Titre : Le Réveil du Havre : organe républicain ["puis" organe républicain-socialiste indépendant "puis" organe du Parti républicain démocratique]
Éditeur : [s.n.] (Le Havre)
Date d'édition : 1894-02-17
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32854639q
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 17 février 1894 17 février 1894
Description : 1894/02/17 (N132). 1894/02/17 (N132).
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : BIPFPIG76 Collection numérique : BIPFPIG76
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k32633317
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-89667
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/04/2019
4* Année — S° 132 — Samedi 17 Février 1894.
4 e Année — 29 Pluviôse An 102 — fli° 132.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
ORGANE RÉPUBLICAIN
PRIX DES ABONNEMENTS :
Ü
UN AN SIX MOIS
Le Havre ...... 3 fr. 2 fr.
Départements 4 fr. 2 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15. RXJE CASIMIR-PÉRIKR, 15
LE RÉVEIL DU HAVRE paraît tous les Samedis
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces.......... 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
1 On traite à Forfait
DROIT DE DOUANE
SUR LES BLÉS
Depuis quelques jours, la Chambre des
Députés discute aeharnément cette passion
nante question : Faut-il, oui ou non, aug
menter les droits de douane sur les blés ?
Encore une fois, protectionnistes et libre
échangistes sont en présence.
Quelle sera la solution ? That is the question ,
disent les anglais. Nous, Français, nous
n’hésitons pas à déclarer que nous sommes
Certains que tous les députés sensés se feront
un devoir de repousser un droit qui ruine, et
qui ruinera tous les ports de commerce.
T^és protectionnistes quand même , à la tête
desquels l’illustre Méline fait la roue, sou
tiennent que la majoration du droit de douane
s’impose et que, seule, elle peut sauver l’agri
culture nationale de la ruine qui la guette.
Allons donc ! farceurs ! .Vous savez parfai
tement que si le nouvel impôt sur les blés
étrangers était voté, il ne profiterait qu’à
quelques gros cultivateurs, c’est-à-dire, pour
parler franc, à vous-mêmes. Vous prêchez
pour votre saint, et vous vous souciez comme
de colin-tampon des humbles : dès pauvres
ouvriers dès campagnes et des villes dont vous
augmenteriez la misère, tout en prétendant lé
protéger.
Bas les masques, Messieurs, nous ne som
mes plus en carnaval !
Vous trouvez, sans doute, que vos nom- :
bretises propriétés ne vous rapportent pas
assez, et vous voulez augmenter vos revenus,
et ce, en ayant Fuir de faire une œime
méritoire. Vous vous érigez en protecteurs de
la veuve et de F orphelin, et ne songez qu’à
protéger vôtre bourse et vos appétits insatia
bles. N’ayant plus de Panama sous la main,
il vous faut autre chose, et vous avez pris les
blés.
Insensés qui ne voyez pas ou qui ne voulez
pas voir que l’augmentation des droits sur les
blés jetterait des milliers de familles dans
l’affreuse misère.
Que deviendraient les nombreux navires
français qui nous apportent cette nourriture
du pauvre? Les armateurs devraient vendre
leurs bâtiments à l’étranger, licencier leurs
équipages, congédier les commis et les nom
breux ouvriers employés à la manutention.
Tous ne vous en souciez guère, Messieurs j
les protectionnistès’î • ?
Nous ne reprendrons pas ici les arguments
développés à la tribune par M. Jules Sieg
fried, arguments sans réplique. Nous sommes
heureux, — et nous ne pouvons être taxés de
tendresse pour le député de là l re circonscrip
tion du Havre, — nous sommes heureux,
disons-nous, de constater que, cette fois; il a
compris la mission qui lui incombait, et a
défendu les intérêts h a vrai s aveé brie élôquerice
et une énergie remarquables. '
11 est bien évident que la sufélévation des
droits ne profiterait pas aux cultivateurs. Si
le prix de revient des céréales est, en France,,
beaucoup plus éleVé que dans les autres pays,
cela tient surtout à ce que bous sommes en
retard de plusieurs siècles sur les questions
de culture. Nos écoles d’agriculture sont peu
ou point fréquentées et les rares sujets qui
en sortent sont impuissants à faire prévaloir
les nouvelles méthodes sur l’antique routine.
S'il y a quelque chose à faire en faveur des
populations agricoles, c’est à la propagation,
à la vulgarisation des connaissances scienti-
ques acquises par nos agronomes qu’il faut le
demander et non à un nouveau droit qui n’au
rait d’autre résultat que de faire augmenter
le prix du pain.
Après cela, M. Méline, s’inspirant de Marie-
Antoinette, dirait, peut-être, s'ils n’ont pas de
pain qu'ils mangent de la brioche !
Pierre MÊR1TEL.
—«sas*-
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
La bombe. — La destinée s’acharne contre
nous. Vaillant jette sa bombe, et monte allègre
ment à i’échafaud, exhalant, avec la vie, .son der-
niercfi de haine et de vengeance. Le cadavre du
supplicié est à peine refroidi, que l’attentat de
l’hôtel Terminus succède à l’attentat du Palais-
Bourbon.
Cette fois, ce n’est pas même des députés qu’on
vise, c’est-à-dire^ges hommes revêtus d’un pou
voir qui permet de léur attribuer, plus ou moins
justement, une part de responsabilité dans les
événements qui se déroulent. Non ! Comme à
Barcelone, c’est à la foule irresponsable, inoffen
sive, qu’on s’en prend. Des hommes, des femmes,
sont là, après une triste journée peut-être, venus
pour s'engourdir de musique, écoutant, oubliant
la : vie. Parmi eux, un fanatique, abîmé dans je ne
sais quel rêve de sanglante mysticité, médite l’ef-
froyable -massacre, et, le tenant en puissance dans
le creux de sa main, lance la mort au hasard de
son geste,, prêt à se targuer de son crime, comme
d’un acte sublime pour l’humanité.
Un homme capable d’un pareil acte doit être
mis hors d’état de recommencer : cela ne souffre
pas de discussion. Mais, ce point réglé, y a-t-il
rien de changé dans l’état de choses qui fait sour
dre d’en, bas ces fureurs criminelles ? On se plaint
des : déclamations qui affolent de faibles esprits,
qui détraquent des volontés instables. Gela est fâ
cheux, sans doute, mais les déclamations n’enta
ment le pauvre esprit humain qu’aiguisées d’une
pointe de vérité. Si vous voulez qu’elles soient
inoffensives, enlevez-leur ce pénétrant aiguillon.
C’est de quoi l’on ne s’occupe guère. Qn a plus
tôt fait, sans doute, de répondre à la violence par
la violence, et les mauvais conseils ne manque
ront pas. L’affolement dans la répression, après
l’affolement dans le crime : c’est le train ordinaire
des choses.
*
* *
Une bonne mesure. — On prête au groupe
socialiste de la Chambre l’intention de proposer
la modification suivante au règlement :
« A l’avenir, U sera interdit: au gouvernement de
poser la question de confiance plus .d’une fois par
semaine. » , v . ' ; , i
Autant demander lai tête du cabinet Casimir
Périer.
' •' - ' ^ i
EN AFRIQUE
En Afrique, nous avons décidément tous les
malheurs. Il y a huit jours, nous nous alarmions
de la fréquence des collisions :anglo-françaises sur
la frontière de Sierra-Leone ; aujourd'hui, c’est la
fin malheureuse de l’expédition Rpnnier qui inspire
des craintes sérieuses:aux vrais patriotes.
Dans notre dernier numéro, nous nous efforcions
de montrer ce que notre politique africaine avait
d’irrationnel; un événement récent a établi, par
surcroît, qu’elle était des.plus dangereuses.
Depuis la dynastie des Fatimites, l’envahisse
ment progressif des deux tiers du continent
africain par les musulmans est umfait avec lequel
toute politique consciente et établie sur des bases
raisonnées doit compter.
Il semble cependant que nos officiers et nos
fonctionnaires civils n’en tiennent aucun compte.
Entre les deux seules politiques possibles : l’al
liance nègre et l’alliance arabe, ils ont choisi un
moyen terme qui les expose à toutes les méfiances,
à toutes les rancunes, à toutes les vengeances.
Estimons-nous heureux encore quand l’amour
de la réclame, l’amour du galon, ne les pousse pas
à se contredire eux-mêmes, et à combattre au Sud
les mêmes peuplades dont ils recherchent l’alliance
au Nord.
L’affaire Bonnier est un éclatant exemple des
inconséquences de ce genre. Car, dans le même
temps où, au Sud de nos possessions algériennes,
on recherche l’alliance des Touaregs et on reçoit
solennellement leurs ambassades, nous voyons nos
officiers oser, de leur propre autorité, et au mépris
des principes les plus élémentaires de la politique,
s’emparer d’une cité musulmane.
Et c’est par de semblables procédés que l’on
espère voir se dérouler un jour le ruban de fer du
Tmnsaharien î
Il y a cependant déjà longtemps que les esprits
les plus éminents, que les hommes les plus com
pétents dans les questions coloniales ont tracé la
seule ligne de conduite possible dans nos posses
sions africaines ; et cette ligne de conduite est
Ys.llia.nce Arabe.
Le Gaulois le reconnaissait lui-même ces jours
derniers. L’auteur de l’article concluait en affir
mant que, seule dans le monde, la France pouvait
agir en dehors de toute considération religieuse,
et accepter franchement et loyalement l’islamisme
pour ses sujets à venir.
Nous sommes entièrement de cet avis. Pour
nous, protéger les musulmans à la fois dansleurs
mœurs et dans leur religion : tout est là. Mais une
des conditions indispensables de cette protection
consiste, ne l’oublions pas, à empêcher nos mis
sionnaires d’aller imposer leurs doctrines suran
nées à des peuples que leur religion arme mieux
que tout au monde pour l’existence sous un climat
meurtrier (témoin la réprobation de l’alcoolisme).
Les missionnaires, tant protestants que catho
liques, n’ont jamais réussi qu’à semer la discorde
et l’horreur des Européens ; de telle sorte que les
laisser pénétrer sur un point du globe, c’est pro
prement renoncer à s’en emparer d’une manière
rationnelle et à l’exploiter d’une manière pratique.
Pour nous, qui méprisons également toutes les
religions, qu’elles soient l’œuvre des Mahomet, ou
celles des anarchistes de l’ancienne Rome, nous
ne pensons pas qu’il y ait déshonneur pour le
drapeau français à s’allier au croissant, ou à flotter
sur une mosquée.
PROCÈDE OPPORTUNISTE
Le 4 e bureau de la Chambre chargé de vérifier
l’élection de M. Delaunay, dans la 3 e circonscrip
tion du Havre, a conclu par 10 voix contre 7, qu’il
y avait lieu de procéder à un second tour de scru
tin, et a chargé M. de Lanjuinais de faire un rap
port dans ce sens.
Le bureau s’est bas'é pour émettre cette décision
sur la non annexion au procès-verbal des opéra
tions électorales de 21 -bulletins blancs qui au
raient dû entrer en ligne de compte, et dont la
défalcation avait altéré le chiffre de la majorité.
Voilà bien la loyauté des opportunistes !
CE QUI EST NÉCE SSAIRE
Sous ce titre, une feuille locale attaque violem
ment le parti socialiste. L’auteur de l’article en
tend, se dérobant avec une souplesse qu’aurait
envié St-Ignace de Loyola, rendre responsable le
parti progrossiste des crimes commis par les anar
chistes. Nons ne savons pas s’il réclame la pater
nité de 1 idée ; mais, à coup sûr, le tour estéxécuté
avec une telle adresse que nous ne croyons pas
que le gouvernement lui refuse un brevet d’in
vention.
Il faut avoir un fameux aplomb pour oser pro
poser le remède indiqué par le rédacteur du Jour
nal du Havre. Oh ! il est bien simple ce moyen ;
on peu le traduire par ceci :
« Puisque les ouvriers ne sont pas satisfaits de
leur sort, qu’ils no»s abondonnent notre belle
Patrie. Nous consenterons volontiers, nous, bour-
, geois, à leur céder une colonie quelconque où ils
mourront comme des mouches ! »
D’abord, M. X nous voudrions voir la tête
que vous feriez, si on vous prenait au mot. La
société française serait curieuse à étudier le jour
où il n’y aurait plus d’artisans. Car, nous ne pen
sons pas, qu’à l’exemple de M. Carnot père, chaque
bourgeois ait fait apprendre un état manuel à ses
enfants ? Voyez-vous d’ici M. X. se confection
nant un chapeau ou une paire de bottes.
Et, dites-nous, la classe ouvrière en poursuivant
pacifiquement l’amélioration de son sort, fait-elle
autre chose que ce que vos pères de 1889 ont fait
violemment. La bourgeoisie a chassé la noblesse;
de même la classe ouvrière amènera la bourgeoisie
a lui laisser sa place au soleil ! Diable ! vous êtes
trop heureux aussi : vous jouissez de tous les pri
vilèges des nobles qui, eux au moins, pouvaient
à la rigueur invoquer les services de leurs ancêtres,
tandis que, pour la plupart, vous êtes fils de sep
tembriseurs et n’avez d’autres titres à la recon
naissance nationale que de nous avoir souvent
allégés de nos économies.
S’il y a des gens qui ont armé le bras des anar
chistes, c’est vous ! vous qui, systématiquement,
repoussez sans cesse les propositions", quelles
qu’elles soient, qui tendent à améliorer le sort du
malheureux, dès qu’elles vous imposent le plus
léger sacrifice !
Nous n’en citerons qu’un exemple : l’impôt sur
le revenu. Nous l’attendons toujours ; et
cause. A :
Non, les socialistes n’ont rien de commun avec
les anarchistes ! Et la meilleure preuve c’est que
tous leurs héros sont des déclassés qui, ne pouvant,
par leur origine être des nôtres, c’est-à-dire 4e
laborieux et honnêtes ouvriers supportant stoïque
ment les misères de la vie, sont devenus les crimi
nels qui vous font trembler et que seuls vous avez
créés en leur apprenant votre belle devise bour
geoise. « Vivre c’est jouir ! »
Y.
— —— —
Interview Ridicule
M. Siegfried a trouvé moyen de se faire inter
viewer au sujet de la prise de Tombouctou. Natu
rellement, il n’a pas manqué l’occasion de donner
une nouvelle preuve de son ignorance de toute
question qui n’a point un rapport immédiat avec
son intérêt personnel..
; « La prise de Tombouctou était indispensable,
« a-t-il dit en substance, et maintenant que nous
« y sommes, nous n’avons plus qu’à nous y main-
« tenir. »
Mac-Mahon n’eut pas mieux dit 1
Or, écoutons maintenant le langage des explo
rateurs, des hommes qui, ayant observé les phé
nomènes, peuvent en parler en connaissance de
cause.
L’un d’eux (Casimir Maistre), regrette que la
conquête de Tombouctou n’ait pas été d’abord
faite commercialement .
Un autre, en quelques mots très nets, a montré
les fâcheuses conséquences que l’évènement peut
avoir pour notre expansion coloniale :
« De tous côtés, dit-il, nous marchions pacifî-
« quement par le rayonnement de notre influence,
« par l’accroissement de nos relations commercia-
« les à la domination française à Tombouctou,
t Les chefs Touaregs avaient permis de laisser
« passer des missions, qui s ont maintenant en
« plein Sahara. Tout était à la paix, à la tempo-
« risation. »
« Je me souviens qu’au cours d’une exploration
« je rencontrai à Mouri des Musulmans qui, partis
« de Màcina^en passant par Tombouctou, allaient
« en pèlerinage à la Mecque. Je leur déclarai que
« mon devoir de chrétien était de favoriser cet
« acte de piété. Je leur offris les secours de mon
« escorte pendant une partie du trajet, et lorsque
« je les quittai à Yola, je leur fis présent de quel-
« ques pièces d’étoffe et d’une petite somme.
* La nouvelle de cette cordialité se répandit
« vite et fit excellente impression.
« La prise de Tombouctou par nas troupes sert*
« colportée de même ; croyez-vous qu’elle aug-
« mentera les sympathies que le nom français
« commençait à acquérir ? »
4 e Année — 29 Pluviôse An 102 — fli° 132.
CINQ CENTIMES LE NUMERO
ORGANE RÉPUBLICAIN
PRIX DES ABONNEMENTS :
Ü
UN AN SIX MOIS
Le Havre ...... 3 fr. 2 fr.
Départements 4 fr. 2 50
ADMINISTRATION & RÉDACTION
15. RXJE CASIMIR-PÉRIKR, 15
LE RÉVEIL DU HAVRE paraît tous les Samedis
PRIX DES INSERTIONS:
Annonces.......... 25 cent, la ligne
Réclames 50 cent, la ligne
1 On traite à Forfait
DROIT DE DOUANE
SUR LES BLÉS
Depuis quelques jours, la Chambre des
Députés discute aeharnément cette passion
nante question : Faut-il, oui ou non, aug
menter les droits de douane sur les blés ?
Encore une fois, protectionnistes et libre
échangistes sont en présence.
Quelle sera la solution ? That is the question ,
disent les anglais. Nous, Français, nous
n’hésitons pas à déclarer que nous sommes
Certains que tous les députés sensés se feront
un devoir de repousser un droit qui ruine, et
qui ruinera tous les ports de commerce.
T^és protectionnistes quand même , à la tête
desquels l’illustre Méline fait la roue, sou
tiennent que la majoration du droit de douane
s’impose et que, seule, elle peut sauver l’agri
culture nationale de la ruine qui la guette.
Allons donc ! farceurs ! .Vous savez parfai
tement que si le nouvel impôt sur les blés
étrangers était voté, il ne profiterait qu’à
quelques gros cultivateurs, c’est-à-dire, pour
parler franc, à vous-mêmes. Vous prêchez
pour votre saint, et vous vous souciez comme
de colin-tampon des humbles : dès pauvres
ouvriers dès campagnes et des villes dont vous
augmenteriez la misère, tout en prétendant lé
protéger.
Bas les masques, Messieurs, nous ne som
mes plus en carnaval !
Vous trouvez, sans doute, que vos nom- :
bretises propriétés ne vous rapportent pas
assez, et vous voulez augmenter vos revenus,
et ce, en ayant Fuir de faire une œime
méritoire. Vous vous érigez en protecteurs de
la veuve et de F orphelin, et ne songez qu’à
protéger vôtre bourse et vos appétits insatia
bles. N’ayant plus de Panama sous la main,
il vous faut autre chose, et vous avez pris les
blés.
Insensés qui ne voyez pas ou qui ne voulez
pas voir que l’augmentation des droits sur les
blés jetterait des milliers de familles dans
l’affreuse misère.
Que deviendraient les nombreux navires
français qui nous apportent cette nourriture
du pauvre? Les armateurs devraient vendre
leurs bâtiments à l’étranger, licencier leurs
équipages, congédier les commis et les nom
breux ouvriers employés à la manutention.
Tous ne vous en souciez guère, Messieurs j
les protectionnistès’î • ?
Nous ne reprendrons pas ici les arguments
développés à la tribune par M. Jules Sieg
fried, arguments sans réplique. Nous sommes
heureux, — et nous ne pouvons être taxés de
tendresse pour le député de là l re circonscrip
tion du Havre, — nous sommes heureux,
disons-nous, de constater que, cette fois; il a
compris la mission qui lui incombait, et a
défendu les intérêts h a vrai s aveé brie élôquerice
et une énergie remarquables. '
11 est bien évident que la sufélévation des
droits ne profiterait pas aux cultivateurs. Si
le prix de revient des céréales est, en France,,
beaucoup plus éleVé que dans les autres pays,
cela tient surtout à ce que bous sommes en
retard de plusieurs siècles sur les questions
de culture. Nos écoles d’agriculture sont peu
ou point fréquentées et les rares sujets qui
en sortent sont impuissants à faire prévaloir
les nouvelles méthodes sur l’antique routine.
S'il y a quelque chose à faire en faveur des
populations agricoles, c’est à la propagation,
à la vulgarisation des connaissances scienti-
ques acquises par nos agronomes qu’il faut le
demander et non à un nouveau droit qui n’au
rait d’autre résultat que de faire augmenter
le prix du pain.
Après cela, M. Méline, s’inspirant de Marie-
Antoinette, dirait, peut-être, s'ils n’ont pas de
pain qu'ils mangent de la brioche !
Pierre MÊR1TEL.
—«sas*-
SEMAINE POLITIQUE
FRANCE
La bombe. — La destinée s’acharne contre
nous. Vaillant jette sa bombe, et monte allègre
ment à i’échafaud, exhalant, avec la vie, .son der-
niercfi de haine et de vengeance. Le cadavre du
supplicié est à peine refroidi, que l’attentat de
l’hôtel Terminus succède à l’attentat du Palais-
Bourbon.
Cette fois, ce n’est pas même des députés qu’on
vise, c’est-à-dire^ges hommes revêtus d’un pou
voir qui permet de léur attribuer, plus ou moins
justement, une part de responsabilité dans les
événements qui se déroulent. Non ! Comme à
Barcelone, c’est à la foule irresponsable, inoffen
sive, qu’on s’en prend. Des hommes, des femmes,
sont là, après une triste journée peut-être, venus
pour s'engourdir de musique, écoutant, oubliant
la : vie. Parmi eux, un fanatique, abîmé dans je ne
sais quel rêve de sanglante mysticité, médite l’ef-
froyable -massacre, et, le tenant en puissance dans
le creux de sa main, lance la mort au hasard de
son geste,, prêt à se targuer de son crime, comme
d’un acte sublime pour l’humanité.
Un homme capable d’un pareil acte doit être
mis hors d’état de recommencer : cela ne souffre
pas de discussion. Mais, ce point réglé, y a-t-il
rien de changé dans l’état de choses qui fait sour
dre d’en, bas ces fureurs criminelles ? On se plaint
des : déclamations qui affolent de faibles esprits,
qui détraquent des volontés instables. Gela est fâ
cheux, sans doute, mais les déclamations n’enta
ment le pauvre esprit humain qu’aiguisées d’une
pointe de vérité. Si vous voulez qu’elles soient
inoffensives, enlevez-leur ce pénétrant aiguillon.
C’est de quoi l’on ne s’occupe guère. Qn a plus
tôt fait, sans doute, de répondre à la violence par
la violence, et les mauvais conseils ne manque
ront pas. L’affolement dans la répression, après
l’affolement dans le crime : c’est le train ordinaire
des choses.
*
* *
Une bonne mesure. — On prête au groupe
socialiste de la Chambre l’intention de proposer
la modification suivante au règlement :
« A l’avenir, U sera interdit: au gouvernement de
poser la question de confiance plus .d’une fois par
semaine. » , v . ' ; , i
Autant demander lai tête du cabinet Casimir
Périer.
' •' - ' ^ i
EN AFRIQUE
En Afrique, nous avons décidément tous les
malheurs. Il y a huit jours, nous nous alarmions
de la fréquence des collisions :anglo-françaises sur
la frontière de Sierra-Leone ; aujourd'hui, c’est la
fin malheureuse de l’expédition Rpnnier qui inspire
des craintes sérieuses:aux vrais patriotes.
Dans notre dernier numéro, nous nous efforcions
de montrer ce que notre politique africaine avait
d’irrationnel; un événement récent a établi, par
surcroît, qu’elle était des.plus dangereuses.
Depuis la dynastie des Fatimites, l’envahisse
ment progressif des deux tiers du continent
africain par les musulmans est umfait avec lequel
toute politique consciente et établie sur des bases
raisonnées doit compter.
Il semble cependant que nos officiers et nos
fonctionnaires civils n’en tiennent aucun compte.
Entre les deux seules politiques possibles : l’al
liance nègre et l’alliance arabe, ils ont choisi un
moyen terme qui les expose à toutes les méfiances,
à toutes les rancunes, à toutes les vengeances.
Estimons-nous heureux encore quand l’amour
de la réclame, l’amour du galon, ne les pousse pas
à se contredire eux-mêmes, et à combattre au Sud
les mêmes peuplades dont ils recherchent l’alliance
au Nord.
L’affaire Bonnier est un éclatant exemple des
inconséquences de ce genre. Car, dans le même
temps où, au Sud de nos possessions algériennes,
on recherche l’alliance des Touaregs et on reçoit
solennellement leurs ambassades, nous voyons nos
officiers oser, de leur propre autorité, et au mépris
des principes les plus élémentaires de la politique,
s’emparer d’une cité musulmane.
Et c’est par de semblables procédés que l’on
espère voir se dérouler un jour le ruban de fer du
Tmnsaharien î
Il y a cependant déjà longtemps que les esprits
les plus éminents, que les hommes les plus com
pétents dans les questions coloniales ont tracé la
seule ligne de conduite possible dans nos posses
sions africaines ; et cette ligne de conduite est
Ys.llia.nce Arabe.
Le Gaulois le reconnaissait lui-même ces jours
derniers. L’auteur de l’article concluait en affir
mant que, seule dans le monde, la France pouvait
agir en dehors de toute considération religieuse,
et accepter franchement et loyalement l’islamisme
pour ses sujets à venir.
Nous sommes entièrement de cet avis. Pour
nous, protéger les musulmans à la fois dansleurs
mœurs et dans leur religion : tout est là. Mais une
des conditions indispensables de cette protection
consiste, ne l’oublions pas, à empêcher nos mis
sionnaires d’aller imposer leurs doctrines suran
nées à des peuples que leur religion arme mieux
que tout au monde pour l’existence sous un climat
meurtrier (témoin la réprobation de l’alcoolisme).
Les missionnaires, tant protestants que catho
liques, n’ont jamais réussi qu’à semer la discorde
et l’horreur des Européens ; de telle sorte que les
laisser pénétrer sur un point du globe, c’est pro
prement renoncer à s’en emparer d’une manière
rationnelle et à l’exploiter d’une manière pratique.
Pour nous, qui méprisons également toutes les
religions, qu’elles soient l’œuvre des Mahomet, ou
celles des anarchistes de l’ancienne Rome, nous
ne pensons pas qu’il y ait déshonneur pour le
drapeau français à s’allier au croissant, ou à flotter
sur une mosquée.
PROCÈDE OPPORTUNISTE
Le 4 e bureau de la Chambre chargé de vérifier
l’élection de M. Delaunay, dans la 3 e circonscrip
tion du Havre, a conclu par 10 voix contre 7, qu’il
y avait lieu de procéder à un second tour de scru
tin, et a chargé M. de Lanjuinais de faire un rap
port dans ce sens.
Le bureau s’est bas'é pour émettre cette décision
sur la non annexion au procès-verbal des opéra
tions électorales de 21 -bulletins blancs qui au
raient dû entrer en ligne de compte, et dont la
défalcation avait altéré le chiffre de la majorité.
Voilà bien la loyauté des opportunistes !
CE QUI EST NÉCE SSAIRE
Sous ce titre, une feuille locale attaque violem
ment le parti socialiste. L’auteur de l’article en
tend, se dérobant avec une souplesse qu’aurait
envié St-Ignace de Loyola, rendre responsable le
parti progrossiste des crimes commis par les anar
chistes. Nons ne savons pas s’il réclame la pater
nité de 1 idée ; mais, à coup sûr, le tour estéxécuté
avec une telle adresse que nous ne croyons pas
que le gouvernement lui refuse un brevet d’in
vention.
Il faut avoir un fameux aplomb pour oser pro
poser le remède indiqué par le rédacteur du Jour
nal du Havre. Oh ! il est bien simple ce moyen ;
on peu le traduire par ceci :
« Puisque les ouvriers ne sont pas satisfaits de
leur sort, qu’ils no»s abondonnent notre belle
Patrie. Nous consenterons volontiers, nous, bour-
, geois, à leur céder une colonie quelconque où ils
mourront comme des mouches ! »
D’abord, M. X nous voudrions voir la tête
que vous feriez, si on vous prenait au mot. La
société française serait curieuse à étudier le jour
où il n’y aurait plus d’artisans. Car, nous ne pen
sons pas, qu’à l’exemple de M. Carnot père, chaque
bourgeois ait fait apprendre un état manuel à ses
enfants ? Voyez-vous d’ici M. X. se confection
nant un chapeau ou une paire de bottes.
Et, dites-nous, la classe ouvrière en poursuivant
pacifiquement l’amélioration de son sort, fait-elle
autre chose que ce que vos pères de 1889 ont fait
violemment. La bourgeoisie a chassé la noblesse;
de même la classe ouvrière amènera la bourgeoisie
a lui laisser sa place au soleil ! Diable ! vous êtes
trop heureux aussi : vous jouissez de tous les pri
vilèges des nobles qui, eux au moins, pouvaient
à la rigueur invoquer les services de leurs ancêtres,
tandis que, pour la plupart, vous êtes fils de sep
tembriseurs et n’avez d’autres titres à la recon
naissance nationale que de nous avoir souvent
allégés de nos économies.
S’il y a des gens qui ont armé le bras des anar
chistes, c’est vous ! vous qui, systématiquement,
repoussez sans cesse les propositions", quelles
qu’elles soient, qui tendent à améliorer le sort du
malheureux, dès qu’elles vous imposent le plus
léger sacrifice !
Nous n’en citerons qu’un exemple : l’impôt sur
le revenu. Nous l’attendons toujours ; et
cause. A :
Non, les socialistes n’ont rien de commun avec
les anarchistes ! Et la meilleure preuve c’est que
tous leurs héros sont des déclassés qui, ne pouvant,
par leur origine être des nôtres, c’est-à-dire 4e
laborieux et honnêtes ouvriers supportant stoïque
ment les misères de la vie, sont devenus les crimi
nels qui vous font trembler et que seuls vous avez
créés en leur apprenant votre belle devise bour
geoise. « Vivre c’est jouir ! »
Y.
— —— —
Interview Ridicule
M. Siegfried a trouvé moyen de se faire inter
viewer au sujet de la prise de Tombouctou. Natu
rellement, il n’a pas manqué l’occasion de donner
une nouvelle preuve de son ignorance de toute
question qui n’a point un rapport immédiat avec
son intérêt personnel..
; « La prise de Tombouctou était indispensable,
« a-t-il dit en substance, et maintenant que nous
« y sommes, nous n’avons plus qu’à nous y main-
« tenir. »
Mac-Mahon n’eut pas mieux dit 1
Or, écoutons maintenant le langage des explo
rateurs, des hommes qui, ayant observé les phé
nomènes, peuvent en parler en connaissance de
cause.
L’un d’eux (Casimir Maistre), regrette que la
conquête de Tombouctou n’ait pas été d’abord
faite commercialement .
Un autre, en quelques mots très nets, a montré
les fâcheuses conséquences que l’évènement peut
avoir pour notre expansion coloniale :
« De tous côtés, dit-il, nous marchions pacifî-
« quement par le rayonnement de notre influence,
« par l’accroissement de nos relations commercia-
« les à la domination française à Tombouctou,
t Les chefs Touaregs avaient permis de laisser
« passer des missions, qui s ont maintenant en
« plein Sahara. Tout était à la paix, à la tempo-
« risation. »
« Je me souviens qu’au cours d’une exploration
« je rencontrai à Mouri des Musulmans qui, partis
« de Màcina^en passant par Tombouctou, allaient
« en pèlerinage à la Mecque. Je leur déclarai que
« mon devoir de chrétien était de favoriser cet
« acte de piété. Je leur offris les secours de mon
« escorte pendant une partie du trajet, et lorsque
« je les quittai à Yola, je leur fis présent de quel-
« ques pièces d’étoffe et d’une petite somme.
* La nouvelle de cette cordialité se répandit
« vite et fit excellente impression.
« La prise de Tombouctou par nas troupes sert*
« colportée de même ; croyez-vous qu’elle aug-
« mentera les sympathies que le nom français
« commençait à acquérir ? »
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