Titre : Le Petit Havre : organe républicain, démocratique, socialiste ["puis" organe républicain démocratique "puis" bulletin d'informations locales]
Éditeur : [s.n.] (Havre)
Date d'édition : 1913-02-23
Contributeur : Fénoux, Hippolyte (1842-1913). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32836500g
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 23 février 1913 23 février 1913
Description : 1913/02/23 (A33,N14547). 1913/02/23 (A33,N14547).
Description : Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque... Collection numérique : Nutrisco, bibliothèque numérique du Havre
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Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t52637896g
Source : Bibliothèque municipale du Havre, PJ5
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 02/04/2023
. 33" Année
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N 14,547
(83 Pages)
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Dimanche 23 Févrw 4943
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Paris, trois heures matin
LA GUERRE D'ORIENT
La Roumanie accepte la Médiation
des Puissances
Bucarest. — Dans son édition du soir, l'or-
gane officieux la Poiittka publie le communi
qué suivant, au sujet du Conseil des minis
tres qui a eu lieu hier, concernant la média
tion des puissances dans le différend rou-
mano-bulgare, médiation proposée par Sir
Edward Grey :
« Les membres du gouvernement ont dé-
eidé à l’unanimité d'accepter la médiation
proposée.
» On a fait ressortir tout spécialement à
se sujet qu’il ne s'agit pas d’une sentence ar
bitrale, mais d’une médiation telle que la
définit la convention de la Haye.
» Le gouvernement a en particulièrement
en vue l'articie 6 de cette convention dans
la note par laquelle il fait connaître son ac
ceptation.
» Le gouvernement insistera pour la fixa
tion d’un délai rapproché ; il accepte égale
ment la médiation de toutes les puissances
pour le choix de l’endroit où aura lieu la
conférence.
» Cette décision du gouvernement prouve
le désir qu’a la Roumanie de joindre ses
efforts à ceux des grandes puissances en
vue d’aplanir le différend d’une façon paci
fique. »
Déclarations de IL di San Giuliano
Bome. — A la Chambre, à l'occasion de la
discussion du budget des affaires étrang-
res, M. di S in Giuliano, ministre des afai-
res étrangères a prononcé un discours très
applaudi.
Après avoir constaté que la tâche de la
diplomatie, facilitée par le haut souci des
peuples et des gouvernements, est de ne
sas déchaîner pour des causes insuffisantes
an terrible conflit, le ministre a déclaré que
ia formule « les Balkans aux peuples balka
niques » est la solution la plus conforme
aux intérês de l’Italie et aux intérêts de la
paix européenne.
il faut que cette solution soit, le plus tôt
possible, réalisée.
Ce résultat ne peut être atteint qu’en éta
blissant une assiette territoriale balkanique
correspondant le plus possible aux condi
tions ethnographiques et géographiques des
pays et aux désirs et aux intérêts des peu-
pies, ces désirs ct cos lmerets étant SUDOr-
donnés en certains cas au but suprême de la
Civilisation et de la paix.
Le ministre dit ensuite que la situation
méditerranéenne actuelle satisfait les inté
rêts italiens.
L’Italie ainsi que les autres grandes puis
sances désirent qu’elle soit maintenue.
L'integnné territoriale de la Turquie d’Asie
a été reconnue par toutes les puissances
comme une garantie efficace de la paix eu
ropéenne. La Turquie n’ayant plus à défen-
dre ses possessions européennes, pourra
sûrement consolider ses possessions asiati
ques.
La Démarche des Puissances à Sofia
Sofia. — La demande collective des gran
des puissances au sujet de la médiation en
tre la Bulgarie et la Roumanie doit avoir
lieu aujourd’hui.
LA SOIRÉE DE M. POINCARÉ
Le president de la République et Mme
Poincaré se sont rendus successivement hier
soir, aux bals de l’Association des anciens
élèves de l’Institut agronomique, delà Saint-
Cyrienne et de l’Hôtel de Ville.
“Partout le chef de l’État a été accueilli avec
enthousiasme.
L'AVIATEUR FAVRE
JUVISY. — L'aviateur Favce, qui avait quitté
Hourmelon hier matin, à huit heures dix,
a atterri à Juvisy quarante-huit minutes plus
ard.
L’aviateur a effectué ce parcours à la vi
tesse de 172 kilomètres à l'heure.
UNE FEUE CONDAMNÉE A MORT
La 2e Cour d’assises de la Seine vient de
condamner à mort la femme Laure Farre-
ren, 41 ans, originaire d’Espagne, qui, en
octobre dernier, à Levallois-Perret, tua d'un
coup de revolver une de ses compatriotes.
LA MOBILISATION EN AUTRICHE ET
EN RUSSIE
Berlin. — La dettes Tagrs Zeitung consta
te que ni la Russie ni l'Autriche n’ont encore
démobilise. V
La Taegliscke Rundchau déclare apprendre
que l’autorite mimhaire russe a fait a des fa
briques allemandes et russes d'importantes
commandes de fers à cheval en quantité suf
fisante pour ferrer 23 divisions de cavalerie.
Ces commandes devraient être livrées d’ici
à six semaines au plus tard et être condition
nées de telle sorte que les chevaux puissent
être ferres à glace.
Il convient de n’accueillir ces renseigne-
ments que sous toutes réserves.
EXPLOITS DE SUFFRAGETTES
ÂONDRES. — LeS suffragettes ont saboté
les fils télégraphiques pres de Newcasile ;
Biles ont également sabote plusieurs boîtes
aux lettres.
Les ministres sont sous la surveillance
ipéciale d’agents de la Sûreté, en raison de
la nouvelle que les suffragettes se proposent
» d’enlever » un ou plusieurs membres du
Cabinet! s.
LA NEIGE EN ESPAGNE
2ERBÉRE. — On signale d’abondantes chu
tes de ueige dans la Catalogne et T’Aragon.
Plusieurs trains sont restés en détresse.
On se montre inquiet sur le sort des voya
geurs.
Les trains de secours ne peuvent pas
avancer.
Un cyclone a causé d’importants dégâts à
Almeria.
Plusieurs maisons se sont écroulées.
Cinq Carabiniers ont disear.
UliU
Dans un article ‘très complètement docu-
menté, dû à la plume de M. Vallée, le Petit
Havre a étudié jeudi dernier la question
brûlante des armements allemands. Je vou
drais à mon tour reprendre, mais du point
de vue diplomatique, ce troublant pro
blème, me demander ce qui a pu conduire
nos voisins à leur récente démarche, et re
chercher si, en fin de compte, la situation
européenne est aussi gravement compro
mise pour la Triple Entente qu’on pourrait
le craindre à première vue. Je ne voudrais
pas sans doute tenir le langage de celui qui
rassure, quand il y a péril. J ai admiré le
calme viril et impressionnant de l’opinion,
sa façon martiale et fière de dire : « S’il le
faut ...... Mais il ne faut pas non plus
verser dans le pessimisme, et il fait bon
d’ajouter que l’équilibre européen ne tend
pas du tout à se détruire à notre détriment.
D’autre part, à la veille de prendre une
mesure aussi grave que le service de trois
ans, ne faudrait-il pas réfléchir un peu plus
longtemps ?
Je crois donc qu’il convient de dire que
la situation politique de l’Europe n’a rien
actuellement qui menace sérieusement la
position de la Triple Entente. Et pourquoi
cacher que la Triple Alliance a, de son
côté, de graves sujets d’inquiétude ?
La guerre des Balkans marque, dans l’é
volution de l’Europe contemporaine, un
point tournant de grande importance. Nul
doute que l’augmentation projetée de l’ar-
,mée allemande n’en soit une conséquence
Immédiate. Remarquez en effet que ce n’est
ni après Tanger (1903), ni après Casablanca
(1909), ni après Agadir (1911) que l’Allema
gne a pris la décision militaire subite qui
impressionne si vivement l’opinion mon
diale. Non, c’est deux mois après les vic
toires balkaniques, un mois après la mys
térieuse et inquiétante mobilisation autri
chienne. Ne faut-il pas se demander si l’Al-
lemagne ne s’est pas sentie indirectement
touchée par les événements d’Orient ? Son
acte en apparence provocateur n’est-il pas
peut-être motivé surtout var le souci de ré
tablir une situation jugée compromise de
ce côté là ?
Il y a un principe qui domine toute la
politique prussienne, comme le principe de
la suprématie des mers domine la politique
anglaise, c’est que l’Empire doit être en
mesure de faire face, des deux côtés en
même temps, à ses deux adversaires histo
riques, la France et la Russie. Cette préoc
cupation n’a cessé de hanter Bismarck :
c’est pour y répondre que, dès le lendemain
de Sadowa, il a prévu et préparé l’alliance
autrichienne ; c’est pour y répondre encore
qu’il a fait plus tard de son entente avec
l’Autriche la base fondamentale de son sys
tème. Il s’entendait en même temps avec
l’Italie pour neutraliser un ennemi dange
reux de l’Autriche, et il annexait même à
sa combinaison la Roumanie, pour avoir,
dans le cœur même des pays slaves, une
sentinelle avancée. Pour compléter cette
géniale organisation, il s’entendait enfin
avec le Turc. Que voulait-il par cet ensem
ble de mesures diplomatiques, sinon s'assu
rer contre la coalition inévitable des Fran
çais et des Russes ?
Or cet équilibre si savamment combiné
apparaît depuis quelques mois compromis.
Non que l’Allemagne soit en aucune façon
affaiblie. Elle n’a cessé de se tenir militai
rement prête. Aujourd’hui, comme aux
jours de fer et de sang de 1870, elle croit et
affirme qne sa suprématie, sa sécurité mê
me reposent sur la puissance de ses ar
mées. Donc, de côté là, rien de changé.
Mais, dans l’Europe sud-orientale, quel
les transformations en quelques mois !
Voici d’abord que la Turquie d’Europe
n’existe plus. A sa place que voyons-nous?
La race slave, jeune, brutale, ambitieuse
s’installe bruyamment dans la péninsule
balkanique, et cela dans la zone même que
l’influence allemande avait convoitée. Der
rière la Bulgarie et la Serbie, la Russie
tutélaire se prépare à étendre jusqu’à la
mer Egée le rayonnement de sa puissance ;
elle revit, après trente années, les grands
jours de San Stefano.
Tout cela n’est pas, si vous voulez, un
coup direct porté à l’Allemagne ; mais c’est
un coup direct et terrible porté à sa pre
mière alliée, à son « brillant second » com
me disait Guillaume II. Et c’est un coup
indirect porté, à travers l’Autriche, au ger
manisme tout entier. Il faut en effet élever
la question pour la bien comprendre : der
rière une lutte de gouvernements ambi
tieux et avides se cache mal une rivalité de
races et de civilisations : Slaves contre
Allemands, Croire que, dans l’espèce, l’Al
lemagne n’est pas immédiatement solidaire
de l’Autriche, c’est donc se méprendre.
Il y a quatre ans, le germanisme semblait
l’emporter sur toute la ligne : l’Autriche
annexait la Bosnie, pointait vers Salonique,
comprimait la Serbie, sans que celle-ci osât
bouger, sans'que la Russie, protectrice des
Slaves, essayât sérieusement de protes
tes. Subitement, par un retour de fortune
comme l'histoire en ménage aux plus puis-
sants, voici que tout d'un coup l'Autriche
voit non seulement s’évanouir ses plus bel-.
VPPECECES u avenir, mais encore Se sent
menacée dans son existence même,en temps
que nation. La Serbie, la Bulgarie,la Grèce
lui ferment la route de la mer Egée. C'est
terrible pour un empire qui, chassé d’Alle
magne il y a quarante ans, cherchait désor
mais des compensations en Orient !
Ce n’est pas tout. Il y a, pour l’Autriche,
quelque chose de plus dangereux encore.
La victoire des Slaves a remué, dans toute
la vallée du Danube, de profondes passions
ethniques. Au bruit des canons de Lule-
Bourgas et de Dimotika, tout ce qui est
slave dans l’empire des Habsbourg a tres
sailli. Et l’Europe, qui l’avait un peu ou
blié, s’est aperçue qu’en somme les Alle
mands ne sont en Autriche qu’une minorité.
L’unité autrichienne est apparue de ce fait
singulièrement peu solide. En effet, depuis
la guerre, des mouvements centrifuges se
manifestent de toutes parts dans cette puis
sance de belle apparence, mais qui n’est
pas une nation. L’opinion mondiale a alors
constaté avec stupeur que, d’un jour à l’au
tre, l'Autriche pouvait se disloquer.
Le gouvernement autrichien, le premier,
a senti ce vent de dissolution et de démem-
brement qui soufflait sur lui. Il s’est de
mandé si, en cas de guerre, ses sujets sla
ves marcheraient. Beaucoup de gens bien
informés pensent que la ruineuse mo
bilisation autrichienne ne cache en somme
qu’une gigantesque opération de police in
térieure pour contenir les velléités sépara
tistes des éléments hétérogènes de l’Em
pire.
Quelle est la conséquence de ces événe
ments si graves', sinon l’affaiblissement
évident de la Triple-Alliance sur son front
sud-orient il ? En cas de guerre européenne
(et désormais il n’y aura plus que des con
flits généralisés), pensez-vous que l’Autri
che sera en mesure de remplir efficacement
le rôle que lui destinait Bismarck, c’est-à-
dire de tenir tête à la Russie ? Elle tentera
de le faire, mais avec combien de difficul
tés ! D’abord, elle sera prise à revers par
les nouvelles puissances balkaniques, no
tamment par la Serbie, avide de devenir la
Grande Serbie. C’est jusque dans son sein
que les Slaves pourront jeter de terribles
ferments de trahison et de révolte. Est-il
sûr, d’autre part, que l’Italie, alliée sur le
papier, ne deviendra pas pour l'Autriche une
ennemie de la onzième heure ? Pense-t-on,
enfin, que la Roumanie, inscrite dans la
combinaison germanique, sera disponible ?
Elle pourrait avoir fort à faire avec la Bul
garie, ou même (la chose est vraisembla
ble) s’unir avec les Slaves contre les Ger
mains.
Il résulte de cette situation, dont je ne
crois pas exagérer le caractère, que la
guerre balkanique a compromis en Orient
la position de la Triple-Alliance, alors que
la Triple Entente a vu en somme la sienne
s’améliorer. Je me demande donc si, même
après ses nouvelles augmentations d’effec
tifs, l’Allemagne sera en mesure de se
montrer plus agressive que précédemment.
Sans doute — et je répète ici ce que
j’avais dit au début — il serait ridicule et
dangereux de nier le péril. Nous ne pou
vons admettre, sans rien faire de notre cô
té, une supériorité de 35 0/0 dans les effec
tifs allemands. Cependant, n’oublions pas
une chose : Il ne faut pas raisonner comme
si nous étions seuls. Seuls contre une Aile-
mage qui grandit sans cesse quand notre po
pulation est stagnante, notre position serait
inquiétante. Mais la vraie question se pose
entre la Triple Alliance et la Triple Enten
te. Etant donnée la façon dont se présente
actuellement l'équilibre de ces deux gou-
pements, nous avons le devoir d’être vigi
lants. Mais vraiment, nous avons aussi le
droit d’être confiants.
André Siegfried.
LA GUERRE D'ORIENT
Négociations Austro-Russes
Berlin, 22 février.
On confirme à Berlin la nouvelle que des
négociations directes entre l’Autriche-Hon
grie et la Russie se poursuivent par l’inter
médiaire de leurs ambassadeurs à Londres,
en présence sir Edward Grey.
Le but poursuivi par ces négociations est
le règlement de la question de la délimita
tion de la frontière d'Albanie.
Le Conflit Roumano-Bulgare
Bucarest. 22 février.
Le Conseil des ministres d’aujourd'hui
doit procéder à la rédaction de la note qui
sera adressée aux puissances au sujet de la
médiation.
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ETRANGER
CHINE
Mort de l’impératrice douairière
L’imperatrice douairière Lung-Yu est mor
te à 2 h. 30 du matin, après une courte
maladie. Elle avait éprouve tout récemment
les premiers symptômes de la maladie qui
devait l’emporter. Dès qu’elle parut en dan
ger, le gouvernement appela téiegraphique-
ment « le gardien de l’empereur », qui ar
riva à Pékin vendredi matin.
Dans l’après-midi, l’état de l’impératrice
s’aggrava et il continua d’empirer jusqu’au
milieu de la nuit.
Le bruit a couru que l’impératrice s’était
suicidée parce que le gouvernement, afin de
pouvoir occuper la partie orientale de la
ville interdite, avait décidé de reléguer pro
chainement la famille impériale dans la
partie occidentale, mais il paraît que l’impé-
ratrice non seulement avait accepté ce chan
gement, mais l’a uit proposé efle-meme.Ceci
redoit à néant la thèse d après laquelle l’im-
peratrice se serait suicidés.
Photo Petit H'Vre
Cliché Petit Havre
— Enfin, appliquez-vous comme pour une revue d’astiquage !...
Trois fois par semaine, à l’heure où la
cage désertée par ses oisillons retrouve son
calme, où les choses replacées dans la sé
rénité du repos s’apprêtent à plonger dans
la nuit, où lescanes géographiques suspen
dues au mur doivent envoyer à la solennité
du tableau noir un peut bonsoir confrater
nel, les portes s’ouvrent, livrent passage au
flot des capotes et des bourgerons.
Les becs de gaz se rallument, les tables se
regarnissent, les cahiers sortent de l'armoi
re et promènent un instant au ras des pupi
tres un vol de grands papillons blancs : la
vie scolaire reprend sous un aspect nou
veau. Aux bambins succèdent des jeunes
hommes. Sur les mêmes bancs une généra
tion qui devance largement les petits les re
joint ainsi dans la communauté de l’igno-
rance.
C’est l’école des grands enfants.
L’obligation de‘instruction demeure une
des gloires de notre régime, et tous les ef
forts dépenses pour cette émancipation des
esprits furent autant de bonnes semences
qui préparèrent les amples moi-sons.
Toutes n’ont (joint germé, cependant, mal
gré la vigilance du semeur, malgré les ri
gueurs de la loi dont il s’arme pour tracer le
sillon dans le champ de ‘ignorance. Nous
comptons encore en France de trop nom
breux illettrés.
Le dernier recensement général de notre
population faisait ressortir que sur 1,000
Français de cinq à vingt ans, 866 savent lire
et écrire, 131 sant complètement illettrés.
Si l’on ne considéré que les individus au-
dessus de 15 ans, le nombre des illettrés est
de. 1,980 095 hommes et 2,981 332 femmes,
soit 4,961,627. Chiffre énorme, incroyable. La
France compte 5 millions de sujets, de l’ado
lescence jusqu’à la vieillesse, qui ne savent
ni lire ni écrire !
A quelles causes doit-on attribuer la pro
gression de l’ignorance ?
Je causais récemment de ces choses avec
un directeur de nos écoles primaires qui
fut pendant plusieurs années instituteur à
la campagne. Il n’hésita pas à accuser l’in
souciance des parents, l’absence fréquente
de l’écolier à l’école,
Certes, la loi de 1882 prescrivit l’obligation
scolaire, mais la loi est en maintes régions
lettre morte. La fréquentation de l’école dé
pend de mille choses, de la pluie, du soleil,
de la moisson, des récoltes.
En Normandie, pendant la récolte des
pommes, les parents retiennent l’enfant,
soit pour s’aider de lui, soit pour l’envoyer
travailler ailleurs.
Dans une région de la contrée normande,
sur 2,560 présences possibles, on constate
en juin 486 absences, vingt pour cent. Des
élèves de dix, neuf, huit et même sept ans
manquent l’ecole de 37 à 62 jours par an.
Consultez les excuses. Elles varient peu :
« Nous gardons Louis pour faner ». « J’avais
besoin de Jums pour relever du foin ». Ou
bien encore : « Emile est allé porter la soupe
à son père ».
Ces circonstances, jointes au peu de durée
de la scolarité, contribuent naturellement à
maintenir éievee la part de l’iguorance. Et
fon peut se rendre compte avec une singu
lière précision de cette situation fâcheuse,
en examinant les écorier s intermiten’s de
jadis à leur entrée dans la grande famille
regimentaire.
* *
Chaque année à l’arrivée des recrues, une
épreuve intéressante est effectuée. Elle a
lieu au Havre dans la salle Frank in, en pré
sence de M. l'inspecteur primaire.
Une dictée, un problème reclamant l’ap
plication des quatre règles, une question
élémentaire d’histoire et de géographie sont
soumises à l’esprit un peu effaré des jeunes
soldats. C’est à la suite de cet examen que
les categories sont formées et que se trouve
déterminée la partie du contingent à la
quelle, durant quatre mois, trois soirs par
semaine, la ville du Havre donnera l’instruc
tion gratuite.
Ils sont deux cents fantassins environ qui
viennent ainsi recevoir, après la soupe ou le
rata, la nourriture intellectuelle, soit à
l'école de la rue de Phaisbourg, soit à l’école
de la rue Gustave-Flaubert, suivant qu’ils
appartiennent aux compagnies casernées à
Kléver ou au fort de Tourneville.
Deux cours sont généralement organisés,
l’un reçoit les soldats qui, sans être pourvus
de hautes aptitudes sur l’art d’écrire, de lire
et de compter, sont cependant capables
d'assembler des. le tires, d’aligner des mots,
des chiffres, l’autre comprend les sujets
complètement ignorants. Les deux catégories
n’en représentent pas moins des illettres.
L'œuvre entreprise de la sorte depuis plu
sieurs années déjà est de celles qu’on ne
saurait trop encourager. La proportion des
soldats illettrés n’est encore que trop consi
dérable dans notre armée.
J’ai sous les yeux les tableaux que le mi
nistère de la guerre fait dresser chaque an
née, après enquête, sur ‘instruction des
jeunes gens de la classe. Ils fournissent des
constatations pénibles. Non seulement le
nombre des illettrés est énorme, mais. ce
qui est plus grave, on peut noter que dans
certaines régions le nombre de ceux-ci, au
lieu de décroître, grandit.
En 1966, sur 310,327 jeunes gens mainte
nus sur les listes du tirage au sort, on si
gnale 11.044 illettrés.
En 1907, pour un chiffre inférieur de
jeunes gens maintenus sur les listes, le
chiffre est de 11,062, soit une augmentation
dans la proportion des conscrits ne sachant
ni lire ni écrire.
Si maintenant on dresse le chiffre des jeu
nes gens normalement instruits,on constate,
là encore, un dechet.
En 1903. ces jeunes gens sont 284 393. Ils
soni 282 615 en 1904. 282 617 en 1905, 281,013
en 1906, 269.540 en 1907, soit une baisse de
plus de 14,000 en quatre ans dans cette caté-
gome de jeunes soidats.
Inversement, il y a une hausse de plus de
400 dans le nombre des conscrits reconnus
totalement illettrés, au sens propre du mot.
de 1905 à 1907.
Ligaorance atteint des proportions assez
pittoresques pour nous donner une saisis -
sante image. Dans son curieux livre sur
l'Education patriotique du Soldat, M. lelieute-
naut Roland a publie des details singulière-
ment éloquents sur l’indigence des connais
sances de certains de nos troupiers.
A sept conscrits fut demande ce qu’ils sa
vaient de Jeanne D irc.
— C’est une dame qui a fait du bien à la
France, dit l’un.
Les autres ont répondu : une dame qui a
régné en France ; qui est morte sur un ro
cher ; qui est montée sur l’échafaud : une
chevalière sous Henri V ; une dame qui a
fait des conquêtes, et enfin une dame qui a
été le gouvernail de la France !
Napoléon n’est pas plus famillier. Tour à
tour, les recrues le décrivent ainsi : un
homme qui vivait il ya vingt ans, qui vivait
en 4848, qui a été ‘empereur du monde.
L’interrogatoire se poursuit et, sur ques
tions, le conscrit affirme, sans eh être bien
sûr, que Sedan est une ville allemande,
Iena un grand général, Berlin la capitale de
l’A Isa ce-Lorraine, Metz une puissance, Cour
bet un amiral sous Louis XV, l’Algérie une
puissance où il y a des nègres, capitale
Constantinople; Madagascar une ville d’Amé-
ri que.
Le Tonkin est au Dahomey. Gambetta a
rait des decouvertes et était général de Na
poléon.
Quant à Victor Hugo, c’est tantôt un célè
bre violoniste, tantôt un ancien avocat qui a
inventé le « vaccinage ».
*
* *
Exception étant faite de sujets totalement
illettrés dont la situation intellectuelle dé
pend d’un état pathologique spécial, je dois
reconnaître que la majorité des troupiers
fréquentant l’école havraise n’atteint heu
reusement pas ce lamentable dénuement de
documentation générale.
H y a évidemment beaucoup de naïveté
dans certaines réponses de ces grands en
fants dont l’esprit en léthargie subit parfois
l’effet de l’atavisme, innocents heritiers de
parents alcooliques.
Mais ce qu’il faut dire aussi, et ce qu’il me
plaît de souligner, c’est, chez le plus grand
nombre, le désir évident de s’instruire, c’est
la s-nsation éprouvée de leur ignorance, la
volonté de réagir, de s’élever au niveau des
autres, de pouvoir dire un jour à la cham
brée : « Moi aussi je sais lire », de ne plus
avoir recours au camarade de lit pour dé-
chiffrer la lettre des vieux, envoyer un petit
bout d’écrit à la payse !
J’ai voulu les voir à la tâche, ces pauvres
Pitons restés en marge de la grammaire et de
‘arithmétique ; j ai tenu à assister à l’un des
cours qui leur sont faits par nos instituteurs.
J’ai surpris une classe studieuse, attentive,
penchée sur le cahier d’écriture ou les yeux
braques sur le tableau noir pour la correc
tion d’une dictée, l’explication d’un pro
blème.
Je les ai trouvés, nos petits troupiers,
même ceux que le régiment qualifie de
« fortes têtes », soumis au maître, caimes et
presque recueillis, avec des mines drôles,
bouleversées d‘i iquietude quand le casse-cou
d’un participe passé en instance de bon ac
cord faisait se cabrer leur plume indécise..
Le hasard m’avait amené là au lendemain
de l’élection présidentielle. Le maître, direc
teur de l'Ecole, leur avait fait une petite cau
serie sur le fonctionnement de nos institu
tions républicaines, la formation du Con
grès, la transmission des pouvoirs. Il avait
ajouté quelques mots sur les devoirs du
citoyen, sur l’idée de patrie.de dévouement,
de sacrifice à l’œuvre commune. Il avait dit
cela simplement, sans phrases, comme on
parle à des enfants.
Et les grands enfants le regardaient avec
respect, un air d’humilité candide où l’on
devinait comme une gratitude rustique qui
montait des cœurs charmés et des esprits
entr’ouverts aux idées. Ils semblaient dire :
« Comme nous avuns tardé à apprendre, à
comprendre ce qu’ils savent déjà, les tout
petits dont nous occupons ce soir les
bancs... »
Puis ce fut le tour de la dictée ; et sur le
papier des plumes grincèrent entre les gros
doigts.
Dans une salle voisine, d’autres pioupious
apprenaient à lire, s évertuaient à discipli
ner la famille des BA, des BS, des B1, des
BO, des BU, s’elevaient jusqu’à former des
mots. L’alphabet leur livrait enfin son se
cret. ..
— Passons au problème !... Voyons Picot,
écoutez-mot bien. Vous recevez un mandat
de cinq francs...
— Un mandat de chinque francs !
Il restait effare, le pauvre Picot. La vision
soudaine de ce mandat de cinq francs l’avait
mis dans un état de stupéfaction indefinis-
sable. Bouche bée, les yeux écarquillés, il
errait dans les blancheurs du plafond. Il se
ressaisit pourtant ;
— J’vais vous dire, j’en ai jamais eu.L'plus
g'A —9. . -, A s. L2. 1 “,7,
qu'on m’a envoyé, des fois, du pays, c’est
quarante sous...
— Soit ! Vous recevez un mandat de deux
francs. Là-dessus vous achetez...
Et bien vite rassuré, ramené dans le do
maine des choses possibles, docile et patient,
Pitou se bourra le crâne avec des chiffres.
ALBERT-HERRENSCHMIDT.
Nouvelles Politiques
Conseil de Cabinet
Les ministres et sous-secretaires d’Etat se
sont réunis hier matin au ministère de l’in
térieur, sous la présidence de M. Briand.
Le ministre des affaires étrangères a con
firmé que le gouverneur d'Andrinople,
Chukri pacha, a télégraphié à la Porte qu’il
s’est entendu avec les consuls pour assigner
le quartier de Karagatch aux colonies étran
gères comme zone neutre.
Le conseil a,commencé l’examen des ques
tions militaires.
Le président du conseil et le ministre des
finances demanderont très prochainement à
être entendus par la commission sénatoriale
de l’impôt sur le revenu.
Visite de M. Poincaré
à ses Prédécesseurs
Le président de la République a rennu vi-
site, hier après-midi, au président Loubet et
au président Fallières.
Le Président de la République
au Concours Agricole
Le président de la République, accompa
gné de Mme Poincaré, a visité hier matin, à
dix heures, le concours général agricole.
A son arrivée au palais, le president et
Mme Poincaré ont été reçus par le ministre
de l’agriculture qu’accompagnait Mme Fer
nand David.
Dans l’assistance, on remarquait MM. Mé-
line, Raynaud, anciens ministres de l’agri
culture ; Decker-David, sénateur ; le général
Michel, gouverneur militaire de Paris ; De-
anney, préfet de la Seine, et Mme Deanney;
Dabit, Cabaret, directeurs au ministère de
l’agriculture ; Carrier, directeur du cabinet
du ministre ; de Lagorsse, secrétaire general
de la Société d’encouragement à l’agricul
ture, etc.
Lorsque le président et Mme Poincaré des
cendent de voiture, la foule qui s’est amas
sée aux abords du palais leur fait une en
thousiaste ovation.
M. Poincaré offre alors son bras à Mme
Fernand D ivid, le ministre de l'agriculture
donne le sien à Mme Poincaré.
Le cortège officiel pénètre aussitôt dans
l’enceinte du paiais, qu’une foule considé
rable a envahi depuis l’ouverture. Le prési
dent de la République est chaleureusement
acclamé. C’est avec peine que le président
suivi et entouré par les innombrables visb
leurs, dont aucun service d’ordre ne main
tient la sympathie et la curiosité, parvient de
vant les boxes où sont installés les animaux
gras primés. M Poincaré felicite aimablement
les éleveurs qui lui sontpresentés par M. Fer-
nanti David, puis non sans difficulté le cor
tège pénètre dans la salle où se trouve la
merveilleuse exposition collective des syn-
dicatsagricoles du Midi.
Des gerbes d’œillets et de roses sont offer-
les à Mme Poincaré ainsi qu’à Mme Fernand
David, qui toutes deux après cette visite,
respectueusement saluées par l’assistance,
quittent l’enceinte du concours, accompa
gnées de M. Mollard, chef du protocole, et
du capitaine de vaisseau Grandclement.
Continuant sa visite le cortège offi iel ga-
gne les galeries du premier étage et se rend
à la section des vins, où sur l'invitation de ,
plusieurs exposants le président dégusté
quelques vins des grands crus. Il s’arrête as
sez longuement dans cette partie du con
cours à l'exposition de vins du departement
de la Meuse dont la plupart des exposants
lui sont connus et qui veulent tous être
admis à l’honneur de serrer la main à leur
illustre compatriote devenu le chef de l’État.
Le cortège, après un coup d'œil aux ani
maux de basse-cour, redescend dans la nef
du palais, et le president se rend au jardin
scolaire installe par M. Vergier, professeur
d'agriculture, qui est une des innovations
du concours de cette année.
Respectueusement salué par de nombreux
cris de z « Vive Poincaré ! Vive la Républi
que ! », le président quitte vers 11 heures la
Grand-Palais aes Champs-Elysees pour aller,
de là, à l’esplanade des invalides où, accueilli
par les mêmes acclamations enthousiastes
de la foule, il a parcouru les diverses sec
tions réservées aux machines et instruments
agricoles.
Il était 11 h. 1/2 lorsque le président, ac
compagne de M. Pichon, secrétaire général
de la présidence, et des officiers de sa mai
son militaire, est rentré à l'Elysée.
A midi, à l’occasion du concours agricole,
le président de la République et Mme
Raymond Poincaré, ont offert au palais d»
l’Elysée un déjeuner.
ON TROUVE '
LE PETIT HAVRE A Paris
à la LIBRAIRIE IMTERMATIOHALE 4
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(Immeuble do T HOTEL TLRéUNUS)
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AU HAVRE
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l'Oise et la Somme.
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Paris, trois heures matin
LA GUERRE D'ORIENT
La Roumanie accepte la Médiation
des Puissances
Bucarest. — Dans son édition du soir, l'or-
gane officieux la Poiittka publie le communi
qué suivant, au sujet du Conseil des minis
tres qui a eu lieu hier, concernant la média
tion des puissances dans le différend rou-
mano-bulgare, médiation proposée par Sir
Edward Grey :
« Les membres du gouvernement ont dé-
eidé à l’unanimité d'accepter la médiation
proposée.
» On a fait ressortir tout spécialement à
se sujet qu’il ne s'agit pas d’une sentence ar
bitrale, mais d’une médiation telle que la
définit la convention de la Haye.
» Le gouvernement a en particulièrement
en vue l'articie 6 de cette convention dans
la note par laquelle il fait connaître son ac
ceptation.
» Le gouvernement insistera pour la fixa
tion d’un délai rapproché ; il accepte égale
ment la médiation de toutes les puissances
pour le choix de l’endroit où aura lieu la
conférence.
» Cette décision du gouvernement prouve
le désir qu’a la Roumanie de joindre ses
efforts à ceux des grandes puissances en
vue d’aplanir le différend d’une façon paci
fique. »
Déclarations de IL di San Giuliano
Bome. — A la Chambre, à l'occasion de la
discussion du budget des affaires étrang-
res, M. di S in Giuliano, ministre des afai-
res étrangères a prononcé un discours très
applaudi.
Après avoir constaté que la tâche de la
diplomatie, facilitée par le haut souci des
peuples et des gouvernements, est de ne
sas déchaîner pour des causes insuffisantes
an terrible conflit, le ministre a déclaré que
ia formule « les Balkans aux peuples balka
niques » est la solution la plus conforme
aux intérês de l’Italie et aux intérêts de la
paix européenne.
il faut que cette solution soit, le plus tôt
possible, réalisée.
Ce résultat ne peut être atteint qu’en éta
blissant une assiette territoriale balkanique
correspondant le plus possible aux condi
tions ethnographiques et géographiques des
pays et aux désirs et aux intérêts des peu-
pies, ces désirs ct cos lmerets étant SUDOr-
donnés en certains cas au but suprême de la
Civilisation et de la paix.
Le ministre dit ensuite que la situation
méditerranéenne actuelle satisfait les inté
rêts italiens.
L’Italie ainsi que les autres grandes puis
sances désirent qu’elle soit maintenue.
L'integnné territoriale de la Turquie d’Asie
a été reconnue par toutes les puissances
comme une garantie efficace de la paix eu
ropéenne. La Turquie n’ayant plus à défen-
dre ses possessions européennes, pourra
sûrement consolider ses possessions asiati
ques.
La Démarche des Puissances à Sofia
Sofia. — La demande collective des gran
des puissances au sujet de la médiation en
tre la Bulgarie et la Roumanie doit avoir
lieu aujourd’hui.
LA SOIRÉE DE M. POINCARÉ
Le president de la République et Mme
Poincaré se sont rendus successivement hier
soir, aux bals de l’Association des anciens
élèves de l’Institut agronomique, delà Saint-
Cyrienne et de l’Hôtel de Ville.
“Partout le chef de l’État a été accueilli avec
enthousiasme.
L'AVIATEUR FAVRE
JUVISY. — L'aviateur Favce, qui avait quitté
Hourmelon hier matin, à huit heures dix,
a atterri à Juvisy quarante-huit minutes plus
ard.
L’aviateur a effectué ce parcours à la vi
tesse de 172 kilomètres à l'heure.
UNE FEUE CONDAMNÉE A MORT
La 2e Cour d’assises de la Seine vient de
condamner à mort la femme Laure Farre-
ren, 41 ans, originaire d’Espagne, qui, en
octobre dernier, à Levallois-Perret, tua d'un
coup de revolver une de ses compatriotes.
LA MOBILISATION EN AUTRICHE ET
EN RUSSIE
Berlin. — La dettes Tagrs Zeitung consta
te que ni la Russie ni l'Autriche n’ont encore
démobilise. V
La Taegliscke Rundchau déclare apprendre
que l’autorite mimhaire russe a fait a des fa
briques allemandes et russes d'importantes
commandes de fers à cheval en quantité suf
fisante pour ferrer 23 divisions de cavalerie.
Ces commandes devraient être livrées d’ici
à six semaines au plus tard et être condition
nées de telle sorte que les chevaux puissent
être ferres à glace.
Il convient de n’accueillir ces renseigne-
ments que sous toutes réserves.
EXPLOITS DE SUFFRAGETTES
ÂONDRES. — LeS suffragettes ont saboté
les fils télégraphiques pres de Newcasile ;
Biles ont également sabote plusieurs boîtes
aux lettres.
Les ministres sont sous la surveillance
ipéciale d’agents de la Sûreté, en raison de
la nouvelle que les suffragettes se proposent
» d’enlever » un ou plusieurs membres du
Cabinet! s.
LA NEIGE EN ESPAGNE
2ERBÉRE. — On signale d’abondantes chu
tes de ueige dans la Catalogne et T’Aragon.
Plusieurs trains sont restés en détresse.
On se montre inquiet sur le sort des voya
geurs.
Les trains de secours ne peuvent pas
avancer.
Un cyclone a causé d’importants dégâts à
Almeria.
Plusieurs maisons se sont écroulées.
Cinq Carabiniers ont disear.
UliU
Dans un article ‘très complètement docu-
menté, dû à la plume de M. Vallée, le Petit
Havre a étudié jeudi dernier la question
brûlante des armements allemands. Je vou
drais à mon tour reprendre, mais du point
de vue diplomatique, ce troublant pro
blème, me demander ce qui a pu conduire
nos voisins à leur récente démarche, et re
chercher si, en fin de compte, la situation
européenne est aussi gravement compro
mise pour la Triple Entente qu’on pourrait
le craindre à première vue. Je ne voudrais
pas sans doute tenir le langage de celui qui
rassure, quand il y a péril. J ai admiré le
calme viril et impressionnant de l’opinion,
sa façon martiale et fière de dire : « S’il le
faut ...... Mais il ne faut pas non plus
verser dans le pessimisme, et il fait bon
d’ajouter que l’équilibre européen ne tend
pas du tout à se détruire à notre détriment.
D’autre part, à la veille de prendre une
mesure aussi grave que le service de trois
ans, ne faudrait-il pas réfléchir un peu plus
longtemps ?
Je crois donc qu’il convient de dire que
la situation politique de l’Europe n’a rien
actuellement qui menace sérieusement la
position de la Triple Entente. Et pourquoi
cacher que la Triple Alliance a, de son
côté, de graves sujets d’inquiétude ?
La guerre des Balkans marque, dans l’é
volution de l’Europe contemporaine, un
point tournant de grande importance. Nul
doute que l’augmentation projetée de l’ar-
,mée allemande n’en soit une conséquence
Immédiate. Remarquez en effet que ce n’est
ni après Tanger (1903), ni après Casablanca
(1909), ni après Agadir (1911) que l’Allema
gne a pris la décision militaire subite qui
impressionne si vivement l’opinion mon
diale. Non, c’est deux mois après les vic
toires balkaniques, un mois après la mys
térieuse et inquiétante mobilisation autri
chienne. Ne faut-il pas se demander si l’Al-
lemagne ne s’est pas sentie indirectement
touchée par les événements d’Orient ? Son
acte en apparence provocateur n’est-il pas
peut-être motivé surtout var le souci de ré
tablir une situation jugée compromise de
ce côté là ?
Il y a un principe qui domine toute la
politique prussienne, comme le principe de
la suprématie des mers domine la politique
anglaise, c’est que l’Empire doit être en
mesure de faire face, des deux côtés en
même temps, à ses deux adversaires histo
riques, la France et la Russie. Cette préoc
cupation n’a cessé de hanter Bismarck :
c’est pour y répondre que, dès le lendemain
de Sadowa, il a prévu et préparé l’alliance
autrichienne ; c’est pour y répondre encore
qu’il a fait plus tard de son entente avec
l’Autriche la base fondamentale de son sys
tème. Il s’entendait en même temps avec
l’Italie pour neutraliser un ennemi dange
reux de l’Autriche, et il annexait même à
sa combinaison la Roumanie, pour avoir,
dans le cœur même des pays slaves, une
sentinelle avancée. Pour compléter cette
géniale organisation, il s’entendait enfin
avec le Turc. Que voulait-il par cet ensem
ble de mesures diplomatiques, sinon s'assu
rer contre la coalition inévitable des Fran
çais et des Russes ?
Or cet équilibre si savamment combiné
apparaît depuis quelques mois compromis.
Non que l’Allemagne soit en aucune façon
affaiblie. Elle n’a cessé de se tenir militai
rement prête. Aujourd’hui, comme aux
jours de fer et de sang de 1870, elle croit et
affirme qne sa suprématie, sa sécurité mê
me reposent sur la puissance de ses ar
mées. Donc, de côté là, rien de changé.
Mais, dans l’Europe sud-orientale, quel
les transformations en quelques mois !
Voici d’abord que la Turquie d’Europe
n’existe plus. A sa place que voyons-nous?
La race slave, jeune, brutale, ambitieuse
s’installe bruyamment dans la péninsule
balkanique, et cela dans la zone même que
l’influence allemande avait convoitée. Der
rière la Bulgarie et la Serbie, la Russie
tutélaire se prépare à étendre jusqu’à la
mer Egée le rayonnement de sa puissance ;
elle revit, après trente années, les grands
jours de San Stefano.
Tout cela n’est pas, si vous voulez, un
coup direct porté à l’Allemagne ; mais c’est
un coup direct et terrible porté à sa pre
mière alliée, à son « brillant second » com
me disait Guillaume II. Et c’est un coup
indirect porté, à travers l’Autriche, au ger
manisme tout entier. Il faut en effet élever
la question pour la bien comprendre : der
rière une lutte de gouvernements ambi
tieux et avides se cache mal une rivalité de
races et de civilisations : Slaves contre
Allemands, Croire que, dans l’espèce, l’Al
lemagne n’est pas immédiatement solidaire
de l’Autriche, c’est donc se méprendre.
Il y a quatre ans, le germanisme semblait
l’emporter sur toute la ligne : l’Autriche
annexait la Bosnie, pointait vers Salonique,
comprimait la Serbie, sans que celle-ci osât
bouger, sans'que la Russie, protectrice des
Slaves, essayât sérieusement de protes
tes. Subitement, par un retour de fortune
comme l'histoire en ménage aux plus puis-
sants, voici que tout d'un coup l'Autriche
voit non seulement s’évanouir ses plus bel-.
VPPECECES u avenir, mais encore Se sent
menacée dans son existence même,en temps
que nation. La Serbie, la Bulgarie,la Grèce
lui ferment la route de la mer Egée. C'est
terrible pour un empire qui, chassé d’Alle
magne il y a quarante ans, cherchait désor
mais des compensations en Orient !
Ce n’est pas tout. Il y a, pour l’Autriche,
quelque chose de plus dangereux encore.
La victoire des Slaves a remué, dans toute
la vallée du Danube, de profondes passions
ethniques. Au bruit des canons de Lule-
Bourgas et de Dimotika, tout ce qui est
slave dans l’empire des Habsbourg a tres
sailli. Et l’Europe, qui l’avait un peu ou
blié, s’est aperçue qu’en somme les Alle
mands ne sont en Autriche qu’une minorité.
L’unité autrichienne est apparue de ce fait
singulièrement peu solide. En effet, depuis
la guerre, des mouvements centrifuges se
manifestent de toutes parts dans cette puis
sance de belle apparence, mais qui n’est
pas une nation. L’opinion mondiale a alors
constaté avec stupeur que, d’un jour à l’au
tre, l'Autriche pouvait se disloquer.
Le gouvernement autrichien, le premier,
a senti ce vent de dissolution et de démem-
brement qui soufflait sur lui. Il s’est de
mandé si, en cas de guerre, ses sujets sla
ves marcheraient. Beaucoup de gens bien
informés pensent que la ruineuse mo
bilisation autrichienne ne cache en somme
qu’une gigantesque opération de police in
térieure pour contenir les velléités sépara
tistes des éléments hétérogènes de l’Em
pire.
Quelle est la conséquence de ces événe
ments si graves', sinon l’affaiblissement
évident de la Triple-Alliance sur son front
sud-orient il ? En cas de guerre européenne
(et désormais il n’y aura plus que des con
flits généralisés), pensez-vous que l’Autri
che sera en mesure de remplir efficacement
le rôle que lui destinait Bismarck, c’est-à-
dire de tenir tête à la Russie ? Elle tentera
de le faire, mais avec combien de difficul
tés ! D’abord, elle sera prise à revers par
les nouvelles puissances balkaniques, no
tamment par la Serbie, avide de devenir la
Grande Serbie. C’est jusque dans son sein
que les Slaves pourront jeter de terribles
ferments de trahison et de révolte. Est-il
sûr, d’autre part, que l’Italie, alliée sur le
papier, ne deviendra pas pour l'Autriche une
ennemie de la onzième heure ? Pense-t-on,
enfin, que la Roumanie, inscrite dans la
combinaison germanique, sera disponible ?
Elle pourrait avoir fort à faire avec la Bul
garie, ou même (la chose est vraisembla
ble) s’unir avec les Slaves contre les Ger
mains.
Il résulte de cette situation, dont je ne
crois pas exagérer le caractère, que la
guerre balkanique a compromis en Orient
la position de la Triple-Alliance, alors que
la Triple Entente a vu en somme la sienne
s’améliorer. Je me demande donc si, même
après ses nouvelles augmentations d’effec
tifs, l’Allemagne sera en mesure de se
montrer plus agressive que précédemment.
Sans doute — et je répète ici ce que
j’avais dit au début — il serait ridicule et
dangereux de nier le péril. Nous ne pou
vons admettre, sans rien faire de notre cô
té, une supériorité de 35 0/0 dans les effec
tifs allemands. Cependant, n’oublions pas
une chose : Il ne faut pas raisonner comme
si nous étions seuls. Seuls contre une Aile-
mage qui grandit sans cesse quand notre po
pulation est stagnante, notre position serait
inquiétante. Mais la vraie question se pose
entre la Triple Alliance et la Triple Enten
te. Etant donnée la façon dont se présente
actuellement l'équilibre de ces deux gou-
pements, nous avons le devoir d’être vigi
lants. Mais vraiment, nous avons aussi le
droit d’être confiants.
André Siegfried.
LA GUERRE D'ORIENT
Négociations Austro-Russes
Berlin, 22 février.
On confirme à Berlin la nouvelle que des
négociations directes entre l’Autriche-Hon
grie et la Russie se poursuivent par l’inter
médiaire de leurs ambassadeurs à Londres,
en présence sir Edward Grey.
Le but poursuivi par ces négociations est
le règlement de la question de la délimita
tion de la frontière d'Albanie.
Le Conflit Roumano-Bulgare
Bucarest. 22 février.
Le Conseil des ministres d’aujourd'hui
doit procéder à la rédaction de la note qui
sera adressée aux puissances au sujet de la
médiation.
---------- -- - -------------
ETRANGER
CHINE
Mort de l’impératrice douairière
L’imperatrice douairière Lung-Yu est mor
te à 2 h. 30 du matin, après une courte
maladie. Elle avait éprouve tout récemment
les premiers symptômes de la maladie qui
devait l’emporter. Dès qu’elle parut en dan
ger, le gouvernement appela téiegraphique-
ment « le gardien de l’empereur », qui ar
riva à Pékin vendredi matin.
Dans l’après-midi, l’état de l’impératrice
s’aggrava et il continua d’empirer jusqu’au
milieu de la nuit.
Le bruit a couru que l’impératrice s’était
suicidée parce que le gouvernement, afin de
pouvoir occuper la partie orientale de la
ville interdite, avait décidé de reléguer pro
chainement la famille impériale dans la
partie occidentale, mais il paraît que l’impé-
ratrice non seulement avait accepté ce chan
gement, mais l’a uit proposé efle-meme.Ceci
redoit à néant la thèse d après laquelle l’im-
peratrice se serait suicidés.
Photo Petit H'Vre
Cliché Petit Havre
— Enfin, appliquez-vous comme pour une revue d’astiquage !...
Trois fois par semaine, à l’heure où la
cage désertée par ses oisillons retrouve son
calme, où les choses replacées dans la sé
rénité du repos s’apprêtent à plonger dans
la nuit, où lescanes géographiques suspen
dues au mur doivent envoyer à la solennité
du tableau noir un peut bonsoir confrater
nel, les portes s’ouvrent, livrent passage au
flot des capotes et des bourgerons.
Les becs de gaz se rallument, les tables se
regarnissent, les cahiers sortent de l'armoi
re et promènent un instant au ras des pupi
tres un vol de grands papillons blancs : la
vie scolaire reprend sous un aspect nou
veau. Aux bambins succèdent des jeunes
hommes. Sur les mêmes bancs une généra
tion qui devance largement les petits les re
joint ainsi dans la communauté de l’igno-
rance.
C’est l’école des grands enfants.
L’obligation de‘instruction demeure une
des gloires de notre régime, et tous les ef
forts dépenses pour cette émancipation des
esprits furent autant de bonnes semences
qui préparèrent les amples moi-sons.
Toutes n’ont (joint germé, cependant, mal
gré la vigilance du semeur, malgré les ri
gueurs de la loi dont il s’arme pour tracer le
sillon dans le champ de ‘ignorance. Nous
comptons encore en France de trop nom
breux illettrés.
Le dernier recensement général de notre
population faisait ressortir que sur 1,000
Français de cinq à vingt ans, 866 savent lire
et écrire, 131 sant complètement illettrés.
Si l’on ne considéré que les individus au-
dessus de 15 ans, le nombre des illettrés est
de. 1,980 095 hommes et 2,981 332 femmes,
soit 4,961,627. Chiffre énorme, incroyable. La
France compte 5 millions de sujets, de l’ado
lescence jusqu’à la vieillesse, qui ne savent
ni lire ni écrire !
A quelles causes doit-on attribuer la pro
gression de l’ignorance ?
Je causais récemment de ces choses avec
un directeur de nos écoles primaires qui
fut pendant plusieurs années instituteur à
la campagne. Il n’hésita pas à accuser l’in
souciance des parents, l’absence fréquente
de l’écolier à l’école,
Certes, la loi de 1882 prescrivit l’obligation
scolaire, mais la loi est en maintes régions
lettre morte. La fréquentation de l’école dé
pend de mille choses, de la pluie, du soleil,
de la moisson, des récoltes.
En Normandie, pendant la récolte des
pommes, les parents retiennent l’enfant,
soit pour s’aider de lui, soit pour l’envoyer
travailler ailleurs.
Dans une région de la contrée normande,
sur 2,560 présences possibles, on constate
en juin 486 absences, vingt pour cent. Des
élèves de dix, neuf, huit et même sept ans
manquent l’ecole de 37 à 62 jours par an.
Consultez les excuses. Elles varient peu :
« Nous gardons Louis pour faner ». « J’avais
besoin de Jums pour relever du foin ». Ou
bien encore : « Emile est allé porter la soupe
à son père ».
Ces circonstances, jointes au peu de durée
de la scolarité, contribuent naturellement à
maintenir éievee la part de l’iguorance. Et
fon peut se rendre compte avec une singu
lière précision de cette situation fâcheuse,
en examinant les écorier s intermiten’s de
jadis à leur entrée dans la grande famille
regimentaire.
* *
Chaque année à l’arrivée des recrues, une
épreuve intéressante est effectuée. Elle a
lieu au Havre dans la salle Frank in, en pré
sence de M. l'inspecteur primaire.
Une dictée, un problème reclamant l’ap
plication des quatre règles, une question
élémentaire d’histoire et de géographie sont
soumises à l’esprit un peu effaré des jeunes
soldats. C’est à la suite de cet examen que
les categories sont formées et que se trouve
déterminée la partie du contingent à la
quelle, durant quatre mois, trois soirs par
semaine, la ville du Havre donnera l’instruc
tion gratuite.
Ils sont deux cents fantassins environ qui
viennent ainsi recevoir, après la soupe ou le
rata, la nourriture intellectuelle, soit à
l'école de la rue de Phaisbourg, soit à l’école
de la rue Gustave-Flaubert, suivant qu’ils
appartiennent aux compagnies casernées à
Kléver ou au fort de Tourneville.
Deux cours sont généralement organisés,
l’un reçoit les soldats qui, sans être pourvus
de hautes aptitudes sur l’art d’écrire, de lire
et de compter, sont cependant capables
d'assembler des. le tires, d’aligner des mots,
des chiffres, l’autre comprend les sujets
complètement ignorants. Les deux catégories
n’en représentent pas moins des illettres.
L'œuvre entreprise de la sorte depuis plu
sieurs années déjà est de celles qu’on ne
saurait trop encourager. La proportion des
soldats illettrés n’est encore que trop consi
dérable dans notre armée.
J’ai sous les yeux les tableaux que le mi
nistère de la guerre fait dresser chaque an
née, après enquête, sur ‘instruction des
jeunes gens de la classe. Ils fournissent des
constatations pénibles. Non seulement le
nombre des illettrés est énorme, mais. ce
qui est plus grave, on peut noter que dans
certaines régions le nombre de ceux-ci, au
lieu de décroître, grandit.
En 1966, sur 310,327 jeunes gens mainte
nus sur les listes du tirage au sort, on si
gnale 11.044 illettrés.
En 1907, pour un chiffre inférieur de
jeunes gens maintenus sur les listes, le
chiffre est de 11,062, soit une augmentation
dans la proportion des conscrits ne sachant
ni lire ni écrire.
Si maintenant on dresse le chiffre des jeu
nes gens normalement instruits,on constate,
là encore, un dechet.
En 1903. ces jeunes gens sont 284 393. Ils
soni 282 615 en 1904. 282 617 en 1905, 281,013
en 1906, 269.540 en 1907, soit une baisse de
plus de 14,000 en quatre ans dans cette caté-
gome de jeunes soidats.
Inversement, il y a une hausse de plus de
400 dans le nombre des conscrits reconnus
totalement illettrés, au sens propre du mot.
de 1905 à 1907.
Ligaorance atteint des proportions assez
pittoresques pour nous donner une saisis -
sante image. Dans son curieux livre sur
l'Education patriotique du Soldat, M. lelieute-
naut Roland a publie des details singulière-
ment éloquents sur l’indigence des connais
sances de certains de nos troupiers.
A sept conscrits fut demande ce qu’ils sa
vaient de Jeanne D irc.
— C’est une dame qui a fait du bien à la
France, dit l’un.
Les autres ont répondu : une dame qui a
régné en France ; qui est morte sur un ro
cher ; qui est montée sur l’échafaud : une
chevalière sous Henri V ; une dame qui a
fait des conquêtes, et enfin une dame qui a
été le gouvernail de la France !
Napoléon n’est pas plus famillier. Tour à
tour, les recrues le décrivent ainsi : un
homme qui vivait il ya vingt ans, qui vivait
en 4848, qui a été ‘empereur du monde.
L’interrogatoire se poursuit et, sur ques
tions, le conscrit affirme, sans eh être bien
sûr, que Sedan est une ville allemande,
Iena un grand général, Berlin la capitale de
l’A Isa ce-Lorraine, Metz une puissance, Cour
bet un amiral sous Louis XV, l’Algérie une
puissance où il y a des nègres, capitale
Constantinople; Madagascar une ville d’Amé-
ri que.
Le Tonkin est au Dahomey. Gambetta a
rait des decouvertes et était général de Na
poléon.
Quant à Victor Hugo, c’est tantôt un célè
bre violoniste, tantôt un ancien avocat qui a
inventé le « vaccinage ».
*
* *
Exception étant faite de sujets totalement
illettrés dont la situation intellectuelle dé
pend d’un état pathologique spécial, je dois
reconnaître que la majorité des troupiers
fréquentant l’école havraise n’atteint heu
reusement pas ce lamentable dénuement de
documentation générale.
H y a évidemment beaucoup de naïveté
dans certaines réponses de ces grands en
fants dont l’esprit en léthargie subit parfois
l’effet de l’atavisme, innocents heritiers de
parents alcooliques.
Mais ce qu’il faut dire aussi, et ce qu’il me
plaît de souligner, c’est, chez le plus grand
nombre, le désir évident de s’instruire, c’est
la s-nsation éprouvée de leur ignorance, la
volonté de réagir, de s’élever au niveau des
autres, de pouvoir dire un jour à la cham
brée : « Moi aussi je sais lire », de ne plus
avoir recours au camarade de lit pour dé-
chiffrer la lettre des vieux, envoyer un petit
bout d’écrit à la payse !
J’ai voulu les voir à la tâche, ces pauvres
Pitons restés en marge de la grammaire et de
‘arithmétique ; j ai tenu à assister à l’un des
cours qui leur sont faits par nos instituteurs.
J’ai surpris une classe studieuse, attentive,
penchée sur le cahier d’écriture ou les yeux
braques sur le tableau noir pour la correc
tion d’une dictée, l’explication d’un pro
blème.
Je les ai trouvés, nos petits troupiers,
même ceux que le régiment qualifie de
« fortes têtes », soumis au maître, caimes et
presque recueillis, avec des mines drôles,
bouleversées d‘i iquietude quand le casse-cou
d’un participe passé en instance de bon ac
cord faisait se cabrer leur plume indécise..
Le hasard m’avait amené là au lendemain
de l’élection présidentielle. Le maître, direc
teur de l'Ecole, leur avait fait une petite cau
serie sur le fonctionnement de nos institu
tions républicaines, la formation du Con
grès, la transmission des pouvoirs. Il avait
ajouté quelques mots sur les devoirs du
citoyen, sur l’idée de patrie.de dévouement,
de sacrifice à l’œuvre commune. Il avait dit
cela simplement, sans phrases, comme on
parle à des enfants.
Et les grands enfants le regardaient avec
respect, un air d’humilité candide où l’on
devinait comme une gratitude rustique qui
montait des cœurs charmés et des esprits
entr’ouverts aux idées. Ils semblaient dire :
« Comme nous avuns tardé à apprendre, à
comprendre ce qu’ils savent déjà, les tout
petits dont nous occupons ce soir les
bancs... »
Puis ce fut le tour de la dictée ; et sur le
papier des plumes grincèrent entre les gros
doigts.
Dans une salle voisine, d’autres pioupious
apprenaient à lire, s évertuaient à discipli
ner la famille des BA, des BS, des B1, des
BO, des BU, s’elevaient jusqu’à former des
mots. L’alphabet leur livrait enfin son se
cret. ..
— Passons au problème !... Voyons Picot,
écoutez-mot bien. Vous recevez un mandat
de cinq francs...
— Un mandat de chinque francs !
Il restait effare, le pauvre Picot. La vision
soudaine de ce mandat de cinq francs l’avait
mis dans un état de stupéfaction indefinis-
sable. Bouche bée, les yeux écarquillés, il
errait dans les blancheurs du plafond. Il se
ressaisit pourtant ;
— J’vais vous dire, j’en ai jamais eu.L'plus
g'A —9. . -, A s. L2. 1 “,7,
qu'on m’a envoyé, des fois, du pays, c’est
quarante sous...
— Soit ! Vous recevez un mandat de deux
francs. Là-dessus vous achetez...
Et bien vite rassuré, ramené dans le do
maine des choses possibles, docile et patient,
Pitou se bourra le crâne avec des chiffres.
ALBERT-HERRENSCHMIDT.
Nouvelles Politiques
Conseil de Cabinet
Les ministres et sous-secretaires d’Etat se
sont réunis hier matin au ministère de l’in
térieur, sous la présidence de M. Briand.
Le ministre des affaires étrangères a con
firmé que le gouverneur d'Andrinople,
Chukri pacha, a télégraphié à la Porte qu’il
s’est entendu avec les consuls pour assigner
le quartier de Karagatch aux colonies étran
gères comme zone neutre.
Le conseil a,commencé l’examen des ques
tions militaires.
Le président du conseil et le ministre des
finances demanderont très prochainement à
être entendus par la commission sénatoriale
de l’impôt sur le revenu.
Visite de M. Poincaré
à ses Prédécesseurs
Le président de la République a rennu vi-
site, hier après-midi, au président Loubet et
au président Fallières.
Le Président de la République
au Concours Agricole
Le président de la République, accompa
gné de Mme Poincaré, a visité hier matin, à
dix heures, le concours général agricole.
A son arrivée au palais, le president et
Mme Poincaré ont été reçus par le ministre
de l’agriculture qu’accompagnait Mme Fer
nand David.
Dans l’assistance, on remarquait MM. Mé-
line, Raynaud, anciens ministres de l’agri
culture ; Decker-David, sénateur ; le général
Michel, gouverneur militaire de Paris ; De-
anney, préfet de la Seine, et Mme Deanney;
Dabit, Cabaret, directeurs au ministère de
l’agriculture ; Carrier, directeur du cabinet
du ministre ; de Lagorsse, secrétaire general
de la Société d’encouragement à l’agricul
ture, etc.
Lorsque le président et Mme Poincaré des
cendent de voiture, la foule qui s’est amas
sée aux abords du palais leur fait une en
thousiaste ovation.
M. Poincaré offre alors son bras à Mme
Fernand D ivid, le ministre de l'agriculture
donne le sien à Mme Poincaré.
Le cortège officiel pénètre aussitôt dans
l’enceinte du paiais, qu’une foule considé
rable a envahi depuis l’ouverture. Le prési
dent de la République est chaleureusement
acclamé. C’est avec peine que le président
suivi et entouré par les innombrables visb
leurs, dont aucun service d’ordre ne main
tient la sympathie et la curiosité, parvient de
vant les boxes où sont installés les animaux
gras primés. M Poincaré felicite aimablement
les éleveurs qui lui sontpresentés par M. Fer-
nanti David, puis non sans difficulté le cor
tège pénètre dans la salle où se trouve la
merveilleuse exposition collective des syn-
dicatsagricoles du Midi.
Des gerbes d’œillets et de roses sont offer-
les à Mme Poincaré ainsi qu’à Mme Fernand
David, qui toutes deux après cette visite,
respectueusement saluées par l’assistance,
quittent l’enceinte du concours, accompa
gnées de M. Mollard, chef du protocole, et
du capitaine de vaisseau Grandclement.
Continuant sa visite le cortège offi iel ga-
gne les galeries du premier étage et se rend
à la section des vins, où sur l'invitation de ,
plusieurs exposants le président dégusté
quelques vins des grands crus. Il s’arrête as
sez longuement dans cette partie du con
cours à l'exposition de vins du departement
de la Meuse dont la plupart des exposants
lui sont connus et qui veulent tous être
admis à l’honneur de serrer la main à leur
illustre compatriote devenu le chef de l’État.
Le cortège, après un coup d'œil aux ani
maux de basse-cour, redescend dans la nef
du palais, et le president se rend au jardin
scolaire installe par M. Vergier, professeur
d'agriculture, qui est une des innovations
du concours de cette année.
Respectueusement salué par de nombreux
cris de z « Vive Poincaré ! Vive la Républi
que ! », le président quitte vers 11 heures la
Grand-Palais aes Champs-Elysees pour aller,
de là, à l’esplanade des invalides où, accueilli
par les mêmes acclamations enthousiastes
de la foule, il a parcouru les diverses sec
tions réservées aux machines et instruments
agricoles.
Il était 11 h. 1/2 lorsque le président, ac
compagne de M. Pichon, secrétaire général
de la présidence, et des officiers de sa mai
son militaire, est rentré à l'Elysée.
A midi, à l’occasion du concours agricole,
le président de la République et Mme
Raymond Poincaré, ont offert au palais d»
l’Elysée un déjeuner.
ON TROUVE '
LE PETIT HAVRE A Paris
à la LIBRAIRIE IMTERMATIOHALE 4
108, rue St-Lazare, 109
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