sanglante qui, dans le tas des prisonniers
ramassés attrape qui peut à la chute de la Com
mune, choisissait de préférence les vieillards pour
les assassiner le long des murs, Porceret-Gallifet,
juif d’origine et grand protégé de Youssouf Rei-
naçh, va se charger de nous démontrer le con
traire. Le ministre Mercier, l’artilleur au flair
subtil, appuie le marquis hébraïque autant qu’il
le peut, et les majoritards de Casimir, fatigués
de la houssine du négrier d’Anzin, demandent un
sabre à grands renforts d’applaudissements.
Alors quoi ? Que reste-t-il de ces robustes piliers
qui doivent soutenir le monument social ?
Celui-là était le dernier : notre armée, jeune et
vigoureuse, préparait ses efforts pour couvrir le
sol de la patrie, sa mère ; elle était patriote.
Gallifet lui dit : Tu seras prétorienne !
Elle ne doutait ni de sa force ni de son courage;
Porceret-Gallifet lui dit : « Allons donc, tu es
incapable de marcher, ce n’est donc pas la peine
de te nourrir. »
Battez donc des mains, bourgeois stupides, voilà
votre rêve qui s’accomplit !
Voilà le général qu’il vous faut pour mettre à la
raison ceux qui ne pensent pas comme vous !
Le sabre du Juif Porceret-Gallifet couvrant de
son ombre tous leurs millions extorqués, toutes
leurs sinécures gueusées en léchant les pieds d’un
auvergnat sans vergogne, tous leurs rubans et
toutes leurs croix, pensions et pots-de-vin, leurs
coups de Bourse fructueux, leurs accaparements
des blés et des huiles, comme leurs ignobles tri
cheries aux courses sur Gaspodar.
Voilà l’idéal de nos digérants.
Un dictateur juif sur une société exploitée, gou
vernée, ruinée et polluée par la race maudite.
On bien alors ?... Eh bien crie : Vive la Révo
lution sociale !!!
Pierre HOUCHARD.
"**^*$?jiSfo** — - —» —. . —
RADICAUX « DE GOUVERNEMENT »
— Accusé Brisson, levez-vous...
Pourquoi n’avez-vous pas accepté de constituer
un ministère, alors que l’éminent Carnot vous en
suppliait ?
— Mon président, j’étais bien libre, il me sem
ble ; ça ne me disait pas, là, mais pas du tout !...
d’ailleurs, sans conditions...
— Assez, taisez-vous ! Et vous, l’autre, là-bas...
Vous, Bourgeois, pourquoi avez-vous refusé lé
même honneur ?
— Dame, mon président, c’est comme le copain
Brisson, j’étais bien libre, pur amour de la liberté
individuelle, tiens !... Et puis, on ne m’a jamais
parlé d’aucune condition.
— Assez, taisez-vous !... Je vais vous le dire,
moi, pourquoi vous avez refusé.
Vous, Brisson, c’est parce que les frères de la
rue Cadet vous ont soufflé à l’oreille que la com
mission d’enquête du Panama n’était pas tf ut à
fait étranglée et qu’elle pourrait encore vous sau
ter à la gorge.
Quanta vous, mon Bourgeois, vous cachez votre
jeu, et vous ne voulez pas dire que les rendez-vous
avec Mme Cottu absorbent tous vos instants; il
ne vous en reste plus pour flirter avec le maroquin.
Allez vous asseoir, vous êtes deux rossards !
P. H.
-■ ■ ■ ■
LE COMMENC EMENT DE LA FIN
M. Crispi est démissionnaire. Il avait pourtant
encore obtenu la majorité, mais une majorité
réduite à sa plus simple expression, puisque le
chiffre de ses partisans ne dépassait que de cinq
celui des députés qui lui refusaient leur confiance.
Quand on songe au nombre considérable des
membres du Parlement qui dépendent du minis
tère et sont obligés de lui accorder leurs suffrages
sous peine de perdre leur situation, on se rend
compte de la portée morale de ce scrutin et on
comprend que le fougueux homme d’Etat sicilien,
n’ait pas essayé d’en dissimuler la signification.
Faut-il croire que M. Crispi est résolu à aban
donner le pouvoir ? Faut-il croire, au contraire,
que sa démission n’est qu’une manœuvre destinée
à montrer qu’en dehors de lui nul n’est apte à
gouverner l’Italie ?
C’est ce que nous saurons bientôt. Mais le fait
est que, dans les circonstances présentes, on ne
voit guère quel est l’homme politique qui ait les
reins assez solides pour prendre sa succession.
Elle est peu enviable, et si l’on a mis vingt et
un jours pour résoudre la dernière crise, il est
permis de penser qu’on en mettrait encore davan
tage pour résoudre celle-ci, dans le cas où l’on ne
voudrait pas revenir au ministre démissionnaire.
Attendons-nous donc à ce que tout ceci se ter
mine par de simples remaniements : par un
ministère Crispi sans M. Sonniuo, par exemple.
C’est la solution la plus probable en même*
temps que la plus facile.
Quoi qu’il en soit, s’il est un fait qui soit incon
testable, c’est que parmi les maux dont souffre
l’Italie, il faut placer au premier rang le manque
de capacité du Roi.
Si, en théorie, le régime parlementaire a été
inventé précisément pour parer à l’insuffisance du
chef de l’Etat, on ne peut nier que la valeur in
tellectuelle de l’homme placé au sommet de la
hiérarchie gouvernementale ne soit un facteur
important ; et cela est vrai pour les républiques-
comme pour les monarchies.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
Réveil
Hav
ORGANE RÉPUBLICAIN-SOCIALISTE INDEPENDANT
FfilX DES ABOIEMENTS :
UN AN SIX MOIS
Le Havre...., 3 fr. 2 fr.
Départements....... 4 fr. 2 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15, RUE CASIMIR-PÉRUR, 15
LE RÉVEIL DUIIA VRE •paraît tous les Samedis
PRIX DES INSERTIONS :
Annonces 25 cent. la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
On traite à Forfait
Le Socialisme de l'Abbé GA
AVI S
Nous prions nos lecteurs dont l'abonnement
annuel est expiré, de bien vouloir retirer leur
quittance au Bureau du Journal, rue Casimir -
Périer, 15, le plus tôt possible. A défaut, les
quittances seront présentées à domieile, dans la
dernière quinzaine du mois, par les soins de la
Poste. — L’abonnement est de 3 fr. par an.
A ms LEC TEURS
Plus que jamais, nous avons le devoir
de tenir haut et ferme le drapeau de l’in
dépendance.
Sincèrement républicains et socialistes,
mus ne sommes inféodés à aucune coterie,
et nous ne recevons de mot d’ordre de qui
que ce soit.
Dès maintenant, nous nous efforcerons
déjuger sainement les actes du gouverne-
et ceux de nos élus, tant municipaux que
parlementaires.
Prenant pour devise : « A chacun selon
ses œuvres! nous reconnaîtrons volontiers
les actes louables de nos adversaires poli
tiques, de même que nous n’hésiterons
pas à critiquer ceux de nos amis, le cas
échéant.
LE SOCIALISME
DE
L’ABBÉ GARNIER
Depuis quelque temps, à grand renfort de
grosse caisse et de conférences, M. l’abbé
Garnier a fait beaucoup parler de lui.
Il était assez curieux de voir cet ensoutané
secouer le joug de Rome et aller prêchant la
fraternité aux riches et aux pauvres; aux
banquiers millionnaires et aux humbles tra
vailleurs.
Quoique le résultat qu’en attendait le nou
vel apôtre ne. laissât de nous paraître fort
problématique, nous ne pouvions nous empê
cher de professer une certaine estime, presque
de l’admiration, pour cet homme, d’un autre
âge, repoussant du pied toutes les ambitions,
tous les égoïsmes qui sont la loi de cette fin
de siècle, pour se consacrer entièrement à la
cause des faibles.
Au moins, s'il se trompait, peut-être, celui-là
était sincère, sublime! Jamais il n’avait rêvé
mitre et bas violets, chapeau de cardinal.
Non, son idéal était plus haut. Dans ses
songes il ne voyait que le bonheur du peuple;
pour lui, il n’y avait pas de question de bou
tique, pas de catholiques, pas de protestants,
pas de juifs, pas de libres-penseurs, mais des
hommes, des frères, en proie à la souffrance
et à la misère dont il voulait les tirer.
Le but était assez noble pour que, à quelque
parti que l’on appartînt, quelque opinion que
l’on professât, on s’inclinât respectueusement
devant le prêtre qui, mettant l’amour du pro
chain avant la doctrine, criait de toutes ses
forces : Aimez-vous, secourez-vous les uns les
autres, au nom de la Fraternité !
0 temporal 6 mores! ce que nous eussions
accepté sans réserve si nous avions Vv.cu quel
ques siècles plus tôt, nous ne pouvions le croirej
même en l’entendant crier sur tous les tons
aujourd’hui.
Comme Cicéron, nous savions en quel temps
nous vivons, et nous sommes payé pour ne pas
prendre pour paroles d’Evangile celles d’un
ministre de Jésus-Christ.
Nous avions raison de douter et d’attendre
avant de porter un jugement sur M. l’abbé
Garnier.
Cet estimable frocard ne nous a pas fait
trop attendre. Lundi dernier, au commence
ment de la conférence organisée à Alfortville
par les soins de ses confrères et amis, groupes
sous le nom fantaisiste d’« Union nationale »,
voici comment s’est exprimé le nouveau pro
phète :
« L’ordre du jour porte : Socialisme chré
tien et socialisme révolutionnaire. Si j’avais
été chargé de le rédiger, j’aurais mis chris
tianisme, car je ne suis pas plus socialiste chré
tien que révolutionnaire. »
M. Garnier n’est déjà plus socialiste !
Qu’est-il? Il ne le sait pas lui-même, ou
plutôt il le sait fort bien, et nous aussi.
Tant que la qualification de socialiste lui a
été nécessaire pour faire un peu de réclame et
lui amener des auditeurs qui n’eussent pas
manqué de faire faux-bond si on les eût
avertis qu’ils étaient convoqués à un sermon
au lieu d’une causerie sur la question sociale
faite par un prêtre catholique, le rusé compère
a caché son jeu. Maintenant qu’il croit avoir
conquis assez de popularité, il démasque ses
batteries, et nous retrouvons, devant nous, le
prédicant ordinaire avec les homélies toutes
faites que, depuis tantôt dix ans, nous débitent
ses émules séculiers et réguliers, jésuites,
dominicains, capucins ou curés.
Si les ouvriers chôment, si les salaires bais
sent au lieu d’augmenter, c’est parce que la
religion est abandonnée, parce que la masse
athée va augmentant chaque jour.
L’instruction primaire est trop répandue,
les fils de nos paysans savent lire et écrire;
ils rient quand leur pasteur les menace des
flammes de l’enfer; ils ont permis aux laïques
de remplacer les congréganistes dans les
écoles et les hôpitaux; ils vont, sans murmurer,
servir loyalement la Patrie ; voilà pourquoi il
y a tant de misère en France.
Ah ! autrefois, quand les évêques étaient de
grands seigneurs territoriaux, quand les abbés
étaient pourvus de bénéfices considérables,
quand l’homme de la glèbe, rivé à la chaîne
comme un chien, payait la dîme, lorsque le
manant ne possédait rien en propre, lorsque
l’église était un Etat dans l’Etat, tout était
pour le mieux dans le meilleur des mondes.
En ce temps-là, les monastères n’étaient pas
peuplés de moines gros et gras festoyant sans
cesse, ne travaillant jamais ; les serfs ne prê
taient leurs biens et leurs femmes aux dignes
religieux que par pure courtoisie, et sans y être
contraints le moins du monde.
La Saint-Barthélémy : une petite tuerie
sans importance, tout au plus une applica
tion anticipée de la doctrine de Malthus.
L’Inquisition : une innocente récréation,
bien permise en ces temps reculés.
Blagueur! va.
Le socialisme de M. Garnier s’appelle : la
réaction !
Cette fois, l’apôtre du socialisme chrétien
a vidé son sac.
Pour parler sa langue, nous dirons :
lioc erat in votis.
Pierre MÉRITEL.
RÉVOLUTI ON OU DICTATURE
Tout se groupe et s’enchaîne dans l’évolution
politique à laquelle assiste notre pays.
Après l’invasion allemande et la mutilation de
la Patrie, nous avons eu la réaction féroce qui s’est
enivrée du sang de la Commune, suprême résis
tance, et n’a pu aller plus loin que cette orgie.
Après le débordement des hordes teutonnes, est
venue l’infiltration délétère de la ploutocratie : la
haute pègre financière corruptive des consciences
républicaines a poussé ses ramifications jusqu’au
plus profond de notre organisme démocratique
pour l’étouffer, l’atrophier, le détruire.
Nous en avons vu les effets intimes dans cette
effrayante sarabande du « Panama », unique dans
l’histoire.
Mais il nous était réservé de contempler, sous
un jour encore plus funeste et plus horrible, les
fatales conséquences de ce que l’on peut appeler
« l'état d'âme de la Société ».
Corruption en haut, en bas, au milieu... partout!
Les principaux fauteurs et complices constituent
la majorité gouvernante.
Au dehors, nous avons, en ce moment même,
ces chancres : l’affaire Turpin et Gallifet, pour ne
citer que les plus récentes manifestations du mal
social.
Turpin !... Nous le voyons contraint d’ameuter
toute la presse, le Parlement et la Nation, pour
arriver à faire accepter des moyens de défense
nationale qui méritent au moins un examen sé
rieux de la part des culottes de peau polytechni
ciennes, fussent-elles douées d’un flair d'artilleur.
Ce phénomène extraordinaire d’un inventeur
français s’adressant à un général, ministre de la
guerre français , pour essayer de doter la France
de moyens militaires qu’il juge supérieurs à tous
les autres, et recevant, pour tout encouragement,
ce mot : « je ne veux pas me salir à votre contact »,
ce phénomène, à lui seul, dis-je, n’est-il pas un
indice de cette action délétère exercée sur notre
patrie jusqu’au point de faire perdre la notion du
bien et du mal, du fas et du nef as, à ceux-là même
qui doivent en avoir la plus haute idée ?...
Aussi, le pays ne comprend plus, — Il compren
dra. — L’incident Porceret-Gallifet arrive juste
pour dèssiler les yeux des plus aveugles et semble
un ultimatum qui pourrait décider d’une réaction
populaire contre le viel édifice social avant qu’il
ne s’écroule de lui-même.
Jusqu’ici, en effet, l’armée était restée pure de
toute compromission, les partis étaient unanimes
à écarter d’elle le soupçon qui ne devait pas
plus l’effleurer que la femme de César.
Tous, nous la considérions comme vraiment
nationale ; le fusillard Gallifet, l’homme de la
semaine sanglante qui, dans le tas des prisonniers
ramassés attrape qui peut à la chute de la Com
mune, choisissait de préférence les vieillards pour
les assassiner le long des murs, Porceret-Gallifet,
juif d’origine et grand protégé de Youssouf Rei-
naçh, va se charger de nous démontrer le con
traire. Le ministre Mercier, l’artilleur au flair
subtil, appuie le marquis hébraïque autant qu’il
le peut, et les majoritards de Casimir, fatigués
de la houssine du négrier d’Anzin, demandent un
sabre à grands renforts d’applaudissements.
Alors quoi ? Que reste-t-il de ces robustes piliers
qui doivent soutenir le monument social ?
Celui-là était le dernier : notre armée, jeune et
vigoureuse, préparait ses efforts pour couvrir le
sol de la patrie, sa mère ; elle était patriote.
Gallifet lui dit : Tu seras prétorienne !
Elle ne doutait ni de sa force ni de son courage;
Porceret-Gallifet lui dit : « Allons donc, tu es
incapable de marcher, ce n’est donc pas la peine
de te nourrir. »
Battez donc des mains, bourgeois stupides, voilà
votre rêve qui s’accomplit !
Voilà le général qu’il vous faut pour mettre à la
raison ceux qui ne pensent pas comme vous !
Le sabre du Juif Porceret-Gallifet couvrant de
son ombre tous leurs millions extorqués, toutes
leurs sinécures gueusées en léchant les pieds d’un
auvergnat sans vergogne, tous leurs rubans et
toutes leurs croix, pensions et pots-de-vin, leurs
coups de Bourse fructueux, leurs accaparements
des blés et des huiles, comme leurs ignobles tri
cheries aux courses sur Gaspodar.
Voilà l’idéal de nos digérants.
Un dictateur juif sur une société exploitée, gou
vernée, ruinée et polluée par la race maudite.
On bien alors ?... Eh bien crie : Vive la Révo
lution sociale !!!
Pierre HOUCHARD.
"**^*$?jiSfo** — - —» —. . —
RADICAUX « DE GOUVERNEMENT »
— Accusé Brisson, levez-vous...
Pourquoi n’avez-vous pas accepté de constituer
un ministère, alors que l’éminent Carnot vous en
suppliait ?
— Mon président, j’étais bien libre, il me sem
ble ; ça ne me disait pas, là, mais pas du tout !...
d’ailleurs, sans conditions...
— Assez, taisez-vous ! Et vous, l’autre, là-bas...
Vous, Bourgeois, pourquoi avez-vous refusé lé
même honneur ?
— Dame, mon président, c’est comme le copain
Brisson, j’étais bien libre, pur amour de la liberté
individuelle, tiens !... Et puis, on ne m’a jamais
parlé d’aucune condition.
— Assez, taisez-vous !... Je vais vous le dire,
moi, pourquoi vous avez refusé.
Vous, Brisson, c’est parce que les frères de la
rue Cadet vous ont soufflé à l’oreille que la com
mission d’enquête du Panama n’était pas tf ut à
fait étranglée et qu’elle pourrait encore vous sau
ter à la gorge.
Quanta vous, mon Bourgeois, vous cachez votre
jeu, et vous ne voulez pas dire que les rendez-vous
avec Mme Cottu absorbent tous vos instants; il
ne vous en reste plus pour flirter avec le maroquin.
Allez vous asseoir, vous êtes deux rossards !
P. H.
-■ ■ ■ ■
LE COMMENC EMENT DE LA FIN
M. Crispi est démissionnaire. Il avait pourtant
encore obtenu la majorité, mais une majorité
réduite à sa plus simple expression, puisque le
chiffre de ses partisans ne dépassait que de cinq
celui des députés qui lui refusaient leur confiance.
Quand on songe au nombre considérable des
membres du Parlement qui dépendent du minis
tère et sont obligés de lui accorder leurs suffrages
sous peine de perdre leur situation, on se rend
compte de la portée morale de ce scrutin et on
comprend que le fougueux homme d’Etat sicilien,
n’ait pas essayé d’en dissimuler la signification.
Faut-il croire que M. Crispi est résolu à aban
donner le pouvoir ? Faut-il croire, au contraire,
que sa démission n’est qu’une manœuvre destinée
à montrer qu’en dehors de lui nul n’est apte à
gouverner l’Italie ?
C’est ce que nous saurons bientôt. Mais le fait
est que, dans les circonstances présentes, on ne
voit guère quel est l’homme politique qui ait les
reins assez solides pour prendre sa succession.
Elle est peu enviable, et si l’on a mis vingt et
un jours pour résoudre la dernière crise, il est
permis de penser qu’on en mettrait encore davan
tage pour résoudre celle-ci, dans le cas où l’on ne
voudrait pas revenir au ministre démissionnaire.
Attendons-nous donc à ce que tout ceci se ter
mine par de simples remaniements : par un
ministère Crispi sans M. Sonniuo, par exemple.
C’est la solution la plus probable en même*
temps que la plus facile.
Quoi qu’il en soit, s’il est un fait qui soit incon
testable, c’est que parmi les maux dont souffre
l’Italie, il faut placer au premier rang le manque
de capacité du Roi.
Si, en théorie, le régime parlementaire a été
inventé précisément pour parer à l’insuffisance du
chef de l’Etat, on ne peut nier que la valeur in
tellectuelle de l’homme placé au sommet de la
hiérarchie gouvernementale ne soit un facteur
important ; et cela est vrai pour les républiques-
comme pour les monarchies.
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